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Funktion: Vorstandsmitglied und Verlagsverantwortlicher des CETIM Datum: 18. Oktober 2019

Ort: Genf, Büro des CETIM (Seite 1)

— Quels étaient les différents objectifs du livre ?

— Le but de la première partie était la narration et l’explication de « Comment on est arrivé à obtenir une Déclaration pour les droits des paysans ». Le but de la deuxième partie était de dire « Voilà le contenu de la Déclaration, à quoi elle peut servir, qu’elles sont ses points forts et faibles, etc. ». Et un troisième but était de présenter Coline Hubert comme une jeune chercheuse enthousiaste. Disons, faire valoir ou excuser le style de la rédaction. Ce constat est présenté dans l’introduction et annonce le style du bouquin.

— Pourquoi le livre a-t-il une première et une deuxième partie ? Quel public avez-vous ciblé ?

— L’opinion de Melik (le directeur actuel du CETIM, ndlr.), Coline et moi était de commencer par raconter l’histoire de la Déclaration pour en arriver à son contenu. Donc ce choix

thématique a déterminé la structure du livre et de faire une partie un et deux. Ça voulait aussi dire une certaine inflexion des publics choisis. Car pour nous, la narration de la saga et du rôle du CETIM au milieu d’une organisation paysanne comme La Vía Campesina (et FIAN accessoirement) est d’un grand intérêt pour un large public en dehors de la question immédiate paysanne. C’est-à-dire, il y a tout un processus : comment amener une bataille, comment on travaille au sein de l’ONU, etc. Donc ça s’adresse à un public qui s’intéresse au boulot de l’ONU et d’une ONG au sein de l’ONU. Cette partie-là peut s’intéresser aussi à la question « Qu’est-ce que c’est La Vía Campesina ? », « Comment une organisation paysanne comme La Via Campesina est construite ? », etc.

La deuxième partie s’adresse plus précisément à des activistes, soit paysans, soit droits de l’homme, soit plus généralement des politiciens, des gens qui s’intéressent à la question paysanne, la position des paysans et paysannes et la violation des droits de l’homme dont ils ou elles sont victimes. Donc en quelque sorte, il y a un peu deux publics cibles différents à travers la partie un et deux.

Quand on dit grand public, en sachant qu’on n’arrive rarement à un tirage monstrueux de 10 000 ou plus d’exemplaires, dans ce cas-là, on a tiré 1500 exemplaires. Donc on essaie de demander aux rédacteurs d’avoir un langage relativement simple, pas trop ou peu

académique et compréhensible par des personnes qui font l’effort de lire, mais qui n’ont pas forcément une formation ni dans le domaine ni intellectuelle. Ça, c’est un effort général qu’on demande. Il est assez difficile à remplir et je crois que c’est d’autant plus difficile dans

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l’histoire, etc. Il y a une tendance à parler d’une manière compliquée pour se démarquer du grand public, du tout-venant. En tous cas il n’y a pas un effort soutenu et entrainé de la part des lycées et universités pour écrire d’une manière accessible à tout un chacun. Ça me semble être une politique plutôt anglo-saxonne ou il faut se rendre intelligible au plus grand nombre.

— Est-ce que vous avez déjà entendu parlé du Plain Language ?

— Oui, dans une certaine mesure.

— Donc ça va dans ce sens-là : un langage facile et accessible.

— Voilà.

— Avez-vous pensé à ça quand vous avez donné des consignes à l’auteure, Coline Hubert ?

— On a pensé à ça quand on a donné les consignes à Coline, même à plusieurs reprises on l’a répété. Comme je l’ai indiqué, en ayant les premiers jets de Coline dans les mains, on a compris quatre choses : 1. Elle a une certaine aisance d’expression, elle écrit vite avec une certaine facilité. 2. Elle a une tendance à la répétition. 3. Un langage assez imagé, parlant.

