faut tout prévoir,
une
des clauses portait que, encas d'expul-sion, on laisserait aux bannis huit jourspour
se retourner.Moréno
leur ouvrit aussitôtdeux
collèges, à Quito et àGua-yaquil.
Des
Jésuites allemands vinrent à l'Université organiser l'enseignement scientifique. Puison
se préoccupa desIndiens,Dans
ce qu'on appelait la Provinceorientale, au bas des Andes, sur le coursdu Napo
et autres affluentsdu
hautAmazone,
il y avaitune
population sauvagenombreuse
: Indiens farouchesou
indolents, perfides ou guerriers, parfois véritables bêtes fauves.Les
Jésuites jadis, ainsique
les Dominicains, avaientAMÉRIQUE LATINE O'I
travaillé dans le pays, et il restait quelques traces defleurs missions, des vieux chrétiens,
sommairement
espagnolisés et laissés à l'abandon. GarciaMoréno
se considéraitcomme
tenuen
conciencede
procurer au plus tôt à ces barbaresla loi et la civilisation.Les
Jésuites partirentdonc pour
les missionsdu
haut Napo, deMacas
et de Gualaquiza. Ils entreprirent l'éducationhumaine
et chrétienne de ces grands enfants, chez qui,même
baptisés, les passions de sauvages ont de terribles réveils, défiants, libertins, capricieux, inconstants, toujours prêts à lever la hache,ou
à fuir dans la forêt.Œuvre
d'au-tant plus malaisée qu'il fallaitcompter
avec desmarchands
sans scrupules qui se faisaientun
jeu d'exploiter les vicesdes indigènes. MaisMoréno
étaitl'homme
desmesures
énergiques.Les
trafiquants prévaricateurs furent éloignés et tenus à dis-tance.Une
police sévère protégea les villages indiens.De
là bien des haines. Mais les missionnaires et leprésident passè-rent outre, et, pendant quelque temps, l'œuvre de Dieu put se faire en paix.Au
bout d'une douzaine d'années,on
comptait environvingt centres, etdix mille chrétiens, anciensetnouveaux.Les écoles prospéraient; et,
comme
partout, à défaut des adultes, les enfants donnaientbon
espoir. Soudain,Moréno
tomba, martyr de la politique chrétienne, victime aussi de son zèle pour les missions.Son
assassinRayo
étaitun
anciengouverneur du
Napo, destitué par lui pour, abus de pouvoir (187o).Immédiatement
les réductions furent dispersées ; lesmarchands
redescendirent dans la forêt et en chassèrent les Jésuites.Dans
lemême
temps, la série des exils avait repris ailleurs,comme
toujours interrompant lesœuvres
les plus fructueuses, et rendant impossible le travail des missions.En
1871, la révolution triomphante chassait les Jésuitesdu
Guatemala. Ils parvinrent à se réfugierau
Nicaraguaoù
ilseurent dix ans de paix. Mais leurs
ennemis
les poursuivaient par delà les frontières.Pour amener
leur expulsion, l'on inventaqu'ils avaientprovoqué une
révolte d'Indiens, etilfallut repartir. Il leur restait encore le collège*de Gartago dans leCHAPITUE II
Costa-Rica.
Or
c'était letemps où Léon
XIII dénonçait aumonde
catholique les agissements de la franc-maçonnerie.L'évêque ayant
promulgué
les paroles pontificales, fut immé-diatement exilé. Puis,comme
dejuste,on
s'enpritaux
Jésuites.Cette fois l'expulsion dépassa en rapidité brutale tout ce qu'on avait
pu
voir ailleurs.A
11 heuresdu
matin, surun télégramme venu
de la capi-tale, les Pères furentmis en étatd'arrestation.Une
heure après,un
train qui les attendait eh gare, devant le collège, les emportait.Une
centainede pensionnaires demeuraiten
arrière, dans les classes abandonnées, sans personne qui s'occupût d'eux (1884).Dans
les républiques d'Amériquecentrale, leMexique
excepté,il n'y avaitplus de Jésuites. Maisilsétaientrentrésen
Colombie Dès
1872,on
les avaitlaisséssefixer àPanama.
Maintenantun
desleurs,Mgr
Vélasco, étaitnommé évoque
dePasto, puisarche-vêque
de Bogota. Sur cette terre, jadis sanctifiée par l'héroïsme de Saint Pierre Claver, le Jésuite esclave des nègres esclaves,une
ère de libertécommençait pour
les catholiques. Elle dure encore.On
a bien eu quelques alertes ; car, pour êtrevaincus aux élections, les libéraux n'en sont pasmoins
puissants.Mais enfin l'Eglise a recouvré sa part de légitime indépen-dance. Les Pères en ont profité.
Légalement
reconnus, ils vi-vent en paix,adonnés
à leurs ministères.On
leur amême
confié plusieurs lycées d'Etat.
Trop peu nombreux
parmalheur pour
pouvoir ajouter au labeur écrasant de l'éducation autre choseque
les missions decampagne.
