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IV. Avènement d’une nouvelle didactique des langues et des cultures

IV. 4. L’éclectisme méthodologique en didactique du FLE

L’enseignement-apprentissage du FLE a réussi à se faire une place dans le domaine de la didactique des langues. L’évolution de cette discipline avait pour objet la formation optimale de l’apprenant.

Evoquons que l’apparition de chaque méthode ressort d’une réaction aux carences de celle qui la précède, comme le cas de « la méthode directe », du besoin de s’appliquer aux occurrences de la société « méthode audio-orale et audio-visuelle », ou de la nécessité de tenir compte de l’apprenant comme étant un acteur principal, de ses représentations ainsi de sa culture « approche communicative ». Néanmoins, on assiste depuis les deux dernières décennies à l’apparition d’un éclectisme méthodologique qui exalte la diversification des approches et des procédés en faisant appel aux fondements des méthodes antérieures. C’est la raison pour laquelle il a été considéré comme une méthode souple qui s’adapte commodément aux problèmes spécifiques de chaque situation d’apprentissage.

Prenant appui sur les différentes méthodes auxquelles la didactique du FLE a eu recours, l’éclectisme émerge dans une optique de renouveau un arrangement entre les principes fondateurs des méthodes qui le devancent. En fait, l’adoption de l’éclectisme se montre répondant aux exigences d’une didactique qui nécessite. A. Vergnous trouve que

La maitrise scientifique de l’acte éducatif, la volante technique de réduire les causes de tout échec et une vision unifiant les approches et proposant une problématique cohérente permettant de fonder efficacement les pratiques

Il est facile de s’apercevoir que la didactique du FLE s’est retrouvée contrainte de rapprocher les regards et les apports des différentes méthodologies en se situant dans un angle multidimensionnel. A cet égard, il ne s’agit pas de privilégier un des aspects de la langue dans ses applications mais principalement de nuancer les approches afin de répondre aux besoins des apprenants.

En cette matière, J.C. Beacco (1995 : 36) trouve que l’éclectisme en classe de langue se caractérise par une conception de polyvalence qui se réalise à l’aide d’un choix raisonné et non d’un tas hétérogène de techniques d’enseignement. En d’autres termes, il est indispensable de rendre rationnel le recours aux techniques empruntées pour donner l’occasion aux apprenants de participer efficacement au processus d’enseignement-apprentissage. Pour lui, ce choix peut être conçu comme étant une « méthodologie circulante » sur laquelle les méthodologies antérieures viennent s’ajouter. L’éclectisme se dresse contre une approche unidimensionnelle et envisage une procédure en se basant sur les besoins des apprenants.

Sous ce rapport, l’éclectisme, comme méthodologie pour enseigner le FLE, prétend à ce que l’enseignant possède d’amples connaissances de la langue cible, différentes façons d’enseigner, qu’il puisse également gérer des situations particulières dans la classe. Cela suppose concevoir une formation des formateurs. Cependant, la confusion liée à cet éclectisme ressort de son statut en porte-à-faux sur les bases des méthodes qui le devancent. A titre indicatif, avantager l’apprentissage de l’oral en permettant un usage insensé de la langue maternelle ne peut pas correspondre aux besoins de la formation. Certes, l’éclectisme représente une extension méthodologique qui varie dans un souci d’efficacité et de rénovation car, apparemment, une méthode ne peut pas à elle seule correspondre aux divers objectifs et besoins d’une classe hétérogène. Mais le système éducatif est présumé gérer les pratiques éclectiques adoptées par des enseignants insuffisamment formés afin de protéger l’apprenant.

Les méthodologies d’enseignement des langues ont été distinguées par leurs plusieurs « entrées » résumées par Christian Puren (2006 : 42)

Le domaine par lequel l’enseignant a choisi de pénétrer sur son territoire à chaque nouvelle unité didactique, celui par lequel va commencer sa séquence, et qui va ainsi donner à la fois le sens de son parcours et du sens à son parcours2.

Ces approches sont classées selon Puren en

- Entrée par la grammaire : une méthodologie traditionnelle. - Entrée par le lexique : une méthodologie directe.

- Entrée par la culture : une méthodologie active.

- Entrée par la communication : une méthodologie audio-visuelle et approche communicative.

- Entrée par l’action : une approche actionnelle.

Le programme de français développe des méthodologies actionnelles car elles appellent une approche par compétences qui engagent l’apprenant dans des situations authentiques ; c’est ce que nous entendons par « l’agir communicationnel »3. Cette performance se divise en « agir d’usage » et en « agir d’apprentissage ». Puren explique que l’agir d’usage représente l’action sociale tandis que l’agir d’apprentissage apparait dans la tâche scolaire.