4. Certaines insécurités grammaticales et syntaxiques, mais pas bien graves. Donc premièrement, on l’a encouragée à utiliser autant que possible un langage simple ou à expliciter des mots qui ne pourraient pas être compris par un grand public, par exemple par une note de bas de page ou par une périphrase. Deuxièmement, à essayer d’éviter les répétitions. Et troisièmement, à faire des choix dans le style de narration et surtout par rapport aux choix des temps. Surtout la première partie, c’est un discours assez complexe, dans lequel on suit une trame chronologique, mais des fois on fait des retours en arrière, des sauts en avant, etc.

Melik faisait le travail concernant l’exactitude de ce qu’elle racontait, par rapport aux

événements, la suite des interventions, au rôle des acteurs, etc. Et moi j’essayais de la cadrer d’un point de vue de l’écriture, tout en disant que ça, c’est une pratique qu’on a ici au sein du CETIM. Mais voilà, les auteurs ont leur style, on essaie d’éviter les fautes grossières grammaticales et de syntaxe et sinon on laisse le style de la personne s’affirmer.

En occurrence avec Coline ça tombait assez bien, car une fois qu’on avait enlevé les répétitions, le verbiage, etc., c’était un langage assez parlant à l’imaginaire. Et finalement assez simple. Si pour autant elle l’a fait, elle a pris la peine d’expliquer des mots relevant du vocabulaire juridique, donc d’expliquer la portée de certains concepts. Voilà comment on a travaillé ensemble.

— Dans le contexte de la consigne d’employer un style facile et accessible, pourriez-vous m’éclaircir plus précisément le travail de révision, en quoi ça consistait et quel type d’interventions avez-vous fait ?

— Il y avait une première chose, on admettait et personnellement j’admets qu’il y ait des répétitions dans un bouquin, d’autant plus dans un bouquin en deux parties comme celui-là.

Partant de l’idée que certains lecteurs vont lire que la première ou la deuxième partie. C’est

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tolérable, mais ça ne doit pas être trop souvent le cas et ça doit être signalé par un petit rajout par exemple, comme nous l’avons dit pour que le lecteur n’ait pas l’impression que l’auteur radote, se répète, etc. Le discours doit être maîtrisé. Mais des fois, il est utile qu’on raconte une deuxième fois la même chose ou qu’on la re-signale pour que le suivi du

discours soit accessible au lecteur ou à la lectrice. Ça, c’est une chose. Par contre, il y a eu un certain nombre de redites qui ont été supprimées. Parce que ça revenait à redire la même chose avec d’autres mots, une redondance. Et troisième point, ayant pris cette option de séparer clairement ces deux parties et de les mettre dans cet ordre, il fallait aussi s’assurer que cette cohérence existe bien dans le texte, qu’on n’était pas en train de revenir en arrière. Des fois, la séparation n’est pas totale. Du point de vue du vocabulaire, la consigne était d’utiliser peu d’anglicismes (si utilisés mis en italique) et pour les termes purement juridiques, on a essayé de les expliquer s’ils n’étaient pas dans le langage courant ou que l’acceptation n’était pas connue du grand public (par exemple : le public pense savoir quel est le concept, alors que le concept ne couvre pas du tout ce sens-là ; je pense aux faux amis). Et quand on dit langage accessible, c’est plutôt un langage pour grand public – en partant de l’idée que le lecteur ou la lectrice qui a un niveau de formation scolaire moyen, qui lit et qui aime lire en faisant un effort pour qu’il ou elle puisse comprendre ce qu’il ou elle lit.

— Vous avez mentionné les mots en italique. Vous avez par exemple mis des mots ou un ensemble de mots en italique qui se retrouvent tels quels dans la Déclaration. Quels étaient les critères pour que vous choisissiez l’italique ?

— La plupart du temps, c’était Coline qui les avait déjà introduits dans son manuscrit. Bon, la première chose, c’est que l’italique s’utilise en principe pour introduire des mots étrangers.

