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La manufacture, le signe de la primauté bourgeoise

Avec le développement des villes, le commerce et l’artisanat se multiplient. Jusqu’à ce stade de l’histoire, les échanges marchands d’ampleur avaient été jusqu’alors freinés par l’insécurité des routes, la lenteur des transports et les guerres trop nombreuses. Avec la généralisation et la prédominance croissante des royautés, les guerres se raréfient. Les contours géographiques des pays se dessinent précisément. Les axes routiers s’améliorent en se sécurisant et le commerce maritime s’intensifie.

Les structures autarciques constituées par les tribus, les communautés de paysans, les villages, les villes s’effacent, englobées au sein du territoire national. Le développement du commerce et la découverte de nouveaux territoires offrent de nouvelles perspectives de débouchés. La forme de la production se modifie, prolongeant cette « ouverture » nationale, puis mondiale… Le tournant de cette période est marqué, selon Lafargue, par la décomposition de l’acte productif. D’un procédé de fabrication artisanale, au cours de laquelle chaque étape était assurée par un individu unique, la production marchande s’oriente vers une réalisation parcellaire des tâches, ou une personne n’effectue qu’une seule étape de cet acte.

Nous allons poursuivre cet exposé des conceptions de Lafargue, en étudiant dans un premier paragraphe, le développement de cette forme de production nouvelle, influençant directement les modes d’appropriation des biens. Dans notre deuxième paragraphe, nous examinerons comment Lafargue analyse les spécificités des nouveaux modes de production.

Paragraphe 1- De 1600 à 1789.

Lafargue, pour la première fois de sa démonstration, propose au lecteur des dates significatives. Jusqu’alors, le leader idéologique du POF se contentait de se référer à des événements invoqués comme identifiables mais dont la précision historique ne semblait pas se justifier. Vraisemblablement, Lafargue cherchait ainsi à souligner l’intemporalité de son propos. Les événements qu’il va retenir et décrire ne s’insèrent pas dans un processus historique limité à l’étude d’un cas particulier. Il estime au contraire que ses constats ont une vocation à la généralité, ses conclusions devant s’appliquer universellement à tout développement des êtres humains en société. En l’occurrence, il s’agit de la France. Nous allons voir d’abord dans quels phénomènes économiques la Révolution française trouva sa source (A). Ensuite, nous verrons comment cet événement transforma l’agriculture (B) et permit l’instauration du capitalisme (C).

A- Le renouveau industriel à l’origine de la Révolution française.

Avec la découverte et le pillage des richesses de l‘Amérique (et des autres colonies), l’Europe se voit inondée d’or. Les nouveaux débouchés induits par le commerce maritime permettent un enrichissement certain des commerçants. La propriété foncière se trouve dépréciée au profit des moyens de production.

« Des hommes nouveaux, n’appartenant d’ordinaire à aucune corporation, mais enrichis par le commerce et cherchant à utiliser leurs capitaux, se jettent dans la production, où ils pressentent une source de gros bénéfices, mais à la condition d’enfreindre tous les règlements

corporatifs sur la manière de produire, sur la quantité à produire et sur le nombre des ouvriers à employer.528 »

Lafargue constate que les corporations veillent pourtant au grain, en s’opposant à toute installation de manufactures dans les villes. Elles interdisent toute forme d’innovation dans la production, afin de préserver l’égalité entre les maîtres de métiers… Les nouveaux entrepreneurs, face à cette hostilité, s’installent dans les campagnes, à la périphérie des villes :

« Ce fut en dehors de l’enceinte fortifiée de Paris et de Londres, au faubourg St. Antoine et à Westminster et Southwark, qu’ils fondèrent leurs manufactures, qui devaient ruiner les maîtres de métiers et bouleverser toute la petite industrie artisane.529 »

Cette nouvelle forme de production abandonne les castes définies par les corporations.

L’artisan perd tout le prestige lié à son activité en devenant le rouage, parmi d’autres rouages, de l’acte productif. Les nouveautés techniques introduites dans les manufactures permettent un gain de production colossal, ainsi qu’une progression sans précédent de la productivité. En décomposant l’acte productif et en le divisant en un grand nombres d’étapes, la spécialisation des employés devient possible. Par la répétition quotidienne à l’infini du même geste, la perfection et la rapidité d’exécution est quasi parfaite.

