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Naissance et développement des FMN

1.2. Les firmes multinationales : forme courante de mondialisation

1.2.1. Naissance et développement des FMN

Il n’existe pas de définition unique de la FMN. Les multiples termes utilisés à ce type d’entreprises (Multinationales, internationales, transnationales…), compliquent le sens et laissent place à de nombreuses confusions.

13Huwart J-Y ; Verdier L. (2012), "La Mondialisation économique: Origines et Conséquences", OCDE. P 88-90

21 La difficulté se situe dans la diversité du vocabulaire utilisé, mais c’est autour de l’expression firme (ou entreprise) multinationale (ou transnationale) que le vocabulaire semble s’être fixé.

Selon Kindleberger (1971), les firmes qui sont soumises et respectent les législations des pays d’accueil sont des firmes multinationales, tandis que les firmes internationales sont indépendantes des politiques nationales. D'autres auteurs suggèrent de retenir l'appellation

"multi ou internationales pour les firmes développant une stratégie de présence à l'étranger […] et globales pour celles dont la stratégie consisterait à organiser leurs moyens et leurs ressources pour en obtenir la plus grande efficacité et renforcer leur compétitivité"14.

Mucchielli (1998) considère comme multinationale "toute entreprise possédant au moins une unité de production à l’étranger, cette unité de production sera alors sa filiale. La logique de la production domine. Une entreprise peut avoir des représentations commerciales à l’étranger, mais elle ne sera vraiment multinationale que si elle produit tout ou partie de ses produits à l’extérieur de son territoire national". Elle est, selon Bertin (1975) "l’entreprise ou, mieux, le groupe d’entreprises dont les activités, s’étendant à de nombreux pays, sont conçues, organisées et conduites à l’échelle mondiale".

Le qualificatif ‘transnational’ est de plus en plus utilisé pour souligner que les firmes traversent les frontières des pays sans avoir plusieurs nationalités, alors que le terme

‘multinationales’ signifie que ces firmes ont plusieurs nationalités, ce qui n’est le cas que rarement15. La mondialisation a influencé l’évolution récente d’organisation et des stratégies des FMN, mais les premières entreprises dont l’activité s’est mondialisée sont très anciennes.

Leur véritable essor remonte au début du XIXe siècle, démarrant avec une stratégie d’approvisionnement à travers l’exploitation de richesses des colonies (ressources naturelles et matières premières), leurs investissements étaient réalisés pour approvisionner la société mère afin de contribuer au développement de ses activités de production.

La multinationalisation s’est accélérée et la firme ‘multidomestique’ apparaît à partir des années 1960 en adoptant la stratégie de marché par l’implantation de filiales relais dans les marchés étrangers. Vers le début des années 1970, les entreprises se sont intégrées dans une stratégie de rationalisation des coûts par la délocalisation de la production, en transformant les filiales relais, en filiales ateliers (Andreff 1997). La décennie 1980-1990 est marquée par la fluctuation des marchés et leur complexité suite à l’intensification de la concurrence.

Plusieurs FMN étaient amenées à adopter une stratégie globale caractérisée par une orientation vers d’autres formes d’implantations, telles que la sous-traitance, les alliances et partenariats stratégiques, l’engagement dans l’activité de R&D ainsi que la recherche de gains sur les marchés financiers internationaux16.

14Meral P. & Petit O. (2002), "Mondialisation et technologies propres : l’importance des partenariats publics-privés dans le secteur automobile" in "Développement durable : enjeux, regards et perspectives", Cahier du GEMDEV N°28, Paris Avril. PP 137-162.

15 Joubert M., Lorrain L. (2015), "Economie de la mondialisation", Armand Colin, DUNOD, Paris. P 54.

16Graiche L. (2012), "Les formes d’implantation des firmes multinationales en Algérie : objectifs et stratégies", Mémoire Magistère, Université Mouloud MAMMERI Tizi-Ouzou, juin. P 11.

22 En 1997, l’ONU a recensé 44 508 entreprises multinationales possédant 276 660 filiales à travers le monde, alors que dans les années 1970, elles étaient à 7 000 maisons mères (Mucchielli, 1998). En 2006, leur nombre a atteint 78 000 entreprises multinationales avec 780 000 filiales étrangères, dont environ 58 000 ont pour pays d’origine, un pays développé et 20 000 proviennent de PED17.

