• Aucun résultat trouvé

Les champs d’application de l’article 16 LTBC

Chapitre II : Les grands principes et les règles générales

B. L’article 25 LTBC : les contraventions

1. Les champs d’application de l’article 16 LTBC

575. La question du devoir de diligence revêt une importance particulière dans le domaine du trafic illicite de biens culturels. En adoptant l’article 16 LTBC, le législateur a souhaité assainir le marché de l’art et des biens culturels en augmentant le devoir de diligence des marchands d’art, des personnes pratiquant la vente aux enchères et des musées, acteurs principaux dans ce domaine, tout comme il le fit pour les intermédiaires financiers en matière bancaire pour renforcer le contrôle de la provenance des fonds753.

576. Le risque de trafic de biens d’origine douteuse est considéré comme élevé dans le domaine du commerce de l’art. Il se justifie donc d’imposer aux personnes actives dans cette branche une vigilance particulière quant aux biens transférés. Depuis l’entrée en vigueur de la LTBC, le 1er juin 2005 (art. 33 LTBC), le devoir de diligence au sens de l’article 16 LTBC s’applique aux transferts de biens culturels, pour autant que certaines conditions soient remplies754.

577. L’article 1 lit. f OTBC détermine le champ d’application matériel de l’article 16 LTBC en définissant le type de transferts engendrant l’obligation de diligence au sens de la loi. Ainsi, le transfert de bien culturel est défini comme un acte juridique onéreux dans le domaine du

752 Voir supra N 229.

753 SANSONETTI, p. 81 ss ; articles 3 ss LBA.

754 Le devoir de diligence, OFC ; BERGER-RÖTHLISBERGER, Sorgfalt, p. 74.

commerce de l’art et de la vente aux enchères ayant pour but d’attribuer la propriété755 d’un bien culturel à un tiers.

578. L’article 16 al. 2 OTBC restreint ce champ d’application en limitant le respect du devoir de diligence aux transferts de biens culturels dont le prix d’achat ou d’estimation est supérieur ou égal à 5000 CHF (art. 16 al. 2 OTBC). Cette dérogation quant à la valeur pécuniaire du bien n’est toutefois pas applicable lorsqu’il s’agit de produits de fouilles ou de découvertes archéologiques ou paléontologiques, d’éléments provenant de démembrements de monuments artistiques, historiques et de sites archéologiques, ainsi que d’objets ethnologiques (art. 16 al.

3 OTBC)756. En effet, plus le bien est ancien, plus le risque d’origine douteuse est élevé, raison pour laquelle il n’existe pas de limitation pécuniaire lorsque le transfert porte sur de tels objets.

579. Cette « exception à l’exception » de l’obligation du devoir de diligence est importante en pratique étant donné que les transactions portant sur ce type de biens représentent une grande partie du trafic de biens culturels. On peut dès lors se demander si le choix du législateur de faire figurer cette particularité dans l’ordonnance de la loi était pertinent au regard du principe de la légalité757, cela d’autant plus que la violation de l’article 16 LTBC entraîne une responsabilité pénale (art. 25 al. 1 lit. a LTBC).

580. Le champ d’application personnel de l’article 16 LTBC n’est pas fixé par la loi mais par son ordonnance d’application. Selon l’article 16 OTBC, les articles 15 à 17 LTBC sont applicables aux institutions de la Confédération (art. 16 al. 1 lit. a OTBC, art. 1 lit. c OTBC) ainsi qu’aux marchands d’art et aux personnes pratiquant la vente aux enchères, pour autant qu’ils transfèrent des biens culturels en Suisse (art. 16 al. 1 lit. b OTBC, art. 1 lit. e OTBC).

Étonnamment, ces articles manquent de clarté quant aux personnes tenues de respecter le devoir de diligence. L’article 15 LTBC fait en effet uniquement référence aux institutions de la Confédération, l’article 16 al. 2 LTBC se réfère quant à lui aux marchands d’art et aux personnes pratiquant la vente aux enchères, alors que l’article 16 al. 1 LTBC se limite aux termes de « transfert dans le commerce d’art ou de vente aux enchères ». Nous tenterons de répondre à ces questions ci-dessous758.

