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Chapitre II : Les grands principes et les règles générales

A. L’appropriation illégitime (art. 137 CP)

466. L’infraction d’appropriation illégitime est la première des dispositions du titre des infractions contre le patrimoine. Il s’agit de l’infraction la plus générale ; elle est par conséquent subsidiaire aux autres infractions contre le patrimoine (art. 138 à 140 CP).

467. Les éléments constitutifs objectifs communs des infractions contre le patrimoine sont les suivants592: il doit premièrement s’agir d’une chose mobilière appartenant à autrui et, deuxièmement, cette chose doit avoir fait l’objet d’une appropriation sans droit. La doctrine et la jurisprudence considèrent qu’il y a appropriation sans droit lorsque l’auteur s’attribue un pouvoir de disposition sur une chose dont il n’est pas propriétaire et qu’il incorpore économiquement la chose ou la valeur de la chose à son propre patrimoine dans le but de la garder, de l’aliéner, de la consommer, de la prêter ou de la mettre en gage593. Il faut par conséquent que l’auteur se comporte volontairement et de manière concrète comme s’il était propriétaire de la chose.

468. En droit pénal, une chose mobilière est un objet corporel non immobilier594. Les créances et autres droits en sont par conséquent exclus, à moins qu’ils ne soient incorporés dans un papier valeur595.

469. Le droit pénal ne définit pas le « bien culturel ». Il convient pour cela de se référer à la définition de l’article 1er de la convention de l’UNESCO de 1970, reprise par l’article 2 al. 1 LTBC, selon laquelle les biens culturels sont des biens meubles : tableaux, sculptures, objets archéologiques, statuettes, livres, meubles, mais aussi des spécimens de botanique ou de minéralogie, etc. Les douze catégories de biens culturels prévues par la définition de l’article

592 BERTOSSA, p. 70 ss.

593 CORBOZ, Les infractions, ad art. 137 CP N 9 ; STRATENWERTH/JENNY, p. 264 N 9 ss ; HURTADO POZZO, Droit pénal, ad art. 137 CP N 778 ss ; BaK-NIGGLI, ad art. 137 CP N 25 ss ; ATF 112 IV 151 ; ATF 118 IV 148, JdT 1994 IV 105 ; ATF 121 IV 25.

594 CORBOZ, Les infractions, ad art. 137 CP N 2 ; ATF 116 IV 144 cons. 2 b. La notion de chose mobilière en droit pénal ne correspond pas à celle du droit civil, définie à l’article 713 CC. Les animaux, par exemple, ne sont pas des choses au sens du droit civil (art. 614 aCC) mais le sont en droit pénal (art. 110 al. 3bis CP). Le statut des biens faisant partie de l’anatomie humaine ou, ce que l’on appelle les restes humains, font l’objet d’une divergence doctrinale, bien qu’ils soient généralement considérés comme une chose mobilière. Pour plus de précisions à ce sujet, voir BERTOSSA, p. 70 s. ; HURTADO POZZO, Droit pénal, ad art. 137 CP N 791 ss.

595 CORBOZ, Les infractions, ad art. 137 CP N 3 ; STRATENWERTH/JENNY, p. 262 N 5.

1er de la convention de l’UNESCO permettent à un nombre très important de biens d’être considérés comme bien culturels mobiliers596.

470. Le deuxième élément objectif constitutif des infractions contre le patrimoine est celui de

« l’appartenance à autrui ». Cet élément doit être interprété à la lumière du droit privé597. Selon l’article 714 CC, les deux conditions essentielles de l’acquisition de la propriété sont le titre de propriété et la mise en possession598. L’ayant droit peut être une personne physique ou morale ainsi qu’une collectivité publique ou l’Etat. La notion de propriété doit être interprétée au sens large. Ainsi, doivent être considérées comme appartenant à autrui, toutes choses faisant l’objet d’un droit de propriété reconnu à quiconque d’autre que l’auteur de l’infraction599.

