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PARTIE II TOPONYMIE APPLIQUÉE

Chapitre 1 : Toponymie comparative diachronique polonaise et française française

1.3. Comparaison des systèmes toponymiques polonais et français

Le système toponymique polonais et le système français sont analysés et présentés différemment. La toponymie française est présentée par les onomasticiens d’une manière chronologique selon les superstrats linguistiques, et la toponymie polonaise selon leur création et motivation. Dans cette partie nous essayerons de mettre en parallèle ces deux systèmes pour trouver des points communs, à partir d’une classification basée sur les critères sémantiques et formels des noms, qui décrit le rapport entre le toponyme et sa base de dérivation76.

76 La plupart des exemples de toponymes qui seront cités sont issus de l'ouvrage de Waleryszak L. Étude de l'onomastique dans les traductions littéraires du polonais en français, thèse de doctorat, Lille 2003.

Nous nous appuierons sur la classification proposée par Rospond dans Klasyfikacja strukturalno-gramatyczna słowiańskich nazw geograficznych (1957). Une classification plus récente est celle de Rymut (1996-2007) ; elle sert de référence dans les études contemporaines des toponymes polonais. Rymut distingue quatre catégories principales qui englobent quelques sous-groupes : les noms dérivés des anthroponymes (les noms patronymiques, de propriété, de lignée), les noms dérivés des noms ethniques ou de servitude, les noms dérivés des noms communs (noms topographiques, noms culturels) et les noms dérivés d'autres toponymes (dont les noms diminutifs et les noms propres topographiques).

Nous venons de dire que dans les deux systèmes toponymiques, les toponymes peuvent être composés de noms communs : substantifs ou adjectifs (voire prépositions ou verbes), qui sont liés aux reliefs, cours d’eau, faune et flore, à des constructions de villes, etc. : Lipsko (de lipa ‘tilleul’), Beauvronne (de beber, bebros – ‘castor’). Ils peuvent également être composés d’anthroponymes (nom de dynastie, de propriétaire, de fondateur, etc.) exemples : Kazimierz (de Casimir), Autun (Augustodunnum de Auguste) ; ou de toponymes, dits noms de relation, créés à partir de villes, de cours d’eau, etc., exemples : Lubsko (ville située sur les bords de la rivière Lubsza), le Loiret (affluent de la Loire). Enfin, dans les deux langues, il existe des toponymes obscurs. Nous allons présenter ces créations toponymiques des deux langues plus en détail.

Parmi les toponymes polonais et français, les oïkonymes et les urbonymes constituent le groupe le plus diversifié. Ce groupe est le plus dynamique aussi, car le nombre des noms de lieux habités et des noms d’objets urbains ne cesse d’augmenter.

On observe cela surtout à partir du Moyen Age. Au cours de l’histoire, on observe également que ce groupe a subi le plus de changements dans la nomenclature.

En nous appuyant sur la classification de Rymut, nous commencerons par les noms de villes et de villages crées à partir des anthroponymes (noms de conquérants, propriétaires des lieux, fondateurs, ethnonymes, hagionymes, ou divinités païennes).

Dans la toponymie française, les anthroponymes étaient la source de création des noms de lieux habités à toute époque. C’étaient les noms des riches propriétaires, des fondateurs, des conquérants ou des saints. On rencontre des oïkonymes anthroponymiques déjà en Gaule. Le suffixe gaulois qui servait à créer ce type de noms était –one comme dans Alignone>Alençon, Divione>Dijon. Le suffixe romain qui est apparu par la suite et qui désignait aussi les propriétaires terriens, était –acum, variante latinisée du suffixe celte –aco, comme dans Ambarriacum qui était le domaine d’Ambarrius (aujourd’hui Ambérieu). Le type suivant est apparu lors des Grandes Invasions, pendant lesquelles des toponymes prirent le suffixe germanique –ingen et l’on peut constater que certains oïkonymes tirent leurs noms des peuples envahisseurs (nous pouvons donc les comparer aux ethnonymes présents dans la toponymie polonaise). Ainsi, on retrouve le nom des Alamans, peuple de l’est du Rhin, dans Allemans en Dordogne, ou Allemagne dans le Calvados. On retrouve aussi des oïkonymes composés d’éléments comme cortis ou villa qui s’ajoutaient à un anthroponyme. À partir du Ve siècle on retrouve des oïkonymes liés à la religion chrétienne qui se développa à

cette époque. Il apparut beaucoup de noms liés aux édifices tels qu’églises, monastères, etc. En ce qui concerne les anthroponymes, dans le cadre de la religion, c'étaient des hagionymes ; les oïkonymes avec un composant Saint ne sont apparus qu’à partir du XIe siècle, car, auparavant, l’équivalent du saint dans la langue vernaculaire, c’était dominus, terme qui ne fut réservé par la suite qu’au Christ (Waleryszak 2003 : 60). Ainsi on peut citer Domrémy, Dampierre, Dammarie, etc., et parmi les oïkonymes avec saint : Saint-Michel, San, Saint-Tropez, etc.

