2.2.2.1 Les engins de pêche disponibles par foyer

De la même façon que pour les moyens de locomotion, nous avons d’abord cherché à connaître la variété des engins de pêche disponibles au sein de chaque foyer et leur nombre selon les communautés (figure 17). La description de ces engins est disponible dans l’annexe 7.

Pour simplifier la compréhension de cette analyse des engins de pêche, nous avons choisi sur la figure 17 de séparer les engins en plusieurs groupes et sous-groupes de gauche à droite de l’axe des abscisses. Admettons tout d’abord l’hypothèse que le fil de nylon et l’hameçon métallique, de par leur prix modique et la facilité à s’en procurer aujourd’hui sur le Haut-Maroni, font partie des éléments d’engins de pêche dont les pêcheurs ne maîtrisent pas la production, mais maîtrisent le stock. Rappelons que les engins à ligne et à hameçon existaient déjà dans la région amazonienne, fabriqués à partir de matériaux naturels65.

65

Les hameçons étaient réalisés en kalakumïlï (non identifié) (Martin, 2014). Martin rajoute qu’on pouvait se servir des épines de la liane etpapanale (peut-être Uncaria guianensis ?) pour réaliser la partie piquante (Martin, 2014). Grenand rapporte l’utilisation dans le passé par les Wayãpi d’un hameçon réalisé en bois d’arc et corne de daguet rouge (Mazama americana) pour la pêche de Hoplias aimara (Grenand, 1982). Roth relate des hameçons réalisés à partir de petits morceaux de bois de palmiers (Roth, 1924).

Le fil de pêche était confectionné à partir d’une bromeliacé présente dans les abattis (Bromelia Karatas) (Grenand, 1995), appelée kulaiwat en wayana (Camargo & Anaïman, 2009) et Chinga achi en aluku (cf. annexe

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 Pou rc e n tage

Villages d'amont en aval

115 ch 60 ch 40 ch 25 ch 15 ch 9,9 ch Pagaie Marche à pieds

La figure 17 nous montre plusieurs éléments.

Parmi les engins à utilisation active et à production maîtrisée, l’arc de pêche avec une moyenne par foyer de 0,6 chez les Amérindiens du HM et de 0,3 chez les Aluku, n’est pas présent au sein de chaque foyer aujourd’hui. La constatation est la même pour les lances ou tridents. Parmi les engins qui utilisent lignes et hameçons, nous remarquons une présence très faible en moyenne chez les Aluku (0,7 pour la ligne et la canne en bois), contrairement aux Amérindiens du HM. Chez ces derniers, nous trouvons plusieurs lignes (1,6 en moyenne) et plus de 2 cannes en bois (2,1) en moyenne. Le satellite, d’apparition relativement récente, reste peu présent au sein des foyers amérindiens du HM et aluku.

Parmi les engins à utilisation passive et à production maîtrisée, nous voyons une absence presque totale des « pièges de type nasse », dans les deux communautés, au profit des « trappes simples ou palangre ». Pour ces derniers, nous remarquons une disproportion nette entre les Amérindiens du HM et les Aluku. Tandis que les premiers en possèdent peu, ils sont très appréciés par les derniers (5,4 en moyenne par foyer aluku). Précisons tout de même pour cet engin, que l’écart-type de 8,4 témoigne de quantités très variables d’un foyer à l’autre. Précisons aussi, que cet engin considéré comme passif au premier abord, demande, en cas d’utilisation intensive, une grande activité du pêcheur pour le recharger régulièrement en appât. En effet, quand plusieurs dizaines de trappes sont posées, le pêcheur peut passer sa nuit à faire des allées et venues entre chacune d’entre elles pour les relever et les recharger en appât.

Parmi les engins à utilisation active et à production non maîtrisée, nous remarquons une présence inférieure à ceux dont la production est maîtrisée. La « Canne à moulinet » ne semble pas supplanter la « Canne en bois » dont la présence est dix fois supérieure chez les Amérindiens du HM et plus de deux fois chez les Aluku. L’ « Epervier » est peu présent chez les Amérindiens du HM (0,3 par foyer en moyenne) et extrêmement rare chez les Aluku. Le « Fusil harpon » en revanche, avec une moyenne par foyer de 0,5 chez les Amérindiens du HM joue un rôle notable, comparable à l’« Arc », tandis qu’il est totalement absent chez les Aluku. Précisons tout de même que pour le « Fusil harpon », les foyers de pêcheurs d’Antecume-Pata en ont en moyenne 0,8 chacun et qu’ils détiennent près de 42 % de tous ces engins parmi l’ensemble des pêcheurs amérindiens du HM, Kayodé étant en seconde position avec près de 21 %.

Parmi les engins à utilisation passive à production non maîtrisée, nous ne trouvons que le filet. A la différence de la « trappe simple/palangre », il n’est pas ou peu sélectif en fonction de la taille des mailles. Tous types de filets confondus, c’est l’engin le plus présent au sein des foyers des deux communautés. On en trouve en moyenne par foyer, 2,8 chez les Amérindiens du HM et 4,2 chez les Aluku, avec respectivement des écarts-types relativement importants (1,7 et 2,8 respectivement).

Figure 17. Nombre moyen des différents engins de pêche par foyer de pêcheur par communauté, avec écart-type. De « Arc » jusqu’à « Trappe simple/Palangre », tous les engins de pêche dont les pêcheurs maîtrisent totalement ou en partie la production. De « Canne à moulinet » jusqu’à « Filet », nous avons les engins dont les pêcheurs ne maîtrisent rien dans la chaîne de production. A gauche de chacun de ces deux groupes nous avons les engins à utilisation active et à droite les engins à utilisation passive. Précisons que la « Trappe simple/Palangre » peut-être d’utilisation active si elle est utilisée en nombre important et relevée plusieurs fois dans la nuit. La moyenne est calculée en divisant le nombre total de chaque type d’engin par le nombre total de foyer de pêcheur, par communauté. n = Nombre de foyers de pêcheur par communauté.

En conclusion, nous pouvons dire que les Aluku se limitent principalement à deux types d’engins, le filet et la « Trappe simple/palangre », tandis que les Amérindiens du HM possèdent toujours chez eux une plus grande variété d’engins de pêche.

Au-delà des engins présents à la maison, il s’agit maintenant de préciser ceux effectivement utilisés en sortie actuellement.