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Chapitre II : Représentations et parcours de la chanson en classe de FLE

I. La chanson, document authentique étudié en classe :

La chanson a fait l’objet d’innombrables études depuis plus de 40 ans (livres, manuels scolaires, articles, fiches de travail, etc.). En France, il est fourni un dispositif au potentiel qui favorise des options diverses, telles que la version « Génération française », « des clips pour apprendre », « in Bloom », etc., ainsi que les que les partenaires actifs comme TV5, le CAVILAM, le Bureau Export de la Musique, avec leurs sites respectifs et celui du Français dans le Monde.

I.1. Intégration de la chanson en classe

En réalité, la chanson n’est pas destinée à être utilisée pour enseigner-apprendre la langue. Mais avec la difficulté qu’éprouvent les enseignants pour transmettre la langue, notamment étrangère, les concepteurs, dont Jean-Louis Calvet (1989 : 20) ont contribué à la multiplication des méthodes et des approches. En fait, la chanson était parmi les outils proposés pour la didactisation des langues étrangères.

La chanson est la représentation de la langue mais une langue particulière qui est créée de la combinaison entre la langue et la musique. Jean Louis Calvet (1989 : 5).

Selon lui, la chanson joue trois rôles principaux dans la classe des langues : linguistique, psychologique et culturel.

a) Le rôle linguistique : par son contenu linguistique varié, la chanson intervient à développer le bagage linguistique de l’apprenant en lui conférant de nouveaux mots et structures syntaxiques (vu le style poétique des expressions).

b) Le rôle psychologique : le plaisir et la distraction sont des caractéristiques spécifiques à la chanson. En effet, elle permet de rire et de s’amuser en français.

c) Le rôle culturel : grâce à sa matière culturelle riche, la chanson francophone est un espace de découverte de la culture de l’autre.

I.2. La chanson et le FLE

L’enseignement du FLE se fait généralement par plusieurs méthodes. Parmi ces méthodes, on peut en citer deux « traditionnelle » et « alternative ». Sous l’angle de cette dernière, s’inscrit « l’apprentissage expérimental ». Cette méthode, par sa particularité peut donc s’appliquer sur l’apprentissage ludique (jeux de rôle, poésie, simulation…). Il nous semble donc possible d’ajouter l’utilisation de la chanson comme support didactique.

D’après Calvet (1989), l’approche expérimentale exige que l’apprentissage de la langue doive inclure tous les sens : la vue, l’ouïe, le toucher, l’odorat et le goût.

La chanson est introduite en classe de langues pour assurer l’interactivité dans l’apprentissage. En effet, elle provoque le désir d’apprendre caché à l’intérieur de tout apprenant. Grâce à ses pratiques authentiques et variées, la chanson, comme pourrait briser la méthode traditionnelle. Il suffit alors d’en saisir l’utilisation, dont les aspects sont divers. Brian Thompson trouve que « …la chanson peut jouer des rôles forts divers dans l’enseignement selon les besoins, les intérêts et les possibilités pratiques des enseignants et des apprenants »

L’utilisation de la chanson comme outil pédagogique date vers la fin des années soixante. En effet, l’approche communicative a facilité l’accès de la chanson en de classe pour des fins

pédagogiques. Dans ce contexte, il a été souligné dans le Français dans le monde (1967) n° 47 que

L’enseignement, lorsqu’il s’est intéressé à la chanson, s’est tourné surtout vers la chanson folklorique. Sans ignorer la richesse de la matière qu’elle propose, on ne peut laisser de côté tout l’apport de la chanson moderne

Plusieurs chercheurs, en prouvant son efficacité, ont sélectionné la chanson comme le lauréat des outils didactiques qui favorisent l’apprentissage de l’oral. On peut citer par exemple (Naddeo et Trama, 2000 ; Gajos, 2003) qui ont conçu des activités didactiques centrées sur cet outil. Dans ce contexte, Poliquin (1988 :1) affirme que la chanson devrait être un outil pédagogique sans pareil pour l’éducateur.

Selon les concepteurs, l’apprentissage en s’amusant a toujours été une source de motivation, qu’est un élément intrinsèque aux apprenants d’une langue étrangère. En effet, le divertissement contribue à réduire le stress et l’ennui dus aux situations d’enseignement-apprentissage du FLE.

Toutefois, pour qu’elle ne soit pas seulement un simple loisir pour les apprenants. La chanson doit exploiter tous les aspects de la langue : la phonétique, la grammaire, le lexique et notamment la compréhension et l’expression de l’oral.