Parmi les oïkonymes polonais contenant les anthroponymes, on compte des noms patronymiques, de propriété et de lignée (dynastiques) que nous avons présentés dans le paragraphe précédent. Ces anthroponymes peuvent être des surnoms, des diminutifs, des patronymes et des prénoms. Ce qui varie, ce sont les suffixes qu’on leur attribue en fonction du type de relation entre l’objet et le donneur du nom que l’on voulait signaler dans la dérivation toponymique77. Les oïkonymes patronymiques reçurent jusqu’à la moitié du XIVe siècle le suffixe –icy et –owicy, comme dans Czechowicy, la forme du pluriel de Czechowic – ‘le fils de Czech’. Le nom Czechowicy était donc ambigu car il désignait en même temps le lieu où vivaient les Czechowicy et les porteurs de ce nom eux-mêmes. Au fur et à mesure que les noms évoluaient, les suffixes –icy et –owicy ont été remplacés par –ice et –owice qui ne formaient que les localités

« patronymiques ». Ces suffixes servirent aussi à la création des noms non patronymiques. Ils se joignirent aux hagionymes lors de la christianisation de la Pologne.

L’autre type de toponymes « déanthroponymiques », les noms de propriété, se distinguent par les suffixes –ów, -owa, -owo qui étaient des suffixes archaïques de formation des adjectifs (ils sont remplacés aujourd’hui par les suffixes –owy, owa, -owe). Ainsi, Kraków étymologiquement désignait ‘le castra de Krak’ (Waleryszak 2003 : 61). Parmi les noms de propriété on compte aussi ceux qui sont terminés par les suffixes –in, -ina, -ino. On les retrouve dans Strzelin (< Strzała), Lubin (< Luba diminutif de Lubomir), ou bien les suffixes –jƄ, -ja, -je qui ne sont reconnaissables que dans les noms terminés par des consonnes molles ou durcies, comme dans Sącz (< Sądecz<Sędek diminutif de Sędzimir). Enfin, dans la toponymie polonaise, des anthroponymes pouvaient tout simplement subir une transonymisation sans changement formel, Kalety

<Kalita (de l’anthroponyme Kalita). Rappelons encore les noms de lignée. Ils avaient à l’époque la même forme que les noms d’habitants du lieu. C’étaient le plus souvent les surnoms au pluriel : Marki (de Marek), Wronki (de Wronka).

77 Waleryszak (2003 : 60) parle du sens en décrivant ce type des noms. Nous préférons éviter de parler de sens dans le cas des noms propres.

Ainsi, les oïkonymes polonais créés à partir des noms des fondateurs de lieux habités ont des formations diverses. Ils peuvent être composés à l’aide des suffixes et affixes mentionnés ci-haut, ne pas subir de modifications du tout comme Kazimierz, mais aussi prendre des lexèmes comme gród (‘ville fortifiée’), -brzeg (‘rive’) ou- pol (‘champ’) : Baligród (de Bala), Fredropol (de Fredro), Tarnobrzeg (de Tarnowski).

Comme le remarque Waleryszak (2003: 62), les formations avec des lexèmes sont analogues aux formations françaises avec cortis, villa, ex. Azincourt ou Romainville.

Les oïkonymes créés à partir des toponymes sont très nombreux dans les deux langues. Malec (2003) appelle ce type de toponymes des noms de relation. Il s’agit d’une dérivation ou relation par rapport à un autre oïkonyme ou hydronyme. Dans la toponymie française, on rencontre aussi bien des formes diminutives, que des constructions prépositionnelles, comme Noyelles-sous-Lens où le dernier élément est

« une ville proche de plus grande importance » (Waleryszak 2003 : 62) ou Vern-sur-Seiche (en breton Gwern ar Sec'h) où le second élément est une rivière. À côté des formes qui ont des marques transparentes d’une relation à un autre toponyme, les onomasticiens français ont analysé des noms de villes dérivés des hydronymes, simples et composés, exemples : Sorgues (de la rivière Sorgue), Fonsommes (< fons – ‘source et de Somme’).

