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L'empathie à tout prix? : étude des liens entre empathie et régulation des émotions dans le contexte de la relation d'aide par téléphone

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Thesis

Reference

L'empathie à tout prix? : étude des liens entre empathie et régulation des émotions dans le contexte de la relation d'aide par téléphone

SCHENKEL, Katia

Abstract

La littérature a largement démontré l'impact positif de l'empathie sur le patient. Ce travail a cherché à se centrer sur l'aidant en étudiant la relation d'aide par téléphone. Les liens entre l'empathie affective, cognitive et la régulation des émotions dans le contexte de la relation d'aide ont été testés à travers deux études. Une première par questionnaire auprès de bénévoles de centre d'écoute d'urgence complétée par l'observation et le codage verbal et non verbal d'interactions en jeux de rôle. Les émotions ressenties, les expressions faciales et gestuelles ainsi que le discours ont été pris en compte. Des différences entre l'empathie affective et cognitive ont été mises en évidence et l'hypothèse du lien entre une empathie cognitive et des stratégies de régulation plus adaptées a été confirmée. De premiers résultats montrent que les gestes extracommunicatifs peuvent être considérés comme des indicateurs de régulation émotionnelle. Ce travail montre l'importance pour l'aidant de développer des compétences de régulation afin de se protéger de l'épuisement professionnel.

SCHENKEL, Katia. L'empathie à tout prix? : étude des liens entre empathie et

régulation des émotions dans le contexte de la relation d'aide par téléphone. Thèse de doctorat : Univ. Genève, 2013, no. FPSE 549

URN : urn:nbn:ch:unige-815384

DOI : 10.13097/archive-ouverte/unige:81538

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:81538

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Section de Psychologie Sous la direction de Prof. Susanne Kaiser

TITRE DE LA THESE

L’empathie à tout prix ?

Etude des liens entre empathie et régulation des émotions dans le contexte de la relation d’aide par téléphone

THESE

Présentée à la

Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation de l’Université de Genève

pour obtenir le grade de Docteur en psychologie

par Katia SCHENKEL

de Sion (VS) Thèse No 549

GENEVE Septembre 2013

N° étudiant : 99-328-510

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Remerciements

Je n’aurai pas pu achever ce périple sans être bien entourée. Ainsi je tiens à commencer ce manuscrit par quelques remerciements. Tout d’abord à ma directrice de thèse, Susanne Kaiser qui m’a laissé le champ libre quant à mon sujet de thèse et qui m’a soutenu tout au long du parcours. A Tanja Wranik qui m’a permis d’intégrer ce projet et avec qui nous avons effectué la première étude et à ma commission de thèse composée de Michae l Reicherts et de Nicolas Favez, qui ont accepté de se joindre à ce projet en cours de route et qui m’ont donné de précieux conseils. Un grand merci également à Moïra Mikolajcak pour ses encouragements et pour nos discussions enrichissantes.

Je tiens à remercier tous les bénévoles sans qui cette thèse n’aurait pas pu exister. Un grand merci à vous pour votre engagement dans ce travail. En espérant qu’il puisse vous servir pour la suite. Merci également aux différentes personnes qui m’ont aidée dans le codage ou les retranscriptions. Merci à Charlène, Claudia, Olivia, Cécilia, Emmanuelle, Nathalie, Seraina et Carolina. Leur application m’a permis d’avancer dans ce travail passionnant mais parfois laborieux qu’est le codage.

Merci également à mes amies et collègues qui ont accompagné quelques moments de stress, Kerstin, Véronique, Christelle, Martine, Fanny, Catherine qui ont été présentes et avec qui nous avons pu échanger quelques idées.

Et finalement un grand merci à ma famille pour son soutien sans faille ainsi qu’à David.

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Résumé

Dans ce travail, nous nous sommes intéressés à la relation d’aide et plus spécifiquement à la relation d’aide par téléphone. Nous sommes partis de l’idée qu’un certain nombre de compétences sont nécessaires pour travailler dans la relation d’aide et que l’empathie et la régulation des émotions en faisaient partie. Afin d’investiguer ce contexte particulier, nous avons mené deux études. Une première étude a été faite par questionnaires auprès de bénévoles de centre d’écoute d’urgence. Les émotions ressenties au téléphone ainsi que l’attitude des bénévoles dans différents scénarios ont été questionnées. Une deuxième étude observationnelle par jeu de rôle est venue compléter cette première. Nous avons quatre hypothèses. La première postule un lien entre l’empathie et la régulation des émotions en faisant une distinction entre empathie affective et empathie cognitive ainsi qu’entre des stratégies adaptées et moins adaptées de régulation des émotions. La deuxième hypothèse va un peu plus loin en postulant une différence entre les personnes d’empathie affective plus marquée et celle d’empathie cognitive plus marquée. La troisième hypothèse postule des différences entre les scénarios (sa colère, la colère de l’autre, son anxiété, l’anxiété de l’autre et la satisfaction pour l’étude 2). Une quatrième hypothèse plus exploratoire postule que les gestes extracommunicatifs pourraient être des indicateurs de régulation des émotions et explore les facteurs liés à la réussite d’un téléphone. Nos résultats vont dans le sens de nos hypothèses et montrent des liens ainsi que des différences. Le groupe d’empathie affective montrant plus de difficultés de régulation des émotions ainsi que des problèmes d’anxiété notamment et moins d’accomplissement dans le travail qui peut amener à un épuisement professionnel. Nous avons également trouvé des éléments confirmant notre dernière hypothèse.

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Table des matières

1. Introduction ... 1

2. Partie théorique... 3

2.1 La relation d’aide... 3

2.1.1 Définition... 3

2.1.2 L’entretien non-directif et l’écoute active ... 6

2.1.5 La relation d’aide par téléphone ... 11

2.2 L’empathie... 12

2.2.1 Définitions ... 12

2.2.2 Distinction entre empathie et d’autres concepts ... 15

2.2.3 Développement de l’empathie ... 16

2.2.4 L’empathie, un phénomène humain et automatique ? ... 17

2.2.5 Les mesures ... 18

2.2.6 Résultats de la recherche ... 19

2.2.7 L’empathie de première intention ... 21

2.2.8 L’empathie : un phénomène à plusieurs composantes ... 22

2.3 Les émotions... 24

2.3.1 Distinction avec d’autres concepts ... 24

2.3.2 Définition... 25

2.3.3 Déclenchement de l’émotion ... 25

2.3.4 La fonction des émotions... 26

2.3.5 Les émotions dans la relation d’aide ... 29

2.4 La régulation des émotions... 30

2.4.1 Définition et modèles ... 31

2.4.2 Fonction de la régulation des émotions ... 33

2.4.3 La régulation des émotions dans la relation d’aide ... 35

2.4.4 Stratégies adaptées et moins adaptées ... 36

2.5 Communication non verbale... 39

2.5.1 Expressivité et expression ... 40

2.5.2 Le visage... 41

2.5.3 Les gestes... 44

2.5.4 Les activités de déplacement ... 48

2.6 L’ouverture émotionnelle ... 49

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3. Questions de recherche ... 52