471. Une chose ne peut donc pas appartenir à autrui si elle est considérée comme « sans maître », si elle n’a jamais fait l’objet d’une acquisition licite ou si elle a antérieurement été abandonnée600. Les biens non découverts, par exemple les biens archéologiques encore enterrés et autres biens présentant un intérêt scientifique sont considérés comme « appartenant à autrui » même si ce sont des « choses sans maître ». Selon l’article 724 CC, le canton bénéficie d’un droit de propriété direct sur ces biens601.

472. Selon l’article 137 al. 2 CP, l’auteur ne sera puni que sur plainte s’il a trouvé la chose ou si celle-ci est tombée en son pouvoir indépendamment de sa volonté, pour autant qu’il ait agi sans dessin d’enrichissement illégitime ou si l’acte a été commis au préjudice des proches ou des familiers602.

473. Les éléments subjectifs603 de l’infraction d’appropriation illégitime sont l’intention et l’enrichissement illégitime. L’auteur doit avoir la volonté de s’approprier une chose appartenant à autrui et de l’intégrer à son patrimoine. Le dol éventuel est suffisant604. Il est

596 BERTOSSA, p. 70 ss. Pour plus de précisions sur la définition du bien culturel, voir supra N 181 ss.

597 HURTADO POZZO, Droit pénal, ad art. 137 CP N 800 ss.

598 BERTOSSA, p. 72 s.

599 CORBOZ, Les infractions, ad art. 137 CP N 6 ; ATF 115 IV 104, JT 1990 IV 139 ss.

600 CORBOZ, Les infractions, ad art. 137 CP N 7.

601 Voir supra N 58 s.

602 BaK-NIGGLI, ad art. 137 CP N 49 ss.

603 Les éléments subjectifs d’une infraction pénale sont l’intention et la négligence mais l’énoncé de fait légal peut parfois en exiger d’autres comme le dessein, le mobile ou encore les états d’esprit. Voir CP-CORBOZ, ad art. 12 CP N 9 ss.

604 CP-CORBOZ, ad art. 12 CP N 24 ss et N 62 ss. Sur le dol éventuel, voir SCHUBARTH, Dolus eventualis, p.

519 ss.

également nécessaire qu’au travers de son acte, il ait l’intention de s’enrichir ou d’enrichir autrui605. La notion d’enrichissement est relativement large. Elle consiste en l’obtention de tout avantage patrimonial606.

474. L’infraction d’appropriation illégitime est punie d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire, sous réserve que les infractions prévues aux articles 138 à 140 CP ne soient pas réalisées, ce qui ne sera que rarement le cas, l’article 137 CP étant subsidiaire aux autre infractions contre le patrimoine.

B. Le vol (art. 139 CP)

475. Le vol est certainement l’une des infractions les plus fréquentes en matière de trafic illicite de biens culturels. Selon l’article 139 CP, commet un vol « celui qui, pour se procurer ou procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura soustrait une chose mobilière appartenant à autrui dans le but de se l’approprier ».

476. Comme pour l’infraction d’appropriation illégitime, les éléments constitutifs du comportement incriminé doivent porter sur une chose mobilière appartenant à autrui. Pour que les éléments constitutifs objectifs de l’énoncé de fait légal soit remplis, il faut encore que l’auteur soustraie le bien contre la volonté de l’ayant droit. On entend par soustraction, toute prise de possession. L’auteur doit donc s’approprier une chose appartenant à autrui en prenant possession de celle-ci (création d’une nouvelle possession) et en privant l’ayant droit du pouvoir de disposition sur la chose607. En droit pénal, possède une chose celui qui a un pouvoir de fait sur la chose selon les règles de la vie sociale ou, pour le moins, la possibilité de l’exercer ainsi que la volonté d’en disposer608.

