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Le droit à l’indemnisation

CHAPITRE III - LES PERSPECTIVES D’ÉVOLUTION DE

3. Le droit à l’indemnisation

La question du droit des malades, qu'il s'agisse de ses droits fondamentaux en tant que citoyen ou des droits que lui confère sa qualité d'usager du système de santé, ne se limite pas aux conditions du dialogue avec les professionnels de santé et de la prise en charge par les établissements, elle implique aussi d'assurer la réparation de l'éventuel accident médical.

Il arrive que, lors d'une intervention ou d'un traitement, la situation du patient s'aggrave pour des raisons qui ne semblent pas liées à l'évolution normale de la maladie. Hormis les cas de faute médicale, l'accident médical résultant d’un risque thérapeutique est souvent le revers d'une médecine toujours plus technicienne. Il est devenu de plus en plus insupportable pour la société qu'une personne qui s'est adressée au système de soins pour y trouver guérison puisse en ressortir avec une infirmité, voire en mourir, pour des raisons étrangères à l'évolution normale de la maladie.

S’agissant de la réparation des conséquences des risques sanitaires, la loi du 4 mars 2002 s'organise autour de quelques idées-forces : affirmer et mettre en oeuvre la responsabilité des professionnels de santé et des établissements de santé en cas de faute, mettre en oeuvre la solidarité nationale dans le cas de l'aléa thérapeutique, simplifier pour les victimes le recours aux procédures et leur permettre de bénéficier d'une indemnisation rapide.

Ainsi, elle pose clairement le principe selon lequel les professionnels et les établissements de santé ne sont responsables des conséquences dommageables des actes de prévention, de diagnostic et de soins qu'en cas de faute.

243« Enquête sur la représentation des usagers dans les établissements publics de santé 2002 » - Bloc-Notes Santé n°54, UNAF, octobre 2002.

A contrario, la loi nouvelle a créé un droit à indemnisation des accidents médicaux graves sans faute, c'est-à-dire des dommages qui ne sont pas dus à une faute (ou à un défaut dans l'organisation du service, ou à l'utilisation d'un produit de santé défectueux) et qui ne sont pas non plus un simple développement de la maladie antérieure du patient, mais qui sont causés directement par les soins et ont un caractère anormal eu égard à l'état antérieur de la personne ou à l'évolution prévisible de cet état. Un nouvel équilibre, plus favorable aux patients, a été trouvé entre la responsabilité pour faute à la charge des acteurs de santé et leurs assureurs, et la responsabilité sans faute, liée à l’aléa thérapeutique, mise à la charge de la solidarité nationale.

Afin de ne pas retomber dans les errements de procédures qui n'en finissent plus, le législateur a permis un accès facile et égalitaire de toutes les victimes d'accidents médicaux à l'indemnisation par le biais d'une Commission régionale de conciliation et d’indemnisation (CRCI), qui se charge désormais d'instruire les demandes en finançant le cas échéant les expertises dont le coût était auparavant un obstacle à toute action contentieuse. L’ensemble de ces missions est coordonné et financé par un Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM).

La loi du 4 mars 2002 a eu le mérite de simplifier la saisine de la commission régionale de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux, d’exonérer les victimes de la rémunération des experts et de soumettre à des délais relativement brefs l’offre et le versement de l’indemnité. Cette loi est aussi le signe d’une évolution de la société, « qui a commencé au tournant des années 1970 et entend contester les formes autoritaires des pouvoirs pour privilégier des modes de relations et d’organisations beaucoup plus participatives qui tiennent compte, dans toute la mesure du possible, du point de vue des intéressés »244.

Le renforcement des droits des usagers ne doit pas être perçu comme une contrainte supplémentaire pour les établissements de santé, mais plutôt comme une opportunité pour mieux évaluer les pratiques professionnelles , tant au niveau individuel qu’organisationnel.

F - UNE REGIONALISATION ET UNE DEMOCRATISATION ACCRUES DES POLITIQUES SANITAIRES

La régionalisation des politiques de la santé est une évolution aujourd’hui bien amorcée. Elle est de nature à favoriser la démocratie sanitaire en rapprochant le citoyen du niveau de décision245.

244 Pr Dominique Thouvenin, « Pourquoi une loi relative aux droits des malades a-t-elle paru nécessaire ? », Revue de la FHF, n°487, 2002.

245 « Aménagement du territoire et établissements de santé », rapport et avis présentés par M. Michel Picard, 2004.

1. Un processus déjà engagé depuis quelques années qui repose principalement sur la déconcentration

La voie suivie jusqu’à aujourd’hui pour la régionalisation de la santé a été celle d’une déconcentration des compétences de l’État, dont l’objectif principal a été la rationalisation des dépenses de santé. Depuis la fin des années soixante-dix, la plupart des avancées législatives ont pour pivot la circonscription régionale246.

Le processus de régionalisation a débuté en 1977 avec la création des DRASS, échelon déconcentré du ministère. Mais la logique régionale commence à prendre une place significative dans le paysage sanitaire français seulement avec la loi hospitalière du 31 juillet 1991, qui renouvelle les procédures de planification hospitalière, la création des SROS et l’instauration des comités régionaux d’organisation sanitaire. Ainsi est exprimée et concrétisée la volonté de faire de la région le cadre territorial de l’organisation de la santé.

Les développements du début des années quatre-vingt-dix sont significatifs d’une recherche de cohérence et de meilleure articulation des acteurs, afin de remédier aux dysfonctionnements liés à l’éclatement des responsabilités : clarification des compétences entre les DRASS et les DDASS, mise en place de systèmes informels de partenariats entre les DRASS et les Caisses régionales d’assurance maladie. Face à une administration régionale qui se renforce, le paysage s’enrichit alors de nouveaux acteurs amenés à jouer un rôle sur la scène régionale. D’une part, les Unions régionales de médecins libéraux (URML) ont été créées par la loi du 4 janvier 1993 et installées l’année suivante. Elles sont investies de missions d’analyse et d’étude du fonctionnement du système de santé, d’évaluation des besoins, de formation et d’information des médecins et des usagers. D’autre part, les conférences régionales de santé sont mises en place à titre expérimental en 1995.

Comme le remarque Dominique Polton247, économiste, directeur de l’IRDES (ex-CREDES), les ordonnances de 1996 font franchir au processus de régionalisation de la gestion du système de soins une étape très significative par la création des ARH, des URCAM et l’officialisation des conférences régionales de santé. Le mouvement vers les régions est ainsi amplifié. La gestion du dispositif de régulation repose dorénavant sur les ARH, en mesure de manier efficacement les outils de pilotage créés ou renforcés par l’ordonnance du 24 avril 1996.

La planification hospitalière est désormais confiée à l’ARH et non plus aux préfets de région. L’idée qui sous-tend ce mouvement est qu’en donnant davantage de responsabilités aux acteurs régionaux, la capacité d’innovation,

246 Didier Tabuteau, « La régionalisation du système de santé en question », Droit social, juillet-août 2002.

247 Dominique Polton, Quelle régionalisation du système de santé ?, Les Cahiers hospitaliers, juillet-août 2003, n° 192.

l’expérimentation ainsi que l’émergence de nouvelles formes d’organisation s’en trouveront stimulées. L’approche régionale apparaît comme la bonne échelle de maîtrise des risques et de contrôle des dépenses. Mais surtout, les régions semblent mieux placées que le niveau central pour adapter des solutions aux contextes locaux et traiter la dimension territoriale des politiques de santé publique248.

2. La recherche d’une plus grande démocratisation des politiques de