« La division du travail, qui augmente la productivité, mais réduit à son minimum l’habileté technique de l’artisan, naît dans la manufacture. Toutes les opérations d’un métier furent analysées et détachées les unes des autres. […] L’artisan, qui auparavant connaissait les diverses opérations de son métier, les exécutait à tour de rôle et créait une œuvre dans laquelle se reflétait sa personnalité d’artiste, est dégradé à ne plus être que l’ouvrier parcellaire, condamné sa vie durant à n’exécuter machinalement qu’une seule opération. Son individualité est également détruite ; il a maintenant besoin de la coopération d’un certain nombre de camarades pour faire le travail qu’autrefois il achevait seul.530 »

Le changement des techniques de production modifie parallèlement la vie des campagnes.

Auparavant, l’artisan des villages partageait son temps entre son travail et la culture de la terre. Il possédait souvent une maison et du terrain agricole.

« La manufacture marque le divorce avec le travail agricole qu’il accomplissait sur son champ ou sur les terres des grands propriétaires ; elle le concentre dans les villes qui brisent leurs enceintes fortifiées et s’étendent sur les campagnes alentour.531 »

Emerge très rapidement le problème des subsistances. La population se multiplie sans cesse, mais la production agricole stagne. Les techniques employées en agriculture n’ont pas évolué depuis plusieurs siècles. L’outillage, les pratiques stagnent depuis l’orée du Moyen Age. Les récoltes subissent les conséquences de ce manque de rationalité : elles restent trop inégales d’une année sur l’autre et d’une région à l’autre. Des famines (qui parfois sont parfaitement locales !!!) surviennent après des crises de surproduction : tous les efforts des ministres du Roi ne suffisent pas à endiguer le phénomène. La méthode jusqu’alors usitée consistait à jongler entre « ouverture commerciale » et « protectionnisme ». Les crises succèdent aux crises sans qu’aucun moyen probant de les enrayer n’apparaisse efficace.

Lafargue observe que le seul moyen de mettre définitivement fin à cette problématique et d’instaurer les rudiments d’une agriculture moderne, réside dans la dépossession des paysans de leurs droits séculiers qui grèvent la propriété foncière.

528 ibid., p. 461.

529 ibid., p. 465

530 ibid., p. 466.

531 ibid., p. 467.

« La Révolution de 1789 débarrassa l’agriculture, le commerce et l’industrie des entraves féodales qui retardaient leur marche ; alors la propriété bourgeoise put en pleine liberté accomplir son évolution. » (ibid., p. 471)

B- La Révolution et son apport agricultural.

Au XVIIIème siècle, les savants prennent conscience du retard conséquent pris par l’agriculture française : elle n’a pas progressé depuis l’Antiquité grecque… La réaction est proportionnée à la tâche à effectuer : on introduit de nouvelles productions (pomme de terre…), on dispense des cours d’agronomie dans les campagnes. De nouvelles techniques de culture et de nouveaux instruments agraires furent utilisés.

« L’enthousiasme pour l’agriculture de ce siècle merveilleux qui bouleverse les industries, les idées et les sciences, ne connut pas de bornes ; les encyclopédistes déclaraient que planter un arbre, c’était faire acte de vertu.532 »

Malgré toutes ces mesures, les disettes et famines persistent. Le principe souvent répété par Lafargue contre le réformisme politique trouve ici une parfaite illustration : à quoi bon prôner des mesures partielles, si on n’anéantit pas les causes.

« Mais tous les efforts pour transformer l’agriculture échouaient devant l’obstacle insurmontable que leur opposaient le morcellement des cultures et des terres et les droits séculaires des paysans. »

Par exemple, le droit de vaine pâture, impose aux propriétaires de ne pas clore leurs champs après la moisson. Cette mesure avait pour conséquence directe d’interdire tout changement de culture et tout essai de nouvelles plantations, sous peine de voir les troupeaux des paysans les anéantir. Il est aussi impossible de cultiver sur de grandes surfaces : les divisions successives des terres familiales ont rendu les exploitations microscopiques…

La Révolution anéantit le droit de vaine pâture condamnant par voie de conséquence les petits paysans à un changement d’activité.

