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L’apprentissage et le développement

IV. LISTE DES FIGURES

5 LA LIGNE CULTURELLE DE DÉVELOPPEMENT

5.3 L’apprentissage et le développement

Sur cette base, nous nous permettons de distinguer :

1. l’apprentissage : intériorisation qui consiste dans le passage de l’interpsychique à l’intrapsychique, résultant en une appropriation des savoirs par le sujet;

2. le développement : la poursuite de l’intériorisation qui consiste en la restructuration des savoirs préexistants du sujet, de ses connaissances, sur la base de ces nouveaux savoirs investis de sens. Il y a ainsi intégration des savoirs aux connaissances antérieures pour en former de nouvelles (Piaget, 1977b), autrement dit transformation du fonctionnement psychique du sujet (Vygotski, 1934/1997).

Lors de l’apprentissage, il y a appropriation par le sujet sur la base d’un sens porté par le contexte externe au sujet. La signification contextuelle, donc forcément co-construite en partie dans les interactions, est en quelque sorte fondée sur une multiréférentialité culturelle et sociale. Cette multiréférentialité peut se réduire à des référents forts et communs à une culture professionnelle, si le sujet en est partie prenante ou, à tout le moins, adhère a priori à celle-ci95. En effet, le sujet s’inscrit en général dans une forme ou autre d’activité. L’appropriation est dès lors l’intériorisation du sens telle que ressortant du contexte interpsychique, de son activité culturelle. Cette intériorisation a toutefois engendré un déséquilibre (étape béta de l’intériorisation96) et a nécessité un mécanisme d’équilibration (étape gamma). Un sous-système du sujet a retrouvé son équilibre sur la base, entre autres, d’éléments externes au sujet. Cette équilibration, grâce à des régulations au sein d’un sous-système, a comme résultat un savoir : l’information externe, l’événement expérientiel, a été doté d’un sens et, soit est devenue nouveau un savoir, soit, en tant que savoir, a été compris, dans un premier degré, selon les règles épistémiques fournies lors de l’interaction liée à son intériorisation.

Lors du développement, ce savoir, résultant des régulations d’un des sous-systèmes, est mis en lien dans la conscience du sujet et doit donc s’harmoniser avec les autres sous-systèmes. On pourrait dire que le contexte change : le contexte interpsychique fait place à un contexte intrapsychique. Le savoir résultant de ces régulations menant à une équilibration du système ne peut qu’être subjectivé, et les différents systèmes ne peuvent qu’être affectés eux-mêmes. Ces altérations des systèmes du sujet sont justement la

95 Nous retrouvons cette adhésion inconditionnelle du disciple aux enseignements du maître dans les formations orientales, alors que nous constatons des résistances très fortes dans les formations occidentales, où les étudiants agissent comme s’ils étaient porteurs d’une culture équivalente à celle du maître.

96 Si nous revenons à Piaget (1977), nous pensons à trois étapes de l’intégration de savoirs aux connaissances intérieures pour en former de nouvelles : alpha, béta et gamma.

caractéristique du développement : le savoir qui vient d’être intériorisé ne peut plus être restitué sans une vision personnelle, et les savoirs préalables sont enrichis par ce nouvel apport.

Si nous admettons que les deux intériorisations, car il s’agit bien de deux passages vers une intégration dans la conscience, d’abord vers la périphérie ensuite vers le centre, obéissent aux mêmes mécanismes, alors nous devons nous interroger sur les propriétés de ceux-ci. Il nous manque ainsi des éléments permettant de comprendre le mécanisme d’intériorisation lors du passage de l’interpsychique à l’intrapsychique du sujet et, plus encore, que ce mécanisme permette la poursuite de l’intériorisation. Ce qui nous amène à nous questionner sur le développement.

Une vision développementale des apprentissages, investiguée également par Piaget, est bien l’un des fondements de l’œuvre de Vygotski. Son attachement à la notion de dépassement du simple associationnisme rejoint parfaitement la notion de régulation homéorhésique de Piaget. Il ne s’agit pas seulement d’intégrer, d’associer, mais bien de développer plus que la simple assimilation ne le permet. La zone de développement proximale doit être vue comme telle. Il ne s’agit pas seulement d’une zone d’assimilation proximale, qui lui est probablement préalable, telle qu’elle a été décrite en d’autres mots dans les travaux de Wallon (1945/1989) ou de Zimmerman (2005), voire dans les descriptions de Rogoff (2003).