477. Les éléments constitutifs subjectifs de l’infraction sont l’intention, le dessein d’appropriation et le dessein d’enrichissement illégitime. Le vol est une infraction intentionnelle. L’auteur

605 CORBOZ, Les infractions, ad art. 137 CP N 14 ss ; STRATENWERTH/JENNY, p. 270 N 29 ss.

606 Pour plus de précisions sur la notion d’enrichissement illégitime, voir CORBOZ, Les infractions, ad art. 138 CP N 10 ss ; BaK-NIGGLI, ad vor art. 137 CP N 61 ss ; et STRATENWERTH/JENNY, p. 271 N 32 ss.

607 CORBOZ, Les infractions, ad art. 139 CP N 2 ss ; HURTADO POZZO, Droit pénal, ad art. 139 CP N 905 ; STRATENWERTH/JENNY, p. 287 N 69 ss ; BaK-NIGGLI/RIEDO, ad art. 139 CP N 11 ss.

608 STRATENWERTH/JENNY, p. 287 N 70 ; CORBOZ, Les infractions, ad art. 139 CP N 3 ss ; ATF 118 IV 209 cons. 3a, JdT 1994 IV 162. Les notions de possession selon le droit pénal ou le droit civil ne sont pas pareilles, bien qu’elles soient difficiles à distinguer. Pour plus de précisions sur la différence entre la possession en droit civil et en droit pénal, voir CASSANI, La protection, p. 120 et STEINAUER, T1, N 159 et N 175 ss. La possession d’un bien matériel en droit civil est définie par l’article 919 CC comme la maîtrise effective du bien.

doit donc avoir la volonté de réaliser tous les éléments objectifs de l’énoncé de fait légal pour que l’infraction soit commise.

478. Il ne suffit pas que l’auteur s’approprie la chose en vue de l’utiliser temporairement ou de la détruire, dans quel cas il pourra être puni de soustraction mobilière (art. 141 CP), de dommage à la propriété (art. 144 CP) ou de vol d’usage s’il s’agit d’un véhicule (art. 94 LCR). Il doit avoir l’intention de l’intégrer à son patrimoine en vue de la garder ou de l’aliéner609. Le voleur doit également agir dans le dessin de s’enrichir illicitement, c'est-à-dire d’obtenir un avantage patrimonial pour lui ou un tiers610.

479. Le vol est puni d’une peine privative de liberté de 5 ans au plus ou d’une peine pécuniaire.

L’auteur qui fait métier de vol est puni d’une peine privative de liberté de 10 ans au plus ou d’une peine pécuniaire de 90 jours-amende au moins (art. 139 al. 2 CP). Finalement, celui qui commet un vol aggravé est puni d’une peine privative de liberté de 10 ans au plus ou d’une peine pécuniaire de 180 jours-amende (art. 139 al. 3 CP)611.

C. Le recel (art. 160 CP)

480. Selon l’article 160 CP est punissable de recel « celui qui aura acquis, reçu en don ou en gage, dissimulé ou aidé à négocier une chose dont il savait ou devait présumer qu’un tiers l’avait obtenue au moyen d’une infraction contre le patrimoine [...] ».

481. On entend par acquisition le fait pour l’auteur du recel d’obtenir un pouvoir de disposition sur la chose, que ce soit à titre onéreux ou gratuit612. L’acte de dissimulation consiste à rendre plus difficile, voire impossible au moins temporairement, la découverte de la chose. Selon la doctrine et la jurisprudence, commet un recel en dissimulant une chose celui qui l’apporte dans un endroit inattendu, par exemple chez lui613. Est également considéré comme receleur celui qui aide à négocier pour rendre la découverte d’un bien plus difficile, en participant ou collaborant à son aliénation en indiquant, par exemple, à l’auteur de l’infraction préalable, le nom d’un acquéreur potentiel614.