Mais dans ce livre-là, en occurrence, on l’utilisait aussi pour souligner un élément important dans le déroulement du discours (premièrement, deuxièmement, etc.), c’est une manière courante de faire pour que le lecteur puisse se référer mentalement à la trace de la

narration. Mais effectivement on l’a aussi utilisé pour faire référence à des concepts ou des éléments clés qui ont fait l’objet de discussion, qui ont été importants dans le choix du vocabulaire à l’ONU et qui se reflètent dans la Déclaration elle-même. Donc à certains

endroits, on soulignait avec l’italique que ce n’était pas par hasard que ces trois mots accolés étaient choisis et pas d’autres.

— Si on revient au sujet du style. Coline Hubert m’a dit qu’il fallait trouver le style ONG : qu’est-ce que ça veut dire de votre point de vue?

— Il est vrai qu’on peut déceler un certain style des ONG des droits de l’homme. Il y a un certain vocabulaire, une certaine manière d’aborder les choses et les concepts ont un arrière-fond qui se base sur les droits de l’homme. De ce point de vue, c’était important de ne pas utiliser un langage qui ne défend pas les droits humains et qu’il n’y ait pas un décalage. Je dirais qu’il faut être attentif à ça. Si par exemple j’utilise le mot « lutte des classe », le lecteur va éventuellement se demander, « de quoi il me parle » ou se dire « ah c’est un marxiste ». Mais si on parle de différents groupes sociaux ou de la divergence d’intérêt, ça passe.

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— Oui, l’accessibilité au grand public peut être un souci commun des différents auteurs.

Pour moi la question, c’est aussi dans quelle vision du monde on le situe, ce style, car il y a clairement des langages typés. On est clairement dans un langage très « droits de

l’homme », mais on ne déborde pas de cette manière d’aborder les choses.

— Comment expliquez-vous le choix d’employer les pronoms personnels nous et on ?

— Je dois dire que le passage du nous ou on, il est très courant en français. Dans le langage courant, on passe facilement de l’un à l’autre, alors qu’on décrit la même situation. Donc il n’y a pas nécessairement une systématique. Des fois le nous a été éventuellement préféré, car l’implication du CETIM était précise, marquée. Et dans d’autres cas, il s’agissait d’un mouvement plus général, donc le on était plus adapté. Mais en tous cas, je me ne souviens pas qu’on ait donné une consigne à ce propos. En général, je ne vais pas vous prétendre qu’on donne des consignes extrêmement précises, car je n’ai pas fait d’études d’éditeur.

— Donc finalement votre travail de révision s’appuie aussi beaucoup sur votre instinct ?

— Oui, ça s’appuie plus sur l’expérience dans le passé que sur des concepts ou consignes établis ou extrêmement précis. En général, on n’a pas suivi de règles très précises.

— Par rapport aux choix des verbes : devoir, falloir, pouvoir, ce sont trois différents niveaux d’exigence. Que pourriez-vous dire sur ces choix ? Sont-ils donnés par la Déclaration en elle-même ?

— Je crois que le choix de ces mots était plus ou moins rigoureux vu la Déclaration et les négociations. En même temps – au-delà de ces trois verbes – il y a aussi une appréciation linguistique qui est celle de Coline ou la mienne par rapport à l’emploi judicieux de tel ou tel verbe.

— Concernant la terminologie et le vocabulaire à employer : y avait-il une ligne directrice ? Par exemple : éviter trop de mots étrangers ou juridiques, utiliser des synonymes, etc.

— Il fallait effectivement traduire le résultat des négociations. C’est un élément et la deuxième chose, c’est vraiment essayer de se mettre à la place du lecteur moyen sans connaissance particulière du juridique. Ce qui est mon cas, je ne suis pas un juriste. Donc il y avait plusieurs fois où je me disais « Ah, là, je ne suis pas sûr de bien comprendre » ou je ne savais pas si je comprenais bien le sens juridique d’une phrase et je me demandais « est-ce qu’elle a un sens particulier ? »

— Par rapport à la structure de la deuxième partie (introduction, titre, sept articles phares de a. à g., et puis une conclusion, un encadré). Comment expliquez-vous la structuration du livre sur les pages 99 à 124?