3.1 Etude 1 et 2 ... 53

3.1.1 Hypothèse 1 ... 53

3.1.2 Hypothèse 2 ... 53

3.1.3 Hypothèse 3 ... 54

3.2 Etude 2 ... 54

3.2.1 Hypothèse 4 ... 54

4. Méthode ... 55

4.1 Etude 1 ... 55

4.1.1 Population ... 55

4.1.2 Procédure ... 56

4.2 Etude 2 ... 63

4.2.1 Population ... 63

4.2.2 Procédure ... 63

4.2.3 Questionnaires ... 64

5. Résultats ... 69

5.1 Etude 1 ... 69

5.1.1 Validation du BES ... 69

5.1.2 Données descriptives ... 72

5.1.3 Hypothèse 1 ... 79

5.1.4 Hypothèse 2 ... 85

5.1.5 Hypothèse 3 ... 90

5.2 Etude 2 ... 97

5.2.1 Données descriptives ... 97

5.2.2 Hypothèse 1 ... 102

5.2.3 Hypothèse 2 ... 104

5.2.4 Hypothèse 3 ... 106

5.2.5 Hypothèse 4 ... 120

6. Discussion / Conclusion ... 139

6.1 Discussion des résultats ... 139

6.2 Limites de l’étude ... 144

6.3 Perspectives ... 145

7. Bibliographie ... 149

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1. Introduction

Lorsqu’une personne s’engage dans une action de bénévolat, elle peut le faire pour différentes raisons. Pour s’occuper, pour aider l’autre, pour apprendre de nouvelles choses, pour faire partie d’un groupe, … Se pose alors la question pour les formateurs de comment la préparer à cette nouvelle mission. Quelles sont les compétences nécessaires dès le départ lors du recrutement ? Quelles sont les compétences spécifiques que le bénévole apprendra lors de la formation continue ? Qu’est-ce qu’il fait qu’il va rester dans le service et ne pas partir au bout d’un ou deux ans car il sera épuisé ? Comment donner le cadre théorique nécessaire pour que des non professionnels soient à même de bien remplir leur rôle ?

Voici quelques questions qui ont été à la base de ce travail. Nous nous sommes intéressés à la relation d’aide par téléphone mais, nous le constaterons tout au long de ce travail, les questionnements suscités par cette relation spécifique ne sont pas si éloignés des questionnements de la relation d’aide en général. Comme nous le verrons, il y a un certain nombre de compétences qu’un aidant doit avoir pour que la relation d’aide se passe bien et que « l’aidé », le client, l’appelant reparte avec quelque chose qui le fasse avancer.

L’empathie ressort naturellement, peu importe le courant de pensées, comme une compétence essentielle. Qu’entend-on tout d’abord par empathie ? En effet, derrière ce même terme se cachent plusieurs définitions en fonction des auteurs. Est-elle toujours positive pour l’aidant ? Est-elle une et unique ou est-elle faite de plusieurs composantes ? Nous allons parcourir ces différents aspects et tenter de répondre à ces questions.

Une autre compétence importante dans la relation d’aide est, selon nous, la régulation des émotions. Comment un bénévole peut- il être efficace s’il ne régule pas ses propres émotions ? Comment le fait- il ? Peut-on observer cette régulation par certains indicateurs ? Nous verrons par la suite comment nous avons essayé de trouver des indicateurs non verbaux de régulation des émotions. Nous pensons qu’il est difficile pour un aidant d’aider l’autre à réguler ces émotions s’il n’est pas au clair avec ce qui se passe pour lui à ce même moment. L’ouverture émotionnelle nous apparaît donc comme un modèle très intéressant pour investiguer ce qui se passe dans la relation entre aidant et « aidé ».

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2 Afin de répondre à la plupart de ces questions et d’essayer de comprendre ce qui se passe au sein d’une relation d’aide par téléphone, nous avons choisi d’effectuer deux études. La première, par questionnaires, va nous permettre de mieux comprendre les liens entre ces différentes compétences et d’autres facteurs comme la personnalité, les émotions ou l’épuisement professionnel. La deuxième étude, plus exploratoire, va nous permettre d’explorer et d’observer ce qui se passe dans l’interaction entre ces deux personnes aussi bien au niveau verbal que non verbal.

Nous allons tout d’abord poser notre cadre théorique avant de développer nos questions de recherches et notre méthodologie. Nous explorerons ensuite nos rés ultats et nous les discuterons pour aboutir à la conclusion de ce travail.

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2. Partie théorique

2.1 La relation d’aide

2.1.1 Définition

Nous allons commencer cette partie littérature en posant le cadre principal de ce travail qui est la relation d’aide. Mais avant de développer les différents aspects de cette relation particulière, qu’entend-on exactement par relation d’aide ? Selon Bioy (Bioy & Maquet, 2003), la relation d’aide s’inscrit dans la relation thérapeutique et est « l’action d’une personne sur une autre pour l’aider à avancer dans sa vie, à gérer les situations d’arrêt qu’elle vit ou pense vivre.». On comprend ainsi qu’il s’agit d’une relation qui va permettre à celui qui recherche de l’aide d’avancer.

Ceci est une première définition mais o n ne peut pas parler de relation d’aide sans parler de celui qui a été un des pionniers en la matière, Carl Rogers. Il définit la relation d’aide en émettant une hypothèse : « La relation d’aide psychologique est une relation permissive, structurée de manière précise, qui permet au client d’acquérir une compréhension de lui- même à un degré qui le rende capable de progresser à la lumière de sa nouvelle orientation.

Cette hypothèse a un corollaire naturel : toutes les techniques utilisées doivent avoir pour but de développer cette relation libre et permissive, cette compréhension de soi dans l’entretien d’aide, et cette orientation vers la libre initiative de l’action. » (C.R. Rogers, 1942/2005, p.

33). Dans son livre « Le développement de la personne » (C.R. Rogers, 1961/2005), il précise sa pensée et décrit la relation d’aide comme une relation dans laquelle l’une ou les deux personnes impliquées dans cette relation, cherchent à faciliter la croissance de l’autre

Dans cette définition on sent que Rogers se détache de ce qui se faisait jusque là dans l’entretien. Nous ne sommes pas dans des ordres, des interprétations, des conseils, de la catharsis, un interrogatoire, ni une confession et encore moins un diagnostic avec lequel on fait entrer la personne dans une case sans se préoccuper de son vécu (Mucchielli, 2007; C.R.

Rogers, 1942/2005). On va donc se centrer sur l’individu et non pas sur le problème. C’est une nouvelle manière de voir l’entretien et la relation thérapeute-patient qu’il va d’ailleurs renommer en relation « conseiller »-client. Ces différentes réflexions sur ce thème et sur ce qu’est une relation d’aide et ce qui la rend efficace vont l’amener à développer la thérapie centrée sur la personne que nous connaissons actuellement. Dans ce courant, on accorde de l’importance à l’autonomie de la personne.

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4 La personne qui vient consulter étant le meilleur expert de sa propre vie, elle saura trouver les réponses qui lui correspondent. On se centre donc sur les ressources en partant du principe que cette personne a des ressources pour faire face. Rogers (C.R. Rogers, 1942/2005) décrit huit conditions qui indiquent que l’aide psychologique est recommandée dont notamment le fait qu’elle puisse faire face et qu’elle puisse exprimer verbalement ou par d’autres moyens cette tension interne.