L'évangélisation des sauvages dans lesAndes
et les savanes n'a pas encorepu
être reprise par eux.Pendant quelque temps,
on
a étéun peu
plusheureux
à l'Equateur, Chassés de leurs chrétientés par les assassins de GarciaMoréno,
les Pères avaient été malgré tout tolérés dans leurs collèges.On
y vivait au jour le jour, sur le qui-vive, car la révolution ne désarmaitpas.Une
ère meilleure s'ouvrit en 1883.Le gouvernement
redevenu catholique, invita les Jésuites à redescendre sur le Napo.Les
Dominicainsne
tar-dèrent pas à les y rejoindre.MalJieureusement
Je
grandprésidentn'était plus làpour
faireAMÉRIQUE LATIME o3
la police des missions. Les
marchands
avaient reparu dansles peuplades, exploitant l'immoralitéou
l'inexpériencedes Indiens.Les missionnaires faisaient de leur
mieux
pour défendre les néopliytes. Mais c'était se créer à la capitaled'irréconciliables ennemis.Leur
expulsionl'ut décidée.Pour
l'arracher au gou-vernement, tout fut mis enœuvre. Des
Indiensconvenable-ment
stylés vinrent déposer à Quito contre leurs prêtres.Une
révolte
fomentée
par les blancs éclata,où
plusieurs Jésuites faillirentêtre écharpés (1892). Puis, laguerre- ayant éclaté entre l'Equateuret le Pérou, lapresse radicale accusa les missionnai-resdepactiseravec lesPéruviens.Il estvrai qu'àLima,on
racon-tait sérieusement qu'ils exploitaient lessables aurifèresdu Napo
au profit desEquatoriens. Cependanton
continuaità agir surles indigènes.La
consignevenue
de Quito fut de faire le vide autour des missions,de retourneraux
forêts, etde contraindre par lafamine les Pères à s'éloigner. Enfin, en 1894, legou-vernement
céda à la pression des loges, et il fut enjointaux
JésuitesdequitterdéfinitivementleNapo.Us
n'y ont pas reparu.Cette fois encore le territoire de l'Equateur ne leur futpas absolument interdit.
Us
purent reporter leur zèle sur d'autres Indiens, près de la capitale, et conservèrent plusieurs maisons et collèges. Mais cette paix n'estque
relative.En
1895, larépublique étant en pleine révolution,
une émeute
eut lieu ,àRiobamba
; le recteurdu
collège fut tué, lamaison
pillée, le tabernacle saccagé, plusieurs Pères jetés en prison.Chose
assez rare dans l'histoire des Jésuites, on s'en tint là et les violences deRiobamba ne
se terminèrent pasparun
arrêt d'ex-pulsion.Quelques Jésuites sont encore à l'Equateur.
Y
resteront-ils longtemps?Au
jour d'expulsion observera-t-on à leur égardla clause signée par G.
Moréno,
qui leur garantit huit jourspour
faire leurs paquets?Ce
qui s'y passe aumoment où nous
écrivons, lesmesures
prisesponr
interdire le sol de la république aux religieuxnon
equatoriens, l'isolement où l'on semble vouloir les réduire, l'interdiction faite à leurssupérieurs étrangers de venir les visiter, bien d'autressymptômes
encore permettent de tout craindre.On
y regarde beaucoup,beaucoup
trop,
du
côté de la France.34 CHAPITRE II
A
la mission de l'Equateur se rattachent les stations de la Bolivie etdu
Pérou.Leur
histoire tient en .quelques lignes.Au
Pérou, les Jésuites furentramenés
en 1871 parl'arche-vêque
deLima
qui leur confia son séminaire deHuanuco. En
1879, ils rentraient dans leur ancien collège Saint Paul
de
Lima.En
1886, il y eutune
expulsion dont le prétexte futun jugement
sévère et mérité, dansun
livre classique, à l'adresse de tel et tel fondateurde l'indépendance péruvienne.On
se réfugia à la Paz, enBolivie, où, dès 1883, legouverne-ment
avait appelé les Jésuitespour
y ouvrirun
collège.Depuis, ils sont rentrés au
Pérou où
ils ont lesdeux
collèges deLima
et d'Aréquipa.La
mission deColombie
relève de la province de Gastille : ellecompte
148membres,
dont 68 prêtres. Il convient d'y joindre lesdeux
collèges deCuba
qui occupentun
personnel de 68 religieux.Les
maisons de l'Equateur,du Pérou
et de Bolivie en ont 178, dont 104 prêtres, et appartiennent à la province de Tolède.L'histoire des missions de la
Compagnie
de Jésus dans l'Amériquedu
sud, Argentine, Uruguay, Paraguay, Chili,Brésil, estmoins
tourmentée. Aussi lesœuvres
apostoliques oiit-ellespu
y avoir àpeu
près leurdéveloppement
normal.Ce
n'est pasque
les épisodes d'arbitraire et de violence aient manqué/.Là,