• Aucun résultat trouvé

Encadré II.1 : Les quatre systèmes scolaires européens

SECTION 4. LES FACTEURS SOCIOECONOMIQUES ET POLITIQUES

4.5. Les inégalités économiques

Le débat sur les inégalités de revenus et la croissance est à la fois ancien et actuel. Pour certains économistes, l’accroissement des inégalités est une phase transitoire du développement économique (Kuznets, 1955) comportent des effets vertueux pour la croissance économique. En effet, la première réponse aux questions sur la relation inégalités-développement économique fut apportée par Kuznets. L’auteur a mis en évidence deux phases d’évolution entre les inégalités de revenus et la croissance économique. Tout d’abord, il la croissance économique s’accompagne d’un accroissement simultané des inégalités. Ensuite, une fois que le rééquilibrage de répartition des revenus dans la société est atteint et que le pays a atteint un certain seuil de développement, les inégalités atteignent elles aussi leur point d’inflexion. Elles amorcent alors leur décroissance. De ce point de vue, l’augmentation des inégalités n’est qu’une phase « primaire » du développement économique, elle-même préalable à un rééquilibrage de la répartition des revenus dans la société. ON retrouve aussi cette pensée dans l’hypothèse de Kaldor selon laquelle la propension marginale à épargner serait plus forte chez les riches que chez les pauvres. Sur cette base, on s’accorderait que les économies inégalitaires disposent d’un niveau élevé d’épargne qui, à son tour, favoriserait l’investissement et accélérerait la croissance économique (Orazio Attanasio et Chiara Binelli, 2004)77.

Sur le plan empirique, cette relation est observables en au Botswana et en Afrique du Sud où coexistent des niveaux de revenus relativement élevés avec une forte inégalité de revenus

77Orazio Attanasio et Chiara Binelli, (2004) : « Inégalités, croissance et politiques rédistributives », Afrique contemporaine - Automne 2004

de relation linéaire entre les inégalités et l’épargne. De plus, on a pu observer dans le temps que les inégalités intra-nationales et interrégionales dans cette région constituent une entrave supplémentaire à l’accès aux services sociaux et à l’éducation. Cette inégalité se caractérise par une hétérogénéité inter et intra-pays d’une part, et inter et intra-région d’autre part. Et les différences semblent être très marquées dans les pays à fort taux de croissance de la population rurale. Sur l’ensemble des pays observés, l’amélioration de la performance économique s’est accompagnée par l’accentuation des inégalités de revenus.

La part des revenus des 20% des populations les plus pauvres dans les dépenses représente moins de 10% des dépenses totales alors que les 20% les plus riches dépenses plus de 42%.

Les taux les plus élevés sont observés en Namibie (56,1%), au Lesotho (44,2), au Botswana (20,4%), en Afrique du Sud (17,9%) et en Zambie (15,3%) (Graphique II.11).

De même, la part des dépenses des 10% plus riches de 26 pays sur les 3078 est de 10 fois plus élevée que celle des 10% plus pauvres. Deux pays apparaissent particulièrement plus inégalitaires. Il s’agit de la Namibie (128,8 fois) et le Lesotho (105 fois). Même si elles restent élevées, les inégalités sont moins marquées dans neuf des 30 pays à savoir la Tunisie (39,8), le Maroc (39,5), le Burkina Faso (39,5), le Malawi (39), la Guinée (38,6), le Bénin (36,5), l’Algérie (35,3), la Tanzanie (34,6) et l’Ethiopie (30) (graphique II.12 et Annexe II.2).

78 Les données n’étant pas disponibles pour les trois pays, nous n’avons pas pu les inclure dans cette analyse.

Graphique II.17 : Dépenses de consommation des plus riches et des plus pauvres de 30 pays africains

Source : Construit par l’auteur sur la base des calculs des statistiques du PNUD sur le Développement humain, 2007/2008.

On notera toutefois que les dépenses de consommation ne constituent pas des bons indicateurs de mesure du niveau de revenus et des inégalités dans les pays pauvres en général et dans les pays d’ASS en particulier. Ces indicateurs sont biaisés du fait que 75,99% de la population totale vivant dans le monde rural en Afrique anglophone et lusophone, 75,85% en Afrique francophone et 59,60 au Maghreb. Le mode de vie dans les milieux ruraux fonctionne en dehors du système marchand et donc de tout système de mesure axé sur les prix susceptible d’être évalué. De ce fait, les consommations ou plus exactement, l’autoconsommation et les marchés parallèles échappent au contrôle légal. A cela, s’ajoute la faiblesse des dispositifs nationaux de statistiques. Aussi, faudrait-il faire attention à ne pas sous-estimer ou à surestimer les valeurs réelles des dépenses de consommation.

Graphique II.18 : Ecart entre les dépenses des plus riches et des plus pauvres

Source : Construction de l’auteur sur la base des indicateurs de développement de la Banque Mondiale, rapport 2007/2008

Ces données montrent que le rendez-vous du millénaire pour le développement en 2015 reste inaccessible pour la quasi-totalité des pays de la région malgré les quelques efforts constatés ça et là. Les statistiques montrent également une très grande disparité entre les trois sous-groupes étudiés. L’écart entre les plus pauvres et les plus riches est plus élevé dans les pays anglophones et lusophones (indice de Gini minimum est de 30 pour l’Ethiopie contre un maximum de 74 pour la Namibie), moins marqué dans les pays francophones (36,5 pour le Bénin notre un maximum de 50,5 pour le Niger) et enfin plus réduits dans le Maghreb (min de 35,3 pour l’Algérie contre 39,8 pour la Tunisie).

