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CHAPITRE V : FISCALITE COMMUNALE ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE *

RAPPORTS RELATIFS A LA FISCALITE IMMOBILIERE

2.4 A NALYSE CRITIQUE DES PROPOSITIONS .1 La revalorisation des revenus cadastraux

2.4.4 Mesures appliquée au calcul du précompte immobilier

L'équipe de l'Université de Liège a réalisé une série de propositions concernant la possibilité, pour la région, d'appliquer des taux de base variables suivant différents critères [1:99-100].

Actuellement, une telle différenciation existe déjà de manière embryonnaire puisque, en Wallonie, les habitations sociales bénéficient d'un taux réduit de 0,8% (au lieu de 1,25%) et que la région bruxelloise a porté le taux de base à 2,25% pour tous les immeubles ou parties d'immeubles non affectés au logement. Par ailleurs, la réduction de PI pour les immeubles dont le RC est inférieur à 30 000 Fb, peut être apparentée à ces mesures.

Constatant la compétence de la Région Wallonne en matière de fixation des taux de base, l'équipe de recherche de l'Université de Liège propose de faire varier celui-ci en fonction de différents critères. Plutôt qu'une discussion approfondie de chacun d'eux, nous aimerions souligner l'idée de départ et l'adapter à des fins d'aménagement du territoire.

Ainsi, il pourrait servir les intérêts du SDER d'établir un tel dispositif en discriminant le type de logement (appartement, maison mitoyenne, maison unifamiliale, …) ou le type d'espace (ZIP, …).

Ici encore, les effets sociaux seraient bénéfiques en termes d'équité verticale mais le coût serait supporté par les communes les moins aisées financièrement. L'attrait des logements préservant mieux l'environnement et la gestion parcimonieuse des ressources (appartements, maisons mitoyennes) s'en verraient augmenté. L'impact sur le secteur de la construction reste à apprécier. Il est vraisemblable que l'on assiste à un transfert des activités vers la rénovation.

CHAPITRE V:FISCALITE COMMUNALE ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE 58 2.4.5 Mesures liées à l'imposition des revenus

Outre la fiscalité immobilière, la cellule "Politique des Grandes Villes" s'est également intéressée aux aspects locaux de l'impôt des personnes physiques et ce, sous la forme de deux propositions concrètes.

La première proposition, soit une "taxe additionnelle à l'impôt sur les revenus dans les communes au lieu de travail", fait référence au fait que la taxe additionnelle ne tient pas compte des charges subies hors du lieu de résidence et ne fait référence qu'à l'impôt des personnes physiques. Ainsi, les entités ne perçoivent aucune taxe ni sur les revenus qu'engendrent les activités économiques localisées sur leur territoire, ni sur les salaires perçus par les travailleurs se rendant chaque jour sur le territoire de la commune. Cette situation est particulièrement préjudiciable pour les centres urbains.

L'équipe de travail propose par conséquent d'attribuer une taxe additionnelle à l'impôt sur les revenus à la commune du lieu de travail. Cette taxe serait identique en toute entité du territoire de sorte que le contribuable (où la société qui l'emploie) n'a pas d'intérêt à déplacer son lieu de travail ou à communiquer une information erronée12.

Quel pourrait être l'impact d'une telle mesure sur l'aménagement du territoire ?

Si on se place dans une perspective neutre d'un point de vue global pour le contribuable, les entités pourvoyeuses d'emploi se verraient doter de moyens supplémentaires qui leur permettraient de baisser les impôts et/ou d'investir dans la rénovation de l'espace public. Les entités où l'habitat prédomine verraient leur recettes diminuer, ce qui les obligeraient à quelque peu revoir leur niveau taxatoire à la hausse. Par conséquent, les communes où la fonction "travail" est importante gagneraient en attractivité par rapport à celles où la fonction

"logement" prédomine, ce qui s'inscrit dans la philosophie du SDER.

D'un point de vue social, la réforme œuvrerait certainement dans le sens de l'équité verticale puisque la pression fiscale diminuerait dans les communes centrales, généralement pourvoyeuses d'emplois mais où les revenus moyens sont peu élevés.

Si la réforme s'inscrit dans un principe de stabilisation des recettes fiscales locales liées à l'IPP, celle-ci ne constituerait pas une charge pour les communes mais contribuerait à répartir les recettes en liaison plus directe avec les dépenses réelles des communes et favoriserait l'équité dans ce domaine.

Il ne semble pas qu'une telle taxe soit de nature à perturber le marché immobilier et le secteur de la construction.

Reste que sa mise en place pose certains problèmes d'ordre institutionnels. Tout d'abord, il est fréquent dans notre pays que lieu de résidence et lieu de travail soient situés dans des régions différentes. Ensuite, des niveaux taxatoires différents d'une région à l'autre pourrait entraîner une délocalisation des activités. Aussi il semble que "l'attribution d'une taxe communale additionnelle à l'impôt sur les revenus au profit de la commune du principal lieu de travail doit … être réglé au niveau fédéral" [3:28] en concertation avec les communes, provinces et régions.