755 Notons que cette définition exclut les actes n’opérant pas un transfert de propriété dont l’usufruit ou le nantissement. A ce sujet, voir FOEX, p. 37 ss et l’ATF 131 III 418.

756 GABUS/RENOLD, ad art. 16 LTBC N 14.

757 Pour un commentaire sur le type de loi (formel ou matériel) nécessaire au respect du principe de la légalité, voir CP-HURTADO-POZZO, ad art. 1 CP N 19 ss.

758 Voir infra N 587 ss et N 613 ss.

581. L’article 1er lit. e OTBC définit la notion de marchands d’art et de personnes pratiquant la vente aux enchères. Il s’agit des personnes physiques et des sociétés ayant leur domicile ou leur siège en Suisse qui sont tenues de s’inscrire au registre du commerce759 et qui acquièrent des biens culturels pour les revendre en leur propre nom ou qui en font un commerce pour le compte de tiers (art. 1 lit. e ch. 1 OTBC)760. Les personnes ou sociétés domiciliées ou ayant leur siège à l’étranger sont considérées comme marchands d’art au sens de la loi lorsqu’elles effectuent plus de dix transactions de biens culturels pour un chiffre d’affaire supérieur à 100'000 CHF durant l’année civile et qu’elles acquièrent des biens culturels dans le but de les revendre en leur propre nom ou en font le commerce pour le compte de tiers (art. 1 lit. e ch. 2 OTBC)761.

582. Les institutions de la Confédération sont quant à elles exhaustivement énumérées à l’article 1 lit. c OTBC. En font notamment partie le musée national suisse, la bibliothèque nationale suisse et la collection Oskar Reinhart «am Römerholz».

583. Le champ d’application territorial de l’article 16 LTBC est également défini par l’OTBC.

Selon l’article 16 al. 1 lit. b OTBC, le champ d’application des articles 15 à 17 LTBC est limité aux transferts de biens culturels qui ont lieu en Suisse762. Le transfert est défini à l’article 1 lit. f OTBC, mais ce que l’on entend par « en Suisse » n’est pas établi par la loi, ni par la doctrine763. Quels sont les critères pertinents pour déterminer si le transfert a lieu en Suisse ? S’agit-il par exemple du lieu de conclusion du contrat ou de celui de la situation de l’objet au moment du transfert ? Nous sommes d’avis que pour que le devoir de diligence de l’article 16 LTBC soit applicable, il est nécessaire que le transfert de propriété du bien culturel soit opéré en Suisse764. Le transfert de propriété constitue en effet l’élément

759 Art. 927 ss CO et l’ordonnance sur le registre du commerce du 17 octobre 2007, entrée en vigueur en Suisse le 1er janvier 2008 (ORC ; RS 222.411). Pour plus d’informations, voir RENOLD/CONTEL, p. 381 ss.

760 GABUS/RENOLD, ad art. 16 LTBC N 16.

761 GABUS/RENOLD, ad art. 2 LTBC N 72 ss.

762 Il est intéressant de noter qu’à la lettre de la loi, la condition selon laquelle le transfert doit avoir lieu en Suisse n’est applicable qu’aux marchands d’art et personnes pratiquant la vente aux enchères. Nous sommes d’avis que cette limitation territoriale n’est dès lors applicable que pour les marchands d’art et personnes pratiquant la vente aux enchères et non pour les institutions de la Confédération. Ces dernières y sont donc toujours soumises, que le transfert ait lieu en Suisse ou à l’étranger. Pour plus de précisions sur la territorialité du devoir de diligence, RENOLD, The international scope, p. 850 ss.

