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CHAPITRE VI L’ANALYSE DU CORPUS ORAL

1 PRÉSENTATION DU CORPUS

1.1 Corpus de l’église catholique

En tout, trois célébrations eucharistiques ont été enregistrées, transcrites et analysées, même si elles ne seront pas toutes présentées en détail, pour une question de pertinence et d’espace. Il s’agit de la cérémonie d’ordination presbytérale du 08 septembre 2002 à 9h à la cathédrale de Bobo, de la cérémonie du 18 avril 2003 à 18h, toujours à la cathédrale de Bobo et de la cérémonie du 19 avril 2003 à 22h à l’église du secteur 22 de Bobo. En annexes, seuls figurent les cérémonies des 18 et 19 avril 2003, la cérémonie du 08 septembre 2002 ayant seulement servi comme cas d’essai, dont les résultats ne sont pas présentés ici non plus. Ces cérémonies du 18 et 19 avril seront respectivement présentées en annexe comme les textes I et II du corpus de l’église catholique.

1.1.1 Texte I : Cérémonie du 18 avril 2003 à la cathédrale de Bobo (vendredi saint)

Nous procéderons d’abord ici à une description du décor avant la présentation de la répartition linguistique.

1.1.1.1 Description du décor

La messe a eu lieu dans la cour de la cathédrale en plein air, près de la grotte. Un autel y est dressé pour les occasions festives où on prévoit beaucoup de participants.

Cette stratégie vise à résoudre le problème de place qui se pose souvent à l’intérieur de l’église40. Les bancs sont disposés dans toute la cour en quatre rangées pour les fidèles : deux faisant face à l’autel et deux placées latéralement, une de chaque côté de l’autel. L’autel placé devant l’assemblée comporte des chaises pour les célébrants, des micros, des hauts parleurs, des pagnes servant à décorer et un tapis dans l’allée, sur lequel est étalée une natte couverte d’un pagne.

Cette messe, présidée par un prêtre diocésain, était concélébrée par une dizaine d’autres prêtres et l’archevêque même de la ville, qui est d’ailleurs l’auteur des deux homélies délivrées en français et en dioula.

La cérémonie commence avec l’entrée des célébrants par les allées. Il n’y a pas de chants d’entrée comme à l’accoutumée, mais un rite funéraire mooré joué avec des tam-tams. Il faut préciser que c’était le vendredi saint, journée commémorative de la mort de Jésus, et depuis 1997, la cathédrale de Bobo a entrepris de faire la liturgie de ce jour selon un rite funéraire d’une ethnie du Burkina. Toutes les ethnies présentes à l’ouest et pas forcément originaires de la région sont représentées à tour de rôle selon un calendrier. Chaque année donc, on confie la responsabilité liturgique à un groupe ethnique qui vénère Jésus comme on vénère les morts dans l’ethnie. Cette politique s’inscrit dans la droite ligne de l’inculturation.

Le cortège de prêtres arrive au niveau de l’autel. Chacun rejoint sa place et le célébrant principal s’étend sur la natte, face contre terre quelques instants. À ce moment, toute l’équipe célébrante est à genoux et l’assemblée se recueille aussi à genoux. Peu de temps après, ils se relèvent et le célébrant introduit la célébration avec le rite d’accueil en français.

Tous les intervenants (prêtres célébrants et lecteurs) à la célébration se mettent debout près d’un ambon durant leur intervention.

1.1.1.2 Répartition linguistique

Les interventions ont eu lieu selon l’ordre et les langues suivants :

40 Estimée pourtant à cinq mille places (interview du 06 décembre 2003 avec l’archévêque de Bobo). Cela donne une idée du nombre de personnes attendues à cette célébration.

PASSAGES FRANÇAIS DIOULA

Introduction du célébrant principal X

Première lecture : Isaïe 52, versets 13 à Isaïe 53, verset 12 par un fidèle

X Deuxième lecture : Hébreux 4, versets 14 à Hébreux

5, verset 1-9 par un fidèle

X Evangile chanté: Passion du Christ, Mathieu 26,

verset 20 à Mathieu 27, verset 50 par un groupe de lecteur et le prêtre célébrant

X

Homélie de l’archevêque X X

Prières universelles lues par un lecteur X Explication du rituel de la croix par un prêtre X

L’évangile est chanté par plusieurs personnes sous forme de pièce de théâtre, où chacun a un rôle. Les acteurs ont incarné des personnages et chacun devait chanter sa partie comme on joue une pièce. Il y a une lectrice (chanteuse) qui fait reprendre les refrains par la foule, un lecteur (chanteur) principal qui relate les faits, le célébrant principal de la messe chante les passages prononcés par Jésus (il joue le rôle de Jésus) et d’autres jouent les rôles de Pierre, Juda etc.

