• Aucun résultat trouvé

Les de Barse en ligne directe (1066-1266)

Dans le document LES AVOUERIES DES ÉGLISES LIÉGEOISES XI (Page 151-155)

TROISIEME PARTIE – LES BONNES VILLES

1. Les de Barse en ligne directe (1066-1266)

II. Huy

Avec Fosses, la ville de Huy847 détient le privilège d‟avoir abrité l‟une des plus anciennes avoueries urbaines de nos régions. Ainsi, Adalard, le premier avoué connu, était en fonctions dès le début du XIe siècle. En 1013, il participa à la bataille de Hoegaarden848, où il périt les armes à la main849. Le successeur d‟Adalard, Boson, est mentionné dans les sources en 1032 comme détenteur d‟un bénéfice de l‟évêque de Liège à Bovenistier850. Il est permis de penser que ce Boson appartenait déjà au lignage de Barse851 qui allait occuper l‟avouerie de Huy pendant plus de deux siècles. Avec celui de Walter, le prénom Boson compte en effet parmi les deux principaux patronymes de cette famille852.

1. Les de Barse en ligne directe (1066-1266)

Le successeur de Boson, Walter, apparaît pour la première fois le 24 août 1066853 dans un acte par lequel l‟évêque de Liège, Théoduin (1048-1075), fit donation de divers domaines et

844 Fraire, section de Walcourt, province de Namur, arrondissement de Philippeville.

845 J.LECOMTE, L’éveil de la démocratie..., op.cit., p.122.

846 Seul subsiste aujourd‟hui le tracé de cette tour, qui se trouvait au débouché de la rue al Val. Cf. Patrimoine monumental..., Ibidem. Sa garde avait lieu aux frais des hommes de Fraire-la-Grande et de Denée.

847 A.JORIS, La ville de Huy au Moyen Age..., Paris, 1959.

848 Province de Brabant flamand, arrondissement de Louvain. Lors de cet affrontement, Lambert de Louvain écrasa l‟armée épiscopale.

849 VIIDUS OCTOBRIS...commemoratio Alardi advocati et aliorum qui in bello Hugardi fuerunt occisi.

Cf. C. RENARDY, J. DECKERS, L’obituaire de la Collégiale Notre-Dame à Huy, Bruxelles, 1975, p. XVII et p.207.

850 J.-L. KUPPER, Liège et l’Eglise impériale, op.cit., p.277, d‟après A.E.L., Coll. Ste-Croix, n°5, f°182 R°.

Bovenistier : province de Liège, arrondissement de Waremme. Un Boson de Hora figure en outre comme témoin d‟une fausse de Réginard datée de 1029. Il s‟agit sans doute du même personnage. Cf. U.BERLIERE, Documents inédits, t.1, n°5, p.12.

851 Vierset-Barse, commune de Modave, province de Liège, arrondissement de Huy.

852 J.-L. KUPPER, ibidem.

853 S. BORMANS, E. SCHOOLMEESTERS, Notice d’un cartulaire de l’ancienne église collégiale et archidiaconale de N-D. à Huy, B.C.R.H., 4e série, t.1, 1873, n°I, p.90. On rappellera que l‟épiscopat de Théoduin est intimement

églises854 à Notre-Dame de Huy. Le prélat décréta à cette occasion qu‟il n‟y aurait pas de sous-avoué, ni pour la familia de l‟église, ni pour les possessions cédées au profit de Notre-Dame. Leur protection incomberait à l‟avoué « légitime »855, en l‟occurrence Walter, qui apparaît comme témoin à la fin du document. La même année, nous retrouvons encore Walter en tant que témoin dans la charte des privilèges accordés par le même Théoduin aux bourgeois de Huy.

En 1067, Théoduin procéda à une nouvelle donation au profit de la collégiale Notre-Dame, lui concédant un alleu qu‟il avait acheté à Ulbeeck856. Bien que le transfert se soit déroulé par la main de notre avoué, les dispositions différaient de celles prises l‟année précédente. Ainsi, l‟évêque confia-t-il l‟avouerie d‟Ulbeeck au prévôt de l‟église de Huy, Hermann, et non à Walter. Théoduin justifia ce choix par la distance importante qui séparait Ulbeeck de Huy et faisait dès lors de l‟avoué un défenseur peu adéquat857.

En 1083, une charte de l‟évêque Henri de Verdun (1075-1091) nous livre le nom d‟un mystérieux avoué, Boson (II), dont il s‟agit de l‟unique mention858. Le fait est d‟autant plus curieux que ce Boson, en dépit de son patronyme, ne semble pas appartenir au lignage de Barse. En effet, celui entre les mains duquel l‟avouerie aurait logiquement dû se trouver Ŕ Boson de Barse Ŕ apparaît juste avant lui dans la liste de témoins.

