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C - Les doublements d’assiette prévus pour la sous- sous-traitance publique et les jeunes docteurs

1 - La sous-traitance publique

Le doublement des dépenses prises en compte au titre du CIR en cas de sous-traitance à des laboratoires publics a été instauré par la loi de finances pour 2004125. Il vise à renforcer les coopérations entre acteurs publics et privés. La loi de finances pour 2008 a élargi les organismes concernés aux établissements d’enseignement supérieur délivrant un diplôme conférant un grade de master, aux fondations de coopération scientifique et aux établissements publics de coopération scientifique126. La loi de finances rectificative du 30 décembre 2009 a reprécisé et étendu la liste des bénéficiaires127.

Près de 2 800 entreprises ont déclaré en 2011 des dépenses de sous-traitance vis-à-vis de laboratoires publics128, pour un montant de 435 M€ avant doublement et plafonnement129, soit 870 M€ après doublement. La créance correspondante se monte à 221 M€. Compte tenu des mécanismes de plafonnement, le taux effectif du crédit d’impôt pour ce dispositif ressort en effet à 25 % en 2011.

125 Article 87 2°a) de la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003.

126 Article 101 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008.

127 Article 87.II de la loi n° 2009-1674 reproduit en annexe.

128 Laboratoires publics en France ou à l’étranger sans lien de dépendance.

129 Les mécanismes de plafonnement ont été présentés dans la section relative à la sous-traitance.

La mise en œuvre de ce doublement d’assiette est complexe, étant donné les plafonnements qui l’encadrent, et ce même si la part des déclarations de sous-traitance donnant lieu à plafonnement est faible. La prise en compte de ces dépenses pour leur montant réel, c’est-à-dire sans plafonnement et sans doublement, simplifierait le régime du CIR.

Ce doublement d’assiette a en outre été conçu dans le cadre d’un crédit d’impôt recherche dont les taux étaient nettement plus faibles qu’aujourd’hui. Dans le dispositif actuel, ce mécanisme équivaut à un taux de soutien public de 60 % dès lors que le plafonnement n’est pas atteint. Un tel taux n’est pas de nature à inciter les acteurs concernés à négocier au plus juste les tarifs des prestations effectuées.

Surtout, les pouvoirs publics ont développé, depuis l’instauration de ce dispositif en 2004, de nouveaux outils visant à renforcer les coopérations publiques et privées en matière de R&D. Une part des projets soutenus par l’Agence nationale de la recherche créée en 2005 repose sur l’association de laboratoires publics et d’entreprises. Plus récemment, le programme des investissements d’avenir a prévu de nouveaux outils d’intervention en la matière, avec notamment les Instituts de recherche technologique. À ces dispositifs s’adjoigne un foisonnement d’autres aides qui ont conduit la Cour à recommander leur simplification dans son rapport public thématique de juin 2013 sur « le financement public de la recherche, un enjeu national ».

Même si on peut admettre que, pour accompagner des sauts qualitatifs dans les comportements des acteurs, un faisceau de mesures puisse être dans certains cas justifié, le crédit d’impôt est un instrument dont la force réside dans la simplicité d’usage, ce qui n’est pas compatible avec la multiplication des dispositions dérogatoires en son sein.

La suppression de ce doublement d’assiette représenterait une économie de 110 M€ par rapport à la dernière créance de CIR connue.

2 - Les dépenses relatives aux jeunes docteurs

Le doublement des dépenses prises en compte au titre des jeunes docteurs a été instauré par la loi de finances initiale pour 2006, deux ans après celui prévu pour la sous-traitance publique : il concerne les dépenses de personnel qui se rapportent à des titulaires d’un doctorat ou d’un diplôme équivalent ; durant les douze premiers mois suivant leur première embauche, ces dépense sont prises en compte pour le double de leur montant à condition que les contrats de travail soient à durée indéterminée et que l’effectif salarié de l’entreprise ne soit pas inférieur à celui de l’année précédente.

Les frais de fonctionnement rattachés à ces emplois bénéficiaient déjà d’un régime particulier puisqu’ils étaient fixés forfaitairement depuis la loi sur l’innovation et la recherche de 1999 à 100 % des dépenses de personnel130. La loi de finances initiale pour 2006 a porté ce taux à 200 % (contre 75 %, puis 50 % pour les autres frais de personnel).

La réforme de 2007 a maintenu ces avantages et en a porté la durée à vingt-quatre mois.