Dans des études antérieures, nous avons pu ainsi distinguer, entre autres, une acquisition, une appropriation et une subjectivation du savoir (Buysse & Vanhulle, 2009).

L’acquisition consiste en l’assimilation d’un savoir sans que le système de signification interne de celui-ci ne soit compris par le sujet ou sans que le sujet ne lui ait donné un sens. Il y a appropriation lorsque le sujet comprend les liens de significations qui unissent les éléments du concept selon le cadre épistémique qui est propre à celui-ci. C’est le résultat de l’intériorisation des concepts par le sujet, donc de l’apprentissage. Le sujet comprend les significations internes d’un concept scientifique et peut les expliciter et en faire la synthèse.

La subjectivation a lieu lorsque le sujet donne un sens personnel au concept scientifique. Il est alors en mesure d’expliquer le concept en ses propres mots, de prendre une certaine distance avec le cadre historico-culturel et de donner au savoir un sens qui lui est propre tout en respectant sa logique constitutive. Lors du discours lié à une situation, le sujet explicite les concepts à sa manière et montre que ceux-ci ont un sens pour lui (Buysse, 2011a; Vanhulle, 2005, 2008a, 2009a).

La subjectivation est ainsi vue comme liée à la création d’un sens propre au sujet, suite à la poursuite de l’intériorisation au niveau intrapsychique, sans que ce sens soit pour autant indépendant du sens culturellement établi (Gonzalez Rey, 2008). Il faudrait en effet que l’intériorisation se poursuive et rencontre l’auto-développement du sujet, son mécanisme naturel de développement, pour qu’il y ait développement (Brossard, 2004;

Wertsch, 1985). Lors de cette phase, l’apprenant cherche à donner un sens personnel au savoir. Le résultat est une restructuration des savoirs préexistants de l’apprenant. Nous pouvons en effet supposer que, la plupart du temps, les fonctions sont les mêmes mais que les relations entre elles changent en développant de nouveaux systèmes psychologiques qui modifient les systèmes existants (Vygotsky, 1930/1997).

Ceci correspondrait à la rencontre entre les concepts quotidiens représentant le développement actuel de l’apprenant et les concepts scientifiques dont l’intériorisation établit en quelque sorte la limite supérieure de la zone proximale de développement (Vygotski, 1934/1997).

Ce qui ne peut pas disparaître dans un premier temps, c’est la non-conformité des significations personnelles, portant en elles l’intentionnalité et le parti pris de la conscience

du sujet, avec les significations qui lui sont indifférentes et qui pourraient lui permettre d’exprimer justement ces significations personnelles. Des effets de tension se répètent car le sens créé par le sujet ne peut pas s’exprimer à travers des significations adéquates, et des finalités et intentionnalités propres et sociales sont en conflit (Leont'ev, 1978). C’est l’équilibration de ces conflits que vise la conscience et qui engendre le développement en permettant in fine l’accommodation des significations propres au sujet.

La zone proximale de développement est liée à la fois à cette interaction interpsychique et au potentiel d’auto-développement du sujet. Le développement des concepts scientifiques avance plus vite que celui des concepts quotidiens. Le niveau de maîtrise des concepts quotidiens indique le niveau de développement actuel du sujet et le niveau de maîtrise des concepts scientifiques se situe au sommet de la zone de développement proximal. C’est ainsi que la maîtrise des concepts scientifiques, leur intériorisation, grâce aux apports externes au sujet dans la relation interpsychique, relève de l’apprentissage ; la transformation des concepts quotidiens grâce aux concepts scientifiques intériorisés, et la fusion dialectique des deux, relève de la poursuite de l’intériorisation et donc du développement du sujet. Ce développement ne saurait dès lors qu’être psychologique, en tant qu’englobant l’individu dans sa totalité, car la mise en lien propre à la conscience ne distingue pas les systèmes cognitifs des autres. Le concept scientifique ne saurait subsister, tel quel, à de telles mises en lien et, lui aussi, sera dès lors subjectivé. La zone de développement est donc bel et bien l’étendue entre la possible appropriation médiatisée et la subjectivation des concepts et savoirs au sein de la conscience, avant que cette appropriation ne poursuive son intériorisation. Il ressort d’une telle vision qu’il ne serait pas nécessaire de déconstruire les concepts quotidiens97, bien au contraire, car ils représentent l’état de développement du sujet sur lequel il se fondera, en partie, lors de la poursuite de l’intériorisation. Progressivement, la pertinence et la cohésion des concepts scientifiques devraient faire leur chemin sans nécessité de déconstruire les concepts quotidiens à l’avance.