Vint ensuite Walter II que nous rencontrons comme titulaire de l‟avouerie en 1091, lorsque le comte Baudouin de Hainaut vendit un alleu à Notre-Dame de Huy. A cette occasion, son fils, Boson est cité comme témoin859.

Un Boson de Barse réapparaît en 1096, cette fois dans un acte concernant l‟église Sainte-Marie de Maastricht. Gendre d‟un dénommé Enguerrand de Horpael, il se porte garant aux côtés de son beau-père pour la possession d‟une propriété, engageant une somme de 50 marcs d‟argent860. C‟est fort probablement lui qui devint l‟avoué Boson III cité entre 1106861 et 1116862.

La première mention de Walter III remonte à 1129863. L‟année suivante, il intervient lorsque l‟évêque Alexandre Ier (1128-1135) octroie divers privilèges à l‟église de Neufmoustier864 et c‟est d‟ailleurs par son intermédiaire Ŕ et celui du prévôt, Thierry Ŕ que s‟effectue la donation

lié à la ville et à la collégiale de Huy. Ayant accordé une charte de franchises aux Hutois (1066), il fit également réédifier Notre-Dame et y reçut sa sépulture. Cf. notamment J.-L. KUPPER & P. GEORGE, La sépulture de l’évêque Théoduin de Bavière (1075) à Huy, Liège autour de l‟an mil, op.cit., p.31-32.

854 Situés notamment à Hoesselt, Fronville, Ave-et-Auffe, Havelange, Herstal, Esemael, Neerlangel, Riemst, Tillier, Lustin, Alken, etc., mais aussi dans la ville même de Huy.

855 Decreuimus etiam ut neque familia ad altare pertinens neque possessio aliqua libere tradita secundarium uel substitutum haberet aduocatum sed legitimus aduocatus eis preesset ad defensionem non ad exactionem.

856 S. BORMANS, E. SCHOOLMEESTERS, ibidem, n°II, p.96. Ulbeeck : province de Limbourg, arrondissement de Tongres.

857 Aduocatiam vero eius loci hoyensis ecclesie preposito concessimus eo quod hoyensis ecclesie aduocatus remotione sua minus videbatur ydoneus.

858 J. DARIS, Notices historiques sur les églises du diocèse de Liège, t.12, Liège, 1885, p.133.

859 BORMANS & SCHOOLMEESTERS, op.cit., n°IV, p.100.

860 A. WAUTERS, De l’origine et des premiers développements des libertés communales en Belgique, dans le Nord de la France, etc., Bruxelles, 1869, p.9.

861 BORMANS & SCHOOLMEESTERS, op.cit., n°V, p.103.

862 CSL, t.1, n°XXXII, p.52-53.

863 BORMANS & SCHOOLMEESTERS, op.cit., n°VII, p.108.

864 Ibidem, n°VIII, p.112.

de deux bonniers de terre. Walter III de Barse apparaît encore comme témoin en 1131865 et 1136866.

Il n‟est pas interdit de penser que l‟avoué urbain cumulait déjà à cette époque les fonctions de châtelain867,comme ce sera le cas au XIVe siècle. Divers exemples rencontrés dans d‟autres bonnes villes de la principauté de Liège868 constituent d‟ailleurs un argument supplémentaire dans ce sens. Il serait dès lors tentant de reconnaître notre avoué dans le châtelain Walter cité dans un acte de 1127869.

En 1157, date à laquelle nous rencontrons de nouveau un avoué de Huy, Walter III n‟était probablement plus en fonctions. Toutefois, son remplaçant portant le même prénom que lui870, la différenciation demeure délicate. Nous pensons malgré tout qu‟il faut y voir un Walter IV, dans la mesure où, contrairement au précédent, il avait un frère, Lambert, mentionné dès 1157871 et à nouveau en 1170.

Ultérieurement, Walter IV apparaît encore en 1158872, dans une charte de l‟évêque Henri de Leez (1145-1164) et en 1182873. A cette époque, il avait un fils, alors suffisamment âgé pour témoigner à ses côtés. Bien que son prénom ne soit pas mentionné, il est fort probable qu‟il s‟appelait lui aussi Walter.

La succession du fils au père se déroula certainement au cours de la décennie 1190. Il conviendrait donc de voir un Walter V dans l‟avoué de Huy apparaissant en 1196874, 1203 et 1209875. Sans doute Walter V exerçait-t-il toujours l‟avouerie en 1233, lors du transport de l‟alleu de Barse Ŕ comprenant notamment un château Ŕ dans la main de l‟évêque de Liège876. Jean d‟Eppes (1229-1238) rendit ensuite la terre de Barse sous forme de fief au fils de l‟avoué, le futur Walter VI. Déjà feudataires de l‟évêque pour leur avouerie, les de Barse l‟étaient désormais aussi pour leur terre patrimoniale.