Pour ce qui est de la considération culturelle en didactique du FLE, cette dimension a connu un parcours qu’il serait judicieux d’éclairer (voir figure 3)

En assignant à la culture une conception étroite, la méthodologie traditionnelle était centrée sur la lecture, la grammaire et la traduction, en estimant que pour atteindre la culture, il suffit de se renseigner sur les grandes œuvres artistiques par le biais de la lecture. Cependant, à travers l’acte de la lecture et celui de la traduction, les connotations qui renvoient aux particularités des cultures n’étaient pas abordées en classe, car la visée dominante était la formation d’une sensibilisation et du goût aux valeurs universelles.

Il en est de même pour les méthodes qui sont venues par la suite, à savoir la méthode directe, active, audio-orale et audiovisuelle ; celles-ci écartent la culture de la langue en prêtant attention à des objectifs plus pratiques. Autrement dit, la priorité était destinée à la formation des apprenants capables de produire des énoncés en langue cible. C. Germain (2001 : 105)

2

Cité par A. Dakhia, 2004 :100

avance qu’« aucune mention particulière n’est faite de la culture ». L’option pour ces approches avait de lourdes conséquences. Il ignorait la nature et l’individualité de l’apprenant, en le privant d’appréhender la langue dans sa totalité, et en stimulant chez lui des automatismes et les comportements réflexes.

Mais l’avènement de l’approche communicative, dans les années soixante-dix, a changé les objectifs de l’enseignement des langues. Désormais, la communication est le l’objectif ultime de tout apprentissage. Cette approche a réorienté l’axe méthodologique sur l’apprenant comme étant l’acteur principal pour installer une compétence de communication. Cette dernière suscite le l’appel aux valeurs et aux comportements sociaux ; en l’occurrence intervient la dimension « interculturelle ».

De ce point de vue, C. Puren (1988 : 372) met en évidence l’atout de la communication en signalant que :

Apprendre une langue, c’est apprendre à se comporter de manière adéquate dans des situations de communications où l’apprenant aura quelque chance de se trouver en utilisant les codes de la langue cible

Afin de réaliser son objectif, cette approche recours à des théories exposées par différentes disciplines telles que la pragmatique, la sociolinguistique et l’analyse du discours. Du même coup, nous pouvons dire que c’est l’approche communicative qui a devancé les recherches sur l’interculturel en considérant la culture comme un système de valeurs, de comportements et de principes sociaux conduisant les individus et les groupes. Il s’agit selon Porcher (1996 : 124) d’une « culture invisible » qui entre en jeu dans les échanges en constituant un facteur essentiel dans la production et l’interprétation des énoncés.

Avec la persistance de la représentation méthodologique en didactique des langues, il a été pris en considération la dimension interculturelle dans l’enseignement du FLE, étant donné que toute contiguïté entre deux langues (langue source et langue cible) met en interaction deux cultures différentes. Cette donnée s’est établie comme un composant de la compétence communicative. Elle est entendue comme un ensemble de savoirs relevant de la culture cible et qui permettrait d’augurer d’éventuelles divergences, de contourner quelques blocages et d’élucider certaines situations confuses.

Source : MEZIANI Amina, Pour un enseignement-apprentissage du FLE dans une perspective interculturelle, mémoire de magistère, 2007

IV.5. Perspectives de la didactique des langues et des cultures

Les méthodes structuro-béhavioristes une fois dépassées par l’approche communicative, de nouvelles perspectives méthodologiques sont apparues en didactique des langues. Contrairement à l’approche structuro-béhavioriste qui avantage la « centration sur la méthode », l’approche communicative mène une réflexion qui favorise la « centration sur l’apprenant » approuvée par C. Puren (1998 : 10). Cette dernière accorde à l’apprenant un rôle actif.

Depuis deux décennies, l’élément interculturel s’est montré comme une matière à part entière de l’enseignement-apprentissage des langues, et comme un thème de recherche d’une discipline, « la didactique des langues », appelé désormais « didactique des

langues-Figure 3 : Evolution de la perspective culturelle depuis la méthodologie traditionnelle jusqu’à l’éclectisme.

cultures ». Or, on assiste actuellement à une mise en valeur de l’enseignement des cultures en langues étrangères et les éventuelles contraintes qui se rapportent au croisement de ces cultures. Ajoutons que le souci d’une communication efficace à pousser les partisans de l’approche communicative à se rendre compte de la culture de l’apprenant et de la culture cible. En la matière, J.L. Chiss, J. David, Y. Reuter (2005 : 131) prétendent que c’est

une double stratégie didactico-culturelle [qui] s’impose. Cette stratégie consiste à "didactiser l’offre" et à "accompagner le plus loin possible dans leurs culture" les apprenants

Dans le domaine de la didactique des langues-cultures, apprendre une culture étrangère est envisagé comme un mécanisme de reconstruction constant des représentations de l’apprenant à l’égard de cette culture. Il est à prendre conscience de ses représentations et découvrir de ses propres valeurs culturelles par le croisement avec une langue et une culture étrangères. Cette réflexion vise la relativisation du mécanisme d’acculturation qui permet de dynamiser la culture source. K. HADDAD (1997 : 385) explique ce mécanisme :

