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3,98% de la superficie du territoire national

Section 1 Enjeux écologiques et scientifiques

1.1. Lutter contre la déforestation du bassin du Congo

Selon le Food and Agriculture Organisation (FAO), la forêt112 est un terrain couvert d'une canopée arboricole de plus de 10 % sur une surface de plus d'un demi-hectare. Il définit

112 Selon la FAO, sont considérées comme forêts les forêts naturelles et les plantations forestières. En revanche,

les rangées d’arbres établies pour la production agricole et les arbres plantés dans des systèmes d’agroforestiers n’en font pas partie.

125 la déforestation113 comme la conversion de la forêt pour une utilisation différente du terrain ou la réduction à long terme de la canopée arboricole en dessous du seuil minimum de 10 %. Pour la CCNUCC114, la déforestation est la conversion anthropique directe des terres forestières en terres non forestières.

La déforestation, phénomène planétaire, est essentiellement liée à la quête du développement économique par les hommes ou les Etats. La démarche implique le défrichement des forêts et leur conversion à un autre usage, comme l’agriculture ou la construction d’infrastructures. Jusqu’au début du 20ème siècle, la déforestation touchait essentiellement les régions tempérées. Depuis quelques décennies, elle est particulièrement présente dans les régions tropicales où selon le FAO (1995), le taux de déforestation entre 1981 et 1990 était de 0,8 %. Contrairement à l’Asie, l’Amérique et l’Afrique tropicales, l’Océanie tropicale est très peu exposée à la déforestation. Toutefois, malgré la croissance du phénomène en Afrique, le taux annuel de déforestation en Afrique tropicale est inférieur à celui de l’ensemble des régions tropicales, soit de 0,7 % contre 0,8 % (cf. tab. 27).

Aujourd’hui la déforestation reste d’actualité et continue à un rythme alarmant. Elle touche chaque année 130 000 km² de forêt dans le monde (Duterme, 2008). Il est donc nécessaire de freiner ce phénomène pour ne pas mettre en péril l’avenir de la vie sur terre, autrement dit celle de l’humanité et de son environnement. Le maintien des fonctions écologiques, voire économiques et sociales des forêts passe par des mesures de protection, telles que la création de parcs nationaux, surtout dans les grands espaces forestiers. Même si elles ne permettent pas d'arrêter la déforestation, elles contribuent à la réduire. Selon la FAO/FRA (2010), environ 13 millions d’hectares ont été convertis à d’autres utilisations (principalement l’agriculture) ou perdus du fait de causes naturelles annuellement au cours de la décennie 2000-2010 contre 16 millions d’hectares par an pour la décennie 1990-2000. Les efforts de ces dernières années ont donc permis de réduire les ravages des actions anthropiques et des catastrophes naturelles sur 6 millions d’hectares par rapport à la décennie précédente. En 2001, selon les estimations de la FAO, les forêts occupaient 31 % de la superficie totale des terres. En d’autres termes, la superficie forestière mondiale totale faisait un peu plus de 4 milliards d’hectares, soit une moyenne de 0,6 hectare par habitant.

113 Pour la FAO, la déforestation prend en compte les surfaces de forêt converties pour l’agriculture, le paturâge,

les réservoirs d’eau et les surfaces urbaines. Par contre elle n’inclut pas les surfaces où les arbres ont été retirés pour leur récolte et où l’on s’attend à ce que se regénèrent naturellement ou avec l’aide de mesures silvicoles.

126 Tableau 27 : Estimation de la déforestation en région tropicale, par sous-régions, de 1981 à 1990.

Région tropicale Superficie des forêts (milliers

d’hectares, 1995) Taux annuel de déforestation (%) Afrique Ouest-sahélien Est-sahélien Occidentale Centrale Australe Insulaire 504 901 39 827 57 542 46 324 204 677 141 311 15 220 0,7 0,7 0,9 1,0 0,5 0,9 0,8 Asie Du sud Du sud-Est, continentale Du sud-Est, insulaire 279 766 77 137 70 163 132 466 1,2 0,8 1,6 1,3 Océanie 41 903 0,3 Amérique Centrale et caraïbe Du Sud 907 389 79 443 827 946 0,8 1,5 0,7 Total 1 733 959 0,8

Source : FAO, 1995. In Bergonzini et Lanly, 2000.

