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Chapitre 3 : Cadre méthodologique

3.3 Types de données : instruments

3.3.1 Collecte de données : activités de l’atelier participatif

Cette recherche s’articule autour d’un atelier participatif, proposé à un groupe de jeunes réfugiés, aboutissant à la production d’un récit de vie sur eux-mêmes, sous forme numérique. L’atelier, qui comportait dix étapes principales (comme l’indique le tableau ci-haut), s’est échelonné sur plusieurs semaines, totalisant plus d’une trentaine de rencontres, incluant les entrevues individuelles. Les rencontres ont duré de 1h00 à 5h30 environ chacune (se référer au Tableau V pour plus de précisions). Les séances de l’atelier se déroulaient en groupe et quelques-unes se sont faites séparément, par personne ou en dyade.

3.3.1.1 Présentation et description des activités

Étape 1 - la production du collage autoportrait

L’atelier, animé par la chercheuse principale, proposait diverses activités, dont la production d’un collage autoportrait individuel d’images qui donne lieu à une première présentation de chaque participant. Cette production consistait à mettre sur une affiche des images, des mots et des expressions écrites personnifiés par chaque participant, le tout guidé par quelques questions formulées par l’animateur. Les exemples de questions pour susciter le travail sur le collage d’images ont été : quelles images décrivent le mieux qui je suis ? Quelles

sont les valeurs qui me représentent ? Qui suis-je comme apprenant, élève ? Etc. Nous avons mis à la disposition des jeunes différentes publications publiques (revues, journaux, catalogues publicitaires) dans lesquelles ils pouvaient sélectionner les images de leur choix. Pour éviter de restreindre leur choix au niveau des publications offertes et présélectionnées, nous avons aussi encouragé les participants à dessiner ou à utiliser des mots pour représenter leurs idées. Cette activité permettait de présenter brièvement chaque jeune participant au groupe, car chacun devait montrer son affiche aux autres participants et l’expliquer. Les jeunes pouvaient aussi faire l’expérience d’un premier partage de leur représentation de soi au sein du groupe. Cette activité de collage a également facilité et initié les participants à une première réflexion de leur identité dans le cadre de l’atelier (Daiute, 2010). Plus tard, cette production a été utilisée, lors d’une entrevue individuelle avec chaque participant, pour susciter à nouveau une articulation sur leurs parcours, leur identité.

Étapes 2 à 4 - les activités d’écriture

Les jeunes étaient guidés dans un processus d’écriture par l’entremise de plusieurs exercices d’écriture variés. Ces exercices ont, à différents niveaux, pour but de stimuler la réflexion et la formulation de leur récit et de leur construction identitaire autour de leurs parcours scolaire et migratoire. Aux premières séances de l’atelier, trois exercices ont été présentés : l’écriture d’une carte postale, les écrits-minute et la trame sonore de ma vie. Ce dernier exercice exigeait un accompagnement plus soutenu, il a donc été effectué individuellement. Tous ces exercices d’écriture visaient éventuellement à développer l’histoire à transposer en partie, ou en intégralité, dans le récit numérique, ou simplement à alimenter le processus de réflexion à l’égard de leurs parcours migratoire et scolaire.

D’abord, les écrits-minute, exercice rapide de 5 à 10 minutes, étaient suggérés individuellement aux jeunes comme moyen de se replonger dans leurs souvenirs en y associant des éléments sensoriels. Formellement, il été demandé de penser à un endroit qui avait de l’importance pour les jeunes et de dresser une liste des éléments multisensoriels pouvant décrire cet endroit. Les jeunes pouvaient évoquer des aspects visuels, sonores, tactiles ou olfactifs associés à cet endroit.

En second lieu, à travers l’exercice écrit « trame sonore de ma vie », les jeunes étaient invités à répertorier entre huit et dix événements marquants (perçus comme positifs et/ou négatifs) personnels pré et/ou postmigratoires. Cet exercice était également réalisé individuellement. Les jeunes devaient ensuite sélectionner trois événements selon eux plus importants ou marquants à ce moment-là, et les décrire sur papier. Les jeunes pouvaient faire une description avec des phrases complètes ou simplement relater des mot-clés permettant de comprendre l’essence de chaque événement. Puis, il était demandé de réfléchir à une pièce musicale (avec ou sans paroles) qu’ils pouvaient associer à chacun des trois événements décrits. Les jeunes avaient à leur disposition leur lecteur de musique personnel ou pouvaient naviguer sur Internet. Cet exercice a varié dans la durée selon les participants. Certains jeunes l’ont réalisé en 45 minutes environ, tandis que d’autres ont investi près d’une heure et demie dans sa réalisation.

En dernier lieu, l’exercice de « la carte postale » permettait aux jeunes de rédiger une carte postale à un ami ou à un membre de leur famille. Le temps de rédaction était d’une quinzaine de minutes environ. Chaque jeune devait choisir une personne pour adresser sa carte postale et la rédiger en parlant soit du pays d’origine, soit du Québec, soit d’un lieu idéal à leurs yeux. De plus, des photos étaient disposées sur la table et chacun devait en choisir une pour la couverture ou dessiner sa carte postale. Cet exercice, d’une vingtaine de minutes, a été effectué par seulement trois des participants, les deux autres étant absents à cette séance.