763 KKR-RASCHÈR/RENOLD, chap. 6 N 268 ; RASCHÈR/BAUEN/FISCHER/ZEN-RUFFINEN, p. 48.

764 STEINAUER, T 2, N 2008 ss. L’acquisition (dérivée) de la propriété d’une chose mobilière s’opère par un titre d’acquisition, un acte de disposition et un transfert de possession. GRELL/PLUTSCHOW, p. 19. Pour une interprétation large du champ d’application territorial de l’article 16 LTBC, voir RENOLD, The international scope of application, p. 4 ss selon lequel l’existence de liens avec la Suisse est suffisante pour justifier le respect du devoir de diligence.

caractéristique de la définition prévue à l’article 1 lit. f OTBC. L’exigence du respect de l’article 16 LTBC lorsque le bien est transféré à l’étranger violerait le principe de la territorialité, ce qui pourrait être considéré comme une application abusive du droit suisse.

584. Selon l’article 16 al. 1 LTBC, la personne qui cède le bien doit présumer que le bien est d’origine licite pour pouvoir le transférer sur le marché de l’art suisse. Cet alinéa répare en quelque sorte le fait que les devoirs de diligence ne sont pas applicables lorsque le transfert de propriété a lieu à l’étranger dans la mesure où si cette personne souhaite réintroduire le bien culturel dans le commerce de l’art suisse, elle devra alors respecter les devoirs de diligence de l’article 16 LTBC. Sa tâche est plus aisée si elle a rempli au mieux ses devoirs de diligence, même dans le cas où le premier transfert de propriété a eu lieu à l’étranger.

585. Nous sommes donc enclins à penser que le respect des devoirs de l’article 16 LTBC lors d’un transfert de propriété à l’étranger, même s’il n’est légalement pas obligatoire, est conseillé pour permettre aux marchands d’art et aux personnes pratiquant la vente aux enchères de démontrer leur bonne foi lors d’une procédure civile ou pénale. Ainsi, le respect du plus grand nombre possible de devoirs de l’article 16 al. 2 LTBC par un marchand d’art ou une personne pratiquant la vente aux enchères lors d’un transfert de propriété à l’étranger doit être considéré comme un indice en faveur de sa bonne foi. L’on ne saurait en revanche considérer qu’un marchand est de mauvaise foi du simple fait qu’il n’a par exemple pas obtenu de déclaration de disposition écrite et signée d’un marchand résidant à l’étranger auprès duquel il a acquis le bien culturel qu’il souhaite vendre en Suisse.

2. L’article 16 al. 1 LTBC : les obligations générales

586. Selon l’article 16 al. 1 LTBC, un bien culturel ne peut être transféré dans le commerce de l’art ou de la vente aux enchères que si la personne qui le cède peut présumer, au vu des circonstances, que :

- le bien n’a pas été volé ni enlevé à son propriétaire sans sa volonté, - ou n’a pas été importé illicitement765.

587. Au titre de l’article 16 al. 1 LTBC, c’est la personne qui cède le bien et non, comme l’on pourrait s’y attendre, celle qui acquiert le bien, qui est tenue de présumer l’origine licite du bien lors du transfert de propriété.

765 Nous rappelons que la notion d’importation illicite est définie à l’article 2 al. 5 LTBC en tant qu’importation violant un accord bilatéral au sens de l’article 7 LTBC.

588. L’article 16 al. 1 LTBC ne précise pas si ce sont les marchands d’art et les personnes pratiquant la vente aux enchères au sens de l’article 2 lit. e OTBC qui sont soumis au respect des obligations générales. Le transfert doit néanmoins être opéré « dans le commerce de l’art ou dans une vente aux enchères », ce qui laisse entendre, à notre sens, qu’un marchand d’art ou une personne pratiquant la vente aux enchères au sens de la loi doit nécessairement être impliqué dans la transaction766. L’article 16 al. 1 LTBC s’appliquant à la personne qui cède le bien, nous partons du principe que cette dernière, généralement le vendeur, doit être un marchand d’art ou une personne pratiquant la vente aux enchères au sens de l’article 1 lit. e OTBC 767. Aussi, l’article 16 al. 1 LTBC règle-t-il le transfert de biens culturels par un marchand d’art ou une personne pratiquant la vente aux enchères (au sens de la loi) à un tiers et non l’inverse768.