— Ça dépend beaucoup du sujet, du manuscrit de départ et de l’auteur. En occurrence, avec l’accord de Coline, on a un peu inversé l’ordre de ce chapitre. D’abord parler des articles phares, ensuite développer certains concepts par la suite. Les encadrés, c’est moi qui les ai

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placés, en prenant en considération la mise en page. Il y a clairement une influence du graphisme et de la typographie à la lecture.

La dernière partie de l’entretien (35 min) portait sur des sujets variés, voici quelques extraits :

— A plusieurs endroits, vous vous référez à la Déclaration de La Vía Campesina. De quoi s’agit-il ?

— Oui, ce n’est peut-être pas suffisamment clairement dit, donc c’est une critique du livre.

La Vía Campesina Indonésie avait rédigé un premier texte avec l’intention de le faire

introduire à l’ONU, de le faire adopter. Ce premier texte, nous au CETIM on l’a reçu, on nous l’a soumis. C’est là où nous avons fait travailler Christophe Golay qui était à ce moment civiliste chez nous et qui avait déjà travaillé sur ces questions-là. Il a retravaillé le texte et ensuite il est reparti à La Vía Campesina, qui l’ont relu. Et à un moment donné ce texte a été introduit à l’ONU sous le bras de Jean Ziegler. Donc pendant tout un stade, on avait ce texte de La Vía Campesina qui avait suivi plusieurs étapes (corrections, relecture surtout interne à La Vía Campesina). Ensuite, une fois à l’ONU, le travail de re-rédaction a commencé, avec des experts onusiens, qui connaissent le langage juridique, qui connaissent la maison, comment introduire des notions, qui savent comment se référer à des textes existants au sein de l’ONU, etc. Donc il y a un nouveau texte qui a été écrit, bien rédigé et qui s’appuie au niveau contenu sur celui de la LVC. Mais bien sûr, il a fallu aussi lâcher certains éléments. (…)

— Le grand public et aussi les organisations paysannes de base ont une appréciation ou bien une vision de l’ONU qui est caricaturale. Soit une attente incroyable ou bien ils pensent que ça ne sert à rien, que les textes vont finir dans les tiroirs. Il y a ces deux pôles et entre les deux, il y a toutes les positions intermédiaires. Et on tenait compte de ce fait dans la rédaction du livre. Moi je pense que si on fait de la politique, il faut faire comme Mao Zedong disait : « Pour jouer du piano, il faut mouvoir les dix doigts. »

— Un objectif du bouquin, c’était justement de comprendre comment fonctionne l'ONU et de montrer cette démarche qui n’est pas naïve, qui n’attend pas la lune, mais qui est patiente, intelligente, maline et qui peut être appliquée à d’autres domaines que des droits des paysans. Certes, on a franchi une étape avec la Déclaration, mais en vrai tout reste à faire. C’est un instrument de lutte, c’est tout.

— La fonction de la deuxième partie, c’était de montrer qu’une Déclaration, ce n’est pas n’importe quoi, c’est utile. Même si une Déclaration n’est pas contraignante. Obtenir directement un traité, c’était impossible, car ça entre en pleine contradiction avec la domination du droit international commercial, etc. Ça se heurte de front ! Mais pour nous, une Déclaration a une grande importance dans la lutte politique.

Anhang VII: Déclaration des Nations Unies sur les droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales

https://undocs.org/fr/A/RES/73/165

Anhang VIII: Erklärung der Vereinten Nationen über die Rechte von

Kleinbauern und -bäuerinnen und anderen Menschen, die in ländlichen Regionen arbeiten

https://undocs.org/ot/A/RES/73/165