609 HURTADO POZZO, Droit pénal, ad art. 139 CP N 900 ss ; CORBOZ, Les infractions, ad art. 139 CP N 9 s.

610 Pour plus de précisions sur la notion d’enrichissement illégitime, voir CORBOZ, Les infractions, ad art. 138 CP N 10 ss et STRATENWERTH/JENNY p. 271 N 32 ss ; BaK-NIGGLI/RIEDO, ad art. 139 CP N 70 ss.

611 Pour une analyse des différentes circonstances aggravantes, voir BaK-NIGGLI/RIEDO, ad art. 139 CP N 78 ss.

612 HURTADO POZZO, Droit pénal, ad art. 160 CP N 1578 ss ; CORBOZ, Les infractions, ad art. 160 CP N 27.

613 CORBOZ, Les infractions, ad art. 160 CP N 34 ss.

614 CORBOZ, Les infractions, ad art. 160 CP N 39 ss.

482. Le receleur est punissable car il perpétue une situation illégale en rendant plus difficile le rétablissement d’une situation initiale et conforme au droit ainsi qu’en rendant plus difficile la récupération du bien par son ayant droit615. Il n’est pas nécessaire que l’ayant droit ait réellement subi un dommage supplémentaire dû au recel. Il s’agit d’un délit de mise en danger abstraite616.

483. Le recel doit porter sur un objet corporel mobilier ou immobilier617. Une infraction préalable portant sur une infraction contre le patrimoine est nécessaire à la réalisation de l’acte de recel.

Il ne doit pas forcément s’agir d’une infraction classée comme telle dans le code pénal, il suffit qu’elle soit dirigée contre le patrimoine d’autrui et qu’elle donne au lésé un droit à la restitution. Le recel constitue en effet une atteinte au droit de récupérer la chose618.

484. Si l’infraction préalable a eu lieu à l’étranger, elle doit être considérée comme infraction contre le patrimoine aussi bien par le droit étranger que par le droit suisse. Il n’est pas nécessaire que l’auteur de l’infraction préalable soit responsable de ses actes, ni que cette infraction soit poursuivable en Suisse, pour autant que l’acte constitue une infraction en droit suisse619.

485. Le receleur, contrairement au blanchisseur, ne peut pas être l’auteur de l’infraction principale620. L’auteur du recel doit non seulement accomplir l’acte de recel de manière intentionnelle, mais il doit encore savoir que la chose provient d’une infraction contre le patrimoine. Le dol éventuel621 suffit car l’article 160 CP prévoit la formule « dont il savait ou devait présumer [...] ». Il suffit que le receleur ait des doutes quant à l’origine de la chose ou au vu des circonstances entourant la transaction pour qu’il puisse imaginer l’existence d’une infraction préalable. Tel peut être le cas, particulièrement en matière de biens de valeur élevée, lorsque le prix d’achat est manifestement bas622. La commission par négligence n’est en revanche pas réprimée.

615 CORBOZ, Les infractions, ad art. 160 CP N 3.

616 CORBOZ, Les infractions, ad art. 160 CP N 2. ; KILLIAS/KUHN/DONGOIS/AEBI, N 216.

617 Pour plus de précisions, voir CORBOZ, Les infractions, ad art. 160 CP N 6 et les références mentionnées.

618 BaK-WEISSENBERGER, ad art. 160 CP N 26, CORBOZ, Les infractions, ad art. 160 CP N 9 s. et N 15 ; ATF 127 IV 79 cons. 2 a, b, et c. La doctrine va même jusqu’à affirmer qu’il peut y avoir recel d’une somme d’argent obtenue par une séquestration, un enlèvement ou par une prise d’otage malgré le fait que le bien juridique protégé ne soit pas le patrimoine mais la liberté d’autrui.

