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Le sport se développe tout au long du XXème siècle pour devenir une pratique sociale à par entière, au même titre que les loisirs culturels. Plus précisément, nous assistons à une massification des pratiques sportives dans notre société qui touche l’ensemble des couches de la population. Par conséquent, le sport n’est plus seulement réservé à une minorité. A travers de multiples canaux, cette massification engendre sur le plan spatial une diffusion des pratiques sur l’ensemble du territoire national propageant alors cette pratique sociale au sein du milieu rural. L’espace rural voit se développer un ensemble de pratiques, soutenues par des structures associatives notamment, répondant à une demande exprimée par les ruraux. Ces derniers bénéficient donc de ce phénomène de massification et cela contribue à modifier, en partie, leur mode de vie. Cette diffusion des pratiques sportives s’accompagne de la construction d’équipements dédiés à la pratique de ces activités. Ainsi, sur le plan sportif, la société rurale connait donc une transformation, qui tend à modifier le paysage rural, tant au niveau structurel, avec le développement d’associations, qu’au niveau matériel avec l’apparition de nouvelles infrastructures.

Les Etats généraux du Sport en 2002 ont aussi réactivé les réflexions régionales dans l’aménagement territorial. Comme nous le rappellent William Gasparini et Gilles Vieille Marchiset77, en matière de sport, les collectivités territoriales remplissent actuellement trois grandes missions :

76 Tonini B., La dynamique spatiale des pratiques sportives. Des patronages à l’intercommunalité. L’exemple du

basket-ball, du football et du rugby dans les Pays de la Loire, Thèse pour l’obtention du doctorat de géographie, Université de Nantes, 2007.

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Gasparini W., Vieille Marchiset G., Le sport dans les quartiers. Pratiques sociales et politiques publiques, op.cit., p.132-133.

37 - L’aménagement du territoire avec des infrastructures sportives afin de permettre la pratique sportive et de loisir du plus grand nombre à travers la construction et la rénovation des équipements sportifs fermés ou ouverts, spécialisés ou généralistes. - L’animation du territoire grâce à des compétitions sportives de haut niveau et de masse

en soutenant certaines manifestations sportives de masse ou certains clubs de haut niveau.

- L’intégration des populations locales grâce au sport en favorisant la cohésion sociale afin d’éviter et de réduire les fractures sportives en matière d’accès.

Ainsi, suite à l’avènement et au développement progressif du sport dans notre société, nous assistons durant la seconde moitié du XXème siècle, à une massification des pratiques sportives. Cette sportivisation s’accompagne, non seulement d’un accroissement démographique en matière sportive, mais également d’évolutions en termes d’organisation sportive et législative. Le sport s’implante donc au sein d’une culture de masse dont il convient d’appréhender ses effets au niveau de l’aménagement et de sa diffusion territoriale, particulièrement en milieu rural.

Le sport comme activité sociale s’est développé en utilisant d’abord des lieux indifférenciés et destinés à d’autres usages. Mais la rationalisation du sport et surtout sa massification, ont entraîné la construction de premières infrastructures spécialisées78. Il convient d’insister sur l’intervention de l’Etat dans l’édification des équipements sportifs à partir des années 1960. Ce modèle de planification à long terme, a permis au territoire national de se couvrir d’installations. Aujourd’hui, la France dispose d’un patrimoine d’équipements sportifs importants. En 2004, lors du dernier recensement, « plus de 313 000 lieux ont été recensés à partir de plus de cent variables distinguant

250 500 équipements rassemblés dans 135 000 installations sportives et 65 000 espaces et sites de nature.79 » Ce sont les collectivités territoriales et plus particulièrement les communes qui ont principalement bénéficié des équipements implantés grâce à la planification de l’Etat. Mais ce sont surtout elles qui ont également participé aux dépenses que requiert la diffusion d’équipements sportifs sur tout le territoire. Elles assurent l’ancrage territorial des installations puisqu’elles sont propriétaires de près de 80% d’entre elles et en gèrent 70%. Cela conduit à l’instauration d’organismes de concertation pour l’utilisation des installations sportives. Le modèle des offices municipaux s’est généralisé en prenant des formes variées selon la taille des communes, le choix de gestion et l’importance des réseaux associatifs et des clubs. Le rôle de ces organismes, outre l’établissement d’un calendrier d’occupation des lieux sportifs, est de donner une visibilité de l’action municipale en renforçant l’identité locale, en établissant une logique de collaboration entre les municipalités et les clubs et en intégrant les dirigeants associatifs dans un processus de mobilisation autour du pouvoir municipal. La gestion des équipements publics devient un moyen de

78 Voir à ce propos : Augustin J-P., « Générations d’équipements sportifs », Annales de la recherche urbaine, n°79,

1998, p.5-13.

38 renforcer le pouvoir local mais pose également la question du coût et de l’adaptation des équipements.

