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2.1 1975, parution de loi fondatrice de la gestion des déchets en France

2. La gestion des déchets : un système complexe

Le service de gestion des déchets peut être défini comme un système complexe. Comme nous l’avons déjà montré (Cf. Chap. 1, § III.B.2.1, p. 76), un objet complexe est constitué de quatre formes de complexité qui se retrouvent dans le service de gestion des déchets (Dauphiné, 2003) :

- une complexité structurelle : le service de gestion des déchets s’organise en fonction du type de déchets produits107. À chaque type de déchet correspond des acteurs, une réglementation, des process, des installations de traitement spécifiques. Le service de gestion des déchets combine donc un grand nombre d’éléments qui interagissent entre eux ;

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Seule une collecte organisée par pneumatique génère la réalisation d’une infrastructure linéaire spécifique au service de gestion des déchets. Cependant, ce mode de collecte est encore très peu développé.

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- la complexité d’échelle spatiale : le service de gestion des déchets est marqué par une diversité des échelles d’action. Au territoire d’extension des infrastructures physiques de traitement s’ajoute le territoire de gestion administrative du service (Prost et Le Gauffre, 1997). Ce dernier est constitué par le champ de compétences des acteurs impliqués dans l’organisation et la réalisation du service. À ce même niveau, il y a emboîtement des échelles, le service de gestion des déchets ménagers d’une commune n’a pas le même territoire administratif que celui des déchets d’une grande entreprise. Les pôles de décision ne sont pas les mêmes. Cette complexité est mise en avant par T. Prost et P. Le Gauffre : « On assiste à la fois : à une

extension du territoire technique pour ce qui est du traitement des déchets, principalement motivée par la recherche classique d’économies d’échelle dans les dispositifs d’incinération ou d’enfouissement (…) ; au maintien (d’une façon générale) du territoire communal comme échelle subsidiaire pour ce qui est de la collecte. Ceci est justifié par le fait qu’il n’y a pas d’économies d’échelle à attendre sur ce plan et que le coût de la collecte (véhicule, coûts de personnel) est proportionnel aux quantités collectées » (Prost et Le Gauffre, 1997). À cette

complexité de niveaux d’échelles s’associe donc une complexité des niveaux d’organisations ; - la complexité d’organisation : différents niveaux d’organisations se retrouvent imbriqués. Il

est en effet possible d’étudier le service à travers plusieurs prismes en fonction du producteur, des modes de traitement, de leur dangerosité, de leur nature. Une usine d’incinération est un système, mais également un objet d’un système supérieur ;

- le comportement imprévisible : l’évolution du service de gestion des déchets n’est pas linéaire. Il est en effet difficile de prévoir quelles pourraient être les conséquences d’une évolution du cours des matières premières sur le comportement des producteurs, ou de l’impact d’une nouvelle réglementation concernant l’enfouissement sur les stratégies de traitement des déchets mises en place par les communes. Les évolutions se font sur le temps extrêmement long et différents impacts sont susceptibles d’intervenir venant modifier fortement les comportements. Ainsi, par exemple, la loi de 1992 limitant l’enfouissement des déchets aux seuls déchets ultimes n’a pas modifié autant le comportement des communes en matière de traitement que l’aurait souhaité l’État à l’époque. Les évolutions qui ont eu lieu (diminution relativement faible de l’enfouissement, augmentation importante du recours à l’incinération) sont le fruit de multiples « influences » difficilement prévisibles.

Le service de gestion des déchets peut donc être défini comme un système complexe, c’est-à-dire comme un organisme composé de sous-systèmes qui interagissent entre eux et avec l’environnement extérieur en fonction d’une finalité qui, historiquement, est : « gérer les déchets pour rendre salubre la ville ».

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Pour décrire le service de gestion des déchets dans une approche systémique, son organisation a été décomposée. Le niveau de décomposition dépend de l’étude que l’on souhaite mener. Comme nous allons le voir, nous avons fait le choix de nous arrêter au niveau des infrastructures, les sous-systèmes des sous-systèmes « filières » du système « service de gestion des déchets ».

Nous procéderons en quatre étapes : nous délimiterons tout d’abord ses frontières en décrivant son environnement, nous présenterons ensuite son organisation générale ou réseau – service, puis son infrastructure ou réseau – support. Enfin, nous décrirons les territoires formés par ce système.

1.