619 BaK-WEISSENBERGER, ad art. 160 CP N 21 ss ; CORBOZ, Les infractions, ad art. 160 CP N 10 ss.

620 BaK-WEISSENBERGER, ad art. 160 CP N 19 ; ATF 126 IV 255 cons. 3.

621 Pour une analyse complète de la notion de dol éventuel, voir SCHUBARTH, Dolus eventualis, p. 519 ss.

622 CORBOZ, Les infractions, ad art. 160 CP N 46 ss ; BaK-WEISSENBERGER, ad art. 160 CP N 69.

486. Par ailleurs, celui qui entre en possession de bonne foi d’un bien sans connaître son origine illicite et qui l’apprend uniquement par la suite (dolus subsequens) ne peut pas être puni de recel, car nul ne peut receler son propre bien (une chose mobilière dont il est devenu propriétaire)623. Ce constat doit cependant être nuancé. Ce n’est qu’en cas de chose confiée (art. 933 CC) ou de transfert de monnaies et de titres au porteur (art. 935 CC) que l’acquéreur est protégé dans sa bonne foi. Dans le cas où la chose n’est pas confiée mais qu’elle a été acquise de bonne foi, le propriétaire apprenant par la suite son origine illicite peut être puni de recel s’il l’aliène ou s’il continue de dissimuler le bien en le gardant624. Toutefois, s’il apprend l’origine illicite du bien une fois le délai de 30 ans écoulé (art. 728 ou 934 CC), alors qu’il était de bonne foi durant toute cette période, il ne commettra pas de recel en cédant le bien. Le recel d’un bien ayant fait l’objet d’une infraction n’est en effet plus possible une fois qu’un tiers acquéreur de bonne foi en est devenu propriétaire625. Toujours est-il que le tiers devenu propriétaire est tenu, dans le cas où il est considéré comme marchand d’art, au devoir de diligence de l’article 16 LTBC. Ainsi, s’il apprend l’origine illicite du bien, il ne pourra pas l’aliéner sans encourir la peine prévue par l’article 25 al. 1 lit. a LTBC626.

487. Le receleur est puni d’une peine privative de liberté de 5 ans au plus ou d’une peine pécuniaire (art. 160 al. 1 CP). Il encourt la peine prévue pour l’infraction préalable si cette peine est moins sévère. Le recel par métier est une circonstance aggravante (art. 160 al. 2 CP).

Le délai de prescription du recel ne peut par ailleurs être plus long que celui de l’infraction préalable627. Cela étant, comme le recel est une infraction indépendante, il est possible que le délai de prescription de l’infraction préalable soit échu alors que celui du recel ne l’est pas encore compte tenu des dates de commission, le recel ayant été réalisé ultérieurement628. 488. L’on peut se demander si un bien culturel illicitement exporté peut être recelé. Il faudrait pour

ce faire que l’on considère l’exportation illicite comme une infraction contre le patrimoine.

Nous l’avons vu629, une infraction contre le patrimoine est une infraction à l’encontre du patrimoine d’autrui générant un droit à restitution. L’acte de recel constitue en effet une

623 BaK-WEISSENBERGER, ad art. 160 CP N 71.

624 BERTOSSA, p. 74 ; CORBOZ, Les infractions, ad art. 160 CP N 50 ; BaK-WEISSENBERGER, ad art. 160 CP N 71 ss et les references mentionnées.

625 CORBOZ, Les infractions, ad art. 160 CP N 21 ; ATF 90 IV 14 ; ATF 105 IV 303, JdT 1981 IV 77.

626 Voir infra N 630 ss.

627 Pour plus d’informations sur les délais de prescription voir les articles 97 ss CP et CP-KOLLY, ad art. 97 ss CP.

628 CORBOZ, Les infractions, ad art. 160 CP N 56 s. La question de la prescription de l’infraction préalable reste controversée certains auteurs jugeant que le receleur n’est pas punissable si l’infraction préalable est prescrite, voir BaK-WEISSENBERGER, ad art. 160 CP, N 78 ss et les références citées.