Toutefois, suite aux lois de décentralisation et à la recomposition des territoires (intercommunalité), la tendance actuelle pose de nouvelles questions en matière de gestion des équipements et de programmation. Cela prend en compte plusieurs évolutions modifiant progressivement les perspectives d’utilisation. Cela fait suite à l’émergence d’une demande de plus en plus diversifiée des pratiquants, de l’accroissement des mobilités quotidiennes ou de fin de semaine remettant en cause l’organisation des lieux de proximité. Inscrits dans l’évolution des pratiques, les espaces se sont donc diversifiés. Trois types peuvent se distinguer selon leur degré de « vocation » sportive. D’abord la construction d’ « équipements sportifs par destination » concerne les espaces liés aux sports classiques favorisant l’édification de lieux artificiels conçus à leur intention (stade, piscine, patinoire, etc.). Ensuite, les aménagements sportifs « par adaptation » se rapportent aux activités de nature avec des sites naturels ou des équipements existants qu’une intervention de l’Homme a permis de rendre propres à un usage sportif (sentier de randonnée, etc.). Enfin, « les espaces d’activités physiques et sportives par appropriation » relèvent de pratiques qui s’organisent dans des lieux publiques réservés à d’autres usages (espaces urbains, piétonniers et cyclistes, de détente, naturels de loisir, etc.)80.

Par rapport à la diffusion de ces équipements sur l’ensemble du territoire, John Bale effectue un juste lien entre le type d’équipement et l’utilisation que l’on peut en tirer suivant les propres ressources démographiques de l’espace d’implantation. Ce lien justifie la diffusion du sport et, en quelque sorte, le sous-équipement du milieu rural. En effet, à travers la fonctionnalité des équipements sportifs et la théorie des centres sportifs, Bale constate que la diffusion du sport a permis à diverses agglomérations de plus ou moins grande envergure de développer une certaine sensibilité sportive. Il propose une théorie des lieux sportifs qui se résume en trois points : « Premièrement, la fonction principale d’un lieu sportif est de fournir des éléments sportifs à un

arrière pays environnant. Les lieux des sports sont par conséquent situés dans leur zone de marché, les plus importants proposent des lieux de haut niveau sportif et les plus grands équipements, qui sont moins nombreux et plus largement espacés. Les seuils de population concernés sont élevés. Deuxièmement, les lieux sportifs d’ordre secondaire fournissent des équipements utilisés par des zones d’influence limitée, le seuil de population est plus faible et les installations sont de taille réduite. Troisièmement, la hiérarchie des lieux sportifs qui s’organise a pour effet de rendre aussi efficace que possible la disposition des équipements et des services sportifs, d’abord pour le consommateur qui peut réduire ses déplacements pour bénéficier du sport qu’il désire pratiquer ou

80 Voir : Michon B., Terret T., Pratiques sportives et identités locales, op.cit. Ces typologies usuelles constituent

davantage des nomenclatures conventionnelles répertoriant les types d’équipements les plus nombreux que des classifications raisonnées.

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voir pratiquer, ensuite pour les promoteurs qui doivent maintenir un seuil minimal de rentabilité des équipements et des spectacles sportifs.81 »

Ainsi, le schéma du système sportif est comme dans la théorie des lieux centraux, organisé en nid d’abeilles avec trois types de centres. A l’échelon le plus vaste, les centres régionaux disposent d’équipes et d’équipements de premier plan et sont capables d’attirer un large public. A un moindre échelon, les centres locaux qui sont les plus rapprochés disposent d’une clientèle et d’équipements de proximité. Enfin, à un échelon moyen, les centres de district proposent des services et des spectacles intermédiaires.

De plus, suite à la massification des sports dans notre société, l’ensemble de la population s’est approprié les activités physiques et sportives. Le sport est devenu une activité sociale à part entière. Par l’intermédiaire de différents canaux de diffusion (médias par exemple), des migrations des néo-ruraux et par la multiplicité des mobilités (journalières, saisonnières, etc.) le sport s’est propagé sur l’ensemble du territoire, se développant par la même dans les campagnes. Cette diffusion du sport dans les campagnes conduit les ruraux à rompre avec leur traditionnel mode de vie en intégrant les activités sportives dans leur comportement. Au niveau local, cette pratique sociale devient également prise en compte au niveau des politiques de développement territorial avec la mise en place d’espaces, de lieux consacrés à la pratique. Sous l’impulsion des lois de décentralisation mais plus particulièrement du plan régional d’équipements sportifs de 1987 (Plan Bergelin82), les collectivités territoriales acquièrent des compétences en matière de sport et notamment dans sa diffusion et sa promotion par les équipements. De nouveaux modes de gouvernance sportive se mettent en place. Le développement du sport dans les campagnes s’accompagne donc de la construction de nouvelles infrastructures sportives ou du renouvellement de plus anciennes, modifiant le parc d’équipements sportifs. Le paysage sportif se trouve alors largement modifié.

3 Les pratiques sportives associatives rurales : facteur

de dynamisme