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Quelles conséquences sur les pratiques pédagogiques des enseignants ? enseignants ?

à une complexification de leur métier

III.2. Des formations à la pédagogie diverses, souvent inexistantes

III.3.2. Quelles conséquences sur les pratiques pédagogiques des enseignants ? enseignants ?

La mise au jour des conceptions de l’enseignement des enseignants est importante puisque ces dernières semblent avoir un impact sur les choix pédagogiques des enseignants. C’est en tout cas ce qu’évoquent Donnay et Romainville (1996), selon qui la «représentation des mécanismes

d’enseignement-apprentissage » des enseignants guide leurs choix. De même, Fox (1983)78 considère que les conceptions ont un impact sur les stratégies employées par l’enseignant. Mais, de façon plus précise, il apparaît, comme le montrent Trigwell et Prosser (2004) et Langevin, Bilodeau, Boisclair et Braco (2007), que ces conceptions influent également sur les pratiques pédagogiques des enseignants. Ces dernières seraient même « déterminées », selon le terme employé par Romainville (2000), par ces conceptions. Loiola et Tardif (2001) considèrent d’ailleurs que pour favoriser des changements dans les pratiques des enseignants, il est important de faire évoluer leurs propres conceptions de l’enseignement. Ils ajoutent que « les

conceptions des nouveaux professeurs au sujet de l’enseignement peuvent constituer un obstacle dans leur

développement pédagogique ».

Par ailleurs, il ressort de l’ensemble de ces recherches, comme cela a déjà été induit plus haut, que les enseignants ayant une vision de l’enseignement plutôt centrée sur l’étudiant et ses apprentissages ont une plus forte propension à employer des pratiques pédagogiques issues des méthodes dites « actives ». Au contraire, ceux ayant une vision plus traditionnelle de l’enseignement et considérant cet acte comme une présentation expositive du savoir optent plus souvent pour des pratiques découlant des méthodes traditionnelles79 et par là même moins axées sur l’étudiant et la compréhension de ce dernier.

Néanmoins, d’après Langevin (2008)80, les conceptions centrées sur le professeur et générant des pratiques pédagogiques en ce sens, sont à l’heure actuelle celles qui prédominent chez les enseignants. Cette auteure explique cela en partie par une absence de formation à la pédagogie des enseignants, mais également par « l’imprégnation de l’expérience étudiante passée », autrement dit par ce que les enseignants ont vécu lorsqu’eux même étaient étudiants. Enfin, Langevin (2008) considère que l’influence du contexte institutionnel et disciplinaire entre aussi en jeu. Cela laisse

78 Cité par Loiola et Tardif (2001).

79 Nous reviendrons ultérieurement en détails sur ce que recouvrent ces termes de « méthodes actives » et « méthodes traditionnelles ».

PARTIE 2 : Chapitre III. Pour une meilleure compréhension des pratiques pédagogiques …

entendre que certaines disciplines conduisent plus que d’autres à l’emploi de pratiques centrées sur l’enseignant.

Cette prééminence des conceptions de l’enseignement centrées sur l’enseignant génère des effets sur les étudiants et leurs apprentissages. En effet, selon Demougeot-Lebel et Perret (2010), en fonction « des conceptions de l’enseignement, de l’apprentissage, de ce qui aide les étudiants à

apprendre ou encore des qualités associées à un bon enseignant, un enseignant va mettre en œuvre des pratiques d’enseignement différentes, lesquelles influent sur les types d’apprentissage que ses étudiants développent ». D’après ces chercheuses, les conceptions de l’enseignement des enseignants auraient un impact sur leurs pratiques, lesquelles exerceraient un effet sur les apprentissages développés par les étudiants. Elles rejoignent en cela l’avis de Romainville (2000), celui-ci considérant que les apprentissages « dépendent en quelque sorte des conceptions des enseignants ». Or, certains chercheurs estiment que les conceptions centrées sur l’enseignant conduisent à l’emploi de pratiques pédagogiques posant problème pour les apprentissages des étudiants. C’est dans cette optique que Loiola et Tardif (2001), s’appuyant sur les travaux de Trigwell (1995) et de Ramsden (1992), évoquent les inconvénients des conceptions dites « simples ». Celles-ci présenteraient le défaut de ne pouvoir permettre aux enseignants d’adopter et d’appliquer des «processus connus pour faciliter

l’apprentissage de l’étudiant ».