629 Voir supra N 483 ss.

atteinte au droit de récupérer son bien630. Rappelons également que si l’infraction préalable a lieu à l’étranger, il est nécessaire qu’elle soit reconnue comme infraction contre le patrimoine autant par le droit suisse que par le droit étranger631. Dans l’hypothèse où l’Etat d’origine est propriétaire direct du bien, cela ne pose a priori pas de problème, pour le moins dans l’examen de la double incrimination dans le cadre de la « petite entraide », car l’Etat d’origine dispose d’un droit de propriété sur son patrimoine à l’instar d’un particulier. Un bien inscrit à l’inventaire fédéral illicitement exporté pourrait alors théoriquement être recelé dans un autre Etat, car l’exportation illicite serait considérée comme l’infraction préalable portant atteinte au patrimoine de la Confédération (art. 3 LTBC).

489. Il n’est cependant pas certain que l’Etat sur le territoire duquel le bien est importé reconnaisse la législation suisse interdisant l’exportation de tels biens (art. 3 al. 2 lit.c LTBC et art. 5 LTBC)632. Cela n’a néanmoins que peu d’importance car dans cette hypothèse, d’autres infractions seront généralement également commises, par exemple le vol ou l’appropriation illégitime. L’Etat sur le territoire duquel le bien est importé pourra dès lors restituer le bien sur cette base, le droit de propriété de la Confédération n’étant pas remis en question.

490. La situation est en revanche plus compliquée dans l’hypothèse d’une exportation pure, c’est-à-dire lorsque le propriétaire du bien exporte ce dernier en violation de la législation nationale. Pour que l’exportation illicite soit considérée comme étant l’infraction préalable, il faut que l’Etat sur le territoire duquel le bien est importé, puis recelé, reconnaisse (i) le droit de propriété « latent »633 de l’Etat d’origine au détriment de celui du propriétaire privé, (ii) qu’il considère que l’exportation du bien porte atteinte au patrimoine culturel de l’Etat d’origine et (iii) qu’il applique la législation étrangère sur la protection du patrimoine.

491. L’appréciation de ces critères dépendra sans doute du contenu de la législation de l’Etat d’origine - notamment en ce qui concerne le droit de propriété de l’Etat -, et du type de biens (inscription ou non à un inventaire, degré d’importance pour le patrimoine, etc.)634. Cela étant, nous sommes d’avis, pour le moins en ce qui concerne la Suisse, que ces trois éléments ne seraient aujourd’hui que difficilement pris en considération pour pouvoir considérer une exportation illicite comme une infraction préalable au recel, même dans le cadre d’une

630 CORBOZ, Les infractions, ad art. 160 CP N 10.

631 Voir supra N 483.

632 Précisons à ce sujet que l’article 6 LTBC prévoit expressément une action par laquelle le Conseil fédéral peut faire valoir le droit au retour d’un bien illicitement exporté inscrit à l’inventaire fédéral. La question de la reconnaissance des dispositions de la LTBC par l’Etat sur le territoire duquel se trouve le bien reste toutefois ouverte.

633 Voir supra N 39 s.

634 Voir également l’analyse de l’article 24 al. 1 lit. d LTBC infra N 553 ss.

procédure d’entraide. Ainsi par exemple, si le propriétaire italien d’un tableau de la Renaissance sort son œuvre d’Italie en violation de la législation italienne et le vend à un collectionneur, ce dernier ne pourra que difficilement être considéré comme receleur même s’il avait connaissance de l’exportation illicite du bien. Pour ce faire, il serait nécessaire que les autorités suisses considèrent l’exportation illicite comme une infraction préalable. Cela ne

procédure d’entraide. Ainsi par exemple, si le propriétaire italien d’un tableau de la Renaissance sort son œuvre d’Italie en violation de la législation italienne et le vend à un collectionneur, ce dernier ne pourra que difficilement être considéré comme receleur même s’il avait connaissance de l’exportation illicite du bien. Pour ce faire, il serait nécessaire que les autorités suisses considèrent l’exportation illicite comme une infraction préalable. Cela ne