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CHAPITRE 4 : VARIABLES D’INFLUENCE MOBILISEES DANS CETTE RECHERCHE

1.1. Le degré de connaissance du service ou de la marque

Plusieurs auteurs suggèrent que le degré de connaissance d'un service ou d’une marque est susceptible d'influencer tant le degré d'intangibilité perçue que le niveau de risque associé à ce service (McDougall et Snetsinger, 1990 ; Murray et Schlacter, 1990 ; Ward, 1996 ; Breivik, et al., 1998 ; Laroche et al., 2001 ; Laroche et al., 2003).

La connaissance est un concept qui a été largement utilisé et étudié en comportement du consommateur. Malgré cette utilisation importante du concept, on peut noter un certain désaccord autour de sa définition, ainsi que de son opérationalisation (Aurier et Ngobo, 1999 ; Feick, Park et Mothersbaugh, 1994, dans Korchia, 2004).

En 1995, Engel, Blackwell et Miniard proposent une définition simple du degré de connaissance dans une perspective marketing : il s’agit de l’ensemble des informations relatives aux marchés, et stockées en mémoire. Dans la même idée, Korchia (2004) propose que la connaissance d’une catégorie de produits ou de services représente les informations relatives à cette catégorie, et stockées dans la mémoire à long terme des individus. De manière similaire, il propose que la connaissance à l’égard d’une marque représente les informations relatives à cette marque, stockées dans la mémoire à long terme des individus.

Jusque dans les années 85, la connaissance a été majoritairement traitée dans la littérature comme un concept unidimensionnel, le plus souvent en faisant référence à la familiarité ou à la connaissance antérieure (Alba et Hutchinson, 1987). La connaissance était alors décrite comme le fait que l’individu peut posséder un certain niveau d'expérience ou d'information à propos du produit ou du service. Néanmoins, un grand nombre de recherches sur l'opérationalisation de ce concept a amené les chercheurs à envisager le degré de connaissance comme étant multidimensionnel. Toutefois, le contenu et la dimensionnalité de la connaissance varient grandement d'auteur à auteur.

Ainsi, Alba et Hutchinson ont écrit en 1987 un des articles les plus cités sur l'étude de la connaissance d'un produit ou d’un service. Ils considèrent que la connaissance possède deux composantes : la familiarité d'une part, et l'expertise d'autre part.

La familiarité est définie comme le nombre d'expériences liées au produit ou au service étudié, que le client a accumulées.

L'expertise est définie quant à elle comme la capacité de l'individu à réaliser avec succès des tâches autour du produit ou service étudié.

Ces définitions n’étant pas totalement explicites, ces auteurs précisent davantage la nature de ces concepts. Ainsi, l'expérience est appréhendée au sens large. Elle inclut : l'exposition publicitaire, la recherche d'informations, l'interaction avec une force de vente, l'achat et le niveau d'utilisation du produit ou du service. L'expertise fait référence à la structure cognitive des individus (p.ex. les croyances autour du produit, les perceptions des attributs d’un produit) et aux processus cognitifs (p.ex. les règles de décision de l'individu dans le choix d'un produit) nécessaires à la réalisation avec succès des tâches autour du produit.

Korchia (2004) juge néanmoins que, si la définition selon laquelle la connaissance est un ensemble d’informations stockées en mémoire est retenue, la familiarité telle que définie par Alba et Hutchinson (1987) est un antécédent de la connaissance, puisque c’est suite à ses expériences que le client va être à même de collecter, puis de stocker les informations. Dans la même idée, il propose que l’expertise telle que définie par ces auteurs soit vue comme une conséquence de la connaissance, puisque c’est à partir des informations accumulées autour du produit, du service ou de la marque que le client est capable d’accomplir des tâches liées au produit.

Pourtant, cette confusion entre la connaissance elle-même et ses antécédents ou ses conséquences est très présente dans la littérature. Ainsi, si Alba et Hutchinson (1987) considèrent la familiarité comme un synonyme de l'expérience au sens large, certains auteurs utilisent ce terme comme étant synonyme de la connaissance (Johnson et Russo, 1984). Des auteurs comme Gharbi (1998) estiment que la connaissance est constituée des deux dimensions que sont l'expérience et la familiarité. Nantel et Robillard (1990) ont identifié deux pôles de recherche concernant la conceptualisation de la familiarité : le premier la considère comme une fonction de l'expérience, de l'utilisation, de l'expertise ou de la connaissance, alors que le second le définit en termes de structure cognitive. Nous le voyons

donc, les divergences sont nombreuses autour de ce concept. Au niveau de l'opérationalisation, le débat semble aussi vif qu'au niveau conceptuel. De nombreux auteurs (p.ex. Zaichkowski, 1985 ; Alba et Hutchinson, 1987 ; Murray et Schlacter, 1990 ; Park, Mothersbaugh et Feick, 1994) ont proposé des échelles de mesure de ce qu'ils appellent connaissance, familiarité, expérience ou encore expertise, avec des recouvrements importants entre tous ces termes.