Finalement, de nombreux processus participent à l’explication des pratiques mises en œuvre par les enseignants : la diversité des statuts des personnels enseignants exerçant à l’université, la complexification du métier d’enseignant chercheur, la faible valorisation de la tâche d’enseignement, la formation à la pédagogie quasi inexistante des enseignants ou encore leurs conceptions de l’enseignement conduisent à s’interroger quant à la nature et à la variété des pratiques qu’ils mettent en œuvre ainsi qu’aux effets de ces pratiques sur la scolarité des étudiants.

PARTIE 2 : Chapitre IV. Les pratiques pédagogiques à l’université : éléments de problématisation…

CHAPITRE IV

LES PRATIQUES PEDAGOGIQUES A L’UNIVERSITE :

ELEMENTS DE PROBLEMATISATION

D’UN OBJET DE RECHERCHE

La pédagogie universitaire fait l’objet depuis maintenant plusieurs décennies d’une remise en question de la part des acteurs de l’institution mais également de la communauté scientifique. Déjà en 1964 Bourdieu et Passeron mentionnaient le fait que la pédagogie universitaire se caractérisait justement par son absence de pédagogie. En 1990b, Bireaud dénonce quant à elle un enseignement prenant considérablement appui sur un modèle traditionnel de plus en plus « inadapté », voire même « inadéquat ». Cette auteure, dans son ouvrage portant sur les méthodes pédagogiques dans l’enseignement supérieur, va même jusqu’à évoquer un certain « immobilisme pédagogique ». En 1994, Altet remet elle aussi en cause cette pédagogie, puisque suite à une description du cours magistral, elle estime qu’il est urgent de «mettre en place des stratégies qui incitent davantage les universitaire à réfléchir sur leur efficacité pédagogique ». De même, Felouzis (2003) évoque un modèle pédagogique universitaire « inadapté aux nouveaux publics étudiants », tandis que pour Romainville (2000), l’amélioration de la pédagogie à l’université pourrait même constituer une véritable solution pour lutter contre l’échec : « privilégier les méthodes qui suscitent l’apprentissage

en profondeur », « revaloriser la mission d’enseignement » ou encore « assurer des formations pédagogiques initiales ou continues » pourraient selon lui être des moyens de favoriser à terme la réussite des étudiants en premier cycle. Plus récemment, Bertrand (2014), dans un rapport relatif à la transformation pédagogique dans l’enseignement supérieur, mentionne que le passage au système LMD n’a pas engendré de véritable remise en cause du modèle transmissif, cela alors même qu’il considère que les dispositifs de formation devraient davantage reposer sur une approche d’apprentissage centrée sur l’étudiant. Il ajoute même que « de nouvelles pratiques

d’enseignement et d’apprentissage sont nécessaires ». Leroux (1997) s’intéresse pour sa part plus particulièrement à la pratique du cours magistral et la décrit comme étant « inscrite dans la tradition universitaire » et représentant « un facteur d’échec en premier cycle ». Malgré le peu de travaux produits

PARTIE 2 : Chapitre IV. Les pratiques pédagogiques à l’université : éléments de problématisation…

sur le sujet durant ces dix dernières années, nombreux sont-ils donc finalement à plaider en faveur d’une véritable rénovation du modèle pédagogique actuel et en ce sens, des pratiques pédagogiques qui en découlent. Ces différents écrits conduisent à s’interroger quant aux effets des pratiques des enseignants sur la scolarité des étudiants de première année universitaire. Cependant, pour décrire ces effets, il est nécessaire de connaître la nature des pratiques pédagogiques mobilisées par les enseignants. Le chapitre suivant est de ce fait destiné à développer l’ensemble de ces points.

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