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1.3 Lire sur ordinateur

1.3.2 Livres ´electroniques, e-books et e-paper

Les livres ´electroniques, alias e-books, ont pour objectif de proposer un dis-positif technique combinant une ergonomie ´equivalente `a celle des livres papier aux avantages en terme de manipulation de donn´ees des supports num´eriques. Ce sont donc autant de tentatives `a parer les d´efauts ergonomiques pr´ec´edemment ´evoqu´es et ils nous rappellent que le num´erique est versatile et que la lecture sur ordinateur n’est pas synonyme de lecture devant un poste face `a un ´ecran catho-dique. Ils se pr´esentent sous la forme de tablettes graphiques – un grand ´ecran d’affichage tactile (cf. figure 1.2) – et pr´esentent l’avantage d’offrir le contenu d’une biblioth`eque pour le poids d’un livre. Munis d’un stylet, ils offrent une aisance d’annotation ´equivalente au papier.

Figure1.2 – L’eBook Portable Reader System (PRS-500) de Sony, commercialis´e `a environ 350$ aux Etats-Unis `a partir de l’´et´e 2006

La premi`ere vague de livres ´electroniques a abouti dans la commercialisation de trois produits d´edi´es et deux produits semi-d´edi´es (De Vathaire 2004) :

– Rocket eBook (1998 – Nuvomedia, env. 200$ - 12x18cm – 620g.) : ce dis-positif sert de support aussi bien pour des contenus achet´es que pour la diffusion de contenus personnels. Le nombre d’utilisateurs a ´et´e estim´e `a environ 25 000. Ce dispositif doit ˆetre reli´e `a un ordinateur pour charger des contenus. Il propose le surlignage, la prise de notes, une bande de na-vigation, la cr´eation de signets et la recherche dans les textes. En outre, un logiciel de conversion au format propri´etaire, `a partir du HTML, ´etait fournit gratuitement.

– Softbook Reader (1996 – Softbook, env. 700$ - 20X27cm 1.3kg) : ce disposi-tif ´etait plus orient´e vers un usage professionnel. Il int´egrait un modem pour

une connexion directe avec un d´epˆot de contenus et une solution logicielle permettait la conversion de fichiers MS Word vers le format propri´etaire du dispositif. Une solution serveur permettait aussi de dispatcher des docu-ments au sein d’une entreprise ou autre institution. Il ne proposait pas de fonctions litt´eraires plus avanc´ees comme la consultation d’un dictionnaire ´electronique en mˆeme temps que la lecture d’une œuvre.

– Cybook (2001 – Cytale, env. 800 euros 19x21cm 900g.) : utilisait un for-mat propri´etaire bas´e sur le standard Open eBook (OeB), le CytalPage. Il permettait la navigation sur internet et l’utilisation d’un dictionnaire in-teractif en plus des fonctions d’annotations et de signet. Ses ventes ont ´et´e extrˆemement faibles et se chiffrent en centaines d’exemplaires.

– eBookman (2000 – Franklin Electronic Publishers – env. 130 `a 200$ ) : ce premier dispositif semi-d´edi´e offre des fonctions agenda, carnet de notes, dictaphone, lecteur mp3, etc. Il se rapproche par cons´equent des Personal Digital Assistant (PDA). Il n’a pas eu de succ`es commercial important, le dispositif n’est plus mis en avant par Franklin. Le transfert des fichiers se fait par un port USB.

– HieBook (2001 – Korean eBook Inc.) : c’est aussi un hybride entre les PDA et les livres ´electroniques qui propose les mˆemes fonctionnalit´es que les eBookman.

Le succ`es commercial n’a pas t´e au rendez-vous de cette premi`ere vague de livres ´electroniques (Krebs 2006). Les soci´et´es `a l’origine du Rocket eBook et du Softbook Reader ont ´et´e toutes deux rachet´ees par Gemstar qui a propos´e `a la suite une nouvelle g´en´eration de machines. La firme a d´evelopp´e des forts partenariats avec des ´editeurs et plus de 7000 titres existent, le catalogue ´etait enrichi de 50-100 nouveaut´es / semaine. Mais Gemstar a arrˆet´e depuis 2003 son activit´e dans le domaine des e-books, ses deux produits d´eriv´es des dispositifs pr´ec´edents n’ont pas connu le succ`es commercial esp´er´e. Quant `a Cytale, cette soci´et´e a dˆu d´eposer le bilan en 2002. D’apr`es le retour d’exp´erience rapport´ee dans (B´elisle 2002), c’est le prix des dispositifs ainsi que celui des ouvrages en version ´electronique qui serait `a l’origine de cet ´echec. Les utilisateurs trouvent que l’´ecart de prix entre les livres traditionnels et les e-books doivent se justi-fier par des fonctionnalit´es suppl´ementaires, ils doivent ˆetre bien plus qu’un livre ´electronique. Et en ce qui concerne les ouvrages, les utilisateurs ont manifest´e qu’´etant donn´e l’absence de support papier les ouvrages devraient ˆetre propo-s´es `a tr`es faible coˆut, voire gratuitement. (Krebs 2006) nous rappelle ´egalement que la France ne b´en´eficie d’un raccordement `a l’Internet haut-d´ebit satisfaisant qu’`a partir de 20006

, les premiers e-books ne pouvaient en cons´equence qu’ˆetre p´eniblement aliment´es en nouveaut´es.