En Afrique, où l’étendue de forêt représente 17 % des forêts du monde en 2010, l’accent est particulièrement mis sur la protection des forêts du bassin du Congo. Deuxième bassin forestier du monde, c’est aussi la deuxième plus grande forêt tropicale de la planète après l’Amazonie. Il s’étend sur six pays : le Cameroun, la Centrafrique, le Congo, la République Démocratique du Congo, le Gabon et la Guinée équatoriale.

127 Tableau 28 : Répartition des forêts par région et sous-région en 2010

Région/sous-région

Superficie forestière

En milliers d’ha % de la superficie forestière totale

Afrique de l'Est et australe 267 517 7

Afrique du Nord 78 814 2

Afrique de l'Ouest et centrale 328 088 8

Total Afrique 674 419 17

Asie de l'Est 254 626 6

Asie du Sud et du Sud-Est 294 373 7

Asie de l'Ouest et centrale 43 513 1

Total Asie 592 512 15

Fédération de Russie 809 090 20

Europe sans la Fédération de Russie 195 911 5

Total Europe 1 005 001 25

Caraïbes 6 933 0

Amérique centrale 19 499 0

Amérique du Nord 678 961 17

Total Amérique du Nord et centrale 705 393 17

Total Océanie 191 384 5

Total Amérique du Sud 864 351 21

Monde 4 033 060 100

Source : FAO, 2010.

Le Gabon, objet de notre étude, couvre 17,70 % de la forêt du bassin du Congo ; cette part est identique à celle de la couverture forestière sur le continent africain. Le Gabon occupe de ce fait la seconde place des pays d’Afrique centrale les plus nantis en forêt, après la République Démocratique du Congo (53,40 %). Il est par ailleurs au premier rang des pays africains en terme de surface de forêt par habitant, soit 22 hectares per capita (CNPN, 2005). La forêt s’étend sur près 85 % du territoire national, dont plus d’un tiers est encore à l’état ‘‘primaire’’.

128 Tableau 29 : Répartition des forêts parmi les pays du bassin du Congo

Pays Part dans le bassin du

Congo (%)

Rang Couverture sur le territoire national (%) Rép. Démo. du Congo 53,40 1er 52,5 Gabon 17,70 2ème 85 Rép. du Congo 12,40 3ème 75 Cameroun 11,80 4ème 44 Rép. Centrafricaine 3,40 5ème 57,5 Guinée-équatoriale 1,3 6ème 75 Total 100 6 64,83

Source : CARPE, 2005 / Nasi R. et al., 2006/ RAPAC, 2008.

Figure 14 : Répartition (%) de la forêt du bassin du Congo par pays

Source : CARPE, 2005. 53,4 % 17,7 % 12,1 % 11,8 % 3,4 % 1,3 %

Répub Démo Congo Gabon

Congo Cameroun Rép Centrafricaine Guinée équatoriale

129 Carte 10 : Le Bassin forestier du Congo

Source : CARPE et USAID, 2005.

Toutefois, même si le Gabon enregistre l’un des taux de déforestation les moins élevés d’Afrique centrale, les organismes internationaux (FAO, WWF, WCS, UICN, etc.), soutenus sans trop de conviction par l’Etat gabonais, affirment que sa forêt est exposée à des maux qui pourraient dans le long terme réduire sa couverture. Il s’agit principalement de l’exploitation du bois, l’exploitation du pétrole et l’agriculture itinérante sur brûlis.

Dans le domaine pétrolier, la destruction de pans de forêt est courante pour l’établissement de pistes, de routes et des forages dans le cadre de la prospection. Dans le domaine du bois, l’abattage d’arbres destinés au commerce du bois est un acte de déforestation. La coupe de gros arbres qui entraîne régulièrement la chute des petits, la construction de routes mènant aux sites d’exploitation et aux campements forestiers favorisent aussi la déforestation. De plus, l’intérêt grandissant pour l’exploitation forestière dans les années 1990-2000, pour essayer de faire face à la crise du pétrole, intensifie le phénomène115. En dehors des espaces de forêt détruits, la pratique de l’agriculture itinérante sur brûlis

115 A cause de la saturation du marché des hydrocarbures et de l’épuisement progressifs des réserves pétrolières

du Gabon à partir de 1998 (cf. fig.1- production pétrolière en p. 59), l’Etat gabonais a placé de nouveaux espoirs dans le secteur forestier pour pérenniser le développement économique d’un pays profondément dépendant du pétrole depuis les années 1970.