La combinaison de ces deux modalités de calcul dérogatoires aboutit à un crédit d’impôt correspondant à 120 % de la dépense de personnel engagée par l’entreprise. Un tel taux de soutien public, supérieur à la dépense engagée, n’apparaît pas justifié.

Tableau n° 37 : premier recrutement d'un docteur

dépense de personnel annuelle 30 000 €

dépense prise en compte dans le CIR :

- dépense de personnel pour le double de son montant 60 000 € - frais de fonctionnement au taux de 200 % 60 000 €

total 120 000 €

montant du crédit d'impôt (taux de 30 %) 36 000 € Taux du crédit d'impôt = 120 % de la rémunération avec charges sociales Source: Cour des comptes, à partir de l’article 244 quater B du code général des impôts

En 2011, 1 140 entreprises ont déclaré des dépenses dans ce cadre, correspondant à des rémunérations de 63,5 M€ (avant doublement).

Compte tenu des deux mécanismes de doublement pratiqués, la créance associée se monte à 71 M€.

Dans son bilan du CIR pour 2010, le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche tire des conclusions positives de ce dispositif, constatant que le nombre d’entreprises déclarant des salariés dans ce cadre a doublé entre 2007 et 2010. En fait, étant donnée la dynamique des entreprises ayant bénéficié du CIR, la proportion des entreprises qui déclarent des jeunes docteurs est restée presque stable, autour de 5 %.

130 Article 8 de la loi n° 99-587 du 12 juillet 1999.

Tableau n° 38 : évolution du nombre d’entreprises déclarant des jeunes docteurs

2007 2008 2009 2010 2011

Nombre d’entreprises déclarantes au CIR

ayant utilisé les doublements jeunes docteurs 439 700 781 886 1 143 Taux de croissance 59 % 12 % 13 % 23 % Proportion d’entreprises déclarantes au CIR

ayant utilisé les doublements jeunes docteurs 4,5 % 5,2 % 4,7 % 5,0 % 5,8 % Sources : Bilan du CIR 2010 et Base GECIR 2011, retraitement Cour des comptes

Les effectifs d’entreprises concernées par ce dispositif sont ainsi limités. Ils ne rendent d’ailleurs pas compte de la croissance de l’emploi dans le domaine de la R&D.

Tableau n° 39 : effectifs de recherche dans les entreprises

en ETP 2007 2010 Evolution

Effectif de chercheurs 124 577 139 885 12,3 % Effectif total de R&D 215 891 230 735 6,9 % Source : MESR-SIES

NB : Parmi les chercheurs en entreprise, la part des docteurs est stable sur longue période, soit environ 13 % entre 1997 et 2009.

L’étude actuellement conduite sous l’égide du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche sur l’impact des doublements pratiqués pour l’embauche des docteurs pourrait permettre d’éclairer les motifs de cette situation131.

Il se peut qu’en la matière la clause réservant ces doublements aux entreprises dont l’effectif salarié n’a pas baissé par rapport à l’année précédente induise une certaine prudence dans l’usage de ce dispositif très avantageux et explique le faible succès qu’il rencontre.

Tout comme pour la sous-traitance publique, les pouvoirs publics disposent, en outre, d’autres outils d’intervention pour favoriser le développement de l’emploi des chercheurs, que ce soit en amont de l’obtention de la thèse (conventions CIFRE) ou dans le cadre de jeunes entreprises innovantes. Or ces deux dispositifs ont été réduits dans le

131 La seule étude actuellement disponible est l’étude économétrique publiée en novembre 2011 dans la revue Trésor-Eco et présentée dans le chapitre précédent selon laquelle « le recrutement des docteurs dans les équipes de R&D privées n’est pas inférieur à ce qui serait économiquement optimal ».

cadre de la montée en puissance du CIR132. En la matière, il aurait été préférable de ne pas compliquer le crédit d’impôt recherche par un mécanisme dérogatoire et de conserver toute leur portée aux outils spécifiques déjà existant pour favoriser l’insertion professionnelle des docteurs et le développement de jeunes entreprises innovantes.

Quels que soient les résultats des travaux menés, il est souhaitable d’éviter les situations dans lesquelles le soutien public excède le montant de la dépense engagée par l’entreprise. Conserver le doublement d’assiette pour les dépenses des jeunes docteurs avec un forfait de dépenses de fonctionnement de droit commun, soit 50 % de la dépense de personnel exposé, conduirait ainsi à un taux de soutien public de 75 %. À démographie constante, l’ajustement de la créance serait de 20 M€.

III - La méthode de calcul et de constatation du

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