589. La notion de transfert est définie à l’article 1 lit. f OTBC. Elle implique un transfert de la propriété769. La personne cédant ou transférant le bien sera généralement propriétaire du bien, mais il convient d’étendre cette obligation aux intermédiaires agissant pour le compte du propriétaire770. Ainsi, le marchand d’art est tenu de respecter l’article 16 al. 1 LTBC lorsqu’il transfère un bien culturel pour le compte d’un tiers (art. 1 lit. e OTBC)771.

590. Aux termes de l’article 16 al. 1 OTBC, l’article 16 LTBC est également applicable aux institutions de la Confédération (art. 16 al. 1 lit. b OTBC). Comme l’article 16 al. 1 LTBC ne fait pas spécifiquement référence aux marchands d’arts au sens de l’article 1 lit. e OTBC, nous sommes d’avis que la personne qui cède le bien peut également être une institution de la Confédération, pour autant qu’un marchand d’art ou une personne pratiquant la vente aux enchères soit impliquée dans la transaction, de manière à respecter la condition énoncée du commerce de l’art.

591. Aussi, les commerçants d’art et les personnes pratiquant la vente aux enchères, ainsi que les institutions de la Confédération, ne peuvent-elles céder un bien dans le commerce de l’art que si elles sont en mesure de présumer, au vu des circonstances, que le bien n’a pas été volé (art.

766 GABUS/RENOLD, ad art. 16 LTBC N 6 ; SCHMIDT-GABAIN, p. 7 ; message du Conseil fédéral (FF 2002 505, 558).

767 Message du Conseil fédéral (FF 2002 505, 558) ; GABUS/RENOLD, ad art. 16 LTBC N 7 ; SCHMIDT -GABAIN, p. 7.

768 BERGER-RÖTHLISBERGER, Sorgfalt, p. 75 ; GRELL/PLUTSCHOW, p. 30 ; SCHMIDT-GABAIN, p. 7.

769 Voir supra N 577.

770 GABUS/RENOLD, ad art. 16 LTBC N 8.

771 BERGER-RÖTHLISBERGER, Sorgfalt, p. 75.

16 al. 1 lit. a LTBC) ou illicitement exporté (art. 16 al. 1 lit. b)772. Afin de ne pas alourdir nos propos, nous engloberons désormais sous le terme de marchands d’art, les personnes pratiquant la vente aux enchères ainsi que les institutions de la Confédération lors de l’analyse du champ d’application personnel de l’article 16 al. 1 LTBC.

592. Le message du Conseil fédéral précise que l’analyse de la bonne foi doit s’opérer de la même manière pour l’article 16 al. 1 LTBC que pour les dispositions générales du code des obligations (art. 41 CO, acte illicite) et, plus particulièrement en cas d’acquisition de bonne foi d’une chose mobilière (art. 714 CC et art. 3 CC), à savoir selon l’appréciation du bonus vir773.

593. L’examen de la bonne foi, c’est-à-dire la bonne ou la mauvaise appréciation des circonstances dans un cas d’espèce, fait l’objet d’une abondante jurisprudence. Bien que la jurisprudence développée par le Tribunal fédéral se rapporte à la bonne foi de l’acquéreur d’une chose mobilière, le législateur de la LTBC a choisi, nous l’avons-vu774, de l’appliquer à la personne qui cède le bien.

594. Pour déterminer si une personne peut se prévaloir de sa bonne foi, le Tribunal fédéral procède généralement de la manière suivante :

595. La bonne foi est présumée selon l’article 3 al. 1 CC, sauf si elle s’avère incompatible avec l’attention que les circonstances permettaient d’exiger (art. 3 al. 2 CC).

