• Aucun résultat trouvé

LES IMPORTANTS ROLES D’AVANT-GARDE QUE LA ZAOUÏA MAROCAINE A JOUES:

Parmi les éléments de base qui participent à la confirmation du rôle de la Zaouïa dans les repas distribués et l’hébergement des nécessiteux, Sulaymân al-Hawât dit, dans le Budûr al-Dâwiya à propos du Shaykh al-‘allama Abî Bakr Ibn Muhammad Ibn Sa‘îd al-Dilâ'î, de la Zaouïa al-Dilâ'iyya :

«Il servait de nombreux repas de différents mets, d’une façon qui dépasse toute description, et à l’encontre des us et coutumes ; ses marmites étaient toujours sur le feu, et remplies de nouveau chaque fois qu’elles étaient vides :

Dans des grands plats pareils à des bassins et des barils stables C’était son habitude avec les délégations qui venaient en visite»309.

Il moulait chaque jour vingt-cinq sahfat de blé et vingt tilîs (en langue arabe une sahfa équivalait à trois quintaux et le tilis était un panier double fait de laine ou de poils de chameaux pour être transporté sur le dos des bêtes de somme).

Il donnait à manger aux gens, quelquefois de ce qu’ils désiraient, et d’autres fois de ce qui correspondait à leur nature, car le citadin n’était pas pour lui comme le rural, ni le faible comme le fort310 ; les biographes de Muhammad Ibn Abî Bakr al-Dilâ'î racontaient des récits étranges sur sa générosité étonnante et citaient des nombres élevés de personnes qui s’asseyaient à sa table, à l’occasion ou pas, et qu’il nourrissait de sa meilleure récolte sept mille fuqara chaque jour, en dehors des visiteurs et des résidants, élèves et autres. Une fois, à l’occasion de la fête de la Nativité (‘Aid al-Mawlid al-Nabawi), Il servit des repas à soixante dix mille personnes, résidants et visiteurs, sans qu’ils quittent leur place, sauf pour faire la prière.311

Nous trouvons les mêmes pratiques chez la Zaouïa al-Nâsiriyya. A l’époque de Muhammad Ibn Nasir al-Dar‘î les gens mangeaient différents mets à la Zaouïa en sa présence sans qu’il y participe. Il était le Maître de la Zaouïa, son Savant, son Imâm

309 Id.

310 Haouâte, Soulaymân al-, al-Budûr al-Dâwiya, feuillet 15b. 311 Id., feuillets 48/1 et suivants.

et il était le pivot de ses activités… malgré cela il se contentait du peu des choses de ce monde.

Le Shaykh Muhammad Ibn Nasir supportait tous les talaba (étudiants), les enfants, les visiteurs, les voisins, les pauvres, les nécessiteux, les fuqara et les orphelins ; il avait pris aussi l’habitude de distribuer aux voisins, aux résidants de la Zaouïa, aux nécessiteux de la région du Draa, et d’autres, le mouton pour la fête annuelle du sacrifice, de la laine, du beurre et de l’huile… »312.

Concernant la Zaouïa al-Darqâwiyya al-Basîriyya, il suffit de savoir que sa porte est toujours ouverte, qu’elle sert à manger à tous les visiteurs à toute heure et que les femmes du Shaykh et les disciples préparent les repas dans une grande cuisine, qui comprend différentes sortes d’ustensiles et des grandes marmites, toujours en activité, de jour comme de nuit ; quant à son four à pains, il est aussi important que les grands fours à pain publics, et nous donnerons plus de détails à ce propos plus tard.

L’ENSEIGNEMENT DES DIVERSES DISCIPLINES DE LA SHARI‘A :

Parmi les tâches importantes accomplies par la Zaouïa marocaine, il y l’enseignement des diverses disciplines de la Shari’a. Je donnerai à titre d’exemple le cas de la Zaouïa al-Dilâ'iyya. Le professeur Muhammad Hajjî dit :

«Le Shaykh Abu Bakr al-Dilâ'î donnait beaucoup d’importance à la science et aux Savants, au soufisme et aux disciples. Il accorda un très grand soin à l’éducation de ses six enfants. Certains parmi eux enseignaient aux ‘Ulamâ’ (Savant) qui venaient à la Zaouïa al-Dilâ'iyya, d’autres se déplaçaient à la ville de Fès pour y donner des cours, et lorsque les choses se compliquèrent au Maroc après la mort de Ahmad Mansûr al-Dhahbî, en l’an 1012 de l’hégire, que la discorde se propagea à cause du désaccord de ses fils et de leur compétition pour le pouvoir, et que les gens commencèrent à quitter les villes pour les campagnes, la Zaouïa al-Dilâ'iyya était un des meilleurs endroits où les ‘Ulamâ’ venaient se