Dans la toponymie polonaise, parmi les noms de relation, on rencontre les noms diminutifs dérivés des noms de villes proches plus anciennes auxquelles les nouvelles villes s’attachent ou se construisent dans la proximité. Le suffixe qui servait à la formation de ce type d’oïkonymes c’est –ec, comme dans Lubliniec < Lublin, par la suite c’étaient des suffixes –ek, -ka dans Łaszczówka < Łaszczów. Ces suffixes sont d’ailleurs toujours productifs dans la dérivation des diminutifs. Parmi ces noms, on compte aussi des noms ethniques dérivés des noms du peuple habitant un terrain, exemple : Ruciany (< Rudczany) tire son nom du peuple habitant Rudka, ou Gliniany du peuple habitant le terrain se caractérisant par glina – ‘argile’. Ces noms furent créés à partir des formes du pluriel. Enfin, on compte aussi les noms dérivés d’hydronymes, qui ont donné les noms aux villes, souvent fortifiées à l’origine, situées aux bords des fleuves ou rivières, comme Sanok de l’affluent San, et les noms tout simplement transonymisés, sans marques de dérivation : Narew de Narew, Biała de Biała, etc.

On rencontre aussi dans les deux langues des oïkonymes de relation avec les villes lointaines étrangères, comme Romette de Rome, Fleurance de Florence, et en Pologne Florencja (Florence) et Paryż (Paris). Ces noms renvoient au souvenir des

croisades ou des conquêtes, dans la toponymie française et, dans la toponymie polonaise, ils relèvent plutôt des voyages des nobles et des religieux.

Une autre façon de créer des oïkonymes qui est très populaire dans les deux langues, est la création à partir des noms communs. Ils peuvent être liés à l’activité de l’homme78 comme l’artisanat, les professions, les métiers, les impôts, les constructions diverses (voies, châteaux, fortifications), les lieux de culte, l’industrie, les auberges, etc. ; à la topographie et particulièrement aux reliefs, cours d’eau ; à la faune et à la flore. Il s’agit donc des noms qui ont une valeur topographique, provenant du cadre naturel et à valeur culturelle, qui tirent leurs dénominations de l’activité de l’homme. Dans tous les cas, ces noms sont liés à la spécificité des lieux.

Ils peuvent être simples, composés ou dérivés à l’aide des affixes. Parmi les noms à valeur topographique ou liés à la nature, dans la toponymie française on compte déjà les noms d’origine pré-gauloise qui contiennent des étymons évoquant le relief ou les cours d’eau : Arles <ar –‘eau’ et ‘vallée’ et –el, La Touche de tosca (pré-gaulois qui existe encore en occitan) signifiant ‘taillis’. Parmi les noms caractérisant la faune, les toponymes gaulois contiennent des noms d’animaux sauvages, comme Beuvry de bebros, beber – ‘castor’. Les formations romaines étaient analogues à ce niveau.

Dans la toponymie polonaise, on rencontre de très nombreux noms de ce type : Brzegi, Brzeg, (de brzeg – ‘bord’), Kamień (‘pierre’), Zagórów (de ‘za górą’ – ‘derrière la montagne’), Żabno (de żaba –‘grenouille’), etc.

Les noms de constructions sont aussi présents dans les deux systèmes toponymiques. Comme le remarque Waleryszak (2003 : 64), la Gaule comptait huit millions d’habitants, ce qui n’était pas sans conséquence sur les constructions des lieux habités. En effet, on rencontrait déjà des formes d’agglomérations très diverses :

« (…) aux toponymes (terminés) en –ialo correspondaient des villages des paysans établis sur des zones cultivées ; aux toponymes (terminés) en –mago, les bourgs commerçants établis au carrefour d’axes routiers ; enfin, aux toponymes en –duno et en –duro, des villes perchées ou fortifiées, refuges en cas de guerre et résidences permanentes du roi et des nobles, ainsi que d’une population d’artisans et de commerçants ». (Dauzat 1939/1946 : 131-132)

78 Classification proposée par Waleryszak (2003) que nous n’avons pas suivie d’une manière fidèle.

Le système féodal et la christianisation de la Gaule ont laissé des noms comme Manéglise, Châteauroux (‘le château de Raoul’), La Motte (de mutta – ‘fortification sommaire couronnée par une palissade ou une tour de bois’). On trouve aussi des constructions comme Pontoise (‘pont sur Oise’) ou les noms liés à des redevances comme La Tâche (du médiéval tasche – ‘taxe’). Au XIe et XIIe siècle, il y eut une explosion des villes liée à une explosion démographique. De cela viennent des noms comme Villefranche, Villeneuve ou Neuville, qui est une inversion du nom précédent à cause de l’influence germanique dans la toponymie française.