D’abord l’interprétation de la culture de l’autre à la lumière de ma propre culture ; vient ensuite la phase d’interprétation de ma propre culture à la lumière de celle de l’autre ; enfin, dans un troisième temps, on assiste à l’émergence d’une culture originale, fruit de la synthèse entre ma culture et celle de l’autre

Il est à signaler que la place de la culture dans l’enseignement-apprentissage du FLE est généralement admise et cela pour établir une communication efficace dans des situations de communication réelles ou pour réaliser des devoirs dans la société comme le conseille vivement l’approche actionnelle entamée par le Conseil de l’Europe4

. En cette matière, G. Mounin (1984 : 35) souligne que :

Pour pénétrer la civilisation mieux vaut savoir la langue, et pour se perfectionner dans la langue, il faut se familiariser toujours plus avec la civilisation.

4

Selon les auteurs du Cadre Européen, la parole s’inscrit dans un contexte qui seul lui donne sa signification. L’apprenant est donc appelé à acquérir non seulement des compétences langagières mais aussi sociales et interculturelles

Or, l’appartenance de la culture au domaine de l’intangible l’a rendue complexe. Cela a engendré le souci de sa didactisation en cherchant en premier lieu les contenus d’enseignement qui pourraient répondre le mieux à la problématique de cette matière.

La littérature est considérée par excellence comme étant le vecteur de la culture. Un écrit littéraire reflète les pratiques d’une société, ses modes de vie et exprime son idéologie. Ainsi, vouloir interpréter un produit littéraire exige le recours à sa dimension culturelle qui englobe l’ensemble des valeurs sociales. C’est grâce aux hommes de lettres français comme Flaubert, Racine, Diderot…que nous avons pu découvrir l’histoire des sociétés, connaitre leurs rites et modes de vie. De sa part, la chanson française véhicule un message culturel en étant le miroir de la société que ce soit antique ou moderne. C’est la raisons pour laquelle différentes approches préconisent le recours à la littérature et à la chanson en les considérant comme des médiateurs culturels.

En se centrant sur l’apprenant, la didactique des langues-cultures devrait aborder les programmes à enseigner, les supports et les démarches à suivre. Sous ce rapport, Y. Reutr, J. David et J.L Chiss (2005 :129) s’accordent sur le rôle de la didactique des cultures en avançant que :

Ce qui paraît insuffisamment pris en compte par la didactique de la culture, c’est l’idée que les processus d’accommodation culturelle sont longs, demandent du temps et sollicitent la participation active du sujet

La dimension culturelle a pris de l’ampleur et représente une extension de la dimension pragmatique élue par l’approche communicative. La didactique des cultures veut donc être un champ d’étude met en place différentes conceptions pour accorder aux enseignants les outils appropriés à un apprentissage optimum de l’élève. Le souci d’enseigner la culture a suscité l’intérêt d’innombrables chercheurs : d’après Puren (1998 : 22), nombreuses sont les approches qui facilitent l’enseignement de la culture ; ce sont :

- L’approche par le représentatif :

Dans ce cas, certains faits culturels pourraient rendre la culture étrangère présente pour les apprenants. Cette approche opte pour la littérature et la chanson étant donné que la sensibilité que possède l’artiste influence les réalités sociales évoquées.

Cette approche met en valeur les traits culturels déterminants pour composer l’ensemble de la culture étrangère. Dans ce cas, nous avons recours à l’histoire et à la géographie pour exposer aux apprenants le « don » du peuple étranger.

- L’approche par le parcours d’apprentissage

Cette approche consiste à faire découvrir aux apprenants la culture étrangère d’une manière individuelle. Dans ce cas, il est conseillé d’installer le mécanisme d’apprentissage de sorte que l’apprenant puisse tracer dans la culture étrangère son propre parcours, d’y effectuer ses propres usages et d’en faire ses propres interprétations. Il s’agit de favoriser une ambiance motivante aux apprenants qui leur permettent de découvrir eux-mêmes cette culture.

- L’approche par le contact :

Selon les principes de cette approche qui domine actuellement en didactique des langues, l’enseignant doit s’employer à construire progressivement une compétence interculturelle chez l’apprenant. Dans ce cas, on suit l’impact du contact de ce dernier avec la culture étrangère (degré de tolérance culturelle, connaissance de sa propre identité culturelle, révision des stéréotypes…). M. Abdallah-Pretceille (1998, 49) signale que pour réaliser cette approche, il est préconisé d’avoir recours aux approches précitées.

il convient que cet apprentissage « interculturel » se fasse, mais il ne faut pas le réifier, le didactiser à l’excès. Car apprendre une culture, c’est d’abord rencontrer l’Autre, l’interlocuteur

Dans cette optique, nous pouvons constater que la didactique des langues et des cultures se rapportent aux différentes approches pour faire de l’interaction des cultures l’objet d’une discipline qui projette l’union entre l’acquisition de la langue et la découverte de la culture qui y est affère. Etant un mécanisme toujours inachevé, l’enseignement de la culture doit naître d’une conviction plutôt que d’outils.