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illicite de biens culturels

C. Les accords bilatéraux

300. Selon l’article 303 CPIA, les Etats-Unis peuvent conclure des accords bilatéraux avec les Etats parties à la convention de l’UNESCO de 1970 sans qu’il ne soit nécessaire qu’un acte spécifique supplémentaire soit approuvé par le Sénat. L’Etat partie à la convention doit faire part de sa volonté de conclure un accord en déposant une requête auprès du Cultural Property Advisory Committee406. Ce dernier formule ensuite des recommandations qui sont transmises au Président des Etats-Unis qui, le cas échéant, peut entamer des négociations visant la conclusion de l’accord407.

301. L’article 303 al. 1 CPIA énonce les différents critères devant être respectés pour qu’un accord puisse être conclu. Premièrement, le patrimoine culturel du pays en question doit être considéré comme étant mis en péril par le pillage de biens archéologiques ou ethnologiques.

Les accords sont ainsi limités à ce type de biens, c'est-à-dire aux biens de plus de 250 ans408 et qui se trouvent dans une situation de mise en danger.

302. Deuxièmement, l’Etat requérant doit avoir pris des mesures visant la protection de son patrimoine culturel409. Conformément aux articles 5, 6 et 10 de la convention de l’UNESCO de 1970, ces mesures peuvent par exemple porter sur le renforcement de la protection des musées et des sites, l’amélioration du contrôle aux frontières, ou encore l’éducation de la population sur l’importance du patrimoine national.410

303. Troisièmement, les restrictions à l’importation mentionnées à l’article 307 CPIA doivent constituer un apport important pour la protection des biens archéologiques et ethnologiques se trouvant dans une situation de pillage périlleuse, lorsqu’elles sont appliquées en parallèle à des mesures de restrictions à l’exportation déjà en vigueur ou devant l’être dans une période raisonnable dans un Etat partie ou non à la convention de l’UNESCO de 1970.

304. Quatrièmement, l’adoption d’autres mesures moins incisives que la conclusion d’un tel accord n’est pas envisageable. Cinquième et dernière condition, les mesures de restrictions à l’importation doivent être conformes à l’intérêt général de la communauté internationale à

406 KAUFMAN, p. 398. Pour plus d’informations sur les compétences et la composition de ce comité, voir MERRYMAN/ELSEN/ULRICE, p. 332 s.

407 GERSTENBLITH, p. 630.

408 KAUFMAN, p. 393 ; art. 19 U.S.C § 2601 (2). Chaque accord spécifie cependant très précisément les catégories de biens auxquels il s’applique.

409 Sur les raisons de cette exigence, qui se rapporte de manière générale aux pays exportateurs de biens culturels, voir SANCHEZ CORDERO DAVILA, p. 304 ss.

410 GERSTENBLITH, p. 620 s. et 630 s. Voir aussi SANCHEZ CORDERO DAVILA, p. 304.

l’échange de biens culturels entre les Etats à des fins scientifiques, culturelles ou d’éducation411. Ces cinq conditions sont cumulatives. Elles doivent donc toutes être remplies pour que les Etats-Unis acceptent de mettre en place des mesures de restrictions à l’importation.

305. Jusqu’à présent, les Etats-Unis ont conclu des accords bilatéraux avec la Bolivie, le Cambodge, le Canada, la Colombie, le Salvador, le Guatemala412, le Nicaragua, l’Honduras, le Pérou, le Mali, l’Italie413, Chypre, et récemment avec la Chine (janvier 2009)414.

306. Les accords contiennent une explication sur la raison d’être de l’accord, une liste des biens soumis aux restrictions d’importation ainsi que des dispositions portant notamment sur la coopération mutuelle entre les deux Etats et l’assistance technique. En outre, chaque accord contient des dispositions spécifiques à chaque Etat. Les accords sont conclus pour une période de 5 ans au plus, mais ils peuvent être reconduits (art. 303 lit. b et lit. e CPIA)415.

307. Les biens culturels soumis à l’accord sont classés par catégories et décrits de manière suffisamment précise pour être identifiables (région d’origine, type, époque de création, matériaux, etc.). Pour des raisons de publicité et pour faciliter l’obtention d’informations sur ce type de biens, les Etats-Unis ont mis en place un système de données consultable sur internet par les privés, les commerçants d’art ainsi que le Département nord américain compétent en la matière416.

308. Conformément à la perception de la convention de l’UNESCO de 1970 par les Etats-Unis, les Etats dont les biens sont en périls ont eux-mêmes l’obligation de prendre des mesures en vue de protéger et de promouvoir leur patrimoine et de favoriser les échanges de biens culturels légaux. Ainsi, l’accord avec le Salvador prévoit que le musée national doit être reconstruit

411 KAUFMAN, p. 400 et GERSTENBLITH, p. 630 s.

412 Voir SANCHEZ CORDERA DAVILA, p. 265 ss.

413 Pour une analyse précise de l’accord entre les Etats-Unis et l’Italie, en particulier des biens italiens qui y sont soumis, voir LOBAY, p. 59 ss.