À ce type de noms correspondent les oïkonymes polonais composés de lexèmes, gród (‘ville fortifiée’) dans Nowogród, Nowodwór, etc., et leurs opposés Stara Wieś (<

Starosielce < stare sioło – ‘vieux village’), ainsi que des constructions qui donnèrent des noms comme Ogrdzieniec (lieu clôturé), ou des noms liés au système féodal comme dans la toponymie française, du type Wola, Wielka Wola qui renvoient à la liberté mais dans le sens de franchise temporaire de cens et labeurs dus au seigneur (Gieysztor 1988:68 dans Toponymie et défrichements).

A cause de la différence topographique, la toponymie polonaise contient un bon nombre de noms liés au défrichement (cf. 3.1), ce qui n’est pas le cas pour la toponymie française. Dans la toponymie française on rencontre aussi des noms motivés ainsi : Novale (terre nouvellement défrichée), Arsure (arsus – ‘brûlé’), etc. Ce sont le plus souvent des noms liés à l’action de brûler et au feu.

L’ensemble des noms liés aux professions et aux métiers constitue dans la toponymie polonaise un groupe remarquable. Parmi les noms français, on trouve les noms se référant à l’action des artisans : Bréseaux (de bresil – braisier > braise) est une ville où se trouvait une fonderie (Waleryszak 2003 : 65). Dans la toponymie polonaise, ce type de noms provient du Moyen Age. Ce sont des noms d’artisans et serviteurs qui travaillaient et s’installaient autour des domaines des nobles : Piekary (de piekarze, ‘les boulangers’), Kowale (‘les forgeurs’), Strzelce (‘les chasseurs, tireurs’) etc.

Pour terminer nous pouvons mentionner encore des oïkonymes métaphoriques comme Gołonóg (qu’on pourrait traduire par ‘pieds nus’), la ville qui était entourée de marécages, Balledent, qui signifie ‘sol dur’.

En ce qui concerne la création des urbonymes polonais et français, c’est un groupe de toponymes au sein duquel on compte les noms anciens et les noms contemporains. Les noms des rues des places, des parcs, etc. sont en constante évolution. Les noms de rues françaises et polonaises ont des motivations analogues. Ils

ont été attribués selon leurs caractéristiques : ulica Prosta (‘rue droite’), rue Basse ; selon l’activité commerciale des habitants : ulica Szewska (de szewc – ‘cordonnier’), rue aux Ours (< Oues – ‘oies’) ; selon les noms de saints ou des bâtiments saillants : plac Zbawiciela (‘place du Sauveur’), rue Sainte-Barbe, ulica Dominikańska (‘rue de Dominicains’), ulica Dworcowa = rue de la Gare. Traditionnellement, les noms des rues étaient depuis l’antiquité créés à partir des noms de destinations et directions auxquelles elles menaient. C’était déjà un modèle odonymique de l’ancienne Rome. On rencontre ainsi de nombreuses rues portant le nom d’une localité dans la toponymie française et polonaise : ulica Krakowska menait à Kraków, la rue de Saint-Malo menait à Saint-Malo. Les urbonymes français et polonais modernes portent souvent des noms commémoratifs ou en hommage à des personnes de notoriété pour des communautés.

Parallèlement dans les deux langues, les noms des rues dans des nouveaux quartiers et cités sont souvent « neutres », c’est-à-dire qu’ils n’évoquent aucune connotation historique ou culturelle, ni ne possèdent aucun lien avec l’objet nommé. La seule motivation que l’on peut trouver, c’est l’association au quartier où la rue est construite.

Pour terminer notre parallèle entre la toponymie française et polonaise, il nous reste deux types de toponymes. Le point de rencontre et de l’accord entre l’anthropologie et l’onomastique est la constatation que les premiers objets qui ont reçu les noms étaient les reliefs, les cours d’eau, les étendues d’eau, les forêts, et tout ce qui constituait l’entourage direct de l’homme. Ainsi, les oronymes et les hydronymes polonais et français sont donc de vrais fossiles du lexique le plus ancien. Ce lexique peut être issu des langues qui ont déjà disparu, des proto-langues (une sorte d’hypothèse de langues n’ayant jamais existé en tant que telles) et de dialectes qui sont apparus dans une région pour des raisons différentes.

Les onomasticiens ont constaté que les noms propres étaient à l’origine des noms communs qui ne servaient qu’à appeler des objets quand le besoin s’en faisait sentir.

