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Le secteur du tourisme joue un rôle fondamental dans les tentatives de régénération et de rénovation de la ville de Marseille. Il s’agit d’un domaine qui a le potentiel de générer des apports économiques mais qui a aussi celui de contribuer à un remodèlement des représentations associées à la ville. Marseille n’a jamais joui de la même réputation touristique – et, donc, des mêmes revenus touristiques – que les villes de la Côte d’Azur, ou que d’autres parties de la Provence. La plupart des développements liés à la rénovation urbaine à Marseille visent, au moins en partie, à redresser cette situation et à attirer des touristes. Depuis le début des années 2000 ces développements sont synonymes de succès puisque le secteur touristique a connu une augmentation importante d’activité. Le caractère fondamental du tourisme dans ce projet de régénération peut être résumé ainsi :

L’enjeu social n’est pas au final de laver un affront ou une réputation, mais d’inciter à la mobilité, en cherchant à attirer de façon sélective des « aventuriers » […] il faut faire venir des touristes de passage, pour un jour ou plusieurs, le temps de remplir une valise de souvenirs. Ce qui est arrivé. (Peraldi et al., 2015, p. 110)

Malgré le fait que Marseille n’a pas bénéficié de la même réputation touristique que certaines de ses voisines, le secteur touristique a connu une véritable explosion ces dernières années. Les autorités marseillaises, en conjonction avec l’Office de Tourisme et des Congrès, publient chaque année un rapport sur l’activité touristique à Marseille, l’« Observatoire local du tourisme ». Les chiffres tirés de la dernière édition de cette publication (2015) montrent la croissance spectaculaire du secteur touristique à Marseille.

Figure 1. Evolution de l'emploi touristique à Marseille de 2009 à 20132

Ce graphique montre l’augmentation du nombre d’emplois liés à l’industrie touristique depuis 2009. Ces chiffres, couplés aux chiffres ci-dessous concernant l’évolution d’établissements touristiques dans la ville, attestent de l’intensification importante d’activité touristique à Marseille dans les sept dernières années.

Figure 2. Evolution du nombre d'établissements touristiques à Marseille de 2009 à 20133

Ces observations sur l’augmentation de l’activité touristique à Marseille sont confirmées par les chiffres concernant le trafic de passagers arrivant à Marseille, en augmentation importante. 2 La source pour l’ensemble des graphiques présentés dans cette partie est la publication de l’Observatoire Local du Tourisme à Marseille (OLTM) (Ville de Marseille, 2015). 3 La source pour l’ensemble des graphiques présentés dans cette partie est la publication de l’Observatoire Local du Tourisme à Marseille (OLTM) (Ville de Marseille, 2015).

Figure 3. Passagers accueillis à l'aéroport de Marseille Provence de 2004 à 2014

Depuis 2004, l’aéroport de Marseille Provence a vu le nombre de passagers s’accroître considérablement. MP2, terminal inauguré en 2006 et dédié aux vols « low-cost », a franchi en 2014 la barrière de 2 millions de passagers d’origines géographiques diverses. Les services « low-cost » démocratisent le transport aérien dans le sens où ils permettent à des individus qui n’en auraient pas eu les moyens et/ou la possibilité de voyager en avion. Ainsi, l’aéroport MP2 contribue à la fois à une augmentation générale de passagers accueillis à Marseille mais aussi, et surtout, à une diversification de ceux-ci.

En ce qui concerne les transports ferroviaires, il existe également une hausse du trafic pendant ces dernières années. Le graphique suivant montre comment le trafic de la gare principale, la gare Saint-Charles a augmenté depuis 2006. Il y a clairement un pic en 2013, ce qui correspond à l’accueil de passagers pour les événements de MP2013. Malgré une baisse assez importante dans le trafic en 2014, nous observons tout de même une augmentation générale depuis 2006. De la même façon qu’à l’aéroport, cet accroissement correspond à une diversification des connexions ferroviaires, ouvrant ainsi de nouvelles destinations ou provenances.

Figure 4. Evolution du trafic voyageurs de la gare Saint-Charles de 2006-20144

Bien que les augmentations et diversifications concernant les passagers ferroviaires et aériens soient très importantes, les changements récents les plus frappants concernent le trafic maritime. Le graphique ci-dessous récapitule le trafic dans les ports de Marseille entre 2004 et 2014. Figure 5. Evolution du trafic maritime arrivant à Marseille de 2004 à 20145 4 La source pour l’ensemble des graphiques présentés dans cette partie est la publication de l’Observatoire Local du Tourisme à Marseille (OLTM) (Ville de Marseille, 2015).

Tout d’abord, nous notons un déclin général lié au trafic passager maritime traditionnel, c'est-à-dire les traversées depuis/vers la Corse et d’autres destinations. Cependant, le nombre de croisières desservant les ports de Marseille connaît une augmentation impressionnante. Le graphique suivant montre l’évolution du nombre de croisiéristes arrivant à Marseille depuis 1996.

Figure 6. Evolution du nombre de croisiéristes arrivant à Marseille entre 1996 et 20146

Parmi les chiffres concernant l’évolution des arrivées à Marseille, l’augmentation du nombre de croisiéristes est donc la plus frappante, et constitue un cas spécial puisqu’il s’agit d’un secteur qui était pour ainsi dire inexistant il y a 20 ans.

