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illicite de biens culturels

B. Les autorités douanières

234. Les autorités douanières jouent un rôle fondamental dans la bonne exécution de la LTBC car elles se trouvent au cœur des importations et des exportations de biens culturels. Le contrôle aux frontières de la licéité des transferts de biens culturels constitue la première mesure d’application concrète des législations portant sur la protection des biens culturels356.

235. Les compétences et les tâches des autorités douanières sont décrites à l’article 19 LTBC. Cet article complète la LD. Selon l’article 19 al. 1 LTBC, les autorités douanières doivent contrôler le transfert de biens culturels aux frontières suisses. Elles vérifient la régularité de l’importation et de l’exportation en exigeant la présentation d’une déclaration douanière conforme aux exigences de l’article 25 OTBC. Chaque personne voulant faire passer un bien

353 Les marchands d’art et les personnes pratiquant la vente aux enchères n’ont en revanche pas le devoir de collaborer de la même manière avec les autorités douanières et les autorités de poursuite pénale, comme le prévoyait le projet de la LTBC.

354 Pour une description plus précise des différentes tâches du service spécialisé, voir GABUS/RENOLD, ad art. 2 al. 4 LTBC N 28 à 34 et ad art. 18 LTBC N 1 à 17.

355 Nous relevons que le même problème se pose en matière fiscale. Le contribuable doit en effet collaborer avec l’autorité même qui contrôlera sa déclaration d’impôts et qui le dénoncera en cas d’erreur ou de fraude, voir RYSER/ROLLI, N 460 ss.

356 KKR-WIDMER/FISCHER, chap. 6 N 284 s.

culturel au travers des frontières suisses a l’obligation de le déclarer357. La déclaration douanière doit contenir les informations suivantes :

- l’indication du type d’objet ;

- le lieu de fabrication du bien culturel et

- le lieu de découverte du bien dans l’hypothèse où il s’agit d’un produit issu de fouilles archéologiques.

236. L’article 1er OTBC complète de manière précise le contenu de ces trois informations devant figurer sur la déclaration douanière. En revanche, ne doivent être mentionnés, ni le nom du propriétaire du bien, ni celui du détenteur économique358.

237. La procédure de dédouanement se déroule de la même manière que pour les autres types de marchandises, conformément à la législation douanière (art. 23 OTBC).

238. A teneur de l’article 19 al. 2 LTBC, les autorités douanières sont habilitées d’une part, à retenir les biens culturels suspects lors de leur passage à la frontière (art. 104 LD) et, d’autre part, à dénoncer les faits aux autorités de poursuite pénale, qui peuvent, le cas échéant, ordonner le séquestre de ces biens (art. 20 LTBC)359.

239. La notion de biens suspects n’est pas définie par la loi. Selon la doctrine360, les biens sont considérés comme suspects lorsque les autorités douanières soupçonnent sur la base d’éléments concrets qu’ils font l’objet d’une infraction à la loi (art. 24 LTBC). Ce cas se présente par exemple lorsque le bien provient d’un pays avec lequel la Suisse a conclu un accord bilatéral et qu’au vu des circonstances l’importation paraît contrevenir à l’accord361. En cas de doute sur la licéité du bien, les autorités douanières doivent contacter le service spécialisé.

240. Depuis l’entrée en vigueur de la LTBC en 2005, ce dernier a été sollicité environ 300 fois par les douanes pour des questions d’interception de biens culturels suspects. Le service spécialisé

357 Art. 28 LD et KKR-WIDMER/FISCHER, chap. 6 N 329 s.

358 GABUS/RENOLD, ad art. 19 LTBC N 9 ss.

359 L’Administration fédérale des douanes à dénoncé environ 20 transferts illégaux par année aux autorités cantonales de poursuites pénales depuis l’entrée en vigueur de la LTBC en 2005, voir GUMY, p. 79.

360 KKR-WIDMER/FISCHER, chap. 6 N 307 ss ; GABUS/RENOLD, ad art. 19 LTBC N 4 ss.

361 Pour un aperçu détaillé de la procédure douanière en cas de doute sur l’origine du bien voir GUMY, p. 78 s. ; GABUS/RENOLD, ad art. 19 LTBC N 5.

a confirmé dans 75 cas l’origine douteuse du bien, ce qui a engendré des poursuites pénales cantonales (art. 27 LTBC)362.

241. Selon les articles 114 ss LD, les autorités douanières sont également habilitées à transmettre des informations en Suisse et à l’étranger lorsqu’un traité le prévoit par la voie de l’assistance administrative ou de l’entraide judiciaire internationale en matière pénale sur la base de l’article 30 DPA363.

242. Notons également que l’Administration fédérale des douanes est habilitée à poursuivre elle-même les infractions pénales à certaines conditions (art. 128 et 117 ss LD).Elle est ainsi à même de requérir l’entraide judiciaire en Suisse, pour les enquêtes qu’elle instruit elle-même (art. 30 DPA). Lorsqu’elle souhaite adresser une requête à des autorités étrangères, cette dernière est transmise par le biais de l’Office fédéral de la justice. L’Office fédéral de la justice peut confier l’exécution d’une demande étrangère à l’Administration fédérale des douanes (art. 17 al. 4 EIMP). L’Administration fédérale des douanes doit également accorder l’entraide aux autorités de poursuite pénale (art. 43 ss du code de procédure pénale suisse) 364. 243. En août 2008, les autorités douanières de l’aéroport de Zurich ont saisi, lors d’un simple

contrôle douanier, un carnet d’esquisses de Picasso caché dans les bagages d’un voyageur.

Les 14 dessins se trouvant dans le carnet étaient estimés entre 31’000 et 310’000 CHF pièce.

Comme le voyageur n’avait pas déclaré ces biens et qu’il n’était pas en mesure de présenter des pièces justificatives, l’Administration fédérale des douanes a dénoncé les faits aux autorités de poursuite pénale cantonales conformément à l’article 19 al. 2 LTBC365.

244. La contrebande de biens culturels représente des sommes d’argent considérables. Selon les statistiques de 2006 de l’Administration fédérale des douanes, le volume d’importation d’objets d’art, d’antiquités et d’autres objets de collections s’est monté à 1’554 milliard CHF et le volume d’exportation à 1’221 milliards CHF366.

362 KKR-WIDMER/FISCHER, chap. 6 N 337 ss ; WIDMER, p. 84 ; Communiqué de presse de l’OFC du 19 juin 2008, Les principaux axes d’action de l’OFC pour 2008-2009, www.admin-news.ch. Selon le rapport de l’Office fédéral de la culture pour l’année 2009.

363 GUMY, p. 79 ss.

364 Voir aussi, pour les principes, GUMY, p. 81 ss. Voir aussi N 862.

365 Communiqué de l’Office fédéral de la culture du 15 octobre 2008.

366 WIDMER, p. 84 ; Statistiques du commerce extérieur, Administration fédérale des douanes.