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L’existence de techniques retardant la perfection de l’acte

LA PROTECTION PAR LA SUSPENSION DE LA PERFECTION OU DE L’EFFICACITE DU CONTRAT

A) L’existence de techniques retardant la perfection de l’acte

198. Le Code civil connait ce mécanisme de la condition qui permet de faire dépendre l’existence d’une obligation à la survenance d’un évènement futur et incertain (1°).

Quoi que mécanisme facultatif, cette technique est imposée pour certains crédits visés par le Code de la consommation, et laisse apparaître quelques dissemblances d’avec le droit commun, notamment en ce que le jeu de la condition conditionne non pas l’existence d’une obligation, mais celle du contrat (2°).

244 Art. L. 311-23 du Code de la consommation.

1° L’existence de l’obligation conditionnée à la survenance d’un évènement

199. Par le jeu des articles 1168 et suivants du Code civil, le législateur civiliste instaure un mécanisme juridique qui permet aux parties d’anticiper un événement futur et incertain, dont elles espèrent la survenance. Cet événement, érigé en condition, subordonnera la formation ou la disparition d’une obligation245. Suspensive, la condition suspend l’existence de l’obligation, si la condition se réalise, le droit existe rétroactivement à la conclusion du contrat. Pour le cas de sa non-réalisation, l’obligation est anéantie dès l’origine. Résolutoire, la condition fait naître l’obligation, mais la survie de cette dernière dépend de la réalisation de la première. Dans les deux hypothèses, c’est l’existence de l’obligation qui est conditionnée alors que le terme n’affectera seulement que son exigibilité ou sa durée246.

200. Les effets sont donc radicaux : tant que l’événement ne s’est pas encore réalisé, l’acte conditionnel ne produits pas ses effets. Il y a eu rencontre des volontés, le contrat existe et le droit conditionnel aussi, mais seulement en germe. Le lien d’obligation existe puisque le débiteur ne peut plus rétracter son engagement247, mais en germe puisque le créancier ne peut demander l’exécution forcée, ni agir en résolution pour inexécution248. Quand l’événement se réalise, « la condition accomplie a un effet rétroactif au jour auquel l’engagement a été contracté»249 . La condition n’est censée ne jamais avoir existée et l’acte devient efficace. En matière d’acte translatif de propriété, la solution implique que l’acquéreur devienne propriétaire dès la conclusion du contrat. Il en serait de même, pour le contrat de prêt : l’obligation du prêteur est conditionnée, l’emprunteur acquérant la propriété des fonds rétroactivement.

Enfin, pour le cas où la condition, incertaine par nature, viendrait à défaillir, le droit soumis à condition suspensive est censé ne jamais avoir existé, et les obligations exécutées

245 J.-J. TAISNE, La notion de condition dans les actes juridiques, Contribution à l’étude de l’obligation conditionnelle, th. dactyl. Lille 1977 ; E. PUTMAN, La formation des créances, th. Aix-en-Provence, 1987, p.

368 et s. ; J. DEROUIN, Pour une analyse « fonctionnelle » de la condition, RTD civ. 1978, p. 1.

246 F. TERRE, P. SIMLER, Y. LEQUETTE, Droit civil, Les obligations, Dalloz, 10ème éd., 2008, n° 1209 et s., p.

1124.

247 Cass. civ. 1ère, 19 déc. 1983, Bull. civ. I, n° 305.

248 Cass. civ. 1ère, 16 juill. 1980, Bull. civ. I, n° 139.

249 Art. 1179 du Code civil.

seraient sujettes à répétition250. En droit civil, cette rétroactivité est toutefois facultative, les parties pouvant l’écarter conventionnellement251.

201. Pour le régime juridique relatif à la nullité de la condition, il convient de remarquer qu’au-delà du fait que l’événement est futur et incertain, sa survenance ne doit pas dépendre du seul fait d’une partie, elle deviendrait potestative et tomberait sous le coup de l’article 1174 du Code civil252. Il paraît orthodoxe de penser que l’existence de l’obligation du débiteur ne doit pas dépendre de son bon vouloir sans quoi, la force obligatoire n’aurait plus d’effets. Dès que le contrat se forme par la rencontre des volontés, le débiteur prend le risque de devoir exécuter une obligation devenue exigible au moment de la survenance d’un événement, dont il n’a pas la maîtrise de sa réalisabilité. Il est cependant des cas dans lesquels le débiteur peut avoir une influence sur la réalisation de la condition, mais pas totalement, si bien que sa survenance, ou sa défaillance, n’est pas de son propre fait.