Dans le cadre de cette recherche, nous adoptons la conceptualisation de la connaissance proposée par Korchia (2004), à savoir que la connaissance consiste en l’information acquise et stockée en mémoire autour d’un produit, d’un service ou d’une marque. Les raisons sont les suivantes. D’abord, cette conceptualisation de la connaissance a été retenue par des auteurs précédents pour en évaluer l’impact sur la relation entre l’intangibilité et le risque perçu (Laroche et al., 2003). Ensuite, elle évite d’inclure dans le concept de connaissance des éléments pouvant constituer soit des antécédents de la connaissance, soit certaines de ses conséquences.

Nous n’avons identifié aucune étude qui, à ce jour, ait formellement étudié l’impact du degré de connaissance sur le degré d’intangibilité perçue d’une offre de services. Pour rappel, l’étude de Laroche et al. (2003) a uniquement évalué l’influence de la variable de connaissance sur la relation entre les trois dimensions de l’intangibilité et le risque perçu.

Plusieurs auteurs suggèrent néanmoins que le degré de connaissance puisse influencer la perception d’intangibilité « physique » (McDougall et Snetsinger, 1990 ; Murray et Schlacter, 1990 ; Ward, 1996 ; Breivik, et al., 1998 ; Laroche et al., 2001). Intuitivement, nous pouvons effectivement penser que le processus de développement des connaissances conduit l’individu a être en contact – physiquement ou visuellement – avec des indices matériels du service, et donc qu’il réduit son niveau d’intangibilité perçue. Nous avons vu que l’expérience au sens large est un antécédent de la connaissance, qui permet à l’individu de collecter de l’information sur le service ou sur la marque. L’expérience peut être soit un entretien avec un vendeur (le personnel étant un levier de tangibilisation tant physique que mentale), soit une utilisation du service (le client est alors susceptible d’interagir avec le personnel ou avec l’environnement physique), soit encore l’exposition à une publicité (la publicité pouvant être un levier de tangibilisation, comme discuté précédemment). En outre, si la conceptualisation à deux composantes de l’intangibilité est retenue, le processus de développement des

connaissances à l’égard d’un service ou d’une marque pourrait constituer un moyen de réduire le degré d’intangibilité mentale du service (qui, pour rappel, fait référence, pour les partisans de cette conceptualisation, à la difficulté de comprendre le service, de le définir).

L’activité de recherche d’information est une stratégie très présente dans les études sur la réduction du risque perçu (citons entre autre Cox, 1967 ; Roselius, 1971 ; Derbaix, 1983 ; Mitchell et Greatorex, 1990 ; Dowling et Staelin, 1994). Or, le processus de recherche et d’acquisition d’information a un impact direct sur le niveau de connaissance, puisque la quantité d’information présente dans la mémoire de l’individu augmente. Dès lors, le degré de connaissance est susceptible d’avoir un impact sur le risque perçu. Nous pouvons donc penser que la relation entre l’intangibilité et le risque perçu sera affectée par le niveau de connaissance des individus, comme cela est soutenu par l’étude de Laroche et al. (2003).

Le degré de connaissance d’un individu à l’égard d’un service ou d’une marque peut être appréhendé de deux manières différentes : soit via la connaissance objective, soit via la connaissance auto-évaluée (citons entre autre Aurier et Ngobo, 1999 ; Park et al., 1994 ; Flynn et Goldsmith, 1999).

• La connaissance objective vise à mesurer ce que l’individu sait vraiment d’un produit, d’un service ou d’une marque. Il s’agit donc d’évaluer objectivement l’information que le client a stockée en mémoire. Le plus souvent, la connaissance objective est testée à partir de questionnaires parfois très fouillés, posant des questions de « culture générale » sur le produit, le service, ou la marque, et dont les réponses sont objectivement connues (voir p.ex. Aurier et Ngobo, 1999 ; Burns et al., 1996 ; Park et al., 1994 ; Raju et al., 1995). Généralement, ces questionnaires prennent la forme de questions à choix multiples (p.ex. le Chambolle-Musigny est un vin du bordelais : vrai ou faux), de questions de terminologie (p.ex. pouvez-vous définir ce qu’est le millésime d’un vin ?), ou de questions d’ordre général (quelle est la différence entre un vin d'Appellation d'Origine Contrôlée et un vin Délimité de Qualité Supérieure ?).

En outre, des discussions avec des experts peuvent également être mises en place pour évaluer le degré de connaissance objective de l’individu.

• La connaissance auto-évaluée représente la perception qu’une personne a de ce qu’elle sait. Il s’agit pour l’individu d’évaluer lui-même son degré de connaissance à l’égard

d’un produit, d’un service ou d’une marque (p.ex. Selnes et Gronhaug, 1986 ; Park et al., 1994 ; Aurier et Ngobo, 1999).

Nous présenterons et motiverons dans la seconde partie de ce document le choix effectué dans cette recherche pour mesurer le degré de connaissance de l’individu à l’égard d’un produit ou d’une marque.

A côté de la connaissance, un autre concept lié au concept de connaissance semble intéressant à prendre en considération dans la recherche qui nous occupe : il s’agit de l’expérience que le client a du service ou de la marque. Nous allons à présent lui consacrer une section spécifique.