12 Remarquons que la taxe additionnelle à la taxe sur les automobiles est déjà un impôt à taux fixe entièrement versé aux communes. Ailleurs en Europe, on trouve des impôts similaires, notamment en Autriche (impôt local sur les sociétés, 11,7% de l'ensemble des recettes locales hors emprunt) ou au Portugal (impôt foncier en zone rurale dont le taux est fixé par l'Etat).

CHAPITRE V:FISCALITE COMMUNALE ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE 59 La seconde proposition, intitulée "modulation de la taxe communale additionnelle à l'impôt des personnes physiques", vise à appliquer, au sein d'une commune, des additionnels différents suivant certains critères. Les auteurs parlent de "zones défavorisées"

ou de "catégories de population". Dans un cadre d'aménagement, cette idée pourrait être étendue en fonction de critères spatiaux (distance au centre ville, localisation par rapport au schéma de structure, …). Il convient de définir des critères objectifs afin d'éviter de transgresser le principe d'égalité du citoyen devant l'impôt.

D'un point de vue aménagement du territoire, ces mesures peuvent permettre à certains espaces d'un territoire communal de se redynamiser et à certains autres d'être plus défavorables au développement. Cette différenciation du niveau de taxes peut se justifier par le caractère plus onéreux des dépenses communales pour certains citoyens pourtant aisés (les ménages habitant des logements isolés).

D'un point de vue social, comme les centres densément bâtis abritent souvent les ménages les moins aisés de la commune, l'équité verticale s'en trouverait renforcée au contraire de l'équité horizontale. Il conviendrait toutefois d'être attentif à l'évolution de la situation des populations actuellement établies dans les quartiers que l'on souhaite favoriser demain.

Vu du point de vue des finances communales, l'opération peut paraître à charge des communes. Toutefois l'impact devrait être limité et pourrait l'être plus encore si une diminution des additionnels dans certains espaces de la commune étaient compensé par des augmentation ailleurs. Le problème est de susciter l'intérêt des mandataires communaux à s'engager dans une telle voie. L'aménagement du territoire reste souvent tourné vers l'accueil de nouveaux résidents et l'augmentation des taxes dans les espaces recherchés par les ménages les plus intéressants fiscalement risque d'être perçu négativement par les gestionnaires communaux. Sans autre incitants, la possibilité de mettre en place un tel système risque de rester lettre morte dans bon nombre d'entités.

A l'instar d'autres mesures étudiées précédemment, cette réforme devrait favoriser la rénovation au détriment de la construction neuve. Le marché immobilier des zones centrales pourrait subir une pression à la hausse.

2.4.6 "Petites taxes"

Curieusement, car elles permettent de cibler certains objectifs politiques précis, il est très peu fait mention des petites taxes dans les trois ouvrages analysés.

En fait, seule l'étude menée par l'Université de Liège propose deux taxes au bénéfice de la région mais qui pourraient très bien rentrer dans les caisses des communes.

Elle fait tout d'abord référence à une "taxe sur la fortune immobilière". Le fédéral ne taxant directement l'immeuble que comme source de revenu (au travers du PI et de l'IPP) et non comme capital détenu, il existe une liberté en la matière pour d'autres niveaux de pouvoir.

Toutefois, l'équipe de recherche signale que cette taxe "se heurterait en pratique à de nombreuses réticences tant cette imposition apparaît contraire aux principes fiscaux existant en Belgique". Se pose également le problème de la base imposable : comment la déterminer

? L'équipe de recherche propose d'appliquer un coefficient multiplicatif au RC13 ou de lier la valeur à différents critères (superficie, localisation, …), …

Une telle taxe n'a de véritable intérêt en soutien du SDER que si elle est discriminée spatialement. La remarque formulée dans le § précédent à propos de la modulation de la taxe additionnelle reste donc d'actualité dans le cas présent.

13 Ce qui implique qu'il existe un lien direct entre valeur locative et capital détenu. On sait que dans les grandes villes, dans certaines zones sujettes à la spéculation, ce n'est pas le cas puisque la valeur locative y est relativement faible en liaison avec la valeur du bien.

CHAPITRE V:FISCALITE COMMUNALE ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE 60 La seconde taxe existe déjà dans un très grand nombre de communes. Il s'agit d'une taxe sur les immeubles non bâtis. Nous avons déjà critiqué cette taxe tant dans la théorie que dans sa pratique : elle ne sert pas véritablement une configuration des espaces urbains qui s'inscrit dans les principes du SDER mais lutte plutôt contre la rétention foncière et elle s'applique surtout aux terrains lotis qui, en principe, ne font pas l'objet de spéculation mais d'une réelle volonté de vendre (voir chapitre I, § 4).