202. Si classiquement, la rigueur de la prohibition des conditions potestatives est quelque peu édulcorée par la seule sanction de celles qui sont purement potestatives253. Pourrait donc être stipulée la condition qui ne fait pas totalement dépendre la survenance de l’événement de la seule volonté du débiteur de l’obligation conditionnée. En définitive, ce serait celle faisant intervenir, pour partie, un contrôle extrinsèque à la volonté du débiteur des circonstances entourant la survenue de l’événement254. C’est ce critère qui permet donc d’élargir la catégorie des conditions mixtes, relativement étroites, que vise l’article 1171 du Code civil.

250 Cass. civ. 3ème, 30 mai 1984, RD imm. 1985, p. 70.

251 Cass. req., 10 févr. 1925, S. 1925, 1, p. 61 ; réaffirmé constamment depuis, V. notamment Cass. civ. 3ème, 8 janv. 1980, Bull. civ. III ; n° 12.

252 « Toute obligation est nulle lorsqu'elle a été contractée sous une condition potestative de la part de celui qui s'oblige. »

253 J. GHESTIN, La notion de condition potestative au sens de l’article 1174 du Code civil, Mélanges Weill, 1983, p. 243 et s. ; S. VALORY, La potestativité dans les rapports contractuels, préface J. MESTRE, th.

PUAM, 1999 ; J. ROCHFELD, Les droits potestatifs accordés par le contrat, Etudes offertes à J. GHESTIN, LGDJ, 2001, p. 747. V. aussi en ce sens, Cass. civ. 1ère, 18 juin 1974, Bull. civ. I, n° 198 ; Cass. civ. 3ème, 8 oct.

1980, Bull. civ. III, n° 154, D. 1981, p. 441, obs. B. AUDIT.

254 V. en ce sens, Cass. com., 18 févr. 1972, relatif à la licéité d’une clause de rendement conditionnant la vente, lequel rendement dépendait du débiteur mais pas seulement, le contexte du marché influant aussi sur les ventes , D. 1973, p. 662 et plus récemment, Cass. civ. 3ème, 13 oct. 1993, Bull. civ. III, n° 121, sanctionnant une condition relevant de la seule volonté de l’acquéreur d’un bien immeuble, JCP G 1994, II, 22280, note Y.

DAGORNE-LABBE, RTD civ. 1994, p. 606, obs. J. MESTRE, Defrénois 1994, art. 35845, p. 793, obs. Ph.

DELEBECQUE.

203. Techniquement, rien n’interdit donc que puisse être stipulée une condition sur laquelle le débiteur peut avoir une emprise, tant que la réalisation de cette condition, ou sa défaillance, ne dépend pas de la volonté exclusive de celui-ci. Il est permis de s’interroger sur l’étendue du mécanisme de la condition. En effet, le Code civil n’envisage que l’obligation conditionnelle. Est-il possible conceptuellement d’imaginer une protection plus vaste, fondée sur le conditionnement, à la survenance d’un événement, non pas d’une obligation, mais du contrat lui-même ? Le Code civil ne paraît pas évoquer cette hypothèse directement. A nos yeux, ceci n’est guère utile tant que l’obligation conditionnelle est une obligation liée aux prestations caractéristiques. Ainsi si la condition défaille, l’obligation est censée ne pas avoir existé, et le contrat est alors être que résolu, l’anéantissement de l’obligation conditionnelle entraînant la disparition de la cause de l’obligation réciproque. Si au contraire l’obligation conditionnelle n’est pas une prestation caractéristique du contrat, il ne serait alors pas possible de pouvoir échapper à la force obligatoire du contrat.

204. Concrètement, une obligation de transférer la propriété, conditionnée, aboutirait à la disparition du contrat si la condition vient à défaillir. A l’inverse le contrat subsiste, si l’obligation conditionnelle porte sur une obligation non essentielle, donc autre que le transfert de propriété ou le paiement du prix par l’acheteur.

205. Il est permis de s’interroger dès lors sur la pertinence que pourrait avoir l’existence d’un contrat conditionnel sur la protection de la partie.

2° L’existence du contrat conditionnée à la survenance d’un évènement

Cela concerne le crédit immobilier (a) et le crédit à la consommation (b).

a) en matière de crédit immobilier

206. Le mécanisme de la condition, suspensive ou résolution est reprise par le Code de la consommation, spécifiquement pour les contrats de prêt, à l’article L. 311-23 pour le crédit à la consommation, et à l’article L. 312-16 pour le crédit immobilier. Toutefois, alors qu’il s’agit en droit commun d’une stipulation contractuelle que les parties peuvent choisir d’insérer, le législateur impose cette technique pour le cas des contrats précités.

