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6. DE LA THÉORIE SOCIALE À LA THÉORIE SOCIOCOGNITIVE DE BANDURA

6.2 La théorie sociocognitive

L’essentiel de la théorie sociocognitive de Bandura (2003) se résume par le fait que les êtres humains sont considérés comme des agents auto-organisateurs, proactifs, autoréfléchis et autorégulés, constamment en train de négocier leurs actions, leurs projets avec leurs environnements.

La théorie de Bandura (2003) est considérée comme appartenant à la sous- discipline de la psychologie sociale compte tenu des interactions tripolaires entre la personne, son comportement et son environnement et comme psychologie cognitive, avec la capacité de symbolisation de l’expérience permettant aux personnes de donner un sens et une continuité à leur vie.

Selon Brewer (2008), la théorie sociale cognitive est l’une des seules théories “ englobantes ” qui survivent au début du XXIe siècle. Celle-ci dépasse les grands modèles qui ont marqué la psychologie tout au long du XXe siècle (sociostructuralisme, psychanalyse, behaviorisme), tout en intégrant certaines de leurs influences dans une conception bio-socio-psychologique ouverte.

Bandura a su bâtir et articuler une théorie globale authentiquement dialectique de l’individuel et du social. Il s’agit d’un cadre épistémologique qui est, par essence, une pensée de l’interaction, ouverte à différentes “ entrées ” scientifiques et accueillante à des collaborations interdisciplinaires avec, par exemple, la sociologie, la psychologie clinique ou les neurosciences. (Ibid., p. 6)

Nous proposons d’explorer les composants de la théorie sociale cognitive. Les travaux de Bandura (2003), mettent en évidence que l’agentivité humaine est entendue comme la capacité d’influence sur soi, sur les autres et sur le monde et opère selon une structure causale interdépendante nommée causalité triadique réciproque. Selon l’auteur, les facteurs personnels internes (cognitifs, émotionnels, biologiques), les comportements de la personne et l’environnement sont en interaction et s’influencent réciproquement. Cette théorie s’oppose à une réactivité mécanique de l’individu à son environnement.

Dans la théorie sociocognitive, le fonctionnement psychologique est donc analysé à travers ce modèle triadique.

Bandura (2003) met en évidence trois séries de facteurs qui entrent en interaction deux à deux :

Les facteurs internes à la personne (P) concernent les événements vécus aux plans cognitif, affectif, biologique et leurs perceptions par le sujet (en particulier les perceptions personnelles d’efficacité (ou de compétence), les buts cognitifs, le type d’analyse et les réactions affectives vis-à-vis de soi-même. Les déterminants du comportement (C) décrivent les patterns d’actions effectivement réalisées et les schémas comportementaux. Les propriétés de l’environnement social et organisationnel, les contraintes qu’il impose, les stimulations qu’il offre et les réactions qu’il entraîne aux comportements représentent le déterminant environnemental (E). (Carré, 2004, p. 32)

Figure 1

Déterminismes réciproques de la théorie sociocognitive de Bandura (1986, 2003)

P C E P = Personne C = Comportement E = Environnement

Pour Bandura (2003), parler de causalité triadique réciproque implique que les trois facteurs agissent selon des combinatoires variables, à travers une causalité généralement bidirectionnelle et dans des proportions différentes selon les situations de vie. En effet, ce modèle de causalité triadique et réciproque n’implique ni que chacun des trois facteurs intervienne avec la même force dans une situation donnée ni que les trois facteurs soient concernés en même temps. La bi-directionnalité de l’influence signifie aussi que les personnes sont à la fois produits et productrices de leur environnement (Wood et Bandura, 1989) .

6.2.1 La relation personne-comportement

La spécificité de l’étude de cette relation est aujourd’hui devenue l’objet de la psychologie cognitive. « Il est question de chercher à savoir comment les conceptions et croyances personnelles, les perceptions de soi, les aspirations et les intentions façonnent et orientent les comportements » (Carré, 2004, p. 35).

C’est dans cette relation que se localise « l’étude des auto-réactions et des auto-évaluations du sujet en formation quant aux expériences qu’il/elle vit ou a vécu dans un cadre éducatif » (Ibid.).

6.2.2 La relation environnement-personne

La spécificité de l’étude de cette relation est l’objet de la psychologie sociale où l’on étudie les modalités d’interaction entre la personne et son environnement (Ibid.).

Dans la relation E → P, l’objet consiste à chercher à mieux comprendre l’action de l’environnement sur les conceptions personnelles, à travers les mécanismes de la persuasion, du modelage, de l’instruction et les effets des feed-

back environnementaux sur les processus affectifs et cognitifs (attitudes,

motivation, mémorisation, émotion, etc.) (Ibid.).

Pour le segment P → E, c’est l’inverse. On souhaite illustrer les effets de la perception du sujet par l’environnement (Ibid.).

6.2.3 La relation environnement-comportement

Bandura (2003) met en évidence que dans la vie quotidienne, nous transformons couramment nos environnements par nos conduites (C→ E), en agissant sur les personnes ou les choses qui nous entourent avec le but (conscient ou non) de les transformer (5). Ainsi, notre action sur l’environnement, à son tour, produit des effets sur notre comportement (6), en un processus de causalité circulaire qui a été souvent observé.

En agissant, les personnes forment des représentations anticipatrices des conséquences de leurs actions qui codéterminent leurs réponses.

Comme nous pouvons le constater, il existe des influences différenciées des facteurs environnementaux, comportementaux et personnels-cognitifs selon

la situation.

Pour Bandura (2003), toute personne peut influencer son comportement en agissant sur ses motivations et par l’anticipation de la conséquence de ses choix. Pour l’auteur, les individus contribuent causalement à leur fonctionnement psychosocial par des mécanismes d’agentivité personnelle, dont le plus important est la croyance d’efficacité personnelle. C’est cette croyance perçue qui joue un rôle important dans l’acquisition des structures de connaissances.

Nous percevons ici l’intérêt d’approfondir l’action du sentiment d’efficacité personnelle (SEP) sur les comportements.