La relation d’aide représente une manière particulière d’interagir que la personne n’a pas connue jusque là. Il s’agit avant tout d’une rencontre entre deux personnes qui va permettre à la personne cherchant de l’aide de pouvoir s’exprimer dans un certain climat créé par l’aidant.

Ce climat est très important car c’est lui qui va permettre la suite. Selon Rogers (C.R. Rogers, 1942/2005), pour mettre en place ce climat, l’aidant va tout d’abord devoir avoir, selon ses termes, une chaleur et une émotion sympathiques qui vont faire que la relation soit possible.

Ensuite, il aura de la permissivité en ce qui concerne l’expression des sentiments avec une absence totale de jugement. D’un autre côté il posera des limites claires en ce qui concerne l’entretien (ex. temps de la séance) car permissivité ne veut pas dire laisser-faire. Et finalement, cette relation d’aide sera dénuée de toute forme de pression ou de coercition. Ce climat créé va permettre au client de se sentir en sécurité et c’est à ce moment-là qu’il va pouvoir explorer ce qui se passe en lui (C.R. Rogers, 1989/2001).

Selon Rogers, ce climat, décrit plus haut, va permettre d’obtenir un changement de comportement voir même de personnalité chez la personne qui est venu chercher de l’aide. Ce qui est visé dans la relation d’aide, c’est de créer un climat favorable à l’expression, l’épanouissement et le changement de la personne. Ce changement va pouvoir s’obtenir entre autre par le processus thérapeutique décrit par Rogers (C.R. Rogers, 1961/2005) qui vont amener le client vers une congruence au niveau de ses émotions. Selon Rogers, il faut un certain nombre de conditions réunies pour favoriser ce changement. Il passe de six (C.R.

Rogers, 1957) à trois pour s’arrêter sur les plus essentielles qui sont l’authenticité ou congruence, le regard positif inconditionnel et la compréhension empathique. Nous avons vu qu’il y a un certain nombre de conditions afin de mettre en place un contexte qui permette le changement. Selon Béraud (cité par Bioy & Maquet, 2003), en plus de ces conditions il y a la nécessité de se placer dans une disponibilité totale qui comprend quatre aspects : temporelle, intellectuelle, morale et affective. On comprend à travers cette quadruple disponibilité que la relation d’aide ne s’improvise pas et demande au thérapeute un certain nombre de compétences et de se mettre dans certaines conditions.

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5 Dès le départ, Rogers et ses collègues ont effectué de la recherche pour confirmer leurs théories. Ainsi, nous avons de nombreuses recherches qui montrent l’efficacité de la mise en place de ces conditions (pour une revue voir Rogers 1961/2005 ; Rogers 1989/2001). Deux parmi celles citées nous semblent importantes pour notre recherche. Heiner (cité par Rogers 1961/2005) met en avant un certain nombre d’attitudes bénéfiques qui aident le changement comme le fait de se sentir compris par le thérapeute et qu’il reprenne ouvertement sur les émotions exprimées. Dittes (cité par C.R. Rogers, 1961/2005), a montré que l’acceptation de son client par le thérapeute est essentielle et que si elle est faible, cela engendre des réactions de stress chez celui- ci. Selon Truax (Truax & Carkhuff, 1976) qui a également fait une revue des recherches publiées à l’époque, il y a une ambiguïté entre les études qui montrent une efficacité de la thérapie et celles qui n’en montrent pas. Il en conclut que plus que la différence entre les thérapies, c’est la différence entre les thérapeutes qui peut expliquer ces résultats. Un certain nombre de recherches étayent cette conclusion. Fielder (cité par C.R.

Rogers, 1961/2005, 1989/2001) fait le constat que les thérapeutes experts ont en commun le fait de comprendre les intentions et sentiments des clients, d’être sensibles à leurs attitudes, de s’intéresser avec chaleur mais sans implication émotionnelle excessive. Les experts gardent donc mieux cette « bonne » distance avec le client que les non-experts en manifestant de l’intérêt mais en restant non impliqués émotionnellement. Halkides (cité par Truax &

Carkhuff, 1976) a montré sur la base d’extraits d’interviews de Rogers que les cas qui avaient eu du succès étaient ceux dans lesquels il y avait un haut niveau de compréhension empathique, de regard positif inconditionnel et de co ngruence de la part du thérapeute.

Barrett- Lennard (cité par Truax & Carkhuff, 1976) a montré également une différence entre les thérapeutes. Les plus expérimentés, étaient perçus par les clients comme offrant un plus haut niveau d’empathie, de chaleur et de congruence que les thérapeutes moins expérimentés.

Il semble que l’expérience ait également de l’importance (Probst cité par Beutler et al., 2004) ce qui va dans le sens de compétences apprises et développées avec le temps.

De nombreuses études montrent donc l’importance de ces conditions dont celles de Rank, Munroe, Shoben, Brammer & Shostram (cité par Truax & Carkhuff, 1976) et plus récemment celles de Sachse et Elliott (2001). Les recherches exposées par Sachse et Elliott (2001) montrent l’importance de l’empathie, de l’acceptation et de l’authenticité qui influencent de manière positive l’issue de la thérapie. L’exploration et le fait de vivre l’expérience sont également des facteurs importants.

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6 Ces différents résultats de recherche mettent l’accent sur l’importance de créer un climat adéquat dans la relation d’aide pour prédire une issue thérapeutique positive ou pour permettre le changement comme postulé par Rogers. La plupart des recherches ont été effectuées en prenant le contexte des thérapies mais nous pensons que leurs conclusions sont applicables à la relation d’aide en générale et c’est pour cela que nous avons choisi de les développer. Plus que des ingrédients ou des techniques, ce sont des compétences interpersonnelles que les aidants doivent avoir. Au-delà de la thérapie, une manière de créer un bon climat va être l’écoute active.

2.1.2 L’entretien non-directif et l’écoute active

Le but de l’entretien en relation d’aide est de permettre à la personne d’acquérir une compréhension d’elle-même qui lui permette de s’adapter aux différentes situations rencontrées dans les relations humaines. Bien que la relation d’aide ait été développée dans un premier temps dans le cadre de la thérapie, elle peut s’appliquer à bien d’autres contextes dont le nôtre. Nous pouvons remarquer que la relation d’aide se différencie sur certains aspects des autres courants thérapeutiques. Nous n’allons pas ici décrire les spécificités et les points communs de ces courants, ni même les nommer mais nous allons utiliser une distinction utilisée par Porter dans un écrit non publié cité par Rogers (C.R. Rogers, 1962/2009) qui distingue les thérapies directives et non directives. Porter a effectué une recherche sur les interventions de différents psychologues et a demandé à des juges experts de les classer sur une échelle de directivité. Il ressort de cette étude des différences significatives entre les deux groupes. Le groupe des psychologues directifs parlent plus alors que dans le groupe des non- directifs, l’aidant parle moitié moins que son interlocuteur. Il y a également des différences dans le type d’interventions. Le groupe directif utilise plus des stratégies comme persuader le client, désigner les problèmes qui nécessitent une solution, interpréter les résultats des tests, poser des questions précises. Le groupe non-directif met plutôt l’accent sur les moyens qui donnent au client une plus grande conscience de ses sentiments et comportements alors que le groupe directif va privilégier les moyens lui permettant de diriger l’entretien et d’amener le client vers le but choisi par l’aidant. La grande différence relevée par Rogers, concerne la question de savoir qui doit choisir les buts du client. Pour le groupe directif, ce choix va être fait par l’aidant et il va ensuite aider son client à l’atteindre. Dans le groupe non-directif, ce choix va revenir au client.