207. L’article 312-16 alinéa 1, issu de « la loi Scrivener II » n° 79-596 du 13 juillet 1979 sur le crédit immobilier, dispose que « lorsque l'acte mentionné à l'article L. 312-15 indique que le prix est payé, directement ou indirectement, même partiellement, à l'aide d'un ou plusieurs prêts régis par les sections 1 à 3 et la section 5 du présent chapitre, cet acte est conclu sous la condition suspensive de l'obtention du ou des prêts qui en assument le financement. La durée de validité de cette condition suspensive ne pourra être inférieure à un mois à compter de la date de la signature de l'acte ou, s'il s'agit d'un acte sous seing privé soumis à peine de nullité à la formalité de l'enregistrement, à compter de la date de l'enregistrement ». Trois remarques sont à formuler.

208. En premier lieu, La condition suspensive n’est pas d’origine conventionnelle, elle est légale. Le législateur impose la condition dès lors que l’acte principal mentionne que le financement sera réalisé par un ou plusieurs prêts. Doit-on comprendre qu’à défaut de toute volonté exprimée par les parties, la clause est toujours stipulée. Les parties peuvent-elles donc l’écarter conventionnellement ?

209. Edictée dans l’intérêt exclusif de l’emprunteur, l’on doit être amené à penser que la disposition est d’ordre public. La jurisprudence penche pour cette solution255. Ainsi, seul l’emprunteur peut se prévaloir : comme le formule la Haute juridiction, « les exigences formelles posées par le code de la consommation en matière d'offre de prêt immobilier ne sont édictées que dans un souci de protection du débiteur, qui peut seul les invoquer »256. Mécanisme d’ordre public, l’on ne peut renoncer contractuellement à cette disposition, mais l’on peut cependant renoncer à ses effets257. L’emprunteur ne sera pareillement plus protégé s’il ne recourt pas à un emprunt pour financer un bien immobilier. Dans ce cas, le législateur attira son attention en recourant au formalisme informatif qui impose au client, par écrit, de mentionner qu’il ne finance pas son acquisition par un prêt et qu’il renonce à la protection de l’article L. 312-16258. A défaut de mention, l’acquisition est réputée être réalisée sous

255 Cass. civ. 3ème, 24 sept. 2003, Bull. civ. III, no 164; D. 2003. AJ. 2694 ; JCP éd. E 2004. 204, note S.

PIEDELIEVRE; AJDI 2004. 151, note PRIGENT ; LPA 8 sept. 2004, note Y. TCHOTOURIAN; RTD civ.

2003. 697, obs. J. MESTRE et B. FAGES.

256 Cass. civ. 3ème, 7 nov. 2007, Bull. civ. III, n° 201; D. 2008, chron. p. 1224, obs. NESI ; RTD com. 2008, p.

157, obs. D. LEGEAIS ; JCP éd. G 2008, I, 104, n° 1, note SERINET ; JCP éd. N 2008, n° 12, p. 15, note H.

KENFACK ; ibid., n° 19-20, p. 17, obs. S. PIEDELIEVRE ; JCP éd. E 2008, n° 15, p. 18, obs. LAFONT ; LPA 5 févr. 2008, note D. HOUTCIEFF ; Defrénois 2007. 1744, note E. SAVAUX ; RJDA 2008, n° 321.

257 Cass. civ. 17 mars 1998, D. 1998, IR., p. 118 ; JCP éd. G 1998, II, 10148, note S. PIEDELIEVRE.

258 Article L. 312-17 al. 1er.

condition suspensive d’obtention du prêt259, ce qui permet de d’être protégé si l’acquéreur vient finalement à recourir à un crédit, mais cette solution est juridiquement peu rigoureuse pour le cas où il ne contracte pas avec un prêteur260. L’on peut constater que la condition suspensive légale est conditionnée par la stipulation contractuelle dans le contrat principal du mode de financement, quand bien même l’acquéreur ne recourrait pas au crédit pour financer le bien immobilier.

210. En second lieu, l’on remarque que la technique de protection qui conditionne l’existence du contrat implique le contrat de prêt et le contrat principal soient interdépendants.

L’article L. 312-16 subordonne l’application de la législation protectrice au prêt finançant le contrat principal. Cette technique est doublement originale. Tout d’abord, cela implique qu’il existe un lien de droit entre les deux contrats. Ce postulat ne va pas de soi. En effet, la cause objective du contrat principale ne réside pas dans l’obtention du prêt mais dans l’acquisition du bien immobilier. Peut-être pourra-t-on objecter que la cause subjective, lointaine, a un rapport avec le contrat de prêt : ainsi l’acquéreur n’achètera pas le bien s’il ne peut le financer à crédit. Mais cette cause là relève des motifs propres de l’acquéreur et ils n’intègrent pas le champ contractuel…sauf si ce motif fait l’objet d’une stipulation contractuelle érigeant ce motif en condition.

