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I-I Lois et mesures législatives relatives à l’indemnisation des victimes

du terrorisme :

Nous nous intéresserons d’abord à définir deux notions importantes pour dresser ce cadre législatif

1. Le dédommagement

Le terme « dédommagement » est défini dans le dictionnaire de l’académie française comme « Réparation d'un dommage. Il faut tant pour mon dédommagement. » (41)

Ce terme est synonyme d’ « indemnisation » qui est elle même définie dans le même dictionnaire comme suit : « Indemniser. a. Dédommager, payer les dommages. Il a agi en vertu de votre procuration, c'est à vous de l'indemniser. Il faut l'indemniser des pertes dont il a souffert. Vous serez condamné à l'indemniser » (42)

Tandis que dans le dictionnaire des sciences sociales, le terme dédommagement est défini comme suit : « Dans la législation du travail et de la sécurité sociale, c’est un montant versé en une seule fois ou en versements périodiques pour indemniser une invalidité temporaire ou permanente résultant d'un accident du travail. » (43)

Généralement, le dommage est considéré comme un élément clé pour l'établissement de la responsabilité.

Tous dommage que subit un individu, qu’il soit physique ou financier, et qui cause une perte ou un manque à gagner vis à vis d’un projet légitime, signifie, dans le domaine de la criminalité terroriste : l’exposition de la personne dans ses intérêts légitimes liés à ses biens.

La règle générale du droit civil a toujours stipulé la compensation des dommages, quel que soit le type du dommage causé, physique ou mental. (44)

Le dédommagement est un moyen d’éliminer le dégât, ou de l’atténuer, si l’élimination est impossible, moyennant généralement une indemnisation financière.

(41) Dictionnaire de L'Académie française. P :874.

(42) Dictionnaire de L'Académie française. P :1667. (43) Dictionnaire des termes des sciences sociales P.75.

(44) FAHMI, Khaled Mostafa (2008), Compenser les victimes du terrorisme, Alexandrie, Dar AL-Fekr Jamai, 1re éd. P : 38.

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La loi divise le dommage en deux types : un dommage physique, ce qui signifie une perte d'argent, ou la privation des moyens de gagner de l'argent, qui porte atteinte aux intérêts de la victime et s’accompagne d’une perte financière. L’autre type de dommage est le préjudice moral, par exemple la souffrance psychologique ressentie par la victime, qui peut donner lieu à une blessure physique infligée à son corps, ou encore un préjudice moral qui porte atteinte à sa dignité et à son honneur. (45)

2. La responsabilité des États dans la compensation des dommages auprès

des victimes de crimes : une évolution historique favorable

L'idée de compenser les victimes de la criminalité par l’action de l’Etat est apparue au début du XIXe siècle, lorsque le philosophe anglais « Jeremy Bentham » a préconisé la nécessité de compenser les dommages subis par les victimes des crimes grâce à l’action de l’Etat, dans le cas d’insolvabilité de l’auteur du crime ou si ce dernier reste inconnu. Cette idée émane du fait que l’Etat a une obligation de fournir protection et sécurité aux membres de la communauté ; et s’il a échoué dans cette mission, il doit alors indemniser les victimes. (46)

Une série de conférences internationales a examiné et approuvé la question de l'indemnisation des victimes d'actes criminels par l’Etat.

La première d’entre elle fut le Congrès pénitentiaire international, tenu à Paris en 1895, lors duquel « Adolf Branz » a rappelé, dans son rapport, que le temps était venu pour l’état, de s’intéresser aux victimes, et de prendre en compte leurs conditions de vie. On sait que le délinquant a droit à l’intérêt et aux soins de l’Etat qui lui fournit nourriture et abri, des vêtements, lui garantit une prise en charge de sa santé, lui assure une formation, et lorsqu’il sort de prison, lui donne une somme d'argent perçue comme un salaire pour son travail carcéral. Alors que si on laisse la victime seule et dans la souffrance du crime subi, ceci peut être considéré comme une contribution directe ou indirecte à la réhabilitation du délinquant, assurée de plus par les impôts que payent les victimes à l’état. (47)

Ensuite, pendant le le Congrès pénitentiaire international de Bruxelles tenu durant l’année 1900, l’anglais « Willam Tallack » a présenté un rapport qui indique qu’il incombe à l’état le devoir de supporter l'indemnisation des victimes dans les cas où la victime ne peut pas

(45) Ibid. P :115.

(46) Martin, D (1983), Livre blancs sur l'indemnisation des victimes d'infractions, Huy, A.S.B.L. Aide et Reclassement, Bruxelles, fondation Roi Baudouin. P:17.

(47) William TALLACK (1996), Reparation to the injured and the rights of the victims of to compensation.

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obtenir une indemnisation de la part du criminel en raison de son insolvabilité ; il a de plus précisé un moyen d’indemnisation avec les amendes pénales obtenues par l'État grâce à ses dispositions pénales.