Figure 1.3 – L’eBook Kindle commercialis´e par Amazon pour 400$ et son ´eva-luation par les clients du site marchand

Toutefois les constructeurs ne semblent pas compl`etement d´ecourag´es par ces premi`eres exp´eriences. En t´emoignent les sorties d’un e-book chez Sony – le Por-table Reader System PRS-500 la mi-novembre 2006 en parall`ele avec la mise disposition de 10 000 ouvrages au format ´electronique – et la d´emonstration faite par Philips d’un e-book de 14,1 pouces lors du salon International Meeting on Information Display 2006. D’ailleurs la soci´et´e iRex, qui appartient au groupe Philips, a lanc´e en 2007 un lecteur nomm´e iLiad que l’on peut se procurer pour 650 euros. Les distributeurs de contenu en ligne s’int´eressent aussi `a la question, comme le site Amazon qui a lanc´e un e-book appel´e Kindle pour 400 dollars et qui connaˆıt un accueil mitig´e, comme en t´emoignent les ´evaluations des clients l’ayant d´ej`a essay´e (cf. figure1.3). Peut-ˆetre que l’arriv´ee de grands groupes comme Sony et Philips et des marchands en ligne comme Amazon va finalement lancer le mar-ch´e du livre ´electronique, malgr´e les coˆuts encore ´elev´es. Cependant, il est encore permis de douter de la r´eussite de ces projets :

– La convergence entre ordinateurs, PDA7

, t´el´ephones mobiles, appareils pho-tographiques, etc. va dans le sens des critiques consign´ees dans (B´elisle 2002). Si le livre ´electronique n’est pas plus qu’un livre ´electronique, il risque de ne pas trouver preneur.

– Des nouvelles technologies pour l’affichage de documents num´eriques offrent une ergonomie sup´erieure aux tablettes graphiques et laissent pr´esager une ´evolution de l’industrie orient´ee vers l’e-paper. Il s’agit de proposer une surface d’affichage proche du papier : fine et souple, elle est enroulable. Prenons l’exemple de l’ordinateur rouleau, un prototype qui semble appor-ter une revanche du volumen sur le codex `a l’`ere du num´erique (cf. figure 7. Personal Digital Assistant, assistant personnel ´electronique. Le PDA offre un exemple int´eressant des effets de la convergence des appareils mobiles car son march´e est en perte de vitesse, cannibalis´e par le march´e des smartphones combinant PDA et t´el´ephone mobile. Le cabinet d’analyse International Data Corporation estime que le march´e du PDA a chut´e de pr`es de 40% en un an. (http://www.idc.com/getdoc.jsp?containerId=prUS20947607– derni`ere consultation : novembre 2007)

1.4) !

– Le livre ´electronique a-t-il raison d’ˆetre en tant que tel ? Ces dispositifs sont avant tout des solutions techniques pour compenser l’absence de rep`eres ressentie par les lecteurs lors de leur passage au num´erique, absence que l’e-book comble en partie car il«reproduit les attributs principaux du livre»

(De Vathaire 2004). Jean Cl´ement va plus loin :«Le livre ´electronique n’est que l’ultime avatar du livre. Loin de constituer une avanc´ee vers le futur, il est le dernier signe de notre attachement nostalgique `a un objet d´esormais menac´e de disparition.» (Cl´ement 2000)

Figure 1.4 – Polymer Vision propose des affichages ´electroniques souples et enroulables, vers l’e-volumen?

(Dillon 2000) estime que le public s’int´eressant aux e-books et aux livres ´elec-troniques n’est pas le mˆeme. Ce qui semble confirmer l’exp´erience de prˆet de tablettes men´ee dans (Patez 2004). En fait, chercheurs et ´etudiants se montrent favorables `a la lecture `a l’´ecran de l’ordinateur, outil avec lequel ils ont l’habitude de travailler : «L’exp´erience prouve que les ´etudiants et les chercheurs qui com-posent notre public sont tous dispos´es `a lire en ligne des passages ou des courts chapitres de livres.» Alors que du cˆot´e des biblioth`eques publiques et de leurs usagers, les e-books ont pr´esent´e un plus fort attrait. Ce constat part n´eanmoins de l’´etat de l’art, avec des e-books qui sont des ordinateurs brid´es et qui ne pro-posent pas toutes les fonctionnalit´es d’un ordinateur de bureau. Peut-ˆetre que les r´esultats seraient autres avec des e-books communiquant et qui assurent une continuit´e des travaux avec un poste de travail classique (en offrant des synchro-nisations de donn´ees automatiques par exemple).

Si l’avenir du livre ´electronique est incertain, celui de l’ergonomie de lecture de contenus num´eriques paraˆıt, au contraire, ˆetre vou´e `a une ergonomie ´egale si ce n’est sup´erieure `a celle rencontr´ee avec le support papier aujourd’hui. L’e-paper, support d’affichage souple et fin, issu des laboratoires du MIT (Krebs 2006), s’annonce tr`es prometteur (cf. figure1.5). Que cela soit sous forme de e-book ou

Figure1.5 – En utilisant des supports d’affichage flexibles, l’e-paper promet une ergonomie in´edite pour la lecture num´erique (ici, un prototype de Plastic Logic)

d’e-paper, le lecteur retrouvera une interaction plus imm´ediate et une gestuelle de lecture avec ces dispositifs. A quoi s’ajoutent les possibilit´es de manipulation et de traitement automatique de l’information propres au num´erique. Ce que nous voulons souligner ici, c’est que le verrou ergonomique, `a long terme, n’en est pas un. Ce constat ´etant fait, nous allons maintenant examiner les autres motivations d’une lecture sur support num´erique.