596. L’acquéreur d’une chose mobilière775 n’est pas soumis à un devoir général de renseignement sur le pouvoir de disposer de l’aliénateur ou sur l’origine du bien776. Cela étant, s’il existe des motifs concrets propres à soulever le doute dans l’esprit de l’acquéreur, ce dernier est tenu de procéder à certaines vérifications. L’obligation de l’acquéreur de se renseigner est plus poussée dans certains domaines, dont le commerce d’antiquités777 ou de voitures de luxe778. Le Tribunal fédéral estime alors qu’en cas d’acquisition de bonne foi d’une chose mobilière,

772 BERGER-RÖTHLISBERGER, Sorgfalt, p. 82

773 Message du Conseil fédéral (FF 2002 505, 558 s.) ; KKR-MÜLLER-CHEN/RENOLD, chap. 6 N 144 ss.

774 Voir supra N 587 ss.

775 Notons que la situation de l’acquéreur d’une chose dont le propriétaire a été dépossédé sans sa volonté (art.

934 CC) ou celui d’une chose confiée (art. 933 CC) n’est pas pareille. Voir, notamment, BERGER -RÖTHLISBERGER, Sorgfalt, p. 105 ss ; BaK-STARK/ERNST, ad art. 934 CC N 18 ss.

776 BERGER-RÖTHLISBERGER, Die Gutglaubigkeit, p. 206 ; KKR-MÜLLER-CHEN/RENOLD, chap. 6 N 147 ss.

777 ATF 123 II 134. Voir aussi BERGER-RÖTHLISBERGER, Sorgfalt, p. 149 s. Pour une approche de l’analyse de la bonne foi dans le commerce d’antiquités en droit allemand, voir KOCH, p. 50 ss.

778 SJ 1999 1.

le devoir de diligence doit s’apprécier en fonction du savoir spécifique de l’acquéreur779. C’est pourquoi une personne active dans le commerce de l’art, ou qui en est un tant soit peu familière, sera soumise à un devoir de diligence plus important lors de l’appréciation des circonstances qu’un quidam n’ayant aucun savoir spécifique en la matière780.

597. L’étendue des recherches nécessaires pour être protégé par sa bonne foi se détermine de cas en cas, en fonction des circonstances et des connaissances particulières de l’acquéreur.

L’acquéreur est considéré de mauvaise foi, ou pour le moins négligent, lorsque son appréciation des circonstances peut lui être reprochée ou qu’il n’a pas entrepris les démarches nécessaires qui lui auraient permis de vérifier que le bien était d’origine douteuse. Les démarches imposables à l’acquéreur dépendent également des circonstances et de la

« catégorie » d’acteurs dont il fait partie (collectionneur, marchand d’art, amateur, etc.). Les exigences peuvent aller du simple fait de poser la question au vendeur ou de lui demander des certificats d’origine, jusqu’au contrôle de certains registres spécialisés (Art Loss Register781, liste rouge de l’ICOM782, base de données INTERPOL783, etc.), en passant par le contact avec des organisations telles que l’UNESCO, INTERPOL ou le service spécialisé de l’Office fédéral de la culture784. Ainsi, bien que la bonne foi soit présumée, l’on va se baser sur les circonstances de chaque cas particulier et ce sont des indices externes qui vont permettre de juger de la bonne ou de la mauvaise foi d’une personne785.

598. Il est également important de souligner que l’entrée en vigueur de la LTBC à modifié certains articles du code civil, dont l’article 728 al. 1ter CC. Le délai de prescription acquisitive pour les biens culturels est désormais de 30 ans. Le délai de prescription de l’action en revendication au sens de l’article 934 CC est également de 30 ans (art. 934 al. 1bis CC)786. 599. Le choix de transposer, dans l’article 16 al. 1 LTBC, les obligations de diligence

généralement applicables à l’acquéreur de biens au vendeur résulte de la volonté d’assainir le marché de l’art au niveau des commerçants. En effet, si les commerçants d’art n’acceptent de mettre sur le marché que des biens qu’ils présument ne pas avoir été illicitement importés, ni

779 ATF 131 III 418, ATF 123 II 134, SJ 1999 1. Pour un aperçu de la jurisprudence du Tribunal fédéral sur la question de l’appréciation de la bonne foi, voir BERGER-RÖTHLISBERGER, Sorgfalt, p. 132 ss.