« L’abolition, sans compensation d’aucune sorte, de ce droit acquis et le partage des biens communaux portaient un coup terrible à la petite propriété et à son mode de culture ; elle enlevait aux paysans la possibilité de posséder du bétail pour se nourrir et se vêtir et de l’engrais pour fumer son champ.533 »

Suite à cela, les transformations agricoles commencent : assèchement de marais, déboisement des forêts, les jachères se cultivent, des prairies artificielles sont semées… le but ultime étant un agrandissement foncier des exploitations. L’agriculture à grande échelle, calqué sur le modèle de développement industriel, voit enfin le jour. De nouvelles espèces de cultures sont introduites. En quelques années, les famines disparaissent.

« […] les propriétaires ne sont plus préoccupés de comment produire pour satisfaire la demande, mais de comment trouver des consommateurs pour leur production accrue.534 »

Le développement de l’industrie capitaliste leur offre désormais la solution, via les nouveaux modes de transports…

L’action des révolutionnaires de 1789 rejette bientôt de nombreux paysans vers l’industrie. Les petites exploitations disparaissent au profit d’autres, colossales, utilisant des procédés de plus en plus sophistiqués.

« La transformation de la propriété foncière, de son mode de culture et de la population des campagnes a été imposée par les transformations qui s’accomplissaient dans la propriété

532 ibid., p. 473.

533 ibid., p. 476.

534 ibid., p. 478.

industrielle et financière. Les campagnes, pour fournir à l’industrie les hommes et l’argent dont elle avait besoin pour ses ateliers et ses gigantesques travaux (chemins de fer, percement de montagnes, usines, etc.), qui n’ont de comparables que les colossales œuvres de l’époque communiste primitive535 durent se dépeupler et vider les cachettes où les paysans enfouissaient leurs épargnes. Les hommes se sont engouffrés dans les villes industrielles, et l’argent dans le coffre-fort des financiers.536 »

La Révolution a généré un bouleversement considérable dans l’agriculture, mais elle fit de même dans l’industrie.

C- L’apparition du capitalisme.

La suppression des limitations imposées par les corporations permet, selon Lafargue, la possibilité pour les manufactures de se multiplier. La conception de l’acte productif revêt alors un nouveau visage. Les premières manufactures introduisent le travail parcellaire. Une nouvelle révolution apparaît avec la spécialisation de certaines régions dans des productions spécifiques. Les spécificités locales dictent les implantations. En s’installant là où se trouve la matière première, un gain dans les coûts de transport et de temps de réalisation est effectué…

L’implantation progressive du chemin de fer à proximité des grands centres industriels va permettre une répartition géographique rapide des produits finis.

« La production capitaliste, parvenue à un certain point de son développement, détruit cette indépendance économique ; elle dissocie les métiers, les isole, en centralise un ou plusieurs en des localités spéciales, favorables à leur prospérité. Ni une ville ni même une province ne doivent plus se charger de la production de tous les objets de consommation de leurs habitants ; elles se limitent à manufacturer certaines marchandises et se reposent sur d’autres pour avoir ceux qu’elle a cessé de produire et que le commerce grandissant lui procure.537 »

Ainsi, un pays comme la France, « ne se subdivise plus en provinces autonomes d’après sa configuration géographique et ses traditions historiques, mais en unités économiques simples, en districts cotonniers, vinicoles, granifères, betteravières, en centres sidérurgiques, carbonifères, etc.538 »

L’évolution de la France ne connaît plus de limites. Chaque secteur est en pleine expansion, de nouvelles inventions, énergies, moyens de transports voient le jour. L’économie modifie de façon irréversible le visage de la production et par là même, celui de la vie humaine. Lafargue trouve ainsi l’illustration parfaite du déterminisme historique marxiste : les hommes se débattent, l’économie les mène.

« Le commerce précède et suit la production dans sa marche. Dès que la production capitaliste eut besoin des pays étrangers pour l’approvisionnement de ses matières premières, l’écoulement de ses produits et la subsistance de ses populations ouvrières, le commerce international se développa avec une rapidité extraordinaire.539 »

Le commerce gagne alors un caractère prépondérant sur l’industrie. Là où il se dirige, les infrastructures suivent.

