• Aucun résultat trouvé

Axel Honneth et la théorie de la reconnaissance

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 170-175)

CHAPITRE V : FONDEMENTS THÉORIQUES

5.2. Approche socio-psychologique

5.2.2. Axel Honneth et la théorie de la reconnaissance

Pour Axel Honneth, l’un des principaux enjeux de l’insertion socioprofessionnelle, c’est la reconnaissance des savoirs et compétences professionnelles. Le concept de reconnaissance est construit autour de véritables théories. Honneth soutient que la question de la reconnaissance pose un problème beaucoup plus général que celui

170

des revendications politiques relatives à la différence car l'ensemble de nos rapports à autrui sont traversées par des attentes de reconnaissance.

Le terme de reconnaissance renvoie à l'image positive ou négative qu'autrui peut projeter sur des individus en reconnaissant ou pas la valeur de leurs actes, leurs capacités et leurs compétences. Le terme de reconnaissance renvoie aussi au fait que le savoir que j'ai de ma propre valeur dépend d'autrui.

Si l’'image positive que nous pouvons avoir de nous-mêmes dépend du regard, des jugements et des comportements d'autrui à notre égard, nous resterons toujours en attente de reconnaissance dans les interactions sociales. Ainsi, reconnaître les acquis professionnels d’une personne peut participer à une meilleure insertion sociale et à l’identité professionnelle.

Honneth, dans « la société du mépris », fait une analyse philosophique de la reconnaissance sociale. Au-delà de la théorie de la justice sociale, qui met en avant le juste, l’équité et le bien, il développe une théorie critique d’une « bonne vie » car, d’après lui, notre société mondialisée devrait offrir à ses citoyens une vie correcte or cette mondialisation, liée aux divers enjeux, tend à compromettre le respect de soi et l’estime de soi.

Dans un croisement du concept de la reconnaissance développé par Hegel et de la psychologie sociale démontré par Mead, Honneth fait de la reconnaissance le cœur des relations sociales et des identités, il nous explique que, pour une réalisation de soi, trois sphères de reconnaissance interviennent. Les trois sphères de reconnaissance correspondent aux trois relations à soi. La première est la sphère de l'amour qui touche aux liens affectifs, ou de l’amitié, l’idée étant que seuls les liens affectifs qui unissent une personne à un groupe restreint lui confèrent cette confiance en soi sans laquelle elle ne pourra participer avec assurance à la vie démocratique.

Axel Honneth soutient aussi que seule la solidité et la réciprocité de ces liens confèrent à l'individu une confiance sans laquelle il ne pourra participer avec assurance à la vie publique.

La deuxième sphère est juridico-politique : c'est parce qu'un individu est reconnu comme un sujet universel, porteur de droits et de devoirs, qu'il peut comprendre ses actes comme une manifestation de sa propre autonomie dès lors qu’il est respecté par autrui. La reconnaissance juridique est indispensable à l'acquisition du respect de soi, mais pour y parvenir cela nécessite aussi une considération sociale, c’est la

171

troisième sphère : l’estime sociale qui permet à l’individu de se rapporter positivement à ses qualités particulières ou ses capacités concrètes ; cette troisième sphère est indispensable, à l’acquisition de l’estime de soi ; au sentiment de sa propre valeur.

Graphique D : Les trois sphères de Honneth

Honneth soutient que ces trois sphères sont indispensables à tout individu, et que si l'une de ces trois formes de reconnaissance fait défaut, cela menace de ruiner l'identité de l'individu en portant atteinte non seulement à l’intégrité physique mais aussi à l’intégrité juridique et morale.

C’est dans la reconnaissance publique et juridique que l'individu peut aussi se penser en sujet à part entière, nous explique A. Honneth. Il prend ainsi conscience de sa singularité, de ce qui lui est particulièrement acquis par son travail (ses acquis, ses compétences et ses expériences). Il se sent responsable de sa propre vie, il prend ainsi conscience de son unicité et son identité par une auto reconnaissance qui exige l’intersubjectivité car l’individu se construit qu’à partir d'un « autrui » qui constate, encourage et approuve ses capacités et ses qualités positives.

L’analyse du chercheur s’impose pour mettre en cause la dignité et l’identité des individus, les injustices qui font qu’une personne ne peut pas s’auto-réaliser. En

172

rompant avec les théories habituelles sur la justice sociale inspirée de Kant, la conception d’Honneth associe les pathologies sociales à l’injustice, qui d’après lui, des manifestations du mépris éclipsant la reconnaissance, la confiance en soi, l’estime de soi, le rapport harmonieux à soi et aux autres, nécessaires à l’épanouissement de chacun. « Ce qui doit prévaloir et former le cœur même de la normalité d’une société indépendamment de toute culture, ce sont les conditions qui garantissent aux membres de cette société une forme inaltérée de réalisation de soi » (Honneth, 2006, p. 88).

