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En résumé, le modèle écologique soutient l’idée que le développement humain et l’adaptation psychosociale se réalisent progressivement à travers les interactions continues entre l’individu et son environnement, et ce tout au long de sa vie (Bronfennbrenner, 1979, 1999, 2005). Durant les trois dernières décennies, le modèle écologique a apporté des contributions complémentaires pour comprendre l’importance du contexte dans l’adaptation psychologique et la socialisation de l’individu, attestant que chaque « sous- système » de ce modèle agit sur les enfants, les parents et la famille, et, plus globalement, sur la qualité de vie en société (Lerner et al., 2002). Le modèle développemental (Bronfenbrenner, 1979) illustre explicitement le partage d’influences, la réciprocité et la complémentarité entre l’école et la famille. Ce modèle offre une perspective dynamique, interactionniste et multicausale du développement des comportements, des attitudes, des compétences et des rôles de l’individu. Il présente un portrait réaliste, adapté aux situations réelles, d’un processus développemental qui se réalise à travers les multiples facettes de l’environnement ainsi que par le biais des principaux agents de socialisation, dont le milieu familial et le milieu scolaire.

Le modèle développemental de Bronfenbrenner représente aussi un cadre théorique cohérent avec la théorie de l’autodétermination (Deci & Ryan, 1985), laquelle souligne explicitement l’importance du contexte (différents sous-systèmes) pour comprendre la motivation à l’égard de tâches et activités diverses (Deci & Ryan, 2000; Guay, Mageau & Vallerand, 2003; Vallerand, 1997). La théorie de l’autodétermination (Deci & Ryan, 2000; Vallerand, 1997) reconnaît en effet l’importance des processus proximaux et du contexte social de l’adolescent dans le développement de la motivation autodéterminée et la satisfaction de ses besoins de compétence et d’autonomie (Guay et Vallerand, 1997). Le modèle de Bronfenbrenner permet donc d’illustrer explicitement, par exemple, l’importance de l’influence positive et du soutien des parents, des enseignants et de l’école dans le développement progressif de l’autonomie et de la motivation de l’adolescent à l’école et dans divers autres domaines (Guay & Vallerand, 1997).

Aussi, le modèle théorique de cette thèse (Figure 2) s’inspire de la perspective écologique et systémique du développement humain (Bronfenbrenner, 1979, 2005) afin d’illustrer la complexité des liens et la pluralité des variables contextuelles qui agissent sur le bien-être et la réussite éducative de l’adolescent.

Dans ce modèle, la famille constitue l’environnement immédiat de l’adolescent (microsystème) alors que le travail de ses parents fait partie de son exosystème. Pour les parents toutefois, leur travail constitue un microsystème qui leur est propre, alors que le monde du travail en général ou l’idéologie du travail véhiculée par la société constitue une dimension du macrosystème des parents et de l’adolescent (Bronfenbrenner, 1999). Enfin, l’interaction existante entre le travail et la famille, représente une composante du mésosystème des parents (Bronfenbrenner, 1999).

Figure 2. Modèle théorique

Le modèle théorique proposé dans cette thèse met en relief une chaîne d’associations qui influencent le bien-être psychologique et la réussite éducative des jeunes adolescents canadiens. Ce modèle présente les liens qui semblent les plus généralement supportés empiriquement par les écrits scientifiques. Compte tenu de la revue de littérature, cette thèse suppose d’entrée de jeu des liens indirects entre les conditions inhérentes au travail des parents et le bien-être psychologique ou la réussite éducative des adolescents. Ce postulat s’appuie, d’une part, sur les divergences observées quant aux conclusions des recherches mettant en évidence les relations entre le travail des parents et le bien-être ou la réussite éducative des jeunes et, d’autre part, sur le nombre important de ces études qui font plutôt ressortir l’absence de liens directs entre ces variables, du moins à l’adolescence.