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7 L’aidant n’est donc pas supérieur au client car il saurait ce qui est bon pour lui mais c’est le client qui va être en mesure de faire un choix. « Le patient a la carte, le thérapeute a la boussole. » (Tournebise, 2001, p. 130). Cette phrase résume la manière de voir le guidage non directif. Pour Tournebise (2001), les clés du guidage non directif sont :

1. Ne pas savoir à la place de l’autre 2. Avoir confiance en lui

3. Etre communicant

C’est dans cette optique de non-directivité que va apparaître la notion d’écoute active inspirée de Rogers. L’écoute est décisive dans la relation d’aide. L’enjeu de l’écoute est d’entendre au plus juste celui qui est écouté et lui permettre de mieux saisir le sens de ce qu’il exprime (Artaud, 2006). L’écoute demande un apprentissage car il ne s’agit pas ici d’entendre ce qui a été dit mais d’une écoute véritable qui va favoriser l’expression de la personne écoutée. C’est un outil très puissant car si la personne se sent écoutée, on peut s’attendre à ce que cela l’amène à se sentir exister plus fortement, à regagner confiance en elle à travers la confiance de l’autre, à être encouragée à rebondir, à accepter des critiques constructives, à se sentir plus à l’aise pour se confier complètement (Bellenger & Couchaere, 2007). Pour ces auteurs, pour être à l’écoute il faut offrir une disponibilité active en faisant un effort de concentration et avoir une surveillance de ce qui se passe. Il faut également accepter les silences utiles, ceux qui permettent de réfléchir, de se poser, d’explorer plus en avant. Les personnes qui pratiquent la relation d’aide savent reconnaître un silence gênant et qu’il vaut mieux combler de ce lui qui au contraire va être utile. L’écoute active est favorisée par l’utilisation de certaines techniques comme la reformulation ou l’utilisation de certaines questions. Nous allons maintenant décrire ces deux outils.

2.1.3 Les reformulations

La reformulation va consister à redire ce que la personne a dit mais sans jouer a u perroquet.

C'est-à-dire ne pas seulement répéter mot pour mot mais parfois résumer, paraphraser ou accentuer un certain aspect évoqué par la personne. La capacité à reformuler est un s igne fort d’écoute active car elle montre à l’écouté que ce qu’il a dit a été retenu et compris. Mucchielli (2007) cite trois types de reformulation décrit par Rogers. Nous n’avons pas retrouvé aussi clairement ces types dans les écrits de l’auteur et nous allons décrire ici ceux de Mucchielli.

Le premier est la reformulation reflet. Elle consiste à paraphraser ce que vient de dire l’écouté. Il s’agit de reformuler de manière à ce que la personne reconnaisse ses propos.

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8 Elle peut parfois prendre l’aspect d’un résumé mais qui doit impérativement se faire à partir de ce qui est fondamental pour l’écouté et non par pour l’écoutant sinon nous risquons d’être dans l’interprétation ou dans de l’entretien directif. Le deuxième type de reformulation est le renversement figure- fond.

Figure 1. Image illustrant le renversement figure – fond. Image tirée de Mucchielli (2007) Cette image, tirée de la théorie de la Gestalt, montre que l’on peut voir à la fois un vase si l’on regarde le blanc sur fond noir ou deux profils si l’on regarde le noir sur fond blanc. Le changement figure-fond n’ajoute ni n’enlève rien à ce qui existait déjà mais fait apparaître d’un coup quelque chose qui était déjà là. Le troisième type de reformulation est la reformulation clarification. C’est la reformulation la plus co mplexe et la plus efficace. Il s’agit ici de mettre en lumière quelque chose qui a été perçu par l’écoutant et qui n’a pas été dit directement pas l’écouté. Ici également il faut se méfier de l’interprétation.

Bellenger et Couchaere (2007) quant à eux décrivent quatre types de reformulations : la reformulation sur le contenu, la reformulation sur le processus de l’échange, la reformulation- interprétation et la reformulation sur le ressenti. La reformulation sur le contenu se divise en deux types. La reformulation résumé tout d’abord consiste à être efficace sur ce qui a été dit en reprenant brièvement les propos de la personne. On peut retrouver ce type de phrase : « En résumé, je retiens que… ». Ensuite nous avons la reformulation clarification qui sert donc à clarifier le propos pour s’assurer de sa bonne compréhension (ex. « Si je vous ai bien compris,…). Le deuxième type de reformulations, se centre sur le processus de l’échange et peut s’apparenter à du recadrage (ex. Passons à…, Revenons à,…). Vient ensuite la reformulation- interprétation. Il s’agit ici d’oser reformuler ce que l’écoutant croit avoir compris mais qui n’a pas été explicitement dit. Il vaut mieux pour cela annoncer la couleur et dire qu’il s’agit d’une interprétation (ex. « En d’autres termes… »).

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9 Le dernier type de reformulation est celui sur le ressenti. La reformulation porte a lors sur les émotions ainsi que sur le comportement non verbal (ex. « ça à l’air de vous convenir »…).

Rice (2001) affirme que la technique de reformulation du sentiment est celle qui est potentiellement l’outil le plus actif et puissant du thérapeute. Le but de la reformulation est de permettre au client d’ouvrir son expérience afin d’en avoir une vision plus profonde et plus claire et d’ainsi sortir de ses constructions automatiques qu’il avait jusque-là. Elle se distingue de l’interprétation dans le sens où, si elle fonctionne bien, elle va même surprendre le thérapeute qui pouvait prédire la direction générale mais pas son essence particulière.

Plusieurs auteurs font un lien entre les reformulations et l’empathie tout en les distinguant.

Les reformulations seraient des signes d’empathie pour les uns alors que pour les autres, l’empathie serait nécessaire pour pouvoir reformuler. Bozarth (1997) insiste sur le fait que la reformulation est une technique qui aide le thérapeute à être empathique et de vérifier s’il a bien compris le client et de le lui communiquer. Ce n’est pas de l’empathie mais un moyen d’être plus empathique en entrant dans le monde du client. Il s’agirait bien d’une technique qui permettrait le processus d’empathie. Wynn et Wynn (2006) ont analysé des entretiens thérapeutiques et ont trouvé trois types de reformulations manifestant l’empathie : l’empathie cognitive (le thérapeute exprime directement sa compréhension des pensées, sentiments ou comportement du patient), les séquences dans lesquels le thérapeute montre qu’il partage les sentiments du patient et l’empathie partagée (lorsque le patient perçoit que le thérapeute et lui ont quelque chose en commun). Selon Artaud (2006), nous ne reformulons un sentiment que si nous le ressentons comme à la place de l’autre. Il faut donc pour cela de l’authenticité et de l’empathie sans quoi la reformulation pourrait passer pour une interprétation ou une volonté de conduire la personne vers un certain but. Nous ne somme pas ici dans l’idée de confronter la personne avec ses sentiments mais plutôt dans celle de les refléter pour lui permettre de les explorer en sécurité. La personne qui écoute doit être un reflet de ce qui se passe pour l’écouté mais ne doit pas être un décodeur. C’est à l’écouté de trouver sa solution car comme le disait Pascal (1623-1662) : « On se persuade mieux, pour l’ordinaire, par les raisons qu’on a soi- même trouvées, que par celles qui sont venues dans l’esprit d’un autre ».

