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PRESENTATION DU CONTEXTE DE LA RECHERCHE

II.1. La motivation des étudiants

II.1.1.1. La théorie de l’autodétermination (Deci et Ryan, 1985)

La motivation est, selon Deci et Ryan (2008), « ce qui incite les personnes à penser, à agir et à se développer ». Leur conception de la motivation naît de leur « théorie de l’autodétermination ». Il est avant tout important de préciser que cette dernière s’articule autour de trois « sous théories » basées sur les mêmes fondements : la théorie de l’évaluation cognitive, la théorie de l’intégration organismique et la théorie des orientations de causalité. Nous prendrons principalement appui, dans le cadre de ce travail, sur les deux premières puisqu’elles s’avèrent les plus en lien avec notre objet de recherche.

L’autodétermination se définit chez un individu comme le besoin de «considérer qu’il est à l’origine

de ses actions » (Pelletier et Vallerand, 1993). Ainsi, être autodéterminé, c’est avoir le sentiment d’être soi-même le propre « décisionnaire » de son comportement (Lambert-Le Mener, 2012). Cela renvoie notamment à une certaine notion de liberté pour l’individu dans ses propres choix. La satisfaction de ce besoin s’avère capitale pour l’homme (Pelletier et Vallerand, 1993). En réalité, la théorie de l’autodétermination postule que l’environnement social de l’individu a un impact sur sa motivation, cet effet passant par des « médiateurs psychologiques » (Sarrazin et Trouilloud, 2006). Ces derniers sont en fait des besoins psychologiques fondamentaux, dont la satisfaction est primordiale pour l’être humain. Ces besoins sont de trois types :

Le « besoin de proximité sociale »fait référence au besoin qu’a l’individu d’entretenir des relations avec d’autres personnes de son environnement social et de bénéficier de l’attention de «personnes significatives pour soi » (Sarrazin et Trouilloud, 2006). Un individu

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est plus disposé à entreprendre une tâche s’il a le sentiment que celle-ci est « valorisée par un autrui significatif ».

Le « besoin de compétence » correspond au «désir d’interagir efficacement avec l’environnement» ainsi qu’au «sentiment de contrôler les éléments qui conduisent au succès dans une tâche particulière » (Sarrazin et Trouilloud, 2006). Ces auteurs précisent que plus l’individu a le sentiment d’être véritablement efficace, plus il adopte un comportement autodéterminé.

Le « besoin d’autonomie », autrement dit le besoin de se sentir autodéterminé, est le plus important d’après Deci et Ryan (1985) et se rapporte «au désir d’être à l’origine ou à la source de ses propres comportements » (Sarrazin et Trouilloud, 2006). Ainsi, un individu se sentant maître de ce qu’il exécute est motivé de façon plus autodéterminée qu’un individu ayant le sentiment d’être soumis à la contrainte.

La satisfaction, ou autrement dit l’accomplissement de ces trois besoins conduit l’individu à se sentir mieux, à être plus autodéterminé et donc à être plus motivé. Mais cette satisfaction dépend notamment de la façon dont l’individu perçoit son environnement social. Ces auteurs postulent par ailleurs, à travers leur théorie de l’intégration organismique, l’existence de différents degrés de motivation, ceux-ci variant en fonction du niveau d’autodétermination qui anime le comportement de l’individu et par là même de la façon dont sont satisfaits les différents besoins mentionnés ci-dessus. Ils identifient en ce sens, sur ce qu’ils nomment un « continuum d’autodétermination », la motivation intrinsèque, la motivation extrinsèque et l’amotivation. Motivation extrinsèque Régulation externe Motivation intrinsèque Amotivation Régulation introjectée Régulation identifiée Régulation intégrée Régulation intrinsèque Moins Autodéterminée Plus Autodéterminée Non- Régulation

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La motivation intrinsèque est le plus haut niveau d’autodétermination. L’étudiant se sent ici véritablement responsable de son comportement, il est à l’origine de sa motivation. Celle-ci est caractérisée par un locus interne de causalité perçue qui affecte de façon positive la motivation. Ainsi, un étudiant est intrinsèquement motivé lorsqu’il participe à une activité pour «le plaisir et la satisfaction» qu’il en retire pendant la pratique de celle-ci (Vallerand et Sénécal, 1992). L’inscription à l’université pour le simple plaisir d’apprendre de nouvelles choses peut, par exemple, être considérée comme une motivation intrinsèque. Dans cette même perspective, la théorie de l’évaluation cognitive consiste à «décrire les effets du contexte social sur la motivation intrinsèque des individus » (Carré et Fenouillet, 2008). D’après cette théorie, tout évènement, tel par exemple une récompense donnée à l’étudiant, est susceptible d’avoir un impact sur la motivation intrinsèque de l’individu. Deci et Ryan (1985) précisent d’ailleurs que les récompenses peuvent jouer un rôle à double tranchant : elles peuvent avoir une fonction « informationnelle» en renseignant l’individu sur sa compétence, ou au contraire une fonction « contrôlante» conférant à l’individu le sentiment d’être placé sous le joug d’un certain contrôle (Sarrazin et Trouilloud, 2006).

La motivation extrinsèque est, au contraire de la précédente, caractérisée par un locus externe de causalité perçue. Cela signifie que l’individu est porté à croire que son comportement a été « induit par des forces externes » (Pelletier et Vallerand, 1993). Ce type de motivation « regroupe un ensemble de comportements effectués pour des raisons instrumentales », donc des conduites moins autodéterminées de la part des individus (Pelletier et Vallerand, 1993). Ces derniers accomplissent une activité afin de bénéficier d’un avantage ou bien d’éviter un désagrément (Vianin, 2006). Cette motivation extrinsèque comporte plusieurs niveaux :

La « régulation externe » : l’individu est «dirigé par des contingences qui lui sont externes » (Viau, 1998). Cela signifie, dans le cas d’un étudiant, qu’il ne travaille que pour obtenir une récompense, parce qu’on l’y a contraint, ou encore pour éviter de recevoir une punition.