Cette manière de concevoir le développement à travers la création d’un sens lié à des concepts permet, à notre avis, de cerner la double appartenance des savoirs à la fois objectifs/sociaux et subjectifs/personnels.

Ce qui nous semble important dans cette notion de développement, c’est que le sujet pourra par la suite atteindre d’autres apprentissages. Il peut aller ailleurs que là où il a été auparavant. Il ne s’agit pas nécessairement d’une progression mais bien d’un changement qualitatif et visant l’autonomie98. Nous voyons ici que le contrôle de ce processus doit être dévolu totalement à l’apprenant et qu’il devrait l’avoir intégré à son fonctionnement intrapsychique.

Soulignons que nous constatons que la plupart des concepts scientifiques sont d’abord l’objet d’une acquisition ou d’une appropriation. La subjectivation n’a pas nécessairement lieu, du moins dans un premier temps. Vygotsky (1934/1978, p. 57) soulignait déjà:

La transformation d’un processus interpersonnel en un processus intrapersonnel est le résultat d’une longue série d’événements développementaux. Le processus en cours de transformation continue

97 Il convient de ne pas confondre concepts quotidiens et concepts erronés : le concept quotidien est bien une élaboration du sujet. On pourrait aller jusqu’à dire qu’un concept scientifique totalement subjectivé, au point que le sujet en ait oublié l’origine, voire l’épistémie, est, aux yeux du sujet, un concept quotidien.

Les sources du concept quotidien du sujet adulte sont d’ailleurs difficiles à retracer : est-ce son expérience et son interprétation personnelle ou d’anciens concepts scientifiques intériorisés et subjectivés il y a longtemps.

Leur statut de validité scientifique ou culturelle quarante ans après leur intériorisation peut également totalement troubler l’analyse.

98 Il est vrai que Vygotski, dans l’air de son temps, avait tendance à voir une échelle de progression des sociétés.

pendant longtemps d’exister et de changer en tant que forme externe d’activité avant de se tourner entièrement vers l’intérieur. Pour de nombreuses fonctions, le stade des signes externes se poursuit pour toujours, c'est-à-dire que c’est leur stade final de développement. D’autres fonctions se développent plus avant et deviennent progressivement des fonctions internes. Toutefois, elles ne prennent seulement le caractère d’un processus interne qu’à la suite d’un développement prolongé.

Leur transfert vers l’intérieur est lié à des changements dans les lois qui gouvernent leur activité;

elles sont incorporées à un nouveau système avec ces propres lois.

C’est souvent bien plus tard que l’internalisation porte ses fruits et qu’on peut constater une subjectivation. Nous avançons toutefois que ce processus naturel peut être influencé à travers des dispositifs conçus à cet effet (Buysse & Vanhulle, 2009). Cette démarche est à notre avis essentielle car, d’un point de vue développemental, l’appropriation de concepts sans poursuite de l’intériorisation correspond à une sorte de schizophrénie dans laquelle le développement est limité à une partie du système de l’apprenant. Dans le cas extrême où, lors d’une appropriation, il n’y a que régulation d’un système isolé, reposant sur une référence exclusive aux savoirs et concepts proposés eux-mêmes, on ne pourrait pas parler d’une conscience à l’œuvre en tant que mise en lien de différents systèmes. Il n’y aurait pas harmonisation des différentes équilibrations ni téléonomie de la pensée. La réflexivité contrôlante serait probablement largement tributaire de systèmes externes à l’apprenant, et la réflexivité structurante limitée. Dans un tel cas, on ne saurait ni parler de subjectivation ni de développement.