I.3. Objectifs visés par l’introduction de chanson la chanson

Le travail avec la chanson pour enseigner le FLE pourrait se résumer dans les intentions suivantes :

 Rendre l’enseignement plus enthousiaste en rampant la monotonie.  Enrichir le vocabulaire et favoriser la syntaxe.

 Saisir les différents niveaux de langue (du familier jusqu’au soutenu)  Inciter l’apprenant à la lecture.

 Transmettre la culture et la civilisation de l’autre.

 Servir pour travailler la prononciation, la diction et le rythme.

I.4. La chanson folklorique et moderne

La chanson, étant un prétexte pour résoudre les obstacles de l’oral, peut également véhiculer la culture de l’autre et exercer les aptitudes linguistiques stockées chez l’apprenant.

Contrairement aux concepteurs et aux chercheurs, qui encouragent l’introduction de la chanson dans les programmes du FLE. Les enseignants, comme étant les réalisateurs et les libérateurs des compétences linguistiques chez les apprenants, ont du mal à pratiquer la chanson en classe, à mener une pratique chorale de la langue.

La chanson en classe peut remplir plusieurs fonctions : la compréhension, l’animation, l’expression et la mémorisation. Dans ce chapitre, nous allons tenter de mettre sous la loupe l’impact de la chanson sur ces pratiques qui nous paraissent indissociables.

Il nous semble qu’un protocole expérimental est donc exigé pour démontrer l’impact de la chanson sur les pratiques langagières, y compris évidemment la compréhension et la mémorisation : ces deux atouts indispensables pour tout apprentissage.

Comme l’approche communicative sollicite l’exposition des apprenants à des situations de communication authentiques ; ceux-ci se trouvent dans l’obligation d’améliorer leurs compétences à l’oral, à la fois (compréhension et expression). En ce sens, mieux vaudrait-il assurer le bain sonore (préparé sous forme de documents sonores authentiques) pour bien cerner la contrainte du blocage vis-à-vis de la langue étrangère.

Comme la rapidité des propos oraux pose un obstacle pour les apprenants du FLE, il serait préférable d’assurer une écoute répétée des chansons. Cela les familiarise au débit naturel de l’oral. Aussitôt, la chanson révèle l’aptitude de compréhension orale en facilitant l’accès au sens en fonction de son contexte général.

L’introduction de la chanson dans le processus d’apprentissage du FLE, permettrait aux apprenants de :

 Enrichir leur compte en vocabulaire courant, voire soutenu

 Inciter l’imaginaire des apprenants et nourrir les valeurs culturelles.  Travailler la diction

I.5. L’évolution de la chanson en classe de langue

La rencontre entre la chanson et la classe a eu lieu la première fois à la fin des années 50, avec l’apparition des chansons folkloriques « Alouette », « Auprès de ma Blonde » et autres qui ont offert aux enseignants une occasion en or pour éduquer leur mémoire et travailler la diction, ainsi de fournir des activités grammaticales grâce aux nombreuses répétitions du

texte, ce qui le rend utile. J.C Demari (2004) note que les pratiques de la chanson en classe se faisaient en choral pour garder la spécificité musicale.

A l’ombre de la méthodologie classique ou tructuro-globale, la chanson reste un simple texte-source d’exercices et un éventuel cours d’histoire de la civilisation. Dans ce sens, Marie-Thérèse de Julliot explique dans son article intitulé Le chant dans l’enseignement du français à l’étranger paru dans Le Français dans le monde n° 9, mai 1962, l’effet des exercices structuraux ôtés de la chanson sur la langue. Au début des années 80, d’autres chansons ont été conférées en faveur des classes par le communicatif Archipel (Hatier) telle que « A la claire fontaine », « Le temps des cerises »…

Vers les années 60, les enseignants sont passés de la chanson folklorique à la chanson à texte : le français fondamental trouve alors un nouvel usage avec l’arrivée de Brel, Ferrat, Béart et d’autres chanteurs qui, pour les enseignants, ont bouleversé la classe. Quoique ni la démarche ni les activités tirées de la chanson n’ont changé, la chanson moderne a contribué sa propre emprunte. C’est ce qu’affirme Robert Damoiseau (1967) :

L’enseignement, lorsqu’il s’est intéressé à la chanson, s’est tourné surtout vers la chanson folklorique. Sans ignorer la richesse de la matière qu’elle propose, on ne peut laisser de côté tout l’apport de la chanson moderne

En dissociant le texte et la mélodie, la chanson à l’époque comporte des lacunes ; rejetée par les jeunes Français, malgré son importante thématique d’actualité (l’adolescence, la famille, les loisirs…). L’été de 1969, Francis Debyser avec sa Lettre ouverte sur la chanson a combiné entre la chanson poétique et l’explication du texte ; ce qui a favorisé l’avancée du processus de la chanson comme outil didactique.