211. A cet égard, l’entrée dans le champ contractuel du recours au financement est rendu possible dès lors que la loi impose aux parties de faire figurer le mode de financement du bien immobilier, comme le dispose l’article L. 312-15. Il devient alors envisageable de faire de cet élément une condition, dès lors qu’il répond à la définition de la condition suspensive que donne l’article 1181 du Code civil et qu’il respecte la prohibition des conditions purement potestatives de l’article 1174. Précisément, l’obtention du prêt est bien un évènement futur et incertain dont la survenance dépend d’un tiers, le banquier. Il n’est donc pas douteux que le mobile d’une partie puisse conditionner l’existence du contrat de vente immobilière à la réalisation du contrat de prêt. Des auteurs ont pareillement pu expliquer l’existence de cette condition légale fondée sur les mobiles des parties261.

259 Article L. 312-17 al. 2ème.

260 Quant l’opération n’est pas financée par un prêt et si la mention est omise, le contrat est alors conclu sous la condition suspensive d’un évènement qui n’existe pas ! L’intérêt de cette disposition réside néanmoins dans la faculté qu’aurait l’acquéreur de solliciter un emprunt une fois le contrat principal conclu. Cela n’en retire rien à la validité de la clause puisque l’événement conditionnel, l’obtention du prêt, reste hypothétique.

261 M. SANTACREU, La protection de l’emprunteur immobilier, éd. Du Moniteur (Coll. Act. Juridique) 1982 ; Le droit du crédit au consommateur, ouvrage sous la direction de I. FADLALLAH, Litec 1982 ; J.-L. BERGEL,

Réciproquement, il paraît alors légitime de pouvoir faire tenir l’existence du contrat de prêt à la réalisation effective de la vente.

212. Ainsi, l’article L. 312-12 alinéa 1er dispose que « l’offre est toujours acceptée sous la condition résolutoire de la non-conclusion, dans un délai de quatre mois à compter de son acceptation, du contrat pour lequel le prêt est demandé. » La loi retient ici pareillement l’interdépendance du contrat de prêt et du contrat de vente, par le mécanisme de la condition résolutoire. L’acquisition du bien immobilier entre naturellement dans le champ contractuel puisqu’il s’agit de l’objet même du contrat de prêt. Il devient alors aussi possible d’ériger l’acquisition du bien en condition résolutoire. Il s’agit d’un crédit lié qui précise la destination contractuelle des fonds et la condition s’impose aux parties262.

213. Le champ d’application de l’article L. 312-12 du Code de la consommation est spécifique. En dehors du cadre du crédit immobilier conclu aux termes du Chapitre II du Titre III du Code de la consommation, il n’est donc pas possible de faire jouer un tel mécanisme, sans stipulation contractuelle, prévoyant que la destination des fonds est la cause du contrat de prêt.

Il est traditionnellement enseigné que le recours à la cause subjective a une toute autre finalité263. Elle ne permet pas demander l’annulation d’une convention sur le fondement de la disparition des mobiles du contractant, pas plus qu’elle n’autorise une caution à se dédire de son engagement de garantir264 quand les raisons qui l’ont conclu à s’engager ont disparues. La Cour de cassation a en effet retenu cet argument dans une affaire liant un contrat de prêt et un contrat de vente. Pour la Haute juridiction, dans un litige entre deux professionnels, la faillite d’un vendeur ne rend pas sans cause l’obligation de l’emprunteur qui restait tenu envers le prêteur265. Cette solution de la Cour de cassation a été rendue dans une affaire opposant des professionnels, si bien qu’ils ne peuvent pas se prévaloir de l’intégration au champ contractuel

Les ventes d’immeubles existants, Litec 1983 et suppl .à jour au 10 janv. 1988 ; M.-Th. CALAIS-AULOY, Fondement du lien juridique unissant vente et prêt dans le « prêt lié », JCP éd. E 1984, II, 14182 ; M. DAGOT, Vente d’immeuble et protection de l’acquéreur emprunteur (loi du 13 juillet 1979), JCP 1980, I, p. 39 à 58 ; C.

MOULY, Le droit nouveau du crédit immobilier, Actualités du droit de l’entreprise, sept. 1981, p. 8 ; C.