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10 2.1.4 Les attitudes d’écoute

Il n’est pas toujours facile pour l’écoutant de savoir s’il est réellement dans une écoute empathique. Porter cité par différents auteurs (Artaud, 2006; Bellenger & Couchaere, 2007;

C.R. Rogers, 1962/2009) a développé une grille de repérage des attitudes d’écoute qui peut aider les écoutants. Il y décrit 5 attitudes principales d’écoute. La première est la solution qui se manifeste sous forme de conseil, d’ordre ou de suggestion. L’écoutant est dans la recherche de solution immédiate et il suggère des actions à l’écouté. La deuxième est l’aide / soutien.

Cette attitude cherche à rassurer, apaiser mais a tendance à minimiser ou invalider le sentiment de la personne qui vient chercher de l’écoute. La troisième attitude est le questionnement qui cherche à obtenir des informations supplémentaires ou à vérifier une hypothèse. Il a y un risque d’induire une direction en fonction des questions posées. La quatrième est l’évaluation. Elle indique une opinion sur ce que dit la personne ou sur ce qu’elle devrait faire. La cinquième attitude est l’interprétation qui consiste à faire prendre conscience à l’écouté de quelque chose qu’il ignore sur lui. On lui explique pourquoi les choses se passent comme ci ou comme ça. Une dernière attitude qui n’était pas présente dans les écrits de Porter est celle de compréhension qui consiste à comprendre l’autre de l’intérieur.

Cette dernière est rajoutée par Mucchielli (2007) et il utilise des fragments d’entretien pour trouver les attitudes d’écoute dominantes et sous-dominantes d’un aidant. L’identification de ces attitudes peut permettre à l’écoutant d’en prendre conscience pour les affiner si elles sont dans le respect de l’opinion de l’autre ou les corriger si elles exercent une pression ou un jugement sur l’attitude de la personne écoutée (Artaud, 2006). A part l’attitude de compréhension, les autres attitudes de l’aidant peuvent empêcher une bonne écoute. La plupart du temps, « l’aidé » ne cherche pas à ce que l’aidant lui donne une solution mais plutôt qu’il l’aide à la trouver.

L’écoute peut également être questionnante (Bellenger & Couchaere, 2007). Les questions ouvertes vont être particulièrement utiles dans ce type d’écoute car elles créent le dialogue et n’oriente pas la réponse à l’instar des questions fermées ou suggestives. Les questions suggestives sont des questions qui donnent la réponse.

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11 2.1.5 La relation d’aide par téléphone

Nous n’avons pas trouvé beaucoup de recherches qui se sont penchées sur ce contexte spécifique. Nous pouvons supposer que le fait de ne pas voir son interlocuteur a un impact sur la manière de s’exprimer. Des recherches ont montré que nous ne nous exprimions pas de la même manière au niveau non verbal lorsque nous sommes en interaction directe (Buck, Losow, Murphy, & Costanzo, 1992). D’un autre côté, nous savons que des indicateurs émotionnels passent à travers le téléphone. En effet, il a été montré que le sourire s’entend au téléphone (Drahota, Costall, & Reddy, 2008). Ce contexte bien que spécifique pourrait utiliser les mêmes codes qu’une interaction de face à face.

Dans la plupart des centres d’aide par téléphone, ce sont des bénévoles qui assurent le service.

Il y a différentes raisons qui poussent des personnes dans des activités de bénévolat. Certaines personnes cherchent un meilleur équilibre dans leur vie, d’autres recherchent une expérience, d’autres encore cherchent à s’occuper après le travail ou à augmenter leurs compétences (Ancans, 1992). Peu importe les raisons qui motivent les personnes à se porter volontaires, il semble que cela leur procure un sentiment de bien-être. Moen et Fields (1999) ont montré que les retraités qui s’engagent dans un travail de bénévolat ont un plus haut niveau de bien-être physique et psychique. Seulement deux heures par semaine peuvent déjà procurer cet effet (Morrow-Howell, Hinterlong, Rozario, & Tang, 2003). Dans la littérature sur les bénévoles, il faut distinguer les personnes qui s’engagent pour aider une personne « étrangère » et celles qui aident un membre de sa famille. Dans le deuxiè me cas, on parle plus d’obligation que d’engagement volontaire (Chacon, Menard, Sanz, & Vecina, 1998; Omoto & Snyder, 1995).

Les auteurs se sont interrogés sur les facteurs psychosociaux et les motivations qui poussent les bénévoles à venir en aide aux autres. Ils ont observé qu’une motivation importante et un faible support social influencent directement la durée d’engagement dans les centres. De plus, une personnalité dite voulant aider et une bonne intégration dans l’organisation influence nt également la durée de l’engagement car elle augmente la satisfaction personnelle avec ce travail. Les volontaires acquièrent des compétences qui leur permettent de gérer les situations nouvelles et qui les encouragent à rester volontaires sur le long terme.

Une recherche sur les centres d’écoute a montré que les personnes y travaillant étaient à risque de développer un épuisement professionnel (Deery, Iverson, & Walsh, 2002). Même si cette recherche concerne les centre d’appels professionnels et non pas ceux centrés sur la relation d’aide, nous pensons que le fait de se retrouver à gérer différents appels délicats en même temps peut entraîner les mêmes risques.

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12 Maintenant que nous avons défini ce qu’était la relation d’aide et dans quelles conditions elle pouvait se mettre en place, nous allons explorer un certain nombre de compétences du thérapeute qui nous paraissent essentielles. Nous avons dû évidemment faire des choix et c’est ceux-ci que nous allons développer.

Nous commencerons par l’empathie et continuerons par la régulation émotionnelle et l’ouverture émotionnelle.

2.2 L’empathie

Dans ce travail, nous avons choisi de nous centrer principalement sur l’empathie. Cette notion nous est apparue comme centrale dans le processus de changement et commune aux différents courants ce qui fait d’elle un élément incontournable de la thérapie et de la relation d’aide en général. Elle a également fait l’objet de beaucoup de recherche et a donné lieu à de nombreuses définitions. Certains disent même qu’il en existe autant que de chercheurs travaillant dans le domaine (Decety & Jackson, 2004). En effet, beaucoup d’auteurs ont écrit sur l’empathie et le terme est également fréquemment utilisé dans la langue courante. Il est utile avant de poursuivre de préciser ce que nous entendons par empathie puisqu’il existe un grand nombre de définitions. Nous allons donc commencer ce chapitre par en donner quelques unes.