Dans une initiative, Debyser (1969) rejette la méthodologie traditionnelle appliquée aux textes littéraires pour la chanson (dissertation, commentaire composé…) pour appréhender la chanson en classe. Conséquemment, il suggère des exploitations pédagogiques au sein de la phonétique. En effet, la chanson est la meilleure placée pour exercer la phonétique corrective. Le choix du texte pour lui, se fait selon sa valeur culturelle.

Vers les années 80, la chanson connaît une évolution qualitative : l’écoute de la chanson devient un facteur indispensable. Lucette Chambard (1984) explique :

Réduire la chanson à un texte écrit, si riche qu’il puisse être, ce serait la stériliser sur le plan pédagogique en l’amputant de ce qui attire d’abord

l’étudiant, suscite de sa part une première appréhension globale et intuitive : la mélodie, le rythme, le choix des instruments, la couleur de la voix, la manière de chanter, porteurs de sens d’une autre façon que les mots, mais pourtant en rapport avec eux

Cette affirmation démontre la nécessité d’associer la parole, la musique et l’interprétation. C’est ce que soutient encore Jacques Pêcheur, ancien rédacteur en chef du Français dans le monde :

Nous avons alors pris en compte le fait que la chanson est une expression culturelle proche des étudiants, dans laquelle ils peuvent se reconnaître, ne serait-ce qu’au niveau musical. Et puis, il y avait aussi une volonté plus idéologique : donner du français une image vivante

Ces déclarations mettant en valeur les éléments extralinguistiques (voix, rythme, mélodie…), s’écoulent dans sens de la méthodologie communicative ; d’où l’apprenant est l’acteur principal.

Ces efforts pédagogiques associés aux travaux de Jean-Louis Calvet (ses articles sur la chanson « Chanson : quelle stratégie ? », « Chanson et Société » dans le Français dans le monde n°144) et avec l’arrivée des ministres de l’éducation et de culture à cette époque, ont collaboré à l’innovation des disques (par l’éditeur scolaire Hatier) en faveur des apprenants hors le cadre de la classe. Au début de la dernière décennie du XXe siècle, la pédagogie de la chanson abandonne la classe pour des raisons économiques. (La production et la concurrence font de la chanson un objet commercial).

I.6. La chanson comme texte littéraire

Comme la considèrent Cuq et Gruca (2009 : 436), la chanson

Comme la poésie, par son organisation strophique, ses refrains, ses rimes et son rythme, la chanson semble particulièrement bien convenir aux niveaux débutants et intermédiaire et plus apte aux réemplois de certains éléments d’acquisition que d’autres supports oraux ou sonores. Par ailleurs, il est possible de considérer la chanson comme un espace privilégié qui raconte la société et où la société se raconte.

La première représentation faite lors de la rencontre avec une chanson (écrite) révèle le poème autant que genre littéraire avec ses caractéristiques (rimes, strophe, refrain). Autrement dit, mis à part les facteurs de la mélodie et de la musique, la chanson semble un texte littéraire

ayant toutes ses propriétés esthétiques. Ce qui suppose encore l’exploiter dans une épreuve écrite, afin de transmettre les effets littéraires : genre, courant, thématique, expression poétique, figures de style et de rhétorique, le registre de langue, etc. C’est ainsi l’occurrence pour véhiculer les valeurs socioculturelles qui s’articulent autour de la chanson ; et dont sont indissociables. Sur ce ton, J. Deniot (2007) ajoute en envisageant la mission de la chanson.

Qu’elle soit de facture plus circonstanciée ou plus poétique, la chanson française s’apprécie à l’aune d’une prééminence affirmée d’un phrasé de la signification, sur les dimensions mélodiques et rythmiques. Elle est un chanter pour dire, tantôt le sens partagé de l’événement, tantôt les mots de l’indicible affrontant la censure des conventions, suggérant l’énigme des sentiments, des silences. Deniot, 2007.

Au-delà de toute considération extralinguistique, la chanson comme récipient purement littéraire pourrait transférer un ensemble d’idées, de doctrines propres à une époque donnée, tout en caractérisant les différents styles et formes, les effets de l'expression, etc. C’est en fait, ce que nous allons démontrer au cours de ce travail.

II. La chanson : discours et apprentissage