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CHAPITRE 2 : FONDEMENTS THEORIQUES ET CADRE D’ANALYSE DE LA FOURNITURE DE SERVICES ENVIRONNEMENTAUX

2.1.1 Les actifs physiques : spécificité de site et spécificité temporelle

L’épuration des eaux usées et le traitement des boues d’épuration nécessitent des investissements dans un ensemble d’actifs physiques, pour certains localisés et ancrés sur le sol (réseaux, STEP), pour d’autres mobiles et plus aisément redéployables comme le matériel de transport et d’épandage des boues ou les terres agricoles.

2.1.1.1 Réseaux de collecte, équipements d’épuration des eaux usées et de stockage des boues

La collecte des eaux usées domestiques nécessite des investissements dans des réseaux collectifs souterrains qui relient chaque habitation d’une ou plusieurs communes. Les réseaux sont des actifs durables, immobiles qui présentent des durées d’utilisation longues comprises entre 20 ans et 50 ans.

Ces réseaux sont raccordés à des STEP qui assurent l’épuration des eaux usées par traitement biologique avant que l’eau soit rejetée en rivière. Une STEP est constituée d’un ensemble de bassins qui réceptionnent les eaux usées : chaque bassin est dédié à un type de traitement de l’eau : primaire, secondaire, tertiaire, décantation. L’eau usée termine son parcours dans le décanteur dont la fonction est de séparer les boues de l’eau dépolluée par un processus mécanique de décantation.

Une STEP comprend également des équipements de stockage des boues produites. Le choix d’un équipement de stockage porte sur trois aspects. (1) Le type d’équipement de stockage : plusieurs types d’équipement sont possibles en fonction de la siccité (degré d’humidité) de la boue produite et des objectifs de réduction des nuisances olfactives et visuelles : du silo en béton couvert à la simple plate-forme de stockage. La réglementation porte sur l’étanchéité

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des installations pour éviter des pollutions accidentelles des eaux mais n’impose rien en ce qui concerne les nuisances olfactives et visuelles ; (2) Le dimensionnement des équipements : une période de stockage plus ou moins longue est généralement nécessaire entre le moment où la boue est extraite du décanteur et le moment où elle subit son traitement ultime. L’épandage des boues est une activité saisonnière, réalisée généralement en fin d’été après la récolte des céréales. De ce point de vue, elle est beaucoup plus exigeante que les autres. Les périodes durant lesquelles les épandages sont possibles sont réduites – avant les semis ou après les récoltes – alors que l’accès à un incinérateur ou un centre d’enfouissement n’implique pas de contraintes temporelles particulières. Les collectivités et leurs exploitants doivent mettre en place « une capacité de stockage suffisante entre 6 et 10 mois selon les conditions locales »62 lorsque les boues produites sont destinées à être épandues (3) La localisation des installations : les communes sont libres de construire où elles le souhaitent leurs équipements de stockage. Le plus souvent, elles le font sur des terrains qu’elles possèdent généralement à proximité de la STEP. Mais, les communes peuvent aussi opter pour la construction de plates-formes de stockage sur des terrains privés appartenant aux agriculteurs dans l’objectif de faciliter et réduire les temps de transport au cours des chantiers d’épandage.

Une STEP comprend donc plusieurs équipements pas ou peu redéployables, localisés à proximité les uns des autres, fonctionnant en continu et dont la durée d’utilisation est longue, généralement supérieure à 20 ans.

2.1.1.2 Equipements de traitement et d’épandage des boues sur des terres agricoles

A leur sortie du décanteur, les boues peuvent subir différents types de traitement : hygiénisation, déshydradation. L’analyse de la composition des boues est réalisée par un matériel de laboratoire spécifique. Ces équipements ne sont généralement pas acquis par les producteurs de boues dans la mesure où les économies d’échelle réalisables sur le marché compensent les coûts de transaction. Les traitements d’hygiénisation des boues sont des investissements réalisés à la demande des agriculteurs pour des considérations de valorisation agronomique de la boue. En théorie, de tels investissements sont marqués par une spécificité dédiée qui nécessite que les contrats comportent des garanties contractuelles. La déshydratation des boues nécessite des équipements de centrifugation ou de séchage acquis dans l’objectif de diminuer les coûts de production du service : baisse des dépenses de transport et de stockage des boues produites. Il s’agit d’investissements physiques plus aisément redéployables car mobiles et pouvant être revendus.

Le matériel de transport et d’épandage des boues n’est pas non plus spécifique. En effet, ce matériel peut servir pour l’épandage de différentes catégories d’effluents notamment d’élevage : fumiers et lisiers. Il s’agit de tracteurs munis d’épandeur à lisier ou fumier soit de

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Circulaire du DE/SDPGE/BLP n°9 du 18 avril 2005.

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camions-citernes munis de pompe extractrice de liquide. Rien n’empêche une entreprise privée d’acquérir ce type de matériel et de proposer ses services à plusieurs communes pour amortir ainsi plus rapidement le coût d’acquisition. Des économies d’échelle sont alors potentiellement réalisables par les communes en recourant à la prestation d’entreprises privées.

Enfin, les terres agricoles sur lesquelles les boues sont épandues possèdent différentes utilisations possibles et sont des actifs redéployables (Allen et Lueck, 2000). Pour un agriculteur, il existe plusieurs usages agricoles alternatifs d’une même terre (Masten, 1996).

Pour les producteurs de boues, les plages temporelles d’utilisation possible des terres agricoles (qui conservent leur usage agricole initial) sont limitées au cours d’une année comme le montre le graphique n°10 ci-dessous. Les périodes d’épandage dépendent à la fois de considérations agricoles et de préservation de l’environnement63 et se traduisent par le fait que l’épandage ne peut avoir lieu qu’à des stades végétatifs bien précis du couvert végétal implanté (inter-culture, avant les semis) et à des périodes où le risque de lessivage des éléments minéraux contenus dans les boues est minimale. Dans un objectif de protection de l’environnement, la réglementation64 a cherché à réduire les épandages durant les périodes hivernales et les limiter lorsque les terres présentent un couvert végétal. L’hétérogénéité des systèmes de production agricole facilite alors la coordination dans le temps des transactions dans la mesure où un nombre plus important d’espèces végétales est susceptible d’être cultivé sur les parcelles appartenant au périmètre d’épandage.

Graphique n°10 : Limitations des périodes d’épandage en fonction des systèmes de culture

Mois / systèmes de culture Janv. Fév. Mars Avril Mai Juin Juillet Août Sept. Oct. Nov. Déc. Céréales d’hiver ou colza

Cultures de printemps Herbage

Epandage sans restriction

Epandage possible en fonction des possibilités d’accès aux parcelles, pâtures, fauches Épandage impossible : culture en place, prairies non accessibles, risques de lessivage Source : Plans d’épandage du Puy de dôme, enquêtes Cemagref 2004

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D’après le décret du 8 décembre 1997, « les périodes d’épandage doivent être établies en cohérence avec

l’arrêté du 4 mars 1996 relatif aux programmes d’action à mettre en oeuvre dans les zones vulnérables afin de réduire la pollution des eaux par les nitrates d’origine agricole ».

64 Arrêté du 8 janvier 1998. CemOA : archive ouverte d'Irstea / Cemagref