2.2.1 Définitions

Rogers (C.R. Rogers, 1957) définit l’empathie au début de la clarification de sa pensée comme : “The therapist’s sensitive ability and willingness to understand the client‘s thoughts, feelings and struggles from the client‘s point of view. The ability to see completely through the client‘s eyes, to adopt his frame of reference». Il s’agit donc pour le thérapeute d’essayer d’adopter le cadre de référence de son patient et de voir le monde à travers ses yeux comme si on était lui, mais sans perdre de vue la composante « as if »: C’est-à-dire qu’il ne doit pas y avoir de confusion entre ce qui appartient à l’aidant et ce qui appartient au client. Plus tard il apporte des compléments à cette définition (C.R. Rogers, 1980/1995, p. 142) en disant qu’une manière d’être empathique avec une autre personne comprend plusieurs facettes : « It means entering the private perceptual word of the other and become thoroughly at home in it. It invloves being sensitive moment by moment, …, whatever he or she is experiencing. It means temporarily living in the other’s life,…,. It includes communicating your sensings of the person’s world as you look with fresh and unfrightened eyes at elementsoh he or she is fearful. It means frequently checking with the person as to the accuracy of your sensing, and

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13 being guided by the responses you receive”. Dans cette deuxième définition, on constate un aspect encore plus dynamique de la compréhension empathique. Il introduit également le fait de partager avec le client nos impressions et de les soumettre à la validation de celui-ci à travers des reformulations. Il y a une notion de travail commun qui permet au client de voir les choses d’un œil nouveau, sans peur, de mettre l’accent sur l’un ou l’autre aspect plus profondément et de s’approprier son expérience.

Freud a également utilisé le terme même s’il n’était pas central dans son approche (cité par Bohart & Greenberg, 1997b). Il s’agissait d’une manière pour le thérapeute de savoir les pensées du patient et ainsi d’avoir accès à sa dynamique inconsciente pour produire des interprétations efficaces. Il ne s’agissait pas d’un moyen d’établir une meilleure relation comme ça a pu l’être pour d’autres auteurs.

Un autre auteur de la même époque que Rogers, Gladstein, définit l’empathie en faisant une distinction entre l’empathie affective et l’empathie cognitive. Selon Gladstein (1983), l’empathie cognitive serait le fait de prendre le rôle ou la perspective d’une autre personne de manière intellectuelle alors que l’empathie affective consisterait à répondre aux émotions de l’autre avec la même émotion.

Plusieurs auteurs s’accordent sur le fait que les définitions de l’empathie se regroupent sous plusieurs groupes (Duan & Hill, 1996; Feshbach, 1997; Gladstein, 1983; Haggstrom, Skovdahl, Flackman, Kihlgren, & Kihlgren, 2005; Hojat, 2007). Il y a ceux qui voient l’empathie comme un phénomène affectif, d’autres qui la voient comme un concept cognitif et le troisième groupe dont fait partie Gladstein qui voit l’empathie comme un phénomène aussi bien affectif que cognitif. Il ajoute également une autre caractéristique qui est essentielle selon lui et qui est la distinction entre soi et l’autre. Tengland (2001) rajoute un quatrième type de définitions. Pour lui, il y a un première série de définitions qui voit l’empathie dans un sens cognitif, c’est-à-dire d’avoir la capacité d’imaginer ou de comprendre les états cognitifs et/ou affectifs d’un autre personne. La deuxième série de définitions voit l’empathie au sens affectif dans lequel on est capable de partager, d’expérimenter le même état affectif (ou un similaire) que la personne. Un troisième type de définitions entend l’empathie dans un sens d’attitude proactive en ayant la capacité d’imaginer ou de comprendre les états cognitifs et/ou affectifs d’une autre personne et en faisant cela, d’avoir un intérêt marqué, une préoccupation (« concern ») et de vouloir le meilleur pour cette personne. La dernière catégorie de définitions voit l’empathie dans le sens d’une préoccupation émotionnelle.

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14 Celui qui éprouve de l’empathie, a la capacité d’imaginer ou de comprendre les états cognitifs et/ou affectifs d’une autre personne et en faisant cela il expérimente une émotion spéciale de préoccupation, d’intérêt (« concern ») pour cette personne.

Quand on parle d’empathie, parle-t-on plutôt d’un trait de personnalité, d’une compétence thérapeutique, de quelque chose de figé ou de quelque chose qui se développe ? De manière générale, les auteurs voient l’empathie soit comme un trait de personnalité soit comme une compétence générale. Il y aurait ainsi, selon eux, des gens plus empathiques que d’autres au départ. Rogers, entre autres, a parlé d’orientation interpersonnelle (cité par Duan & Hill, 1996). On serait ainsi plus ou moins empathique que les autres et ceci constituerait un facteur de différence individuelle. D’autres pensent que l’empathie est un état affectif ou cognitif selon la situation. Ce serait une manière de réagir à un stimulus ou à une personne cible à un moment donné. Ce ne serait donc pas quelque chose de statique mais une compétence qui se manifeste dans l’action. On pourrait ainsi mesurer le degré de compréhension d’un thérapeute pour son patient lors d’un entretien en voyant les similarités entre l’état affectif ou cognitif du thérapeute et de son client. Ce serait donc une capacité qui se développe notamment par les formations et de l’entraînement (Feshbach, 1997; Truax & Carkhuff, 1976). Lorsque l’on voit l’empathie comme une compétence du thérapeute pour comprendre son client, cette compréhension peut être vue comme une mesure positive du résultat de la thérapie (Sachse &

Elliott, 2001), même si elle n’est pas toujours vécue comme aussi importante par tous les clients. D’autres enfin voient l’empathie comme un processus expérientiel multiphasé (Multiphased experiential process). L’empathie comprendrait ainsi plusieurs phases. Barrett- Lennard (cité par Duan & Hill, 1996), par exemple, identifie trois phases de l’empathie : La résonance empathique, l’empathie exprimée et l’empathie reçue. Il est donc possible d’envisager l’empathie comme étant à la fois trait et compétence.

Il existe différentes manières dont l’empathie peut se manifester dans la relation thérapeutique. Il y a premièrement le rapport empathique, lors duquel le thérapeute montre une attitude compatissante envers son client et essaie de lui montrer qu’il le comprend. Il y a également ce qu’on appelle le « Communicative attunement » qui consiste à reformuler les paroles du patient de façon empathique afin de montrer sa compréhension mais aussi de permettre au patient d’explorer plus en profondeur ses pensées et émotions. Il y a enfin le

« person empathy », qui consiste en un effort soutenu pour comprendre l’expérience du patient, et vise la compréhension de comment il en est arrivé à ces pensées et ces ressentis spécifiques à ce moment (Bohart & Greenberg, 1997b).

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15 2.2.2 Distinction entre empathie et d’autres concepts

Lorsque l’on parle d’empathie, il convient de ne pas confondre cette compétence avec d’autres notions telles que la sympathie ou la contagion émotionnelle (Boulanger & Lançon, 2006; Feshbach, 1997; Jorland, 2004; Pacherie, 2004). La sympathie suppose que nous partagions la même émotion qu’autrui et nécessite l’établissement d’un lien affectif. Il n’y a pas ce présupposé de lien affectif dans l’empathie (Pacherie, 2004). Boulanger et Lançon (2006) estiment que dans l’empathie il ne s’agit pas de partager un sentiment ou une croyance mais de se représenter les sentiments, les désirs et les croyances d’autrui. Pour Wispé (cité par Boulanger & Lançon, 2006), l’empathie consiste à comprendre autrui alors qu’être en sympathie avec l’autre consiste à se soucier de son bien-être. Pour Eisenberg (Eisenberg &

Spinrad, 2004), l’empathie est la première étape et elle peut évoluer en sympathie, car la sympathie est une réponse émotionnelle issue de l’état émotionnel de l’autre et qui permet de se sentir désolé ou préoccupé (« concern ») pour l’autre.