Le nombre de sociétés mères est d'environ 60 000 en 2016, avec environ 500 000 succursales réparties dans le monde entier. De nombreuses sociétés transnationales connaissent aujourd'hui une croissance importante, avec un chiffre d'affaires annuel qui dépasse le produit national brut d’un grand nombre de pays. Le tableau ci-après montre le classement des plus grandes multinationales selon le critère de la valeur de leurs actifs possédés à l’étranger.

Tableau 01 : Classement 2005 et 2018 des FMN selon leurs actifs à l’étranger (Mds $) Source : Etabli par nous-mêmes à partir de données de la CNUCED 2007 et 2019

En comparant le classement entre 2005 et 2018, nous notons que certaines firmes ont pu maintenir leur position parmi les meilleures compagnies. Par ailleurs, avec une valeur totale d’environ 2.300 milliards de dollars d'actifs étrangers en 2018 de l’ensemble des dix premières firmes, les secteurs pétrolier et automobile demeurent prédominants sur la scène internationale.

17CNUCED (2006), "World investment report", Genève.

23 1.2.2. Structures organisationnelles et degré d’Internationalisation des FMN

Le statut de ‘multinationale’ est une question de degré. Perlmutter (1969) fut l’un des premiers à distinguer plusieurs degrés de multinationalisation. Il a développé un modèle qui distingue les différents stades de développement poursuivis par l’entreprise dans son processus d’expansion internationale en distinguant quatre stades ; Ethnocentrisme, Polycentrisme, Régiocentrisme et Géocentrisme (EPRG).

- Durant l’orientation ethnocentrique, la firme, ne fait que prolonger certaines activités nationales : elle reste centrée sur le marché domestique et les ventes à l’étranger constituent un moyen pour se débarrasser des excédents de production : elle reste une entreprise nationale. Les PME poursuivent souvent cette orientation ;

- Dans le second stade, appelé polycentrique, l’entreprise s’implante dans de nombreux pays par la mise en place de filiales qui opèrent de manière autonome et s’adaptent aux spécificités du marché étranger. Ce mode du management est adopté fréquemment par les entreprises de taille moyenne qui opèrent sur un nombre limité de marchés étrangers et deviennent ainsi des entreprises internationales ;

- Au troisième degré, régiocentrique, l’entreprise développe une stratégie régionale intégrée.

Elle s’oriente vers une ou plusieurs zones géographiques considérées comme un seul marché (entreprises multinationales) ;

- La firme dans le stade géocentrique devient globale, en considérant le marché mondial comme un seul marché et le processus de prise de décisions stratégiques est intégré dans un système global de prise de décision18.

L’entreprise se globalise à travers sa présence dans plusieurs pays et sous différentes formes : filiales spécialisées de production, de commercialisation et de R&D, réseaux de sous-traitance et d’alliances, entraînant une croissance rapide des flux internationaux d'échanges et d’opérations transfrontalières, regroupées en quatre catégories :

- Le commerce international ;

- Les investissements directs à l’étranger ;

- Les coopérations internationales entre firmes et ; - Le transfert international de technologie.

La stratégie de globalisation d’entreprise impose la mise en place d’organisations capables de répondre aux enjeux de l’internationalisation des entreprises. En effet, la transformation fondamentale des firmes réside dans leur changement de structures au niveau de l’organisation interne.

18Mayrhofer U. (2004), "Marketing international", Ed.Economica, Paris. P 15-17

24 Selon Meier & Schier (2005), la gestion d’une grande entreprise nécessite une structure adaptée aux fluctuations des marchés, qui passe progressivement d'une forme unitaire centralisée (U) à une forme décentralisée (M), comportant une direction générale et un certain nombre de divisions spécialisées, chacune dans un produit ou sur une zone géographique19.

- La forme Unitaire possède un système fonctionnel centralisé géré par une structure de coordination qui dépend directement de la direction générale de l’entreprise. "Les décisions sont liées aux différents stades […] de la chaine de valeur de l’entreprise (production, vente, finance, recherche) et à ses différents marchés de produits intermédiaires et finis"

(Mucchielli, 1998). La filiale étant avoir une faible autonomie de décision, elle joue souvent le rôle de relais entre la maison-mère et les marchés étrangers.