Ceci ne veut pas dire que le développement devrait s’étendre à toutes les fonctions en même temps et englober tous les systèmes. Des différences existent quant au développement des différents systèmes (Wertsch & Tulviste, 1992), mais, justement, il devrait y avoir articulation, harmonisation, de différents systèmes entre eux, même si cela ne s’étend pas à toute la conscience du sujet. L’ensemble du système psychologique n’est pas nécessairement modifié. Dans ce cas, certains liens s’effacent progressivement (Vygotsky, 1930/1997) à moins d’être mobilisés régulièrement. Le sujet s’en remet à son habitus et se fie progressivement au fait que les routines fonctionnent sans qu’il n’ait plus besoin de s’interroger sur leurs significations. Le développement scolaire ou professionnel peut ainsi rester séparé du développement de la personne. Il peut y avoir un rôle se rapportant à une activité seulement, avec une conscience limitée à cette activité et dissociée de la personne dans son ensemble. Le développement ne prendrait toutefois sa pleine expansion qu’en modifiant et en étant influencé par l’ensemble du système psychologique de l’apprenant99, provoquant un ensemble de restructurations.

Dès lors, il convient de s’interroger sur ce qui permet, d’une part, l’intériorisation, donc l’élaboration d’un premier sens, et, d’autre part, la restructuration des autres systèmes de l’apprenant, dépendant en quelque sorte de la poursuite de cette intériorisation au niveau de la conscience, donc un développement.

5.4 La médiation

Si nous admettons que le sujet intériorise principalement des savoirs culturellement établis, nous pouvons considérer que les savoirs ne font pas l’objet d’une intériorisation directe. Toute opération d’intériorisation100 semble en effet impliquer un troisième élément, médiateur. Même pour la mémorisation, l’intériorisation ne peut être qu’indirecte, médiate (Vygotsky, 1934/1978).

99 Voir les besoins d’actualisation, de congruence du sujet, et l’apprentissage transformationnel (Mezirow, 2001).

100 Ici nous excluons volontairement la mémorisation sensori-motrice et la mémorisation à court terme pour lesquels une intériorisation «directe» est envisageable, quoique, là-aussi, peu efficiente.

Tout semble ainsi devoir bénéficier d’une médiation avant d’être intériorisé, d’autant plus s’il s’agit de pouvoir comprendre : « […], la compréhension ne consiste pas dans la saisie immédiate d’une vie psychique étrangère ou dans l’identification émotionnelle avec une intention mentale. La compréhension est entièrement médiatisée par l’ensemble des procédures explicatives qu’elle précède et qu’elle accompagne » (Ricoeur, 1986, p. 211).

C’est d’autant plus vrai si on cherche une compréhension de son propre fonctionnement : « […] il n’est pas de compréhension de soi qui ne soit médiatisée par des signes, des symboles et des textes ; la compréhension de soi coïncide à titre ultime avec l’interprétation appliquée à ces termes médiateurs» (Ricoeur, 1986, p. 29). C’est dans la tentative de compréhension des médiations elles-mêmes que la connaissance de soi peut se dessiner. Il s’agit là d’un dialogue entre ce que notre conscience, en tant que mise en lien de systèmes, aurait tenté d’élaborer comme réponse, sans la présence de la médiation, et ce qu’elle a pu élaborer grâce à cette médiation. C’est dans le travail d’intériorisation de la médiation, et plus encore dans la distance qu’on peut prendre par rapport à cela, que la connaissance du fonctionnement de notre propre conscience se dessine.

Comme nous l’avons vu, l’activité du sujet, externe ou interne, est médiatisée et régulée par un réfléchissement de la réalité (voir aussi Piaget, supra). Ce que le sujet semble voir de cette réalité, ce sont des intentions, des motifs, des finalités (voir aussi Meltzoff, supra), mais il intériorise en même temps une manière de réguler son activité (Leont'ev, 1978). Il convient donc de se poser la question de ce qui permet au sujet de trouver une manière appropriée de réguler son activité, tenant compte du fait que cette activité peut être psychique ou physique. La nécessité de disposer de médiations dépasse donc le besoin de signes afin de pouvoir intérioriser des savoirs. C’est ainsi que les médiations doivent être considérées comme s’inscrivant dans une culture donnée, et comme reflétant les principes organisateurs pouvant être inférés de certains comportements partagés au sein d’une société donnée. Les médiations sont donc, par définition, culturelles.