En ce qui concerne l’évolution des taux de croissance annuelle au cours de la période d’investigation retenue, trois tendances se dégagent : les pays à taux de croissance nul, ceux à croissance négative et ceux qui ont réalisé des progrès plus ou moins importants sur la période (graphique II.13).

Graphique II.19 : Taux de croissance annuelle moyenne entre 1985-2005

Source : Construction de l’auteur à partir des World Development Indicators, Banque Mondiale, CD-ROM, 2007

En comparant les revenus des pays de notre échantillon au revenu des Etats-Unis, il ressort un grand écart. La différence moyenne (graphique II.14) fait apparaître que huit seulement des 33 pays présentent des écarts substantiellement faibles tandis que dix autres exhibent des écarts raisonnablement en deçà de 1,5. Parmi les dix derniers cas se trouvent six pays francophones et quatre pays anglophones. Ainsi, d’après la théorie du gap technologique de Fagerberg (1994) et Verspagen et Caniëls (1997) selon laquelle le potentiel de rattrapage dépend de la différence initiale de développement entre les régions leaders et les suiveurs, potentiellement, les pays en voie de développement, les pays dont cette différence est proche de zéro ont une forte chance de rattrapage par rapport à d’autres. Ceci s’explique en raison de l’existence et de la diffusion des externalités positives des connaissances qui font que les régions les plus en retard profitent des innovations des plus avancés. Cela dit, disposer d’une forte capacité d’imitation et d’un bon stock de connaissances par l’investissement éducatif substantiel

innovations. A partir de ce raisonnement, on peut penser que les huit pays de la sous-région présentent des potentiels de rattrapage et d’imitation substantiellement importants par comparaison aux 25 autres (cf. Graphique II.14). Le graphique II.14 montre aussi que l’écart moyen pour les pays francophones est relativement homogène –mis à part la Côte-d’Ivoire, le Cameroun, le Sénégal et le Togo. L’Ile Maurice est le seul pays francophone à présenter une situation macroéconomique assez favorable par rapport à l’ensemble des pays francophones.

Pour ce qui concerne les pays anglophones et maghrébins, la situation est relativement hétérogène ainsi que dans les pays du Maghreb – à l’exception de l’Afrique du Sud, le Botswana, le Swaziland, la Tunisie et l’Algérie.

Graphique 11.20 : Ecart moyen du PIB_USA et PIB pays "i"

Ces écarts ne sont pas seulement statiques mais évoluent en s’accentuant dans le temps et ceci pour trois raisons principales. D’une part, les inégalités de revenus entre les riches et les pauvres se sont accrues ces dernières années et créent par conséquent des inégalités d’accès à l’éducation et à la formation qualifiée. Les plus nantis ont plus de chances d’accéder au travail qualifié et bien rémunéré. Les inégalités de revenus et donc l’écart de revenus se creusent

gagnent de mieux en mieux leur vie que les individus de la classe moyenne et pauvre.

Certaines études montrent aussi que les changements dans la structure de la population et sur le marché du travail au cours des 20 dernières années ont beaucoup contribué à cette accentuation des inégalités. Les ménages qui ont un faible niveau d’instruction et qui ont donc un très faible niveau de qualification sont plus exposés au chômage. Cela dit, il y a une sorte de reproduction de classe dans les pays où la répartition des revenus est inégalitaire comme c’est le cas ici dans la majorité des pays africains. Les inégalités sont d’autant plus importantes que le taux de dépendance est élevé. Effectivement, l’augmentation croissante du nombre d’enfant par famille et la structure des familles africaines font que plusieurs personnes dépendent du revenu du seul chef de famille – généralement le père de famille. Les revenus par tête sont ainsi moins importants dans les familles les plus pauvres.

Les inégalités de revenus ne sont pas seulement des phénomènes propres aux pays. En suivant le sens contraire de l’aiguille d’une montre, les rayons qui vont du Burundi au Cameroun se situent durablement en-dessous des revenus de moins de 1000 euros par habitant en 2006 tandis que ceux dont les rayons partent du Maroc au Botswana disposent des revenus substantiellement élevés et supérieurs à 2000 euros par habitant (graphique II.14).

Graphique II.21 : Niveau du RNB des 33 pays en 2006 (en $EU)

Source : construction de l’auteur à l’aide des données tirées des statistiques de l’UNICEF sur les indicateurs des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD), 2008.

Même si les données du graphique II.15 ne sont pas évaluées dans la même unité que celles du graphique II.16, fort est de constater que la situation des pays comme le Malawi, le Tchad, le Mali, le Togo, s’est fortement dégradée ou stagnée depuis 1960 tandis qu’à partir du même point de départ en 1960, le Botswana, et l’Ile Maurice ont connu une ascension fulgurante (graphique II.15 et II.16).

ceux où les inégalités entre les plus pauvres et les plus riches sont les plus élevées comme le Botswana et le Lesotho (graphique II.14 et II.21).

Graphique II.22 : PIB réel à parité du pouvoir d’achat en 1960

Source : Indicateurs du développement mondial, Banque Mondiale, CD-ROM, 2007

Les deux graphiques montrent que si certains pays disposent d’un niveau de revenus par tête relativement élevé en 2006, il n’en est pas de même pour leur taux de croissance sur la période considérée. La moyenne du taux de croissance annuelle du Tchad et de la Tunisie entre 1985 et 2005 est pratiquement proche. Pourtant, le niveau de revenu par tête en 2006 du

Mozambique. Toutefois, trois pays de l’échantillon présentent une bonne performance aussi bien en termes de flux de revenus qu’en termes de niveau en 2006. Il s’agit du Botswana, de l’Ile Maurice, du Cap Vert et du Lesotho. Mettre en lien les performances économiques et les indicateurs sociaux permettrait de mieux comprendre la relation entre la croissance des revenus et le bien-être de la population.