Ainsi, en citant Rostaing (1961:6), un ruisseau s’appelait simplement ruisseau (et il existe encore des noms de ce type) car c’étaient les seuls objets de ce genre dans une commune. Au fur et à mesure que l’espace vital d’une communauté s’élargissait, il devint nécessaire de pouvoir distinguer un objet d’un autre de la même classe ; on le faisait donc à l’aide des caractéristiques, par exemple concernant la couleur. Ainsi un ruisseau a pris le nom de l’Aube (de Albis, la blanche). Le même procédé concerne les oronymes, etc. Handke (1992) propose une thèse selon laquelle tous les toponymes étaient d’abord

des noms communs, puis des noms composés car le nom commun pour se distinguer d’un autre a été complété par un élément caractérisant qui a repris tout le contenu onomastique et qui fonctionne finalement seul, sans élément premier79.

Puisque nous venons de dire que dans les toponymies polonaises et françaises les hydronymes sont des toponymes les plus anciens, un certain nombre de ces noms restent opaques pour les onomasticiens dans les deux langues. Dans la toponymie polonaise, ce sont les noms de fleuves Wisła et Odra (Vistule et Oder). Leur étymologie est contestée. Dans la toponymie française, les plus anciens sont les noms d’origine pré-gauloise ayant une racine signifiant l’eau dōr, dūr ; on la retrouve par exemple, dans Dordogne.

Néanmoins, nombreux hydronymes sont transparents dans les deux langues et présentent des motivations analogues. Dans la toponymie polonaise, ce sont surtout des noms simples constitués directement d’appellatifs (adjectifs et substantifs) : Biała (blanche), Struga (filet d’eau) ou dérivés des appellatifs : Białka (petite blanche). Ce sont aussi des noms composés d’un adjectif et d’un substantif : Czarna Woda (l'eau noire).

Dans la toponymie française, des noms d’origine gauloise, gallo-romaine et germanique sont assez transparents pour les onomasticiens. Ils peuvent être simples et composés, dérivés d’adjectifs et de substantifs : Doubs<Dubis de dub –‘noir’, Sambre<Samara de sam- ‘tranquille’ et –ar- ‘eau courante’.

Ainsi, la motivation des hydronymes polonais est comparable à la motivation des hydronymes français. Dans un premier temps, les hydronymes sont liés à l’eau, à la caractéristique et à la particularité des cours et d’étendues d’eau : Głęboczek (de głęboki – ‘profond’), la Sambre (de Samara : sam- et –ar- ‘tranquille, eau’) ; la flore et la faune sont également des sources de motivation dans les deux hydronymies : Borówka (‘airelle’), la Bièvre (de beber, bebros – ‘castor’) ; les toponymes d’objets avoisinants sont la base de plusieurs hydronymes polonais et français : Ostrowitnica du lac Ostrowiec, le canal de Calais de la ville Calais. Les affluents des fleuves et des rivières sont composés souvent à base du nom de cours d’eau et d’un suffixe diminutif : Wisełka de Wisła (Vistulette < Vistule), le Loiret de la Loire, etc.

Enfin, certains hydronymes ont une étymologie liée à la religion : Sięży Potok (de ksiądz – ‘le prêtre’), la Saône de Souconna est basée sur le nom d’une divinité.

Remarquons que les fleuves sont en majorité dans les deux langues de genre féminin, les lacs polonais sont neutres tandis qu’en français, qui ne possède pas de genre

79 Cette thèse mérite notre attention et nous la présenterons plus en détail lors de l’analyse des exonymes où l’on observe l’ellipse d’un d’éléments constituants.

neutre, ils sont masculins. Ceci peut être lié au genre des noms communs génériques désignant le type d’objet géographique : rivière et rzeka, féminins, mais pas fleuve, lac masculins, jezioro neutre. Le générique morze - la mer est neutre en polonais comme en latin mare mais il est féminin en français, ce qui est une exception pour les noms issus des noms neutres latins, qui devenait majoritairement masculins.

Les oronymes constituent avec les hydronymes les couches toponymiques les plus anciennes. Leur construction et leur motivation sont identiques. Ils peuvent avoir des formes simples : Dół (fossé), l’Albaron (de albus – blanc), composées : Mała Łąka (petite prairie), le pic Long, etc. Ils peuvent être transparents et opaques dans les deux

Les oronymes constituent avec les hydronymes les couches toponymiques les plus anciennes. Leur construction et leur motivation sont identiques. Ils peuvent avoir des formes simples : Dół (fossé), l’Albaron (de albus – blanc), composées : Mała Łąka (petite prairie), le pic Long, etc. Ils peuvent être transparents et opaques dans les deux