Paragraphe 2 – Les spécificités des «Temps modernes ».

535 Lafargue fait ici allusion aux Incas qu’il citait ultérieurement comme exemple illustratif.

536 Paul Lafargue, Origine et évolution de la propriété privée, op. cit., p. 483.

537 ibid., p. 485.

538 ibid., p. 486.

539 ibid., p. 489.

Lafargue analyse dans cette partie de son ouvrage, consacré à l’étude du développement humain, les nouvelles techniques de productions. Il ne fait que reprendre les constats déjà mis en évidence dans le reste de ses ouvrages, mais cette fois, en les situant historiquement. Il commence par retracer le phénomène de l’expansion industrielle (A). Ensuite il s’intéresse aux nouvelles formes financières (B) et termine par les nouvelles formes d’organisation de la production (C).

A- L’expansion industrielle.

Lafargue constate que plus l’industrie se développe, plus elle tend vers sa spécialisation.

L’apport de nouvelles énergies (vapeur, électricité…) permet de remplacer de plus en plus l’homme par les machines.

« Les instruments de l’industrie artisane sont simples et peu nombreux, tandis que ceux de l’industrie manufacturière sont complexes et multiples.540 »

Dans chaque manufacture, les ouvriers disposaient d’outils spécifiques, correspondant à une tâche précise. Ce fait découlait directement de la spécialisation croissante des ouvriers.

« L’industrie mécanique défait l’œuvre de la manufacture ; elle arrache les outils des mains de l’ouvrier parcellaire et les annexes à une armature de fonte et d’acier, qui est pour ainsi dire le squelette de la machine-outil, et les instruments annexés en sont les organes.541 »

Cette influence croissante de la mécanisation et de la rationalisation de la production a pour unique vocation à limiter les coûts induits liés à la production (temps / argent). Cette logique se reporte bien évidemment sur les lieux de production. Certaines régions, de par leurs spécificités géographiques (proches des fleuves ou des ports) ou de leurs ressources naturelles, se spécialisent dans la confection d’une tâche unique.

Avec le temps, les activités connexes au traitement des matières premières se rapprochent des centres d’extraction. De grands centres industriels ayant des activités complémentaires se créent. Rapidement, un nouveau phénomène voit le jour : les propriétaires d’une industrie rachètent les étapes antérieures (extraction, production de la matière première) et postérieures (transports, circuits de distribution…) encadrant la fabrication de son produit. Ainsi, se créent des groupes gigantesques qui se répartissent parfois sur plusieurs pays.

Le commerce suit lui aussi cette évolution. D’une spécialisation très marquée, les commerçants voient leurs étals se diversifier. En un seul lieu, on peut trouver les produits qui étaient répartis auparavant sur une dizaine d’échoppes.

Le développement de l’industrie et par extension du commerce, engendre un développement croissant de la sphère financière. Pour s’agrandir, s’étendre, se multiplier, les entreprises doivent mobiliser des moyens financiers colossaux.

« […] l’or et l’argent deviennent signes représentatifs de la valeur, l’étalon qui mesure toutes les marchandises : ils acquièrent alors le droit de procréer des petits légitimes, de porter légalement intérêt.542 »

Ainsi, de nouveaux moyens d’enrichissement se créaient. La richesse ne provient plus de la propriété mobilière ou de la propriété industrielle, mais du prêt à intérêt. Lafargue note toutefois que ce type de prêts n’est pas une invention du siècle, mais jusqu’alors, il était peu usité. Le XVIIIème et début du XXème siècle offre à cette technique financière de nouveaux horizons.

540 Paul Lafargue, Origine et évolution de la propriété privée, op. cit., p. 491.

541 ibid., p. 490.

542 ibid., p. 496.

B- Le développement du « tant pour cent ».

Un bref retour en arrière nous semble nécessaire, afin de comprendre l’origine de la finance moderne.

Lafargue explique que durant de longues décennies avant 1789, le prêt à intérêt se voit condamné, et ceux qui le pratiquent méprisés. Les Juifs monopolisent jusqu’alors ce métier conspué. Ils amassent des sommes considérables grâce à ce moyen, ce qui contribue à les rendre impopulaires. Cet état de fait va être à l’origine du développement de l’antisémitisme543 dans les décennies à venir.

