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L’appréciation de l’efficacité des techniques de révocation

§ 1 - LES TECHNIQUES DE RETRACTATION DU CONSENTEMENT

B) L’appréciation de l’efficacité des techniques de révocation

189. L’étude de l’efficacité du délai de rétractation, comme technique de protection, montre que les solutions retenues par le législateur peuvent apparaître comme contestable.

Ainsi est-ce le cas du départ du délai de rétractation. Nous avions pu relever que le point de départ du délai de rétractation varie suivant qu’il s’agit d’un contrat de prêt à la consommation ou d’un contrat de démarchage de produits bancaires et financiers à distance243. Ainsi, pour le crédit, le délai de rétraction, aux termes de l’article L. 311-15, court à compter de l’acceptation de l’offre préalable par l’emprunteur, alors que dans le cas du démarchage, il court soit dès la formation du contrat, soit dès la réception de tous les documents contractuels par le démarché. Nous avions enfin précisé que cette différence est estompée puisque pour le crédit à la consommation, l’article L. 311-10 impose au banquier de faire figurer dans l’offre préalable des mentions protectrices, et assortit cette obligation d’une sanction pécuniaire à l’article L. 311-34. Cette différence de point de départ du délai de rétractation n’est pas heureuse, et illustre en quoi la protection de l’emprunteur est mise à mal.

190. Le délai de rétractation commence à courir, en matière de crédit à la consommation, au jour de l’acceptation de l’offre préalable, quand bien même cette offre serait incomplète. Le banquier ne peut alors trouver intérêt à ne pas fournir toutes les informations au client au moment de la formation. Ce dernier ne sera pas alors en mesure d’apprécier la pertinence de l’engagement, si bien qu’il laissera s’écouler le délai de rétraction. Au prix de risque d’être astreint à une amende de 1500 euros au titre de l’inexécution des dispositions de l’article L. 311-10 du Code de la consommation, ce risque peut être profitable.

191. La protection par le droit de rétractation nous semble donc facilement contournable. L’article 14 de la Directive européenne du 23 avril 2008 sur le crédit aux consommateurs, non encore transposée, modifie l’état du droit positif et précise que le délai

243 supra n° 179.

ne commence à courir que si les informations exigées sont transmises. Cette modification procède d’un souci d’uniformisation de la protection au regard des dispositions applicables au démarchage de produits bancaires et financiers, et rehausse la protection de l’emprunteur.

192. Spécifiquement, pour le cas du démarchage, faire courir le délai de rétractation à la transmission de toutes les informations contractuelles, prévues à l’article L. 341-12 du Code monétaire et financier, est une disposition sévère à l’encontre du banquier. Parmi ces mentions, certaines sont plus informatives pour le client que d’autres. Pourtant si un seule d’elles manquent dans l’acte transmis au client, la sanction est la même : le délai ne court pas.

Ainsi, si manque l’information relative au numéro d’enregistrement de la personne morale mandatée par un démarcheur personne physique, nous ne pensons pas que cette information soit de nature à influencer favorablement ou défavorablement le consentement du client démarché. Pourtant, à défaut de cette mention dans l’acte, le délai ne commencera pas à courir. Cette solution nous paraît contestable tant elle est sévère à l’encontre de l’établissement bancaire démarcheur.

193. Enfin, nous doutons du bien-fondé de l’existence d’un régime dualiste de la faculté de rétractation en matière de crédit à la consommation, suivant qu’il est conditionné par l’existence d’une clause d’agrément ou pas, visé à l’article L. 311-16 du Code de la consommation.

Nous avions mentionné que cette faculté relevait du dédit quand le contrat était déjà formé, et davantage du délai de réflexion quand le prêt est formé à l’expiration du délai d’agrément de sept jours que prévoit l’article L. 311-16. Il en va donc autrement que pour le cas de l’article L. 311-15 quand, en l’absence de clause d’agrément, le contrat est déjà conclu.

Cette différence n’est pas sans conséquences sur la protection de l’emprunteur. Par le jeu combiné de l’article L. 311-15 et L. 311-17, le prêteur ne peut verser les fonds à l’emprunteur tant que le contrat n’est pas formé. A contrario, dès le moment de la formation, rien n’interdit au banquier de déposer les fonds sur le compte de son client, quand bien même le délai de rétractation n’est pas écoulé, puisque le contrat est déjà formé. A cet égard, le versement des fonds est donc possible, sauf lorsque le contrat prévoit une clause d’agrément qui suspend la naissance du contrat à l’expiration du délai d’agrément.

Il en ressort que la protection de l’emprunteur est moins efficace en l’absence de clause d’agrément puisque le versement anticipé des fonds est de nature à contraindre moralement l’emprunteur à ne pas se rétracter. Afin de pallier cette différence de régime,

préjudiciable à l’emprunteur, nous pensons que l’article L. 311-15 devrait conditionner la perfection du contrat à l’expiration du délai de rétractation. Bien sûr, cela aurait pour inconvénient d’empêcher l’emprunteur de réaliser l’opération principale désirée pendant sept jours, si bien que le prêt à la consommation perdrait en attractivité puisque les fonds ne pourraient être versés rapidement. Ce serait là le compromis acceptable entre une protection efficace de l’emprunteur et la nécessité de recourir au crédit pour les clients qui ne peuvent ou ne veulent financer une acquisition au comptant.

195. Il est d’autres techniques qui empêchent la perfection de l’acte, non pas en autorisant le cocontractant à revenir sur un engagement déjà exprimé, mais en conditionnant perfection du contrat à la survenance d’un événement convenu par les parties. En cas de non-survenance de celui-ci, par le jeu de la condition notamment, l’acte sera anéanti d’une manière similaire à celle de la révocation par le biais de la rétractation du consentement.

Même si les effets de ces techniques semblent comparables, en conditionnant le moment de perfection de l’acte, elles divergent sur le plan du mécanisme mis en œuvre. Ce n’est plus la volonté qui retarde ou empêche la formation du contrat, c’est la survenance d’un élément contractuel extérieur à cette volonté.

SECTION II

LA PROTECTION PAR LA SUSPENSION DE LA PERFECTION OU DE

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