Quant à la contagion émotionnelle, elle désigne le phénomène de la propagation d’une émotion d’un individu à un autre. Il s’agirait d’une indifférenciation entre soi et autrui. La contagion est composée de plusieurs étapes. La première est la « mimicry ». Lors d’une conversation, les personnes « mimiquent » et synchronisent automatiquement leurs mouvements. Cette mimique peut être faciale, vocale ou posturale (Hatfield, Rapson, & Le, 2011). La mimicry peut apparaître lorsqu’une personne observe une expression d’une autre personne et va répondre par une représentation motrice similaire (Hess, Philippot, & Blairy, 1999; Hojat, 2007). Cette vision automatique de la mimicry est nuancée quelques années plus tard, Bourgeois et Hess (2008) montrant que la mimicry dépend du contexte social et du type d’expressions observées. La deuxième étape est celle du feed-back. Les expériences émotionnelles des personnes sont affectées au fur et à mesure par l’activation et/ou du feed- back provenant de la mimique faciale, vocale ou posturale (Flack, 2006; Strack, Martin, &

Stepper, 1988). La troisième et dernière étape est la contagion en elle- même car la conséquence de la mimicry et de la rétroaction font que les gens ont tendance à être pris par les émotions de l’autre. Un exemple bien connu de contagion émotionnelle est la propagation des pleurs dans une nurserie. Lorsqu’un bébé pleure, les autres vont répondre par des pleurs (Simner, 1971). La capacité de résonance émotionnelle est présente très tôt chez l’enfant et c’est un des précurseurs de l’empathie (Decety & Jackson, 2004). La contagion émotionnelle serait plus proche de l’empathie affective. Il y a un partage émotionnel et donc une indifférenciation entre soi et l’autre.

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16 La distinction soi-autrui est essentielle à l’empathie utilisée par le thérapeute dans la relation d’aide mais quand elle manque, elle peut également être délétère et être responsable de certains problèmes de communication dans une population clinique (Kaiser & Wehrle, 2007).

Certains auteurs affirment que l’empathie est un piège (Tournebise, 2001) ou peut être néfaste (McDougall,1908 cité par Gladstein, 1983 ). Selon nous, ces auteurs confondent l’empathie avec ces autres concepts que nous avons cités ou parlent uniquement d’une des composantes de l’empathie, l’empathie affective. Sans régulation de ses émotions, l’empathie pourrait facilement se résumer à de la contagion. Une étude postule même un lien entre ces deux 2.2.3 Développement de l’empathie

Même si, comme nous l’avons vu, l’empathie ne se résume pas à la contagion émotionnelle, c’est par ce type de mécanisme que l’empathie se développe. L’empathie telle qu’on l’entend émerge vers l’âge de deux ans. C’est à cet âge que l’enfant commence à consoler son camarade, à s’engager dans des jeux coopératifs et à distinguer un comportement nocif intentionnel ou non (Decety, 2004; Feshbach, 1997). Selon Hojat (2007), un des facteurs qui va permettre le développement de l’empathie et des comportements sociaux chez l’enfant est l’imitation faciale et la mimicry moteur dont nous avons vu les mécanismes dans le chapitre précédent. Les jeunes enfants apprennent par imitation et sont capables rapidement d’imiter les expressions faciales et les gestes des adultes. L’imitation peut être considérée comme une forme rudimentaire d’empathie (van Baaren, Decety, Dijksterhuis, van der Leij, & van Leeuwen, 2011). A l’âge adulte, on retrouve l’importance de cette mimicry car e lle permet de relier les personnes entre elles. Les recherches ont montré que le fait d’avoir été « mimiqué » va augmenter les comportements prosociaux pour la suite (Ashton–James, van Baaren, Chartrand, Decety, & Karremans, 2007), les comportements aidants ou généreux (van Baaren, Holland, Kawakami, & van Knippenberg, 2004) et favoriser le lien social. Même si empathie et contagion sont des concepts différents, ils ont des liens importants entre eux puisque c’est grâce à l’un que l’autre peut voir le jour. Carr et al (cité par Hojat, 2007) ont montré que les personnes qui avaient une empathie haute montre nt plus de « mimicry » inconsciente des expressions faciales et des postures corporelles de l’autre personne. Par contre il est important que cette « mimicry » reste inconsciente car si cela est perçu cela est très désagréable pour la personne imitée.

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17 2.2.4 L’empathie, un phénomène humain et automatique ?

La capacité à ressentir les émotions des autres congénères, de les communiquer et d’y réagir de manière appropriée a procuré aux cours de l’évolution des avantages sélectifs à l’homme mais elle n’est pas le propre de l’homme. Ces composantes nécessaires au développement de l’empathie sont présentes également dans de nombreuses espèces animales. Darwin (1872/1998) décrivait déjà des processus émotionnels chez son chien. Sans tomber dans le piège de l’anthropomorphisme (attribution de caractéristiques spécifiquement humaines aux animaux), de nombreuses observations de comportements « empathiques » ont été observés chez l’animal lorsqu’il partage la souffrance d’un congénère, qu’il a des comportements altruistes (Preston & de Waal, 2002; Servais, 2004) ou qu’il se reconnait dans un miroir (Reiss et Marino cité par Decety, 2004). Cependant, malgré la capacité des primates non humains à percevoir et à exprimer les émotions de leurs congénères, cela n’implique pas forcément le fait de percevoir soi et autrui comme des êtres qui agissent en fonction d’états mentaux (intentions, croyances), ce qui semble être le propre de l’homme. Cette capacité à pouvoir prendre la perspective subjective de l’autre et de s’identifier à lui semble manquer aux autres espèces alors qu’elle se développe rapidement chez l’enfant.

Est-ce que le fait de percevoir des émotions chez l’autre provoque automatiquement notre empathie ? Certaines études en neurosciences ont montré qu’il suffisait de regarder son conjoint ou une autre personne pour avoir une réponse empathique, c’est-à-dire selon les auteurs, pour avoir une activation des réseaux neuronaux communs (Decety, Chaminade, Grezes, & Meltzoff, 2002; Decety & Lamm, 2007). Ces résultats ainsi que la présence d’une certaine forme d’empathie chez l’animal nous ont amené à penser que l’empathie était un phénomène automatique. De nombreuses études ont cherché à tester l’empathie à travers la réaction d’une personne à la souffrance de l’autre (Avenanti, Bueti, Galati, & Aglioti, 2005;

Cheng et al., 2007; Goubert et al., 2005; Jackson, Meltzoff, & Decety, 2005). Nous n’allons pas entrer dans le détail de ces études et des zones du cerveau impliquées dans ces mécanismes mais nous aimerions relever que ces études montrent que nous réagissons à la douleur des autres en activant les mêmes neurones dans le cerveau que ceux qui sont activés lorsque nous souffrons. Ce phénomène s’explique par la découverte par Rizzolatti (Caggiano et al., 2012) des neurones miroirs. Le fait que ces neurones s’activent lorsque nous voyons une autre personne dans une situation difficile laisse entendre que ce mécanisme est automatique et apparaît à chaque fois.