Gabon Cameroun Guinée-Eq. Congo Rep. Centrafricaine Rép. Démo. du Congo

130 favorise la déforestation à travers les feux qui l’accompagnent. Il faut dire que même si le petit nombre de la population face à une couverture forestière très peu dégradée116 donne à cette pratique agricole un caractère peu nocif vis-à-vis de la forêt, le brûlis contribue malgré tout à l’érosion des forêts primaires.

Ainsi, la lutte contre la déforestation a toute sa place au Gabon. Les parcs nationaux, sont un moyen pour y parvenir. Cette lutte implique une assurance pour la protection durable de la nature dans le pays avec une portée à la fois régional et global, suivant les propos de Jacques Chirac, tenus lors de son discours à l’occasion de l’ouverture du deuxième Sommet des chefs d’Etat sur la Conservation des Ecosystèmes Forestiers d’Afrique centrale, à Brazzaville au Congo le 05 février 2005 : « Les forêts du Bassin du Congo sont tout à la fois un espace qu’il convient de préserver et une ressource majeure pour l’avenir de notre planète » 117. Avec la création de treize parcs nationaux, c’est près de 2 900 000 hectares de sa forêt que le Gabon met en protection. Dans l’ensemble du Bassin du Congo, 46 parcs nationaux couvrent 18 794 635 hectares.

Tableau 30 : Superficie destinée aux parcs nationaux dans les pays du Bassin du Congo en 2008

Pays Nombre Superficie (ha)

Cameroun 15 2 682 407 Congo 3 3 189 161 Gabon 13 2 991 000 Guinée-Equatoriale 3 303 000 République Centrafricaine 5 3 188 700 Rép. Démo. du Congo 7 8 240 000 Total 46 18 794 635 Source : CARPE, 2009.

Par ailleurs, les parcs nationaux permettent de préserver la diversité des ecosystèmes forestiers représentatifs de la végétation du pays : écosystèmes forestiers inondés, herbeux, denses humides à okoumé et denses humides sans okoumé.

116 La couverture forestière n’a guère changé depuis les années 1960. Elle oscille toujours autour de 80 à 85 %

du territoire national.

131 Carte 11 : Parcs nationaux et protection des écosystèmes forestiers du Gabon (peu lisible?)

Source : Pourtier et al., 2004.

La protection de la forêt par les parcs nationaux induit aussi celle des écorégions d’une part, et le maintien des paysages écologiques d’autre part. L’écorégion est la « partie d’une province caractérisée par des facteurs écologiques régionaux distincts dont le climat, la géographie physique, la végétation, le sol, l’eau, la faune et l’utilisation des terres » (Brodagh et al., 2004). L’écorégion est un facteur déterminant pour caractériser les hotspots (zones chaudes de biodiversité ou zone où la biodiversité est fortement menacée) et les hight- biodiversity wilderness areas (zones sauvages de haute biodiversité)118. C’est l’approche

118 Pour l’ONG CI (Mittermeier et al., 2002 et 2004, cités par Mittermeier et al, 2007), une écorégion (ou un

groupe d’écorégions adjacentes et similaires) est qualifiée de hotspot si elle remplit deux critères stricts : contenir au moins 1500 espèces de plantes vasculaires endémiques (soit au moins 0,5 % du total mondial) et avoir perdu au moins 70 % de son habitat originel. C’est le cas de Madagascar et des îles de l’Océan Indien. En

132 prônée par les ONG américaines, en particulier Conservation International (CI). Selon les dinstinctions faites par la CI, le Gabon, et dans une large mesure le Bassin du Congo119, ont des écorégions qui les placent parmi les hight-biodiversity wilderness areas.

La carte suivante présente les hotspots de biodiversité et les régions sauvages dans le monde.