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DE LA REVISION DES PLANS DE SECTEUR *

3. CONSTRUCTION D’UN INDICATEUR SUR L’OFFRE FONCIÈRE POTENTIELLE

Préalablement aux analyses quantitatives devant conduire à inférer un maximum d'informations sur le rôle de la disponibilité de l'offre juridique dans la formation des niveaux de prix, il est nécessaire de construire une variable susceptible de rendre compte de cette disponibilité. En effet, à ce jour, il n'existe pas de source robuste sur les potentiels fonciers.

Afin d'estimer l'offre potentiellement urbanisable, nous avons construit un indicateur en confrontant la configuration communale des zones d'habitat aux données cadastrales sur l'urbanisation. Pour aboutir à ce « ratio d'offre foncière », différentes démarches ont du être entreprises, démarches qui ont notamment consisté dans une analyse des sources disponibles, dans un contrôle qualitatif des données cadastrales ainsi que dans la prise en compte de l'urbanisation sise en dehors des zones d'habitat. En plus de la construction d'une variable devant rendre compte des disponibilités en terres « vierges » au sein des zones d'habitat, cette analyse a également mis en évidence que la réalisation des plans de secteur n'a pas été opérée de façon uniforme sur le territoire belge.

3.1 A

NALYSE DES SOURCES

3.1.1 Le choix de la statistique cadastrale de l’occupation du sol

Afin de construire un indicateur de l’offre foncière potentielle, nous avons choisi de confronter les disponibilités des plans de secteur – les superficies affectées aux zones d’habitat – aux statistiques cadastrales de l’occupation du sol. La statistique de l’occupation du sol, qui est le fruit d’une collaboration entre l’Administration du Cadastre et l’INS, est disponible sur une base annuelle depuis l’année 1980 (sous format informatique depuis l’année 1983). L’échelle de publication la plus fine correspond à la commune. Elle est produite à partir des matrices cadastrales et les parcelles sont classées en deux grands groupes : bâties et non bâties. Ces deux groupes sont ensuite ventilés en 25 catégories reprises, avec les superficies concernées, dans le tableau VI.1. Pour ces différents types de parcelles, on peut connaître, entre autres, le revenu cadastral, le nombre de parcelles et la superficie.

Afin de construire un indicateur sur l’offre foncière potentielle, l’utilisation des données cadastrales est nécessaire car, à l’échelle nationale, il n’existe pas de source globale sur les potentiels fonciers. Certaines initiatives ont été prises par les Régions flamande (P. SAEY ET AL., 1999) et wallonne (travaux du thème 1.1), mais à ce jour, les données ne sont encore que fragmentaires. Face à ces lacunes, le Cadastre est apparu comme la seule alternative.

En termes de données publiées, il s’agit de l’unique source sur l’occupation du sol par l’urbanisation. Au-delà des seules informations publiées, une alternative aurait pu consister dans l’utilisation de données issues de la photo-interprétation et de la télédétection.

Malheureusement, dans ce domaine également, il n’existe pas de source globale susceptible de couvrir le territoire d’études. Différentes bases de données existent1, mais aucune n’est disponible pour l’entièreté de la Belgique. Face à ces lacunes, l’alternative de la production de données originales par le traitement de photographies aériennes ou d’images satellites a été jugée utopique. La potentialité existe (M. BINARD ET I. NADASDI, 1998 ; P.SAEY ET AL., 1999), mais l’ampleur du travail nécessaire pour traiter l’ensemble du Royaume est démesurée par rapport aux moyens disponibles.

1 Par exemple : les cartes topographiques de l’IGN, le PICC (Projet Informatique de Cartographie Continue) du MET, les PPNC (Plans photographiques numériques communaux) de la DGPL.

TOME 4.1.4.LA POLITIQUE FONCIERE 16 Tableau VI.1 – Superficie des classes cadastrales pour l’ensemble de la Belgique en 1999

