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L'aptitude des Arabes

Dans le document MOHAMMAD. Un Prophète pour l humanité (Page 145-149)

Nous en arrivons maintenant aux facteurs qui produisent la réaction évoquée par le prêche islamique. Aussi inlassables que soient les efforts du prédicateur, et aussi précise que puisse être sa présentation du vrai message de l'islam, c'est plus la disposition de son audience qui détermine si son appel sera entendu ou non. Le caractère des arabes était un facteur précieux qui a contribué à leur faire accepter l'islam.

C'étaient des êtres simples, élevés dans un cadre naturel simple. Malgré leur ignorance et leur opiniâtreté superficielles, ils conservaient toutes les qualités de leur environnement. D'une superficie de trente millions de Km² de désert, ce pays chaud, stérile et dur dans lequel ils vivaient, était le terrain idéal pour produire les valeurs humaines les plus élevées. L'arabe moyen n'avait qu'une seule source de revenus : son dromadaire. Mais s'il venait à avoir des invités, il sacrifiait cette bête inestimable pour la leur donner à manger. Si la victime d'une oppression venait à se réfugier sous la tente d'un Arabe, elle savait qu'elle avait en lui un ami qui donnerait sa propre vie pour défendre l'opprimé.

Même les brigands faisaient leurs rapines d'une manière chevaleresque. S'ils voulaient s'emparer des vêtements et des bijoux de la gente féminine d'une tribu quelconque, ils ne s'autorisaient pas à le faire de leurs propres mains; au lieu de

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cela, ils commandaient aux femmes de leur remettre leur effets précieux pendant qu'eux-mêmes regarderaient dans la direction opposée, afin d'éviter de les apercevoir pendant qu'elles enlevaient leur vêtements.

Il serait incorrect de ne considérer les Arabes du désert que comme des niais qui ne savaient rien. Ils étaient des gens hautement intelligents, vifs, prompts à pénétrer les profondeurs d'une affaire.

Sept musulmans convertis d'une certaine tribu vinrent voir le Prophète. Ils lui dirent qu'ils avaient appris cinq choses au temps de l'ignorance (jahilliya), et qu'ils continueraient à adhérer à ces principes, à moins que le Prophète ne leur donne des instructions contraires. Le Prophète leur demanda alors quelles étaient ces caractéristiques qu'ils avaient hérité du temps de l'ignorance. Ils répondirent : "La gratitude en période de prospérité, et la patience face à l'adversité. La fermeté sur le champ de bataille et la résignation face au destin.

Nous avons appris à ne pas nous réjouir des malheurs d'autrui, même si c'était notre propre ennemi qui en était affligé". En entendant cela, le Prophète s’exclama : "Ces gens sont des intellectuelles, des hommes de lettres ! Ils sont coulés dans le moule des Prophètes. Combien sont merveilleux leurs mots !"77

Damad, un exorciste appartenant à la tribu des Banû Azdashanwa, vint un jour à la Mecque. Là, les gens lui parlèrent du Prophète. "Il est possédé par un mauvais esprit, disaient-ils". Damad se rendit voir le Prophète pensant qu'il pourrait l'aider à guérir. Mais lorsqu'il entendit les propos du Prophète, son attitude changea. "j'ai entendu des devins et des illusionnistes, dit-il. J'ai vu les œuvres des poètes, mais je n'ai jamais eu à faire à quelques choses de cette sorte. Donne-moi ta main, dit-il au Prophète. Laisse-moi te prêter serment (de

77 Hadith cité dans kanz al-Ummâl, vol.I, p 69

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fidélité)" Comme à son habitude, le Prophète ne fit pas un long discours à cette occasion. Il dit tout simplement :

Louange à Dieu. Nous le louons et nous cherchons refuge auprès de Lui. Celui que Dieu guide, personne ne saurait l'égarer, et celui que Dieu égare, personne ne peut le guider ! j'atteste que nul n'est digne d'être adoré excepté Dieu. Il n'a pas d'égal.78

Dans ces quelques mots, Damad trouva une multitude de signification.

"répète cela encore, demanda-t-il au Prophète. Tes mots sont aussi profonds que l'océan"79

Pour un arabe, il n'était pas question qu'il y ait contradiction entre les mots et les actions. Il était lui-même fidèle à sa parole et espérait que les autres fassent de même. Dès qu'il saisissait la vérité d'une affaire, il l'acceptait. Selon le biographe du Prophète, ibn Ishaq, la tribu des banu Sa’d envoya Damam Ibn Tha'laba en qualité d'émissaire auprès du Prophète. Il arriva à Médine, fit asseoir son dromadaire près de la porte de la mosquée et l'attache. Puis il entra. Le Prophète était assis à l'intérieur avec ses Compagnons. Damam était un homme brave et intelligent. Il se tint debout devant l'assemblée et demanda : "Qui parmi vous est le fils de Abd al-Muttalib? "C'est moi, répondit le Prophète".