On peut d’ores et déjà faire remarquer que le français domine la célébration. Il est utilisé pour l’introduction, la première lecture, la deuxième lecture, la première partie de l’homélie, les intentions de prière, l’explication du rite de vénération de la croix.

Quant au dioula, il est intervenu seulement pour l’évangile chanté et la deuxième partie de l’homélie.

Après cette description de la répartition linguistique, il apparaît clairement que le seul passage pour lequel il s’est agi de traduction ou d’intention de traduction est l’homélie. Pour le reste, il y a eu plutôt un changement de langue.

1.1.2 Texte II : Célébration de la veillée pascale du samedi 19 avril 2003 à l’église Notre Dame de la Salette du secteur 22 de Bobo Comme pour le texte précédent, nous décrivons d’abord le décor avant de présenter la répartition linguistique.

1.1.2.1 Description du décor

La célébration a lieu à l’intérieur de l’église, où les bancs sont disposés en deux grandes rangées, séparées par deux allées perpendiculaires, ce qui donne finalement quatre blocs. Le présidium est placé au centre devant l’assemblée. L’église est décorée par des images collées sur le mur derrière l’autel. La cérémonie commence avec l’entrée du cortège de célébrants. Les prêtres (cinq environ) s’asseyent à l’autel, vêtus de leurs habits de célébrants. Les liturges (quatre au total), chargés de faire les lectures, vêtus de toges aussi, s’installent à l’autel latéralement, contrairement aux

prêtres qui font face à l’assemblée. Chaque intervenant à la célébration (prêtre ou liturge) se met debout face à un ambon pendant son intervention.

1.1.2.2 Répartition linguistique

Cette cérémonie est beaucoup plus longue que la précédente, parce qu’il s’agit d’une solennité, celle de la fête de Pâques. La présentation schématique qui suit permet de mieux voir sa distribution linguistique.

PASSAGES FRANÇAIS DIOULA Introduction du prêtre célébrant principal X

Introduction générale de la cérémonie, lue par un fidèle X

Introduction à la première lecture, faite par un fidèle X Première lecture : Genèse chapitre I, versets 1-31,

chapitre 2, versets 1 à 3 faite par un fidèle

X

Monition du prêtre X

Introduction à la deuxième lecture faite par un fidèle X Deuxième lecture : Genèse 22, versets 1 à 18 par un

fidèle

X

Monition du prêtre X

Introduction à la troisième lecture lue par un fidèle X Troisième lecture: Exode 14, versets 14-31 et Exode 15,

verset 1 faite par un fidèle

X

Monition du prêtre X

Introduction à la quatrième lecture faite par un fidèle X Quatrième lecture : Isaïe 55, verset 1-11 faite par un

fidèle

X

Monition du prêtre X

Introduction à la cinquième lecture faite par un fidèle X Cinquième lecture : Ezéchiel 36, versets 16-28 faite par

un fidèle

X Introduction à la sixième lecture par un fidèle X Sixième lecture : Romains 6, versets 3-11 faite par un

fidèle

X

Evangile : Marc 16, verset 1-8, lu par le prêtre X X

Homélie du prêtre X X

Première prière universelle lue par un fidèle X

Deuxième prière universelle par un fidèle X

Troisième prière universelle faite par un fidèle X

Quatrième prière universelle lue par un fidèle X

Conclusion aux prières universelles par le prêtre X Prière consécratoire du pain et du vin par le prêtre X

Introduction à la prière du « notre père » par le prêtre X La prière du « Notre père » chantée par la chorale et toute

l’assemblée

X

Introduction au don de la paix par le prêtre X Présentation du pain et du vin par le prêtre X

Prière après la communion par le prêtre X

Vœux de bonne fête et conseils par le prêtre X

Prière finale par le prêtre X

Le changement de langue au cours de la célébration est plus systématique que celui observé dans le cas précédent, ce qui est d’ailleurs le cas dans la plupart des messes bilingues à Bobo. La répartition linguistique privilégie le français toujours, mais de manière moins marquée que dans la célébration précédente.

Aucun intervenant n’est resté collé à une langue. Autant les prêtres que les liturges nommés ‘fidèles’ dans le tableau ont fait usage du français et du dioula. Pour ce qui est des lectures, la monition du prêtre tend à être dans la même langue que les lectures qui précèdent. Tous ces passages délivrés en français par les liturges étaient lus, ce qui veut dire qu’ils existent tous sous forme écrite. Quant à l’homélie du prêtre délivré en français et en dioula, l’attitude du prêtre permet d’affirmer que c’est le texte français qui était écrit, contrairement au texte dioula raconté à la manière des contes africains, comme nous le verrons plus loin dans l’analyse.