Code Interprétation Superficie (hectare) Part

1AE Terres agricoles 969 620 31,76

1BC Pâtures, prés 687 703 22,53

1DI Jardins, parcs 35 723 1,17

1F Vergers 47 816 1,57

1G Bois 607 618 19,90

1H Terres vaines, vagues 95 480 3,13

1J Terrains récréatifs 8 298 0,27

1K Eaux cadastrées 12 134 0,40

1L Chemins cadastrés 11 373 0,37

1MNOP Autres 57 960 1,90

1TOT Total non bâti 2 533 725 83,00

2A1A2 Appartements 4 379 0,14

2B Buildings 2 159 0,07

2C Maisons, fermes 227 804 7,46

2DEF Annexes diverses 15 253 0,50

2G Ateliers industriels 30 759 1,01

2H Bâtiments de stockage 10 504 0,34

2I Immeubles de bureaux 1 591 0,05

2JK Bâtiments commerciaux 12 430 0,41

2L Bâtiments publics 5 757 0,19

2M Utilité publique 2 552 0,08

2N Aide sociale, santé 3 908 0,13

2O Enseignement, culture 7 820 0,26

2P Cultes 1 498 0,05

2Q Loisirs, sports 12 467 0,41

2RST Autres 1 830 0,06

2TOT Total bâti 340 710 11,16

3TOT Parcelles non normalisées 163 0,01

4TOT Superficie cadastrée 2 874 598 94,16

5TOT Superficie non cadastrée 178 194 5,84

6TOT Superficie totale 3 052 792 100,00

Source : INS

TOME 4.1.4.LA POLITIQUE FONCIERE 17 Alors que les traitements réalisés sur photo aérienne ou sur image satellite permettent de produire des données sur les caractéristiques morphologiques, les statistiques cadastrales portent sur l’affectation fonctionnelle des parcelles. Par rapport à l’objectif de nos travaux, cette caractéristique de la donnée cadastrale est un avantage majeur. En raison des caractéristiques de la périurbanisation morphologique, les terrains consommés par les activités urbaines sont, en effet, bien plus importants que les seules implantations de bâtiments. En terme d’habitat, par exemple, les superficies consommées par les jardins ou par les espaces latéraux entre les résidences « 4 façades » sont considérables.

Bien qu’il s’agisse de la seule option réaliste, l’utilisation des données cadastrales présente toutefois de substantiels inconvénients. De nombreux problèmes ont notamment été soulevés par O. DUBOIS (2001, p. 120 et suivantes), problèmes auxquels il faut être attentifs.

En raison de l’objectif poursuivi, l’utilisation des données cadastrales demeure toutefois possible. Certes, le réservoir foncier absolu n’est pas quantifiable de cette manière. Par contre, s’il s’agit d’apprécier les disparités intercommunales, la source est opérationnelle.

3.1.2 Analyse critique de la statistique cadastrale

Dans son analyse critique de la donnée cadastrale, O. DUBOIS (2001, p. 120 et suivantes) a identifié différents désagréments à l’utilisation scientifique de statistiques dont la finalité première est fiscale. Le fond du problème réside dans la variabilité de l’utilisation qui est faite de la terminologie cadastrale. Il apparaît notamment que les 25 classes d’occupations ne permettent pas de rendre compte de la variabilité des situations rencontrées sur le terrain.

En outre, l’importance et la fréquence des rectifications attestent de la multiplicité des erreurs.

Dans son analyse, O. Dubois relève notamment qu’il n’est pas rare de rencontrer des communes où le nombre de parcelles d’habitat diminue. D’une manière plus précise, ce sont les parcelles de la classe cadastrale 2C « maisons et fermes » qui sont concernées. Par commune, la diminution du nombre de parcelles se rencontre essentiellement pour les années 1983 et 1984. Toutefois, en 1998, ce sont encore 13 communes qui sont caractérisées par une décroissance. Par rapport à la réalité du terrain, une telle évolution paraît peu probable. Par contre, cette évolution s’inscrit dans l’hypothèse selon laquelle, dans ce domaine, l’Administration du Cadastre procède à une régularisation progressive (O.

DUBOIS, 2001, p. 126). Même si l’essentiel des rectifications a sans doute eu lieu, il est probable qu’un certain nombre de parcelles demeurent faussement affectées à l’habitat, cela d’ailleurs, de manière étonnante, au désavantage financier des propriétaires.

A l’échelle communale, un autre symptôme de la faible qualité des données correspond à la variabilité de la taille moyenne des nouvelles parcelles affectées à l’habitat2. Cette variabilité tient aux valeurs aberrantes de quelques communes. Chaque année, nous retrouvons, en effet, différentes communes caractérisées par des valeurs moyennes de plusieurs dizaines de milliers de mètres carrés. De nouveau, nous sommes ici en présence de mutations qui ne correspondent pas à un acte concret posé sur le terrain, mais bien à des rectifications administratives, sans doute liée à l’annexion de parcelles contiguës. Ce constat s’inscrit dans les conclusions d’O. DUBOIS (2001, p. 123) lorsqu’il constate que les données cadastrales tendent à surestimer l’espace urbanisé. Il s’agit là d’un élément essentiel auquel il faut apporter la plus grande attention. Il est, en effet, susceptible d’affecter les ratios calculés en vue d’apprécier l’offre potentielle. Plus précisément, il est susceptible de conduire à une sous-estimation de l’offre restant disponible.