312‘Amâlik, Ahmad Ibn Muhammad, Jawânib min Târîkh al-Zaouïa al-Nâsiriyya, Maroc, vol. 2, p. 396, publications du ministère des habous et des affaires Islamiques, 2006.

réfugier ; ils y trouvaient la sécurité et le calme propice à leur science et à son enseignement. Les fils de Abu Bakr acquirent un savoir inestimable et s’adonnèrent à son enseignement dans leur Zaouïa ; les tulâb (étudiants) venaient à eux de toutes parts… La Zaouïa al-Dilâ'iyya prit de l’importance pendant le deuxième tiers du onzième siècle de l’hégire, les écoles très fréquentées devinrent beaucoup plus nombreuses, jusqu’à ce que dans une seule pièce résidassent deux étudiants ou plus. Muhammad Ibn Abu Bakr les prenaient tous en charge. La Médersa qui se trouvait en face de la Mosquée du prêche comprenait mille quatre cents pièces. Les ‘Ulamâ’ enseignant dans les diverses Mosquées de la Zaouïa, résidants ou visiteurs, étaient de plus en plus nombreux. Une bibliothèque très importante fut instituée, qui comprenait des dizaines de milliers de volumes et qui fut comparée par certains à celle de l’Emir (Hâkim) al-Mustansir en Andalousie. Les disciplines enseignées à Dilâ' se diversifièrent et comprenaient les récitations [coraniques], l’exégèse [coranique], le Hadîth, la science de l’unicité, le fiqh (jurisprudence islamique), la science des principes [du fiqh], le soufisme, la logique, la science de l’horaire, la langue arabe, la rhétorique, et la littérature. Les livres composés par les ‘Ulamâ’ et les étudiants de la Zaouïa al-Dilâ'iyya dans les diverses disciplines se comptaient par centaines ».313

Nous trouvons la même situation à la Zaouïa al-Nâsiriyya à Tamgrut. Le professeur ‘Amâlik dit :

« Le Shaykh Ahmad al-Khalîfa tenaient des assemblées auxquelles assistaient un grand nombre de Savants, résidants ou visiteurs. Celles-ci furent de plus en plus nombreuses et atteignaient parfois le nombre de cinq ou six comme c’était le cas du temps du Shaykh Yûsuf al-Nâsiri, ce qui était normal vu le nombre d’étudiants à certaines époques, comme au temps de Ahmad Khalîfa où leur nombre atteignit les mille quatre cents, pour la plupart résidants. Quant aux assemblées que les Shaykhs et les ‘Ulamâ’ de la Zaouïa tenaient en faveur du commun, elles étaient

saisonnières et les gens y venaient pour la récitation du Hadîth, en particulier le Sahîh al Bukhârî… Parmi les disciplines enseignées à la Zaouïa al-Nâsiriyya il y avait le noble Coran, les récitations [coraniques], l’exégèse [coranique], le fiqh, le Hadîth, la science des principes [du fiqh], la littérature, la langue arabe, la grammaire, la rhétorique, la métrique, le soufisme, la science des Raqâ'iq (hadîths concernant les états du cœur), la Sîra prophétique, la doctrine, la science de l’unicité, la fixation des horaires, l’astronomie et la logique »314.

En ce qui concerne la Zaouïa al-Darqâwiyya –celle du Shaykh Ibrâhîm al-Basîr– dont l’étoile commença à briller au début du vingtième siècle de l’ère chrétienne, elle entreprit, depuis sa fondation, d’enseigner le savoir. Elle commença par l’enseignement du Coran, le fiqh de l’école malékite et le soufisme. En ces temps difficiles d’occupation française, elle comptait des centaines d’étudiants, ce qui est confirmé par des documents des Archives du Colonialisme français à Nantes, en France, conservés dans le dossier de cette Zaouïa ; nous donnerons plus de détails sur ce point en temps opportun.

Aujourd’hui, dans cette Zaouïa, le nombre d’enseignants a augmenté de même que des disciplines nouvelles ont été ajoutées au programme, telles que la Sîra prophétique, l’exégèse [coranique], la langue arabe, l’informatique, les mathématiques, la géographie, le français, le tajwîd (intonation du coran), le Hadîth et autres matières de la Shari‘a et des sciences exactes.

D’AUTRES ROLES JOUES PAR LA ZAOUÏA MAROCAINE :

La Zaouïa marocaine, vivante et active, qui joue les rôles qui lui sont dévolus de façon complète, remplit d’autres fonctions exemplaires comme l’hospitalité, la médication, les soins de santé, l’intermédiation, la conciliation, le remboursement des dettes des gens en difficulté, la correction des comportements sociaux déviants, l’ancrage de l’identité nationale chez les citoyens et interagit de façon positive avec la vie politique du pays.

LES RAISONS DE LA PERENNITE OU DE L’ABANDON DE LA ZAOUÏA