"Muhammad, je vais te poser quelques questions et je vais être très dur dans mon interrogation. J'espère que tu ne m'en voudras pas". –" Pas du tout. Tu peux demander tout ce que tu veux". – "Pourras- tu me jurer au nom de ton Dieu, du Dieu de ceux qui t'ont précédée, du Dieu de ceux qui viendront après toi, que Dieu t’a envoyé en qualité de Prophète ?" – "Par Dieu, je le jure". – "Pourras- tu me jurer, au nom de ton Dieu, au nom de Dieu de ceux qui t'ont précédé, et du Dieu de ceux qui viendront après toi, que Dieu t'a ordonné de nous exhorter à

78 Hadith transmis par muslim

79 Al-bidaya wa an-nihaya, vol.3.p.36

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n'adorer que Lui Seul et à ne lui attribuer aucun associé ; qu'il t'a commandé de nous dire d'abandonner l'adoration des idoles et toutes les choses que nos ancêtres avaient l'habitude d’adorer ?"- "Par Dieu, je le jure, répliqua le Prophète". – "je te demande de me jurer, au nom de Ton Dieu, et du Dieu de ceux qui t'ont précédé et du Dieu de ceux qui viendront après toi que Dieu nous a commandé de prier cinq fois par jour". Damam posa ensuite des questions sur la zakat (l'aumône légale), le jeûne, le hajj (le pèlerinage) et tous les autres commandements de l'islam, en formulant chaque question de la même manière.

Quand il eut fini son interrogation et que le Prophète lui répondit à chaque question avec la même simplicité, Damam tint ces propos :

J'atteste que nul n'est digne d'adoration excepté Dieu et que Muhammad est le Prophète de Dieu, je m'acquitterai de ces obligations et je m'abstiendrai des choses que tu as prohibées. Je n'en ferai ni plus ni moins.80

Puis il remonta sur son dromadaire et s'en alla. De retour dans sa tribu, il leur raconta ce qui s'était passé. Avant que la nuit ne tombe, tous les hommes et les femmes de sa tribu avaient accepté l'islam.

Il n'y avait pas la moindre trace d'hypocrisie chez ces gens. Ils ne connaissaient que l'acceptation ou le refus, rien d'intermédiaire. Quand ils faisaient une promesse, ils la tenaient, quoi qu'il arrive. Aucune menace contre leurs vies ou leurs biens ne pouvait les empêcher de transformer leurs mots en actions. Telle était la nature du tempérament arabe. Les historiens ont décrit les discours des Aws et des Khazraj- les deux tribus de Médine- à l'occasion du second serment d'allégeance. Ils comportent tout l'éclat qui distinguaient leur tribu. "Abbes Ibn Ubayda" dit ceci : "Gens de Khazraj, savez-vous à quoi vous vous engagez en prêtant allégeance à cet homme ? Vous vous engagez à entrer

80 Ibid, vol.5

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en guerre contre les hommes de toutes les races. Réfléchissez-y bien. Si, lorsque vous subirez la perte de vies et de biens, vous le renvoyer chez les siens, alors autant le faire tout de suite. Si vous le faites plus tard, alors cela signifiera l'humiliation pour vous dans ce monde et dans l'autre. Mais si vous pensez que vous tiendrez vos promesses, et cela quel que soit le nombre de morts parmi vos chefs, alors emmenez-le avec vous à Médine. Ceci vaudra mieux pour vous dans ce monde et dans l'autre."

Tous répondirent à l'unisson qu'ils emmèneraient avec eux le Prophète à Médine quelles que soient les pertes en vies et en biens qu'ils aient à subir.

Qu’aurons-nous en retour si nous tenons notre parole ?" demandèrent-ils au Prophète. "Le Paradis, répondit-il"- "Tends-nous la main, crièrent-ils tous" Il tendit la main et prit leur allégeance81

Ce n'était pas de simples mots de la part des Ansar ; c'étaient des mots supportés par des actes. Même lorsque les musulmans dominaient, ils ne demandèrent aucune compensation politique pour les sacrifices qu’ils avaient faits. Ils étaient prêts à laisser le Califat aux mains des Mecquois. Ils ne recherchaient pas la récompense dans ce monde, mais ils étaient impatients de recevoir leur récompense dans l'autre monde de la main de Dieu.

Dans le document MOHAMMAD. Un Prophète pour l humanité (Page 145-149)