Pour Honneth, le mépris ne se réduit pas à une simple conséquence du capitalisme, même si celui-ci réduit les individus à une rationalité instrumentale, ignorant la réalité de la société, Il met à jour toutes les formes de mépris et de méconnaissance. La reconnaissance et la réalisation de soi supposent et impliquent alors une conception de la nature sociale fondée sur considération de l’individu, en identifiant les mécanismes du capitalisme contemporain qui empêchent les êtres humains d'accéder à la réalisation de soi.

En somme, Honneth se réclame d'une philosophie sociale, d’où l'importance chez lui de la reconnaissance, du respect de l'individu. Il éclaire la façon dont le capitalisme néolibéral y porte atteinte. Honneth pense que l'environnement socioculturel et politique devrait permettre aux individus de développer une identité autonome et une relation positive à soi-même sans passer par le mépris ou le déni de reconnaissance.

Or l’évolution du capitalisme ne permet pas les conditions du respect et de l'estime de soi : les individus risquent d'être meurtris à travers par exemple la destruction des relations à autrui ou encore des exigences liées à la mondialisation. On a la préoccupation non seulement des inégalités ou des injustices sociales, mais surtout, Honneth met au jour les critères éthiques pour une vie plus humaine. Il s’appuie sur Hegel et sur les acquis de la psychologie sociale de Mead pour proposer une compréhension des confrontations sociales sur le modèle d'une « lutte pour la reconnaissance ». Il estime qu’une démocratie digne de ce nom devrait être capable de donner aux groupes minoritaires l’occasion de prouver que leurs valeurs sont elles aussi susceptibles de contribuer aux fins éthiques que s’assigne la collectivité.

À travers cette théorie, le Cameroun, dans son contexte socioéconomique, ne devrait-il pas donner la possibilité aux minorités, aux personnes en échec scolaire de

173

prouver leurs valeurs qu’elles possèdent car c’est à travers la reconnaissance de ses valeurs que chaque sujet peut acquérir une identité professionnelle et s’insérer dans la société. À en croire Honneth, l’individu peut en effet échapper au « mépris » et accéder à une reconnaissance grâce entre autres au respect dans les droits de la politique mise en place pour lui.

Les dispositifs mis en place pour les personnes peu scolarisées représentent des modèles institutionnalisés de reconnaissance présentant cet aspect juridique dont parle Honneth et qui permet à l’individu de prendre part à la vie sociale. Ils s’inscrivent dans un objectif de justice et de reconnaissance sociale et individuelle mais aussi un enjeu politico économique qui permet aux individus de s’intégrer dans la vie socioprofessionnelle plus aisément.

Des développements plus spécifiques sur des groupes construisant la dimension socio-psychologique ont aussi théorisé l’insertion. L’un des premiers facteurs susceptibles d’influencer l’insertion socioprofessionnelle des jeunes, selon Guichard (1993) est le milieu familial, qui est le premier agent de socialisation. Un second facteur tient au réseau d’amis qui influence également les aspirations éducationnelles et professionnelles. De plus, les membres de ce réseau sont souvent les premiers consultés au moment de la prise de décisions importantes. Ainsi, la situation sociale des amis fréquentés peut avoir un effet sur le jeune en processus d’insertion (Sullivan, 1989). Le milieu scolaire, troisième facteur de la dimension socio-psychologique, exerce son influence sur le développement d’attitudes et d’aspirations, positives ou négatives, envers les études et le travail. De plus, la qualité des interactions du jeune avec le personnel enseignant peut avoir un effet du point de vue de l’adoption des valeurs et des attitudes que les enseignants ou la direction véhiculent au sujet du travail. Les expériences vécues dans le milieu de travail peuvent développer chez le jeune des sentiments positifs d’efficacité personnelle (Bandura, 1986) ou, au contraire, une dévalorisation personnelle. Les médias agissent également sur l’insertion socioprofessionnelle des jeunes. En effet les images de travailleurs présentées par les médias servent souvent de modèles auxquels les jeunes s’identifient.

174 5.3. La dimension psycho-professionnelle

La dimension psycho-professionnelle, d’après Allard & Ouellette (ibid.) s’analyse sur quatre topiques principales : l’image de soi, l’identité professionnelle, l’acquisition de la compétence et les démarches effectives d’insertion.

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 170-175)