THIBIERGE, La protection des acquéreurs de logements qui recourent au crédit pour financer leur acquisition, Defrénois 1980, art. 32254 ; H. THUILLIER, Analyse de la loi n° 79-596 du 13 juill. 1979…, JCP 1979, prat., 7241.

262 Article L. 312-12 : « L'offre est toujours acceptée sous la condition résolutoire… ».

263 F. TERRE, P. SIMLER, Y. LEQUETTE, Droit civil, Les obligations, Dalloz, 10ème éd., 2008, n° 333.

264 Pour une illustration dans laquelle la caution a vainement demandé la décharge au motif qu’elle n’avait plus la fonction de dirigeant de l’entreprise crédité, V. Cass. com., 8 nov. 1972, Bull. civ. IV, n° 278.

265 Cass. civ. 1ère, 20 nov. 1974, JCP éd. G. 1975, II, 18109, note J. CALAIS-AULOY.

des mobiles correspondant à la destination des fonds sans prévoir une stipulation contractuelle expresse.

214. Troisième et dernière remarque, il existe une différence, selon nous, entre le mécanisme de la condition de l’article 1168 du Code civil et celui des articles L. 312-12 et L.

312-16 du Code de la consommation. Cette différence réside dans l’effet de la condition. Si la condition de l’article 1168 conditionne l’obligation266, celle des articles du Code de la consommation semble conditionner le contrat267. Cette technique est singulière. La technique de protection fondée la condition résolutoire a cette particularité qu’elle conditionne l’acte et non plus seulement les obligations.

Certes, si la condition porte sur une obligation, et que cette obligation est une prestation caractéristique du contrat en cause, le cocontractant n’a plus d’intérêt à exécuter sa propre prestation et pourra demander la nullité du contrat pour absence de cause. Il n’y aurait alors dans ce cas guère de différence à distinguer suivant que l’événement futur et incertain conditionne l’obligation ou le contrat, sauf si le contrat peut subsister sans l’obligation conditionnée. Cela ne paraît toutefois pas être le cas en matière de prêt en ce sens que l’obligation de verser les fonds à l’acquéreur est une prestation caractéristique du prêt268. Si la technique de la condition portait sur l’obligation de remettre les fonds, alors la solution serait la même, mais au terme d’une demande en nullité émise par l’emprunteur.

Cette interdépendance des contrats ne se limite pas enfin aux seuls crédits immobiliers.

b) en matière de crédit à la consommation

215. Intégrée dans le Code de la consommation aux articles L. 311-1 à L. 311-37, la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978, dite loi Scrivener, relative à « l’information et à la protection des consommateurs dans le domaine de certaines opérations de crédit » transpose l’espèce des

266 L’article 1168 mentionne en effet le terme d « obligation est conditionnelle ».

267 L’article L. 312-12 précise que « l’offre est toujours acceptée sous la condition résolutoire…» et l’article L.

312-16 que « cet acte est conclu sous la condition suspensive… ».

268 Il en irait peut-être différemment avec l’article L. 312-16 pour lequel l’inexécution de l’obligation pour l’acquéreur-emprunteur de payer le prix convenu peut ne pas engendrer la nullité du contrat de vente si le vendeur préfère l’exécution forcée à la résolution de la vente pour inexécution. En pareille hypothèse, il importe, dans un souci de protection de l’acheteur, de conditionner l’opération immobilière et non l’obligation de l’acheteur.

obligations conditionnelles au crédit consenti aux consommateurs269. Précisément l’article L.

311-23 du Code de la consommation qui dispose que « chaque fois que le paiement du prix sera acquitté, en tout ou partie, à l'aide d'un crédit, et sous peine des sanctions prévues à l'article L. 311-34, le contrat de vente ou de prestation de services doit le préciser. Aucun engagement ne peut valablement être contracté par l'acheteur à l'égard du vendeur tant qu'il n'a pas accepté l'offre préalable du prêteur. Lorsque cette condition n'est pas remplie, le vendeur ne peut recevoir aucun paiement, sous quelque forme que ce soit, ni aucun dépôt » Les deux opérations ont un lien juridique entre elles, tant que l’acquéreur n’a pas accepté le prêt, le contrat principal de vente ne peut l’engager.

216. Il convient de s’interroger sur la nature de ce lien juridique. Selon nous, il s’agirait d’une condition suspensive qui conditionne la capacité pour l’acheteur à payer le prix de la chose acquise au terme du contrat principal. L’expression du législateur « aucun

216. Il convient de s’interroger sur la nature de ce lien juridique. Selon nous, il s’agirait d’une condition suspensive qui conditionne la capacité pour l’acheteur à payer le prix de la chose acquise au terme du contrat principal. L’expression du législateur « aucun

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