2 Entre deux années considérées, la taille moyenne des parcelles est simplement égale au rapport entre la différence en superficie et la différence en nombre de parcelles.

TOME 4.1.4.LA POLITIQUE FONCIERE 18

3.2 P

REMIERE CONFRONTATION DE LA DONNEE CADASTRALE A LA CONFIGURATION DES ZONES D

HABITAT

3.2.1 Le ratio de disponibilité foncière : première présentation méthodologique

Ce sont les disponibilités en termes de zone d’habitat qui ont été confrontées aux données cadastrales sur la consommation d’espace par l’urbanisation. Une première étape méthodologique a dès lors consisté dans la quantification de la superficie des zones d'habitat inscrites aux plans de secteur. La source ayant permis cette analyse correspond à la version digitale vectorielle des plans de secteur. Pour la Région flamande comme pour la Région wallonne, la digitalisation des plans de secteur a, en effet, été réalisée pour le compte des deux administrations de l'Aménagement du territoire.

A partir de la source initiale, l'utilisation de fonctions SIG a permis de calculer la superficie de l'ensemble des zones d'habitat par entité communale (zones d'habitat au sens strict, zones d'extension et zones d'aménagement différé). A notre connaissance, il n'existe pas d'études exhaustives portant sur l’urbanisation des zones d'extension d'habitat et des ZAD. Pour autant, il est notable que le principe de l'urbanisation différée n'a en fait pas été respecté.

Comme l'a par exemple révélé une étude spécifiques aux plans de secteur du Brabant wallon, certaines communes ont entamé leurs zones d'extension d'habitat alors que leurs zones d'habitat au sens strict n'étaient pas complètement occupées (ANONYME, 1994, p. 42).

En conséquence, nous avons choisi de traiter l’ensemble des zones d’habitat, y compris les zones d’extension flamande et les ZAD wallonnes.

Afin d'apprécier l’offre foncière potentielle, nous avons relativisé la superficie des zones d'habitat en fonction de la superficie morphologiquement urbanisée. Ce sont ici que les données cadastrales interviennent par la construction d’un ratio : le ratio de disponibilité foncière. Pour ce ratio, la superficie des zones d’habitat a été placée au dénominateur et l’urbanisation selon le cadastre au numérateur. Dans cette première étape, nous n’avons considéré que les occupations cadastrales directement liées à l'habitat : les immeubles à appartements (2A1A2), les « buildings » (2B), les maisons/fermes (2C) et les annexes diverses (2DEF).

3.2.2 Première analyse cartographique

La figure VI.1 porte sur la cartographie du ratio entre la superficie consommée par l’habitat en 1999 et la superficie des zones d’habitat. Pour cette figure, au plus les ratios sont importants, au plus les terrains juridiquement urbanisables sont déjà occupés et, dès lors, non disponibles pour une nouvelle urbanisation morphologique. A la lecture de cette figure, nous relevons l’importance des disparités régionales, ainsi que la visibilité des frontières provinciales. Epinglons notamment, dans l’Est du pays, les extrêmes disparités entre, d’une part, le Limbourg et le Brabant flamand et, d’autre part, la Province de Liège et l’est du Brabant wallon. En Wallonie, il existe également d’importantes disparités inter-provinciales.

Alors que les zones d’habitat du Luxembourg apparaissent sur-dimentionnées, le Hainaut semble, par contre, caractérisé par des disponibilités nettement moindres. Ces disparités régionales attestent que la réalisation des plans de secteur n’a pas été opérée de façon uniforme sur le territoire belge. Ces disparités s’expliquent sans doute par les caractéristiques des rapports de force locaux lors de l’élaboration des plans. Approfondir cette réflexion nécessiterait de s’intéresser au pouvoir d’influence des acteurs du marché foncier, aux politiques communales, aux perspectives démographiques prises en compte ainsi qu’à l’action des fonctionnaires de l’aménagement du territoire.