Cette organisation est adaptée aux exigences de fabrication statique et fortement standardisée.

Elle peut être soumise à un contrôle budgétaire direct et rigoureux avec des opérations d’audit fréquentes, ou coordonnée, à travers le rassemblement des activités étrangères sous la responsabilité d’une division internationale d’assistance et de coordination, située au même niveau que les directions fonctionnelles.

Figure 01 : Organisation de forme en U- subordonnée -

Source : Gervais M. (2003), "Stratégie de l’entreprise", Ed.Economica, Paris.P 218

19 Meier O. &Schier G. (2005), "Entreprises multinationales : Stratégie, restructuration, gouvernance", ed .DUNOD, Paris. P 60

25 Figure 02 : Organisation de forme en U –coordonnée–

Source : Gervais M. (2003), op cit. P 218

Cependant et face à l'expansion des activités de la firme et à l'augmentation du nombre de ses filiales étrangères, cette forme d'organisation se révèle rapidement limitée, suite aux diverses pressions entre la direction générale et la division internationale, chargée de gérer le réseau de filiales étrangères, qui représente souvent plus de la moitié du chiffre d'affaires consolidé du groupe. Cela risque d’entraîner une perte de contrôle des filiales et il devient nécessaire pour l'entreprise d'adopter la structure multi-divisionnelle (M) afin de combler ces insuffisances.

- La forme Multi-divisionnelle possède un système fonctionnel décentralisé : les décisions à court terme sont prises par les directions opérationnelles, appliquant quotidiennement et de façon décentralisée les directives émanant de la direction générale qui, de son côté, se concentre sur les tâches de stratégie de long terme et de contrôle des ressources (Meier &

Schier, 2005).

Figure 03 : Organisation de forme Multi-divisionnelle

Source : Gervais M. (2003), op cit. P 220

Cette organisation constitue la structure la plus adaptée dans la mesure où les firmes diversifient leurs activités, dans un contexte d'avancée rapide des innovations technologiques et à la croissance de la demande des consommateurs.

26 1.2.3. Stratégies de délocalisation des FMN

Lors de sa réflexion d’une implantation ou d’un transfert d’activités dans d’autres pays et avant de déterminer la forme d’implantation, l’entreprise peut opter, en termes d’adaptation locale et selon les avantages comparatifs du pays d’accueil, les opportunités du marché local et la structure de la concurrence, pour une stratégie soit verticale ou horizontale.

- La stratégie verticale : appelée aussi stratégie par les coûts, qui consiste à la mise en place d’une filiale atelier, dans une stratégie de nature productive, spécialisée dans la fabrication d’un bien ou d’une composante du produit final pour lequel la demande locale ne joue pas de rôle important, de sorte que la quasi-totalité de la production de ce type de filiale est destinée à être réexportée vers d’autres filiales de la FMN ou vers d’autres marchés20.

Dans ce cas, l’objectif principal de la firme est de tirer avantage de l’inégalité des coûts (optimisation et réduction des coûts relatifs à la production). Elle cherche à exploiter les avantages comparatifs de chaque économie nationale. Ce choix de stratégies ne prend pas en considération la taille du marché d’implantation, il s’explique par "le besoin de baisser les coûts des facteurs de production afin d’améliorer la compétitivité des firmes par la baisse des prix sur les marchés et augmenter ainsi les ventes"21 ;

-La stratégie horizontale : ou stratégie de marché, implique l’implantation de la ‘filiale-relais’ qui vient soutenir un flux antérieur d’exportation. Elle facilite l’entrée vers les pays difficiles d’accès et ce, afin de répondre à la demande locale à travers les réseaux de distribution. Dans ce choix, la firme cherche à élargir les débouchés de distribution de ses produits, biens et services et augmenter le volume de ses ventes, dans une optique de conquête des marchés, d’économie d’échelles et de substitution aux exportations, surtout si le marché d’origine est saturé. Cette stratégie est actuellement la plus répandue, mais elle dépend de la volonté des firmes à exploiter les avantages spécifiques, monopolistiques et/ou ceux relatifs aux avances technologiques dont elles disposent sur un marché étranger.