780 Message du Conseil fédéral (FF 2002 505, 558), GABUS/RENOLD, ad art. 16 LTBC N 12 ; BERGER -RÖTHLISBERGER, Die Gutglaubigkeit, p. 207 ; MÜLLER-CHEN, p. 1271 ss.

781 www.artloss.com.

782 http ://archives.icom.museum/redlist/, (consulté le 06.12.2010).

783 http ://www.interpol.int/Public/WorkOfArt/Search/RecentThefts.asp, (consulté le 06.12.2010).

784 BERGER-RÖTHLISBERGER, Sorgfalt, p. 157 ss.

785 BERGER-RÖTHLISBERGER, Die Gutglaubigkeit, p. 205.

786 GABUS/RENOLD, ad art. 32 LTBC N 20 ss et N 24 ss ; BaK- STARK/ERNST, ad art. 934 CC N 17j.

volés ou enlevés à leur propriétaire ou provenant de fouilles clandestines, les acheteurs ne devraient plus avoir la possibilité d’acquérir des biens dont l’origine est douteuse. Les acheteurs ne devraient par conséquent se trouver confrontés que dans une moindre mesure, à des circonstances propres à mettre en doute leur bonne foi787.

600. L’article 16 al. 1 LTBC a donc pour objectif d’empêcher qu’un marchand d’art de mauvaise foi puisse écouler son bien sur le marché en le revendant à un acquéreur, en commettant des actes de recel ou de blanchiment788. Le législateur a souhaité couvrir toute la chaîne des transactions dans le commerce de l’art en soumettant les marchands d’art au respect de devoirs de diligence lorsqu’ils tiennent le rôle de vendeur (art. 16 al. 1 LTBC) et lorsqu’ils tiennent celui d’acquéreur (art. 16 al. 2 lit. a et c LTBC). Le marchand d’art vendeur du bien est soumis au respect de l’article 16 al. 1 LTBC et l’acquéreur, auquel la jurisprudence du Tribunal fédéral reste bien entendu applicable, doit être en mesure de protéger sa bonne foi au sens de l’article 3 al. 2 CC789.

601. Après cet examen de la bonne foi en général, analysons plus précisément ce qu’implique l’article 16 al. 1 LTBC pour le marchand d’art, la personne pratiquant la vente aux enchères ou une institution de la Confédération.

602. Un marchand d’art qui vend un bien culturel ne peut pas être protégé dans sa bonne foi si l’on peut lui reprocher, au vu des circonstances, de ne pas avoir présumé que le bien avait été illicitement importé, volé ou enlevé à son propriétaire ou qu’il provenait de fouilles clandestines. Cet article étant formulé sous la forme d’une présomption, le marchand d’art n’a pas l’obligation de vérifier que le bien n’a pas fait l’objet d’un des actes énumérés et de lever tout doute à ce sujet, mais il doit pouvoir, au vu des circonstances, admettre que le bien est d’origine licite. Cela étant, pour pouvoir vendre le bien sans que l’on puisse lui reprocher sa

602. Un marchand d’art qui vend un bien culturel ne peut pas être protégé dans sa bonne foi si l’on peut lui reprocher, au vu des circonstances, de ne pas avoir présumé que le bien avait été illicitement importé, volé ou enlevé à son propriétaire ou qu’il provenait de fouilles clandestines. Cet article étant formulé sous la forme d’une présomption, le marchand d’art n’a pas l’obligation de vérifier que le bien n’a pas fait l’objet d’un des actes énumérés et de lever tout doute à ce sujet, mais il doit pouvoir, au vu des circonstances, admettre que le bien est d’origine licite. Cela étant, pour pouvoir vendre le bien sans que l’on puisse lui reprocher sa