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3 5 Soumission paysanne au Sahel, accompagnement notabilaire à Beyrouth et détournement mouqataajis au Mont-Liban

4 Entre moutassarifiat et wilayat [182-1918]

4.2 Deux Territoires: étalement, densification et démarcation

4.2.3 Maintien de la ségrégation au Sahel et premiers quartiers communautaires à Beyrouth

Dans le Sahel, bien que pour les localités déjà existantes la répartition communautaire se maintient entre un ensemble maronite et Bourj El Barajné sunnite et chiite, des nouvelle localités

se forment à Ghobeiri, Mrayjé, Laylaké et Tohwitet AlGhadir. La première a une population presque exclusivement de la communauté chiite201 et les autres des populations de la communauté

maronite (voir planche 7- II.c). D’autre part on a tendance à penser que c’est à cette époque que d’autres groupes chrétiens notamment grecs catholiques et grecs orthodoxes commencent à venir au Sahel, seulement ils restent relativement minoritaires dans les localités où ils s’installent.

Par contre Beyrouth voit se consolider les premiers quartiers communautaires. L’est de la ville devient de plus en plus homogène confessionnellement avec une population composée de différentes communautés chrétiennes. C’est principalement une population migrante venant de Damas et du Mont-Liban fuyant les massacres, ou des migrants économiques du Mont-Liban attirés par les débouchés de travail. Ainsi se forment les quartiers de Saifi, Gemayzé et Achrafieh. Au sud se forme le quartier de Bachoura-Basta où se concentre surtout une population de communauté sunnite. Proche du centre et à l’ouest de la vieille ville se développe aussi un petit quartier juif, dit d’Abou Jmil. Toutefois, beaucoup de quartiers, surtout au centre et à l’ouest de la ville comme Zoqaq El Blat, Mousaytbé et Ras Beyrouth sont mixtes de point de vue communautaire.

Si ce n’est les rixes récurrentes, mais marginales, entre les bandes de qabadays202 de Basta et

d’Achrafieh, la question communautaire malgré le poids des «incidents»203 et des massacres de la

montagne et de Damas en 1860 ne pèse pas sur la vie quotidienne à Beyrouth. La dynamique économique et culturelle réussit à intégrer ces migrations dans le cadre d’une riche urbanité nouvelle. (Kassir, 2003).

4.2.4 «Démocratisation» foncière et socioéconomique au Sahel et démarcation des nouveaux quartiers bourgeois à Beyrouth

Nous tendons à penser que si l’ancienne démarcation entre Baabda et Hadath et le reste du Sahel se maintient à cette époque en raison de l’installation de la capitale de la moutassarifyat à Baabda, elle l’est de façon beaucoup moins marquée. Bien que ces deux localités aient un patrimoine bâti en plus riche et diversifié que les autres au Sahel, ce qui peut induire une plus grande prospérité, la chute des Chéhabs s’accompagne toutefois par l’émergence de nouveaux groupes sociaux et non pas seulement à Hadath et Baabda.

201 Quelques familles de la communauté sunnite s’y installent notamment les Bourjawis.

202 Les qabadays sont les fiers-à-bras de la mythologie urbaine des villes levantines. Leur image et appréciation varie

entre des héros défendant les faibles et les gens de leurs quartiers, et des voyous violents au service de leaders, notamment communautaires dans le cas de Beyrouth.

203 Euphémisme utilisé pour designer les affrontements armés et les massacres à l’époque, et qui sera d’ailleurs repris

Minier (2000) en étudiant l’évolution de la situation foncière de la plaine de Hadath sous la moutassarifiyat, identifie les différents groupes qui achètent les terrains des Chéhabs204 qui se

morcellent. Les acquéreurs cherchent dans un premier temps à investir dans une production agricole liée à la soie, et après la crise de celle-ci dans une perspective de spéculation foncière. Pour lui les acquereurs sont:

- d’abord leurs anciens travailleurs ou exploitants agricoles qui ont réussi à mettre de l’argent de côté;

- une nouvelle classe moyenne de salariés qui s’est développée avec la croissance économique de certaines localités du Sahel, surtout avec le développement de l’administration de la Moutassarifyat qui a sa capitale à Baabda et dispose de bureaux à Hadath;

- des représentants des professions libérales. Avec le développement de l’éducation et la création des universités à Beyrouth pendant la même période, on voit émerger surtout à Hadath et Baabda mais aussi dans d’autres localités du Sahel des professionnels libéraux. - une nouvelle bourgeoisie commerçante à Hadath née du développement du souk suite à

la création d’une gare routière à Hadath;

- Des familles modestes qui avec les remises de parents faisant partie de la diaspora libanaise – qui augmente fortement en nombre après 1890 – s’achètent des terrains. Ces remises sont responsables de manière prépondérante de la constitution de la petite propriété foncière au Mont-Liban par l’accès considérable des couches sociales modestes au foncier.

Bien que les travaux de Minier portent sur Hadath, on peut supposer des situations semblables à Furn AlChebbak suite au développement du souk de la rue de Damas, ainsi que dans toutes les autres localités du Sahel. De fait, Buccanti (1973) en parlant de Mrayjé au sud du Sahel signale l’existence de grandes demeures bourgeoises revenant à cette époque. Ainsi la démocratisation de l’accès à la propriété foncière contribue à la diminution des différenciations socioéconomiques. A Beyrouth par contre les différenciations socioéconomiques tendent à se marquer de façon plus nette. Ainsi on peut identifier une différenciation entre d’une part les quartiers plébéiens centraux de Basta, Saifi et Gemayze, et les anciens quartiers bourgeois comme Zoqaq El Blat qui commence à perdre de son importance et d’autre part les nouveaux quartiers bourgeois de maisons pavillonnaires avec jardin, qui tracent un arc de cercle de l’est à l’ouest passant par le sud contournant les quartiers centraux (voir planche 7- II.d).

204 Si les Chéhabs vendent beaucoup de leurs terrains vers le milieu du 19ième siècle, ils continueront à contrôler de

De même on peut voir de nouveaux espaces commerciaux bourgeois comme celui du nouveau Souk Jdidé au nord-ouest de la vieille ville – bâti par la nouvelle bourgeoisie marchande sur le modèle des espaces commerciaux européens de l'époque – se démarquer du reste des souks.

4.2.5 Nouvelles centralités au Sahel et concentration des fonctions au centre-ville à

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