Elles existent d’abord au niveau interpsychique avant d’être intériorisées. Souvent elles sont également existantes au niveau matériel, au sein d’un artéfact. La maîtrise des significations se produit en effet déjà dans l’activité de l’enfant avec des objets matériels. Il acquiert ainsi des significations concrètes en lien avec les objets et, plus tard, il maîtrisera les opérations logiques qui en découlent. Une fois intériorisées, elles deviennent des significations et des concepts abstraits, et leur mouvement constitue une activité mentale intrapsychique, une activité au niveau de la conscience (Leont'ev, 1978).

Lors de l’intériorisation, les médiations deviennent également progressivement un moyen utilisé par le sujet pour piloter ses processus psychiques. Cette intériorisation de la médiation elle-même fait que la nécessité d’un moyen-stimulus externe cesse d’exister. Par la suite, cette intériorisation à un effet de restructuration plus profonde, ainsi, qu’éventuellement, un effet sur les autres systèmes du sujet. Nous pourrions ainsi parler de la poursuite de l’intériorisation au niveau intrapsychique.

Nous estimons que la médiation intériorisée doit donc permettre cet effet : elle doit garder des propriétés qui invitent cette ‘poursuite de l’intériorisation à l’intrapsychique’.

Celle-ci se traduit par :

- un passage d’un sous-système à l’autre au sein d’un système donné – donc une restructuration en profondeur;

- et/ou par un passage d’un système à l’autre – donc son intériorisation dans d’autres champs, donc une tentative de restructuration au niveau de la conscience globale du sujet.

Dans ce processus, la médiation elle-même est subjectivée. Elle est d’autant plus subjectivée quand il y a poursuite de l’intériorisation. Il est important de voir que la

médiation est dans un premier temps associée uniquement au savoir à intérioriser, mais que, par la suite, elle a un potentiel d’action en dehors de ce savoir dont elle a permis l’intériorisation. Il s’agit d’une médiation dérivée qui est, en quelque sorte, devenue propre à l’apprenant.

Afin de tenter de cerner une des propriétés essentielles des médiations, nous prendrons un exemple au niveau du langage. Sur le plan interpsychique, le langage permet le plus souvent une identité entre sens et signification car il est contextualisé ou, plus exactement, car il opère dans une contextualité partagée. Dès que la contextualisation manque de précision, la pluralité de sens de l’énoncé devient possible. Par contre, en cas de concordance totale des sujets et du contexte, peuvent subsister les prédicats seulement (voir le Dialogue des ivrognes de Dostoïevski, cité par Vygotski, 1934/1997, pp. 470-471) excluant du discours toute personne qui ne connaît pas le sujet des prédicats.

Sur le plan intrapsychique, cette relation entre signification du mot et sens n’est pas nécessairement nourrie par le contexte social, interpsychique, mais par le contexte intrapsychique. Ce contexte est composé des informations pertinentes appelées afin d’interpréter la signification et de lui donner un sens. Ainsi va l’exemple donné par Vygotski (ibid., 485): le titre « Les âmes mortes » de Gogol dépasse largement la signification de l’énoncé pour la personne qui a lu le poème.

Il n’en reste pas moins que, dans un premier temps, il y a une œuvre, action sensée, texte ou œuvre d’art, qui a été l’objet d’une tentative de compréhension :

Tout savoir, toute œuvre, propose des clefs de compréhension qui sont autant de médiations à disposition pour donner un sens. Pour autant évidemment que l’on accepte que la compréhension ne peut être ni exclusivement le fait du sujet ni exclusivement le fait des propositions qui lui sont faites :

[…] nous ne nous comprenons que par le grand détour des signes d’humanité déposés dans les

[…] nous ne nous comprenons que par le grand détour des signes d’humanité déposés dans les