Le « métier de Juif » se développe, en devenant respectable au travers de la profession de banquier. L’aristocratie devient dépendante du bon vouloir des banquiers bourgeois. Ces derniers sont à l’origine du climat de développement propice à la Révolution. Les banquiers voient leur situation nettement s’améliorer après cette période : ils se libèrent de toutes les tracasseries administratives royales. Les emprunts publics existent depuis 1500, mais les remboursements par le Roi étaient des plus aléatoires. Les bourgeois révolutionnaires s’empressent d’enfermer leurs remboursements dans un cadre juridique strict.

« La Révolution, en plaçant la dette publique au-dessus de toute atteinte, offrait aux financiers pour le placement de leurs capitaux une garantie inconnue jusqu’alors.544 »

« La bourgeoisie réhabilita le prêt à intérêt et fit du métier de prêteur la plus lucrative et la plus honorable fonction de l’homme civilisé : vivre de ses rentes est le grand idéal bourgeois.545 »

Son action ne se limite pourtant pas à ce strict domaine :

543 Le reproche d’être antisémite a souvent été adressé aux socialistes et en particulier à Lafargue. Comme les socialistes attaquent souvent les financiers et qu’ils sont majoritairement juifs, le terme de « métier de juif », de « juiverie internationale »… trouve souvent place dans leurs écrits. Lafargue s’en explique clairement dans un article du 2/10/1886 dans Le cri du peuple. Nous trouvons reproduit le passage essentiel de cette intervention dans le recueil de texte de Paul Lafargue, introduits et annotés par Jean Girault, aux éditions sociales, Paris, 1970, 260 pages. Nous en extrayons ici quelques passages : « Les antisémites reprochent aux juifs non la manière dont ils ont acquis leurs immenses richesses, mais leurs richesses elles-mêmes, qu’ils voudraient se partager. S’ils détestent les juifs parce que ceux-ci savent mieux voler qu’eux, ils se mettent à plat ventre devant leur personne gonflée d’insolence et de mépris. […] Les socialistes n’ont ni haine de race, ni haine de nationalité, ils laissent ces sentiments barbares aux bourgeois : personnellement, j’ai la plus profonde admiration pour ce peuple juif insulté, foulé aux pieds pendant des siècles, mais jamais vaincu, jamais soumis, qui enfin se redresse de sa longue et abjecte oppression et qui écrase la chrétienté européenne du poids de ses milliards […].

Les socialistes attaquent Rotschild parce qu’il personnifie la finance moderne. […] Les socialistes ne distinguent les hommes qu’en capitalistes et socialistes ; tous ceux qui veulent la conservation de l’ordre social actuel sont nos ennemis […]. Nous regrettons qu’il y ait si peu de juifs parmi nous en France ; car les juifs sont habiles, intelligents, infatigables et dévoués. »

Dans d’autres cas, les réunions publiques par exemple, Lafargue reprend le public lors de débordements antisémites. Un exemple, parmi d’autre : lors du débat contradictoire avec l’abbé Naudet (le lundi 28/11/1892, à Lille ; paru aux imprimeries Lefervre-Ducrocq, Lille, 1892, 48 pages) « […] Ce n’est pas nous qui détruisons la petite propriété ouvrière, ce sont les phénomènes industriels. Il y a aussi et surtout les grands voleurs de la société actuelle, (le public scande Les juifs, les juifs !!!) […]. Cet immense capital était autrefois dans la poche de plusieurs milliers de Français, aujourd’hui il est dans la poche de quelques-uns ! » (Cris : Les Juifs !) Lafargue répondait cette fois : « Non, pas des Juifs ; il est dans la poche de quelques financiers qui n’ont pas de religion ; cela leur est égal de voler des juifs, des chrétiens, des protestants, des musulmans, car, pour eux, ils ne connaissent et ne pratiquent que le culte de la pièce de cent sous ! »

Il n’est pas non plus étonnant que Lafargue s’engage quelque temps plus tard au côté de Jaurès, lors de

Il n’est pas non plus étonnant que Lafargue s’engage quelque temps plus tard au côté de Jaurès, lors de