Dernières étapes - le récit numérique (RN) et le scénarimage.

Au choix des jeunes et dès le début de l’atelier, il était convenu que le récit numérique allait se faire individuellement. Au cours des séances, nous avons, à quelques reprises, instauré des temps d’échanges sur la manière dont le projet prendra forme, parfois organisés par la chercheuse et d’autres fois, selon l’initiative des participants.

La première consigne a été : « Faites un récit qui vous représente bien - ce que vous êtes et ce

que vous avez vécu, en prenant compte de vos parcours. » Puis, quelques explications

planifiées pour discuter et définir la thématique précise du récit numérique, selon des balises fixées par les jeunes. Finalement, nous avons formulé la consigne par la question suivante : « Comment me représenter comme jeune élève réfugié ? », le tout utilisant divers procédés sur support numérique vidéo en quelques minutes. Au total, chaque jeune a bénéficié de 5 à 7 rencontres, individuelles ou en groupe, pour travailler sur son récit numérique. Ces séances étaient directement consacrées au développement du récit numérique, ce qui comprenait la composition du récit (sous forme écrite, graphique ou orale), le scénarimage, le choix des images (photo et/ou vidéo), le choix de la trame sonore et le montage. Le récit numérique pouvait prendre diverses formes. Par exemple, les jeunes pouvaient décider d’inclure une séquence vidéo où ils s’interviewaient, en dyade, en exprimant leurs opinions sur la place des jeunes immigrants et réfugiés à l’école ou n’utiliser que des images sélectionnées en ajoutant une narration orale comme trame dans la vidéo.

Globalement, les jeunes pouvaient exprimer leurs préoccupations générales et spécifiques face à leurs expériences scolaires et migratoires, leur représentation de soi, ce qu’ils aiment et ce qu’ils critiquent. Il s’agissait notamment de synthétiser leurs idées dans un scénarimage et d’exprimer, par une variété de modes sémiotiques, ce qui les représentait en articulant autour de leurs parcours migratoire et scolaire sous forme vidéo. Le scénarimage, aussi connu sous le terme de scénarimage, est un procédé inspiré du secteur cinématographique, qui permet de visualiser en séquence les scènes dans l’ordre souhaité. Emprunté surtout au monde cinématographique et de la télévision, ce procédé se présente généralement sous forme de dessins ou d’esquisses en série pour nous donner une vue d’ensemble du récit numérique, dans le cas qui nous concerne. Bien que la démarche du RN mette de l’avant l’utilisation d’un scénarimage traditionnel (voir annexe B), quelques jeunes préféraient une forme différente pour modeler leur histoire. Des jeunes voulaient façonner leur histoire sous forme traditionnelle écrite ou créer leur histoire tout en se familiarisant au logiciel d’iMovie. Des modèles de création de RN sont disponibles pour nous guider dans le processus. Le Center for

Digital Storytelling propose par ailleurs sept étapes consécutives, dont le « story circle » qui

implique l’écriture d’une histoire et la rétroaction des participants à l’égard de cette histoire, mais aussi la période de travail individuel pour écrire l’histoire/le scénario, l’enregistrement audio de l’histoire, la compilation des différents éléments et la mise en commun des éléments

à intégrer dans le récit numérique avec le scénarimage, le tutoriel, comme formation sur le montage vidéo, et la projection des récits numériques (Lambert, 2002). Certaines de ces étapes ont inspiré l’organisation de l’atelier, mais plusieurs ont été adaptées ou carrément abandonnées suivant notre contexte de recherche, comme le « story circle ». De plus, nous n’avons pas effectué les étapes dans cet ordre précis. Dans notre contexte, plusieurs rajustements étaient nécessaires pour répondre à la fois aux objectifs de recherche et aux réalités des jeunes participants, qui sont au cœur du projet de recherche.

Tout de même, pour mieux accompagner les participants dans le processus créatif, quelques activités-guides étaient proposées à certains d’entre eux pour éviter un désalignement des étapes derrière le RN. Ces activités-guides, sous forme de discussion orale ou d’exercice écrit, visaient principalement à guider et à déclencher le processus de création du RN (voir un exemple en annexe C). Elles étaient édifiées autour des questions suivantes :

 Qu’est-ce qui me représente ? Qui suis-je ? Mes valeurs ? Mes qualités/défauts ?  Qu’est-ce que je veux dire sur moi, sur mon entourage, sur mon parcours ?

o Ma famille ? Traditions familiales ici et/ou là-bas ? Des événements importants dans ma famille.

o Mes amis ? Ici, là-bas, les nouveaux, les perdus et plus.

 Qu’est-ce que je veux laisser savoir ?

 Quel message ai-je envie de transmettre ? Et à qui ?  Quelles émotions ai-je envie de transmettre/d’exprimer ?

 Est-ce que mon parcours semble différent des autres élèves dans ma classe ? En quoi ?  Comment a été mon trajet vers le Canada ? Mes attentes face à l’avenir ? Mes rêves ? Aussi, nous avons fait une initiation au logiciel de montage vidéo iMovie. Ce temps de formation a varié d’un jeune à l’autre et dépendait notamment de la familiarité des participants avec la technologie et avec ce type de logiciel de montage vidéo.