Environnements

Définir l’environnement d’un système c’est d’abord s’interroger sur les raisons d’existence de ce système. Un système existe en effet parce qu’il répond à une attente, au besoin d’une structure plus large. Le service de gestion des déchets a été créé pour répondre au besoin de salubrité des sociétés urbaines. Ainsi, « à un premier niveau, le système (…) inclus dans un plus vaste environnement (…)

propose un projet compatible avec le « projet » supposé du grand système » (Mélèse, 1990). De

manière élémentaire, le premier environnement du service de gestion des déchets est le système urbain tel que nous l’avons décrit précédemment. Ainsi, « la ville, établissement humain producteur de

déchets, est amenée à se doter d’un système de gestion des déchets » (Villard-Vaudey, 1996). C’est

également un élément essentiel du système car c’est le producteur de déchets. Son activité et son fonctionnement génèrent les déchets que le système devra gérer.

Néanmoins, comme le montre J. Mélèse, un système peut être inscrit dans plusieurs environnements. Des organisations qui sont de réels partenaires (ou des adversaires), des organisations en position de pilotage, de tutelle ou de contrôle, des quasi-organisations, c’est-à-dire des organisations aux frontières floues, pas totalement délimitées108, ou des milieux, c’est-à-dire un ensemble d’éléments et de relations dont le nombre, la nature et les frontières restent flous (Mélèse, 1990). Outre le système urbain, le service de gestion des déchets s’inscrit dans plusieurs environnements (Tableau 9, p. 123).

Tableau 9 : Typologie des environnements du service de gestion des déchets Environnements du service de

gestion des déchets Organisations Quasi-organisations Milieux

Environnement physique Système urbain

Milieu physique Environnement organisationnel Autorités organisatrices, Autorités

régulatrices

Environnement économique Prestataires, Fournisseurs, Clients Marché mondial

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L’environnement physique, qui est celui du territoire urbain, dont nous avons déjà parlé, correspond également à celui plus large du milieu physique. Derrière ce terme générique, nous entendons les éléments du milieu naturel : l’eau, l’air, les écosystèmes (Cf. Chap. 1, § III.B.2.2, p. 76). Mais au-delà, nous entendons également un territoire plus vaste que celui du système urbain. En effet, la gestion des déchets dépasse souvent les limites de la ville. Les phases de valorisation et d’élimination se réalisent fréquemment en dehors de la ville, et parfois même, dans une autre région. Avec ce territoire d’importants échanges se réalisent.

Le service de gestion des déchets s’inscrit également dans un environnement organisationnel. Cet environnement correspond à l’ensemble des acteurs institutionnels qui interviennent dans la gestion des déchets. Il s’agit des autorités organisatrices qui regroupent plusieurs acteurs :

- les acteurs qui organisent la gestion des déchets qui peuvent être, comme nous l’avons vu précédemment, soit la commune (ou la structure intercommunale) pour les déchets ménagers et les déchets assimilés, soit le producteur pour l’ensemble des déchets des activités économiques et des services (à l’acception des déchets assimilés), soit un éco-organisme pour certains flux spécifiques (Cf. Tableau 8, p. 115) ;

- les planificateurs de la gestion des déchets à l’instar des Conseils généraux et des Conseils régionaux (Cf. Chap. 2, § II.B.3.1, p. 118) ;

- l’ADEME qui participe à son financement ou à son organisation à travers différents outils (Cf. Chap. 2, § II.B.3, p. 118).

En outre, l’environnement organisationnel comprend également les autorités régulatrices comme les organismes de contrôle (DREAL, DDT, ARS ou DDPP109), le législateur (État et Union européenne). Ces acteurs régulent, organisent et planifient la gestion des déchets. D’importantes relations s’établissent donc entre le service de gestion des déchets et ces acteurs.

Enfin, le service s’inscrit dans un environnement économique. La gestion des déchets est en effet très dépendante du contexte économique, et notamment du cours des matières premières. La définition d’un bien en déchet dépend notamment de la valeur économique que l’on lui porte (Cf. Chap. 2, § I.A.1, p. 88). Outre, cet aspect économique orientant la phase de traitement des déchets, le fonctionnement du système s’appuie également sur la sollicitation de prestataires et de fournisseurs.

Les producteurs sont présents dans l’environnement physique et l’environnement organisationnel. En effet, les déchets sont produits par les composants du système urbain (population, activité). Ce dernier importe des matières premières qu’il transforme en objets de consommation, ou des produits finis, qui,

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DREAL : Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement ; DDT : Direction départementale du territoire ; ARS : Agence régionale de santé ; DDPP : Direction départementale de protection de la population.

ensuite, deviennent déchet par leur mise au rebut par la population et les activités. Le système urbain est donc lui-même producteur de déchet. Mais les producteurs sont également l’autorité organisatrice de la gestion des déchets des activités. C’est pourquoi ils se retrouvent dans les deux niveaux d’environnement. Plus largement, plusieurs acteurs de l’environnement organisationnel et de l’environnement économique se retrouvent également compris dans le système urbain. Ils en sont les acteurs économiques ou politiques (commune, fournisseurs, prestataires, etc.). D’une manière générale, les environnements se superposent donc.

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