865 J. DARIS, op.cit., t.11, Liège, 1882, p.197.

866 M. EVRARD, Documents relatifs à l’abbaye de Flône, Louvain, 1894, n°VIII, p.22-23.

867 S. BALAU, Modave, B.S.A.H.D.L., t.8, 1894, p.1-320 (voir les tableaux généalogiques) ; F. TIHON, L’avouerie de Huy et les seigneurs de Beaufort, A.C.H.S.B.A., t.11, Huy, 1896, p.259-260.A.JORIS, La ville de Huy..., op.cit., p.407-408, plaide également en faveur d‟un cumul de longue date des fonctions d‟avoué et de châtelain, même s‟il signale un cas (1194) où elles étaient confiées à un ministerialis.

868 Par exemple à Waremme sans doute dès le début du XIIe siècle, à Dinant en 1152, à Couvin en 1218, etc.

869 CSL, t.1, n°XXXV, p.57-58. Par contre, concernant une autre mention d‟un Walter de Huy, datant de 1116 [CSL, t.1, n°XXXII, p.52-53], nous ne partageons guère l‟opinion de Balau qui y voit déjà Walter III de Barse.

En effet, à cette époque, Walter n‟était pas encore avoué. C‟est son père qui occupait l‟office et il apparaît d‟ailleurs en bonne place parmi les témoins du document. De plus, en tout logique, Walter devrait figurer aux côtés de Boson III, parmi les liberi. Or, il n‟en est rien : il est cité à l‟extrême fin de l‟acte, parmi les membres de la familia episcopi. Nous estimons donc cette identification comme peu vraisemblable, d‟autant plus que le Walter en question est intitulé « de Huy » et non « de Barse » comme Boson.

870 Ibidem, n°XXIII, p.51-52.

871 EVRARD, ibidem, n°XXV, p.54-55.

872 BORMANS et SCHOOLMEESTERS, op.cit., n°IX, p.115-116.

873 EVRARD, ibidem, n°XXX, p.61-63.

874 F. TIHON, op.cit., p.261. La propension de cet auteur à interpréter chaque vide documentaire comme l‟indice d‟un changement de titulaire de l‟avouerie lui valut des critiques acerbes de la part de Godefroid Kurth, dans le mensuel Archives liégeoises d‟août 1898. Kurth lui reproche ainsi, entre autres, de « s‟être fait une loi du dédoublement des personnages ». L‟argumentation de Tihon est certes parfois embrouillée et son article d‟une lecture fastidieuse, mais il conserve le mérite d‟avoir dressé la liste la plus complète des mentions pour les premiers siècles de l‟avouerie de Huy.

875 Cf. notamment CSL, t.1, n°LXXXIII, p.131 et XCIX, p.157. Dans ce dernier document, en date du 18 avril 1209, il est question d‟un advocatus de Barz (Barse), qui n‟est pas nommé.

876 CSL, t.1, n°CCXXXVIII, p.308. Acte donné dans la demeure du prévôt de Huy, le 28 janvier 1233.

Il est de nouveau question de Walter, fils de l‟avoué de Barse l‟année suivante (1234) 877. En 1235, le père et le fils procèdent à la donation de la grosse dîme des alleux de Barse au profit de l‟abbaye du Val-Saint-Lambert. La fille de l‟avoué, Marjules, ainsi que son époux, Everwin d‟Ochain, y donnent leur consentement878. Peut-être ce geste pieux traduit-il la volonté d‟un Walter V vieillissant et sentant doucement son heure approcher ? C‟est en tout cas dans la même perspective que s‟inscrivent ses dernières interventions connues, en 1238. A cette date, Walter fit donation d‟une autre dîme, celle de Vierset879, aux religieuses de Saint-Rémy, près de Rochefort. Il avait au préalable obtenu l‟accord de la cathédrale Saint-Lambert, dont il tenait la dîme en fief. Toujours pour cette raison, il était obligé d‟acquérir, dans les six années à venir, un alleu d‟une valeur annuelle de 100 sous de Liège et de le tenir en fief de la cathédrale880. A titre de promesse, il engagea sa personne ainsi qu‟un autre fief tenu de Saint-Lambert. Enfin, la même année, c‟est de nouveau aux côtés de son fils qu‟il effectua une deuxième donation au profit des religieux du Val-Saint-Lambert881.