Cette explosion récente du trafic maritime garantit une prolongation de la place du port au cœur de l’économie de Marseille. Les espaces portuaires ont toujours occupé une place primordiale dans l’histoire économique de la ville, que ce soit comme lieu principal des industries ou comme centre de commerce. Peraldi et al. (2015, p. 28) résument cette évolution comme une « étroite dépendance de l’industrie au port, du capital industriel au capital commercial ». A ces capitaux industriel et commercial, les croisières ajoutent un capital symbolique, ou un capital touristique. Dans le passé, le port accueillait les travailleurs, les matériaux et les biens cruciaux pour l’économie marseillaise, aujourd’hui ceux-ci sont complétés par l’accueil des touristes. 5 La source pour l’ensemble des graphiques présentés dans cette partie est la publication de l’Observatoire Local du Tourisme à Marseille (OLTM) (Ville de Marseille, 2015). 6 La source pour l’ensemble des graphiques présentés dans cette partie est la publication de l’Observatoire Local du Tourisme à Marseille (OLTM) (Ville de Marseille, 2015).

Pour résumer, les chiffres présentés ici montrent que Marseille a connu une augmentation importante concernant les arrivées par les centres principaux de transport, c'est-à-dire l’aéroport, la gare ferroviaire et les ports maritimes. Bien que ces chiffres ne prennent pas uniquement en compte les transits de touristes, nous pouvons les mettre en relation avec les chiffres produits par l'OLTM, et conclure à un développement notable du secteur du tourisme dans la ville.

L’importance croissante du tourisme dans la ville est reflétée par les représentations médiatiques de Marseille puisque celle-ci commence à se retrouver parmi les destinations touristiques recommandées dans les médias en France et ailleurs (Hochberg, 2016). Ainsi, la présentation de la ville comme une destination est maintenant assurée non seulement par les stratégies de communication de la ville elle-même mais aussi, de manière plus large, par les médias et les touristes. Peraldi et al. (2015) suggèrent que cette représentation de Marseille comme une destination touristique commence à être partagée par les habitants de la ville, ce qui indiquerait un changement radical – bien que graduel – dans la perception et l’image de la cité phocéenne.

5 Conclusion

Marseille a toujours été une ville caractérisée par l’immigration. Les flux migratoires ont imprégné leurs traces dans le tissu social, démographique, culturel et linguistique de la ville, ce qui a façonné l’image de celle-ci comme un melting-pot multiculturel et multilingue. Le revers de la médaille a été qu'une représentation négative liée au taux de criminalité, de pauvreté et de violence et aux crises économiques, démographiques et sociales s'est constituée, finissant par caractériser Marseille Depuis vingt ans, les autorités de la ville essaient de redresser cette image – et ainsi attirer des gens, des entreprises et de l’investissement – à travers des projets de développement importants. Ceux-ci ciblent certains secteurs clés, dans une tentative de donner à Marseille les attributs d’une métropole globale.

Le développement du tourisme constitue un des pivots essentiels de la rénovation urbaine. Les chiffres présentés dans ce chapitre ont montré que les investissements commencent à fructifier puisque nous observons une augmentation d’arrivées touristiques. Cette explosion a des répercussions positives pour Marseille non seulement au niveau économique mais aussi concernant les représentations qui lui sont associées.

En conclusion, il y a augmentation et diversification du tourisme à Marseille : les profils et les provenances des touristes s’élargissent, ouvrant la ville à des visiteurs d’horizons de plus en plus variés. Le développement du tourisme constitue un changement important qui reflète – et, comme nous le verrons, produit – certaines transformations plus largement liées à la globalisation.

CHAPITRE 2. PERSPECTIVES SUR LA

GLOBALISATION

1 Introduction

La globalisation apparaît comme un processus de transformation sociale, culturelle, économique et politique. L’exploration du rôle des langues et du langage – en tant qu’éléments fondamentaux à la société – peut apporter un éclairage essentiel quant aux dynamiques de la globalisation.

Cependant, avant de nous pencher sur les liens entre le langagier et le social au sein du milieu touristique ou de la globalisation, il nous faut tout d’abord nous poser quelques questions fondamentales : quelle est la nature de ce que nous appelons « globalisation » ? Quels en sont les causes et les effets ? Pourquoi considérons-nous qu’il s’agit d’une transformation sociale ? Comment ce processus touche-t-il nos vies ?

Nous aborderons en premier lieu la complexité de la définition du terme « globalisation » avant de démontrer en quoi elle peut être formulée comme l’expansion mondiale du néolibéralisme. Dans un deuxième temps, nous verrons de quelle manière la propagation d’idéaux néolibéraux à travers le monde mène à une libéralisation et dérégulation des marchés financiers, entraînant une mobilité internationale de capitaux et une interconnexion importante des marchés nationaux. Ensuite, nous montrerons comment les mêmes principes ont été appliqués à d’autres éléments tels que les êtres humains, les biens ou les services et comment ceux-ci deviennent des marchandises mobiles. Nous nous attacherons à exposer comment ces processus contribuent à une conceptualisation du monde comme un seul marché et un seul espace social. Enfin, nous expliquerons qu’il s’agit aussi de l’expansion d’une idéologie faisant émerger un paradoxe : promouvoir richesse et libération pour tous se traduit en réalité par des inégalités de plus en plus profondes et des contraintes de plus en plus fortes.