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Nicolas Hulot parraine le Défi pour la Terre (2005) et le Pacte écologique (2006)

5.5. Créer un continuum école – société civile

5.5.2 Parrainer l’école : quels enjeux partagés ?

5.5.2.4. Nicolas Hulot parraine le Défi pour la Terre (2005) et le Pacte écologique (2006)

Résumé : Autour de l’éducation au développement durable, le partenariat et le parrainage de la

fondation Nicolas Hulot ne prennent pas la même forme que dans le cas du parrainage de Arthus-Bertrand. Les moyens mis en œuvre se déploient dans le domaine de la presse écrite, de la télévision (TF1, en lien avec la profession de son président), de l’Internet. Il apparaît surtout dans des opérations en partenariat avec le ministère de l’Écologie et du Développement durable. La fondation Hulot semble maintenir la distance avec le ministère de l’Éducation nationale même si elle intervient dans des opérations interministérielles comme le

Défi pour la Terre. Avec le Pacte écologique (2006), l’action se concentre directement sur

l’engagement citoyen et politique dans le cadre de la présidentielle 2007. A la marge, les questions de l’éducation et de sensibilisation sont soulevées par la fondation.

Lancé dans le cadre du Plan Climat (2004) par le ministère de l’Écologie et du Développement durable, l’opération Défi pour la Terre (2005) en partenariat avec l’ADEME,

permet une forme d’engagement citoyen virtuel à réduire son impact sur l’environnement à travers des gestes simples et concrets du quotidien. Le ministère de l’Éducation nationale y verra un intérêt pédagogique, comme un outil de sensibilisation des élèves. L’opération sera régulièrement indiquée aux enseignants dans le cadre de la circulaire d’annonce de la Semaine

du développement durable. Comme dans le cas des expositions d’Arthus-Bertrand, durant ce

temps fort visant à développer des comportements éco-responsables, on propose des initiatives pédagogiques autour du Défi pour la Terre. En 2007, le ministère de l’écologie organisera un concours pour les élèves de l’école primaire en les invitant à créer une chanson afin de susciter une forme d’engagement de l’institution scolaire (MEN-BOEN, 2007).

Dès le mois de novembre 2006, avec le lancement de la campagne présidentielle 2007, Nicolas Hulot publie un livre et un site Internet, le Pacte écologique destiné à focaliser l’attention et l’engagement des candidats. Il publie 5 propositions et 10 objectifs pour l’environnement, dont certains sont directement liés à l’éducation (proposition n°5 : Mettre en place une grande politique d’éducation et de sensibilisation, Pacte écologique de la fondation Nicolas Hulot, 2006). Cette proposition rappelle que l’engagement citoyen passe par l’éducation scolaire traditionnelle, mais également l’information, la communication, la formation et la sensibilisation. C’est encore une fois, comme exprimé par Vanier et les responsables ministérielles de l’éducation au développement durable, une clef pour obtenir

l’adhésion de la société au développement durable et susciter des changements de comportements qu’il impose. Cette stratégie suppose des effets directs de la communication

éducative et médiatique sur les comportements d’adhésion et de mobilisation sociale.

Le Pacte écologique propose que les médias comme la télévision, la radio, Internet et la presse écrite, en raison de leur effet sur l’opinion publique, soient utilisés par l’État pour lancer des campagnes nationales de communication et de sensibilisation. On retrouve la stratégie du ministère de l’Écologie et du Développement durable avec le Plan Climat (2004). Durant le Grenelle de l’environnement (juillet 2007), cette proposition de la Fondation Nicolas Hulot sera remaniée en précisant qu’il s’agit d’éco-alphabétiser l’opinion devant l’urgence planétaire. Pour des changements de comportements rapides et à très grande échelle, le préalable pour la fondation est hormis la contrainte […] un niveau profond de

conscience et de motivation.

La stratégie proposée pour le monde de l’éducation est celle de l’imprégnation, au

même titre que la grammaire ou l’orthographe […] : sans cette imprégnation en profondeur dès les bancs de l’école, aucune modification des consciences et des comportements, aucune mobilisation pour des changements structurels ne sera possible (Proposition n°5 du Pacte

écologique, 2006).

Dans la version 2007 pour le Grenelle de l’environnement, la proposition pour l’école est plus élaborée dans la mesure où elle se réfère directement à la politique éducative. On recommande l’acquisition de socle commun de connaissances en écologie et développement

durable62. Ces éléments de connaissances doivent faire partie de la culture des Français au même titre que la maîtrise du français ou le sens civique afin que les changements de

comportements soient pleinement assumés par les individus. Il ne s’agit donc plus directement

de changer les comportements mais, par l’acquisition de connaissances intégrées de manière interdisciplinaire, de responsabiliser les individus. Le texte 2007 va même jusqu’à illustrer la vision de cette éducation à l’écologie et au développement durable par un exemple concret d’enseignement disciplinaire : l’enseignement de l’histoire et de la géographie dans

les collèges et lycées intégrerait l’importance du rôle de la biodiversité dans l’édification ou l’effondrement des civilisations.

Ainsi la stratégie de la Fondation Nicolas Hulot pour l’éducation au développement durable, même si elle s’affine, ne remet guère en cause le rôle de l’école comme instrument médiatique au service du développement durable.

62 Il faut noter que les textes de la Fondation Nicolas Hulot maintiennent le terme écologie à proximité de celui de développement durable.

BI L A N D E L A P R E M I E R E PA R T I E

LE S F O R M E S D’U N E E D U C AT I O N

I N T E RV E N T I O N N I S T E

Résumé : Progressivement, depuis les années 1970, les questions d’éducation à

l’environnement sont devenues à l’image de la politique environnementale des questions d’éducation au développement durable. L’éducation est considérée comme la clef de

l’efficacité de la politique (Brégeon et al., 2008), une clef pour obtenir l’adhésion de la société au développement durable et susciter des changements de comportements qu’il impose

(Hulot, 2006). Les responsables de la politique éducative constatant une faible mobilisation des enseignants dans les projets d’éducation au développement durable, des partenaires et des parrains sont sollicités pour une plus grande efficacité politique. Des messages scientifiques d’aspect consensuel et alarmiste sont diffusés pour justifier la nécessité d’une action sociale et individuelle. Les injonctions d’éducation à visée mobilisatrice (éducation interventionniste) proposent d’intégrer l’école à un continuum d’action avec la société civile. C’est le changement d’échelle qui est visé, considérant l’école comme une des forces d’entraînement social. L’enjeu politique n’est donc pas directement un enjeu de formation à la citoyenneté et d’éducation scientifique citoyenne. Dans ce contexte, on peut s’interroger sur la fonction démocratique de l’appareil éducatif inscrit dans un projet politique. C’est la question fondamentale qui accompagne cette recherche.