414 Pour le texte de ces différents accords ainsi que leur date d’entrée en vigueur, voir le site www.culturalheritage.state.gov/implemen.html. Il peut arriver, comme c’est le cas avec le Mexique, que l’accord et le Pre-Colombian Monumental or Architectural Sculpture or Murals Lawsoient applicables en même temps. Dans ce cas, il faut prendre en considération les deux textes. Voir MERRYMAN/ELSEN/ULRICE, p. 323. D’autres accords portant sur le retour facilité de certains biens culturels ont été conclus avant l’entrée en vigueur du CPIA, notamment celui avec le Mexique de 1970 portant sur le retour de biens précolombiens. Voir WEBER, Archäologische, p. 237 et SANCHEZ CORDERODAVILA, p. 299 ss.

415 GERSTENBLITH, p. 632 ; NAFZIGER/SCOVAZZI, p. 198 ss.

416 GABUS/RENOLD, ad art. 7 LTBC N 4. Voir aussi le site www.exchanges.states.gov/culprop.com, (consulté le 07.12.2010).

avant l’entrée en vigueur de l’accord. Aux termes de l’accord avec l’Italie, cette dernière s’engage à faire des prêts à long termes aux Etats-Unis de biens faisant l’objet de l’accord417. 309. Les différentes clauses adoptées en fonction de la situation de chaque pays démontrent que les

Etats-Unis négocient chaque accord en fonction des avantages qu’ils peuvent obtenir de l’Etat cocontractant. Ainsi, la bilatéralité des prestations de l’accord diffère d’un Etat à l’autre et la contre prestation n’est pas forcément en relation avec la lutte contre le trafic illicite418.

D. La procédure de restitution

310. Les mesures de contrôle à l’importation mises en place par le CPIA sont en vigueur à partir du moment où elles sont publiées dans le Federal Register, dans lequel les biens archéologiques ou ethnologiques auxquels elles se rapportent sont décrits419. Une fois inscrits dans ce registre, les biens peuvent être importés sur le territoire des Etats-Unis uniquement s’ils sont accompagnés d’un certificat d’exportation émis par leur Etat d’origine ou si la personne souhaitant les importer est en mesure de prouver que les biens avaient quitté leur Etat d’origine avant l’entrée en vigueur de la mesure de contrôle.

311. Dans le cas où les biens ne sont pas accompagnés d’un certificat d’exportation attestant que leur sortie du territoire est conforme à la législation du pays d’origine, ou que la personne souhaitant les importer n’est pas en mesure d’apporter une preuve satisfaisante (art. 307 lit. c CPIA) de la légalité de l’exportation (art. 307 lit. b 2 A et B CPIA), les douaniers américains ont l’obligation d’entreposer les biens dans les locaux douaniers jusqu’à l’obtention d’une telle preuve pendant un délai de 90 jours. Une fois ce délai échu et si aucune preuve n’est apportée, les biens sont saisis et confisqués (art. 307 CPIA)420.

417 GERSTENBLITH, p. 633.

418 Il est intéressant de noter qu’il fut un jour discuté entre les Etats-Unis et le Mexique d’adopter un accord selon lequel les Etats-Unis s’engageaient à contrôler l’importation de biens précolombiens si le Mexique s’engageait à empêcher l’importation aux Etats-Unis de différentes drogues (marijuana, cocaïne et héroïne).

Voir MERRYMAN/ELSEN/ULRICE, p. 323.

419 Il existe également des photographies des différents types de biens sur le site officiel www.culturalheritage.state.gov/database.html, (consulté le 07.12.2010).

420 MERRYMAN/ELSEN/ULRICE, p. 323 s. Selon le titre 19 § 1603 ss U.S.C., les biens saisis sont entreposés dans des locaux douaniers. Si leur valeur est estimée à moins de 2500 USD, ils sont vendus aux enchères publiques, à moins qu’une demande en restitution ne soit déposée. Si la valeur des biens est supérieure à 2500 USD une condemnation proceeding est engagée. Il est toujours possible de déposer une demande de restitution sous réserve de faire preuve d’un intérêt suffisant et, en principe, du paiement du montant estimé.

Si la demande est opérée après la vente, le requérant peut obtenir tout ou partie du prix. Dans les autres cas, le produit de la vente est versé au U.S. Treasury.

312. La procédure de restitution, qui est une procèdure douanière, est identique pour les biens faisant l’objet d’un accord bilatéral ou d’une mesure d’urgence (art. 310 lit. b CPIA). Une fois le bien saisi, le retour est en premier lieu proposé à l’Etat d’origine. S’il ne peut pas être restitué à cet Etat, la personne dont le bien a été saisi peut le récupérer si elle détient un titre de propriété valide ou si elle peut prouver son acquisition de bonne foi. Si aucune des deux hypothèses n’est applicable, le bien est soumis aux articles régissant le sort des biens qui ont violé la législation douanière décrite ci-dessus421 (titre 19 U.S.C § 1603 ss). Les frais afférant au retour des biens sont à la charge de l’Etat d’origine ou du demandeur. La question d’une éventuelle indemnité à l’acquéreur (art. 310 lit. b et lit. c CPIA ) n’est pas régie de la même manière lors de l’application de l’article 307 cum 305 CPIA (biens faisant l’objet d’un accord bilatéral ou d’une mesure d’urgence) ou de l’article 308 CPIA (biens volés)422.

E. Cas particulier : l’impact de la législation relative aux biens volés sur les