Walter VI accéda vraisemblablement à l‟avouerie au cours de la décennie 1240 et, à l‟instar de son père, il se comporta en pieux donateur. En 1249, nous le voyons concéder 5 muids d‟épeautre et 5 muids d‟avoine aux Trinitaires de la Sarte882. L‟année suivante, c‟est au tour de l‟abbaye de Solières de faire l‟objet de sa dévotion. De concert avec les chevaliers Rigaud, Gilles et Jean de Beaufort, trois frères, Walter de Barse cède aux religieux de Solières la moitié des grosses et menues dîmes de Ben883 et de Beaufort. A la différence qu‟ici, ces revenus ne lui appartiennent pas : les différents protagonistes agissent en tant qu‟exécuteurs testamentaires d‟Arnold, seigneur de Beaufort884. Ils bénéficient à ce titre de l‟accord des héritiers du défunt, parmi lesquels sa fille, Clémence, qui a pris le voile à Solières, abbaye où Arnold est par ailleurs inhumé885.

L‟élément le plus intéressant n‟en demeure pas moins les contestations qui eurent lieu vers 1257886 au sujet de la terre de Marchin887, sur laquelle Walter VI et son épouse, Béatrice, exerçaient un droit d‟avouerie. Ils y possédaient une maison de pierre, qu‟ils avaient concédée en fief, ainsi que divers domaines liés à leur office. Visiblement soucieux d‟étendre leurs prérogatives, ils usurpèrent des terres autrefois cédées au chapitre de Saint-Lambert par un dénommé Anselme de Barbençon. S‟ensuivirent diverses contestations qui eurent pour aboutissement la renonciation de Walter et Béatrice à tout droit sur Marchin, hormis les

877 Ibidem, n°CCXLVIII, p.320.

878 J.G. SCHOONBROODT, Inventaire analytique et chronologique des archives de l’abbaye du Val-Saint-Lambert..., t.1, Liège, 1875, n°132, p.48.

879 Commune de Modave, province de Liège, arrondissement de Huy.

880 CSL, t.1, n°CCCXXV, p.403

881 La nature exacte du transfert est mal connue. Il est néanmoins attesté par un acte du 30 avril 1248, par lequel Walter VI demanda à l‟évêque Henri de Gueldre de bien vouloir confirmer la donation que son père et lui avaient effectuée au profit du Val-Saint-Lambert dix ans plus tôt. SCHOONBROODT, Ibidem, n°201, p.72. Cet élément contredit les affirmations de TIHON (op.cit., p.262) selon qui le Walter de 1138 serait déjà un nouvel avoué, encore mentionné en 1240 et 1256.

882 À propos des Trinitaires, Leodium, t.5, 1906, p.13-14.

883 Ben-Ahin, province de Liège, arrondissement de Huy.

884 Du XIIIe au XVIIIe siècle, les villages de Ben, Gives, Solières, la Sarte à Ben, Ahin et Saint-Léonard, soit à peu près l‟actuelle commune de Ben-Ahin, faisaient partie de la seigneurie de Beaufort, dont le nom est cité pour la première fois en 1227. Il s‟agissait alors d‟un alleu appartenant au prince-évêque. Cf. Communes de Belgique, dir. H.HASQUIN, op.cit., t.1, p.153.

885 C. PIOT, Documents relatifs à l’abbaye de Solières, B.C.R.H., 5e série, t.4, n°8, p.19.

886 CSL, t.2, n°DLVIII, DLIX & DLX, p.105-107.

887 Province de Liège, arrondissement de Huy.

domaines et fiefs attachés à leur avouerie (24 novembre 1257). En fait, comme l‟atteste un acte délivré trois jours plus tard (27 novembre), les choses n‟avaient pas été si simples : le doyen de Saint-Lambert, Gilles de Lageri888, avait du monnayer le départ de l‟avoué contre une somme de 7 marcs de Liège.

Les deux dernières mentions de Walter VI remontent à 1259889-1260890, époque à laquelle il était toujours marié à Béatrice. Dès le 7 avril 1260, cependant, la situation devient passablement floue : c‟est alors qu‟intervient un avoué Walter faisant savoir que sa femme, Sara, a donné à l‟abbaye de Neufmoustier des terres et des cens acquis dans cette localité auprès d‟un dénommé Conon de Vierset. Par la même occasion, les époux affranchissent la terre d‟une rente d‟un muids d‟épeautre qu‟elle leur devait pour leur cour de Vierset. Si on ne peut écarter un éventuel Ŕ et très rapide Ŕ remariage de Walter VI suite au décès de Béatrice, il est plus probable que l‟on soit en présence de son successeur, Walter VII891.

Dans le document LES AVOUERIES DES ÉGLISES LIÉGEOISES XI (Page 151-155)