La « régulation introjectée » : dans cette configuration, l’individu «s’est approprié des

contingences externes » (Viau, 1998), mais celles-ci ne sont pas véritablement en accord avec ce que l’étudiant souhaite réellement. Ainsi, l’étudiant révise ses cours sans qu’on l’y

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oblige, mais le fait uniquement parce qu’il souffre d’un sentiment de culpabilité s’il ne s’attèle pas à la tâche.

La « régulation par identification » : à ce niveau, l’individu commence à être autodéterminé. Il effectue une activité car « il estime que ses conséquences sont importantes pour lui » (Viau, 1998). L’étudiant révise par exemple quotidiennement ses cours car il pense que cela lui permettra d’obtenir de meilleures notes aux examens.

La « régulation intégrée » : l’individu « s’engage dans des activités parce qu’elles correspondent

à ses propres buts et aspirations » (Viau, 1998). Ici, l’apprenant étudie par exemple les sciences de l’éducation parce qu’il a un projet professionnel bien précis. Cela ne peut cependant pas être considéré comme de la motivation intrinsèque, car l’étudiant ne fait pas cela pour le plaisir, mais bien dans un certain but, il espère toujours en retirer quelque chose.

Enfin, dernier terme employé par Deci et Ryan (1985), l’amotivation correspond à la forme la moins autodéterminée de la motivation, puisqu’il y a ici une absence de contrôle sur les situations vécues par l’individu et par conséquent une absence totale de motivation. « L’individu

caractérisé par cet état ne perçoit pas de relation entre ses actions et les résultats obtenus » (Vallerand et Sénécal, 1992).

Cette catégorisation des divers degrés de motivation a conduit plusieurs chercheurs à s’interroger quant à leur impact sur la réussite des étudiants. D’abord, comme le montre Lambert-Le Mener (2012), l’amotivation exerce en première année universitaire un effet négatif sur la réussite, tandis que la motivation intrinsèque se révèle avoir un impact positif et significatif sur les résultats des étudiants aux examens. D’autres recherches montrent de façon générale que plus le comportement de l’individu est autodéterminé, plus les conséquences éducatives sont « positives » pour ce dernier (Vallerand, 1993 ; Ryan et Deci, 2000 ; cités par Sarrazin et Trouilloud, 2006). Forner et Simonot (2001) se sont également intéressés à cette problématique. Aussi ont-ils mené une recherche en s’appuyant sur un échantillon de 239 étudiants inscrits en première année de sociologie à Lille. A travers leurs résultats, ils constatent un effet positif de la motivation extrinsèque, qu’ils nomment autrement «motivation à la réussite », sur les résultats des étudiants aux examens de sociologie, sciences économiques, psychologie sociale et statistiques. En revanche, aucun effet significatif de la motivation

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intrinsèque, c'est-à-dire de « l’intérêt», n’est détecté. Ces résultats peuvent paraître surprenants puisque ces chercheurs, prenant appui sur les travaux de Fenouillet et Tomeh (1998), évoquent ensuite dans leur article le fait que les différents types de motivation susciteraient des stratégies d’apprentissage diverses. Ainsi, la motivation extrinsèque conduirait plutôt les étudiants à employer des stratégies dites de surface, tandis que la motivation intrinsèque mènerait les étudiants à un apprentissage en profondeur22 et de ce fait plus favorable à la réussite. Mais alors comment interpréter les résultats mis au jour par Forner et Simonot ? En réalité, pour eux, « l’organisation des études à l’université éveille massivement une motivation extrinsèque qui favorise l’usage de

stratégies de surface, qui peuvent être efficaces pour les apprentissages simples, mais se révèlent inefficaces pour les apprentissages complexes ». D’après ces auteurs, l’université considérée dans son ensemble encourage les étudiants, en raison de la façon dont elle fonctionne, à adopter une motivation extrinsèque. Ce type de motivation, s’il s’avère sans grande conséquence en première année universitaire, ne permet cependant pas de parvenir avec succès aux cycles supérieurs.

L’opposition entre motivation intrinsèque d’une part et motivation extrinsèque d’autre part est peu à peu remplacée au profit d’une opposition entre motivation «autonome » (regroupant régulation identifiée, régulation intégrée et motivation intrinsèque) et motivation « contrôlée » (régulation externe et régulation introjectée) (Deci et Ryan, 2008). Mais les conclusions des chercheurs restent les mêmes : contrairement à la motivation contrôlée, la motivation autonome conduit notamment à de meilleurs résultats scolaires (Black et Deci, 2000, cités par Deci et Ryan, 2008) et à une plus grande persistance dans les activités scolaires et sportives (Pelletier, Fortier, Vallerand et Brière, 2001).

La théorie de l’autodétermination met en définitive en avant l’importance de la perception de l’environnement social par l’individu, puisqu’elle influence l’accomplissement de besoins fondamentaux. En fonction de la satisfaction de ces derniers, l’individu adopte un comportement plus ou moins autodéterminé. Mais cette théorie n’est pas la seule à supposer que les perceptions de l’étudiant jouent un rôle primordial sur sa motivation.

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II.1.1.2. Le sentiment d’efficacité personnelle (Bandura, 1997,

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