Comme illustré, dans ce cheminement indirect entre le travail des parents et le bien-être ou la réussite éducative de l’adolescent; les construits liés à la dynamique familiale jouent un rôle médiateur. En d’autres mots, le modèle postule que l’incidence du travail des parents se manifeste à travers des variables

familiales, dont le milieu de vie, l’exercice du rôle parental et, conséquemment, la qualité des relations parent/enfants.

Conformément à la croyance partagée par plusieurs chercheurs quant à l’impact négatif de longues heures de travail sur la famille (Dunifon et al., 2005; Kalil & Bajracharya, 2005; Lapierre-Adamcyk et al., 2001; Pronovost, 2007; Turcotte, 2007), l’idée générale illustrée par ce modèle est que certaines conditions de travail et d’emploi des parents (susceptibles par exemple de nuire au bien-être physique et psychologique de ceux-ci) seraient associées à un milieu de vie familiale moins fonctionnel, à des pratiques parentales moins adéquates et à des relations plus conflictuelles entre les parents et leurs adolescents; ces relations conflictuelles étant elles-mêmes associées négativement au bien-être psychologique et à la réussite de l’adolescent.

En résumé, cette étude tente de capturer les multiples relations entre le travail, les conditions parentales et familiales, le bien-être psychologique du jeune et sa réussite éducative. D’un point de vue méthodologique spécifiquement, cette recherche interroge l’adéquation réelle du modèle proposé, pour expliquer le cheminement de ces multiples relations. Les données de l’enquête sociale sur lesquelles s’appuie cette recherche offrent une occasion unique d’étudier l'influence des parents dans un contexte élargi. Sur ce point, cette étude exploratoire présente de grandes similarités au niveau de l’ancrage théorique (voire méthodologique) avec l’étude de Steinberg et ses collaborateurs (1995).

Chapitre 8. Aspects méthodologiques

Comme mentionné, l’objectif de recherche consiste essentiellement à capturer les multiples relations entre le travail, les conditions parentales et familiales, le bien-être psychologique de l’adolescent et sa réussite éducative. Cet objectif a une large portée multidisciplinaire et pour cette raison, cette recherche demeure exploratoire. Le choix d’utiliser la base de données de l’Enquête longitudinale nationale sur les enfants et les jeunes (ELNEJ) dans le cadre de cette thèse découle principalement du fait que l’ELNEJ est une enquête statistique reconnue qui offre l’avantage majeur de fournir une quantité et une diversité de données, difficilement accessibles par ailleurs. L’accès à cette diversité de variables permet de mieux saisir la dynamique des facteurs impliqués dans un modèle à caractère multidisciplinaire.

Le but premier de l’ELNEJ était d’établir une base de données nationale sur les caractéristiques et les expériences de vie des enfants et des jeunes au Canada, depuis l’enfance jusqu’à l’âge adulte (Statistique Canada, Special Surveys Division, 2008). Plus spécifiquement, les buts de l’ELNEJ étaient les suivants :

1. Déterminer la fréquence de divers facteurs de risque et de protection chez les enfants et les jeunes;

2. Comprendre comment ces facteurs, tout comme les événements de la vie, influent sur le

développement de l’enfance;

3. Mettre cette information au service de l’élaboration de politiques et de programmes destinés à aider les enfants et les jeunes;

4. Recueillir des renseignements sur une grande diversité de sujets d’ordre biologique, social et économique;

5. Recueillir des renseignements sur le milieu où grandit l’enfant, qu’il s’agisse de la famille, des pairs, de l’école ou de la collectivité.

Cette enquête longitudinale nationale, débutée en 1994, a été réalisée en partenariat par Ressources humaines et Développement Canada (RHDC) et Statistique Canada. Les résultats de l’ELNEJ sont, depuis, utilisés par une variété de personnes provenant des universités, du gouvernement et d’organismes responsables de l’élaboration de politiques.

Population ciblée