Cette idée n’a pas connu de succès à l’époque. En effet deux guerres mondiales se sont succédées avec les effets que l’on sait, Ce n’est qu’avec l’anglaise « Margherite Ferari » qu’est signifiée, en 1957, la nécessité de la création d’un système qui garantirait le paiement d'une indemnité à la victime. Margherite Ferari a suggéré de plus que ce système soit financé par une taxe levée auprès de chaque citoyen adulte, d’un montant d’un penny (équivalent de dix centimes d’euro) par an, ce qui ne constitue pas un lourd fardeau sur le revenu des particuliers, mais possède l’avantage de faciliter l’allègement de la souffrance des victimes.

Cette idée a été largement saluée par tous les courants de la société de l’époque et constitue la première action qui a favorisé ce système d’indemnisation par l’Etat au point qu’il sera appliqué concrètement. Ceci incitera aussi plusieurs pays à la création d’un fonds pour indemniser les victimes. (48)

Les conférences internationales sur ce sujet se sont ensuite succédées et on peut citer par exemple la conférence de Los Angeles, en 1968, qui a recommandé que l’Etat doit indemniser les victimes. On considère alors qu’il s’agit d’un droit et non seulement d’une subvention.

Ensuite, la deuxième conférence internationale d’indemnisation des victimes s’est tenue au Canada, en Ontario, en 1973, et succède au premier « Symposium International sur la Science de la Victime » en Palestine en 1973, qui traite de l'indemnisation des victimes. A l'issue de plusieurs sessions, des recommandations sont publiées. Parmi celles –ci : les États doivent prendre en compte la question de l'établissement de systèmes d'indemnisation des victimes d'actes criminels. (49)

Ensuite, le Congrès international du droit pénal, qui s’est déroulé à Budapest, en 1974, a recommandé que la compensation de la part de l’Etat pour les victimes soit considérée en tant que droit et non plus seulement en tant que prime ou subvention. (50)

(48) Zidane, ZAKI HOUSSEIN (s.d), Le droit de la victime à l’indemnisation, Alexandrie, Dar Fekr Jamais. P :

190-191

(49) Fakhi, Adel Mohamed, Les droits de la victime par rapport à la Charia Islamique ; Thèse de doctorat ; Le Caire, Université Ain Chams, 1984. P : 266.

(50) Mostafa, Mahmoud Mahmoud (s.d), Les droits des victimes dans le droit comparé, Imprimerie de l’université du Caire, 1re éd.P : 126.

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Puis l’assemblée générale des Nations Unies a publié une déclaration (Milan, 1985) qui représente une victoire morale pour les droits fondamentaux des victimes. Comme indiqué dans l’article n° 12 de cette Déclaration, l'indemnisation des victimes est ainsi prévue par l'Etat :

« 12. Lorsqu'il n'est pas possible d'obtenir une indemnisation complète auprès du délinquant ou d'autres sources, les Etats doivent s'efforcer d'assurer une indemnisation financière :

a - aux victimes qui ont subi un préjudice corporel ou une atteinte importante à leur intégrité physique ou mentale par suite d'actes criminels graves.

b - à la famille, en particulier aux personnes à la charge des personnes qui sont décédées- ou qui ont été frappées d'incapacité physique ou mentale à la suite de cette victimisation. »

Quant aux compensations psychologiques et sociales aux victimes de la criminalité, qui sont le cœur de cette étude, elles sont citées dans la Déclaration de Milan, en 1985, dans les articles (14-15) comme suit :

« 14. Les victimes doivent recevoir l'assistance matérielle, médicale, psychologique et sociale dont elles ont besoin par la voie d'organismes étatiques bénévoles, communautaires et autochtones.

15. Les victimes doivent être informées de l'existence de services de santé, de services sociaux et d'autres formes d'assistance qui peuvent leur être utiles, et doivent y avoir facilement accès. » (51)

La première conférence arabe à cet égard est la quatrième semaine de la jurisprudence islamique (Tunisie 1974) pendant laquelle des discussions sur la question de l'indemnisation par l'Etat des victimes ont eu lieu. On y a également évoqué le principe islamique bien connu selon lequel "Aucun droit n’est perdu en Islam." (52)

Cette conférence sera suivie de la troisième Conférence de l’association égyptienne de droit pénal (Le Caire, 1989), qui indique : "l'obligation de l'État à indemniser la famille de la victime en cas de décès ou d'invalidité, si la justice n’a pas identifié l’auteur ou s’il est en fuite, et ce conformément aux dispositions de la charia islamique. (53)

Dans les sections suivantes, nous examinerons les lois d’indemnisation des victimes du terrorisme dans les systèmes français, égyptien, algérien, ainsi que les règlements législatifs en Arabie Saoudite. Ce pays est en effet l'un des états qui a beaucoup souffert du terrorisme. Cet

(51) 7ième congrès des nations unis pour la prévention du crime et la justice pénale, Milan, 1985.

(52) Mustafa Mahmoud Mahmoud (1987) : « les droits des victimes dans les procédures pénales dans la loi et la

charia », Revue de recherche économique et juridique de l'Université de Mansoura, N° 2. P : 3.

(53) Les droits des victimes dans les procédures pénales, la troisième Conférence de l’association égyptienne de

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état de fait nécessitait la promulgation de lois pour garantir les droits des victimes à l'indemnisation.

I- II Les différents systèmes nationaux et leurs spécificités :

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