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18 En revanche, des études récentes (Cheng, Tzeng, Decety, Imada, & Hsieh, 2006; de Vignemont & Singer, 2006; Hein & Singer, 2008; Singer et al., 2006) ont montré que l’on réagissait bien à la souffrance de l’autre mais pas dans toutes les situations. La réponse empathique peut en effet dépendre du lien que nous avons avec la personne en souffrance.

Singer et collaborateurs (2006) ont montré que les réponses empathiques, des hommes notamment, étaient influencées par les interactions préalables entre partenaire. Si ce partenaire a été injuste avec nous, nous ne serons pas forcément empathiques avec lui lorsqu’il recevra un choc électrique. Les résultats montrent que nous sommes influencés par ce qui se passe avant et que l’empathie serait donc conditionnelle. Dans la même ligne, une recherche a montré que l’activité des neurones miroirs pouvait être modulée par le fait d’avoir faim ou non (Cheng et al., 2006).

Nous l’avons vu dans cette partie, le fait de réagir aux émotions de l’autre mais également à sa souffrance n’est donc pas le propre de l’homme et n’est pas non plus forcément une réaction automatique. Il peut être parfois difficile de se mettre à la place de l’autre, notamment lorsque nous ne vivons ou n’avons pas vécu les mêmes expériences (de Vignemont & Singer, 2006).

2.2.5 Les mesures

Plusieurs questionnaires ainsi que des grilles d’évaluation ont été créés afin de mesurer l’empathie (Bohart, 2001). De même que, comme nous l’avons vu plus haut, il n’y a pas de définition unique de l’empathie, elle peut se mesurer de différentes façons : par un observateur externe, par le client ainsi que par le thérapeute. La plupart des mesures que nous avons trouvées sont des mesures auto-rapportées et qui voient l’empathie plutôt comme un trait. Nous allons en développer quelques-unes et en citer d’autres.

De nombreux questionnaires ont pris en compte l’aspect multidimensionnel de l’empathie et mesurent l’empathie par mesures auto-rapportées dont celui de Davis (1983) avec son échelle à quatre dimensions ; prise de perspective, imagination (fantasy), empathic concern et anxiété propre (self-distress) ou celui de Baron-Cohen (Baron-Cohen & Wheelwright, 2004) avec ses trois facteurs : l’empathie cognitive, la réactivité émotionnelle et les compétences sociales.

Jolliffe et Farrington (2006) proposent un questionnaire qui prend en compte la dimension affective et cognitive de l’empathie en 20 items. Hogan (Hogan, 1969) a développé une échelle inspirée d’autres pour mesurer l’empathie selon une conception morale.

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19 Mehrabian (Mehrabian & Epstein, 1972) s’est concentré sur l’aspect émotionnel de l’empathie avec l’idée qu’une personne avec un haut score d’empathie émotionnelle aurait moins tendance à avoir des co mportements agressifs et serait plus à même d’avoir des comportements d’aide. Miller décrit des situations et demande aux participants d’écrire ce qu’ils auraient aimé dire à ces personnes (Helpful Responses Questionnaire) (Miller, Hedrick,

& Orlofsky, 1991).

D’autres questionnaires, comme le Relationship Inventory (Barrett-Lennard, 1962) mesurent l’empathie du point de vue du thérapeute et se basent sur l’idée que l’empathie est plus un état vécu par le thérapeute pour son client. L’auteur parle de résonnance empathique qui est une manière d’expérimenter ce qui est ressenti, dit, pensé par le client et qui suscite chez le thérapeute une sorte de sentiment corporellement ressenti (« bodily felt sense »).

D’autres encore utilisent le point de vue de l’observateur pour mesurer l’empathie comme Bozarth (1997), selon qui nous pouvons observer également les réponses du thérapeute. Les réponses empathiques sont celles qui capturent le champ de référence interne du client. Il est important de regarder aussi si les reformulations sont adéquates, c’est-à-dire qu’elles reflètent bien ce que le client ressent ou pense. Ickes (Hall & Schmid Mast, 2007; Ickes, 1997;

Marangoni, Garcia, Ickes, & Teng, 1995 ) n’utilise pas un observateur externe mais demande à des intervenants d’une interaction de dire ce qu’ils ont ressenti à tel ou tel moment. Il demande ensuite à l’autre partenaire de l’interaction de dire ce qu’il pense que le partenaire ressent ou pense à ce moment- là. Il étend ainsi la définition de « empathic accuracy » proposée par Rogers et la définit comme le degré avec lequel une personne est capable d’inférer de manière adéquate le contenu spécifique des pensées et sentiments successifs d’une autre personne (Ickes, 2011). Hall et Schmid Mast (2007) ont montré que c’est d’abord le verbal qui contribue le plus à la justesse de l’inférence, « l’accuracy ». Viennent ensuite les indices non verbaux vocaux et finalement les indices non verbaux visuels.

2.2.6 Résultats de la recherche

Nous l’avons vu dans le chapitre sur la relation d’aide, de nombreuses recherches ont montré l’importance de certaines conditions, dont notamment l’empathie, pour l’issue du lien thérapeutique et nous n’allons par les redévelopper ici. Nous souhaitons juste en rajouter quelques-unes spécifiques à l’empathie.

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20 Lafferty (Lafferty, Beutler, & Crago, 1989) montre que les thérapeutes qui sont le moins efficaces dans le traitement avec leurs patients sont ceux qui ont un niveau plus bas de compréhension empathique.

Orlinsky (cité par Bohart & Greenberg, 1997b) a montré que 54% des 115 recherches examinées montrent une relation positive entre l’empathie et l’issue positive de la thérapie et que ce chiffre passait à 72% lorsque l’empathie était mesurée par la perception du client. De nombreuses études, comme celles de Sachse en 1990, de Burne et Nolen-Hoeksema en 1991, de Elliott et al en 1991, Greenberg et Watson en 1997 ou Vaillant en 1994 citées par Bohart et Greenberg (1997b), montrent les bénéfices de l’empathie.

Bohart (cité par C.R. Rogers, 1957) a montré que les réponses empathiques ne devaient pas forcément rester dans l’ici et le maintenant mais que si celles-ci étaient orientées vers le futur elles permettaient d’augmenter le sentiment de pouvoir d’action et d’efficacité dans la résolution des problèmes du client.

La plupart des études se sont intéressées à l’empathie dans son aspect trait de personnalité et ont montrés des différences de genre en faveur des femmes (Eisenberg & Lennon, 1983;

Thomas & Maio, 2008). D’autres auteurs estiment que cette différence relève plutôt d’une différence de motivation plutôt que d’autre chose (Ickes, Gesn, & Graham, 2000; Klein &

Hodges, 2001; Rueckert & Naybar, 2008).

Bohart et Greeberg (1997a), à travers l’étude de nombreuses recherches, évoquent deux fonctions principales de l’empathie. La première concerne la relation dans laquelle l’empathie promeut le sentiment de sécurité, baisse les résistances, peut enlever la peur et le déni, augmente la confiance des clients dans le fait que le thérapeute peut leur offrir une relation coopérative et permet une rencontre mutuelle. La deuxième fonction concerne le client pour lequel l’empathie développe la compréhension de soi et la facilité à parler de son histoire, favorise l’ouverture aux expériences intra personnelles, permet d’accéder à des expériences plus profondes et augmente la perception de contrôle de la situation. Elle augmente l’acceptation de soi, la congruence et l’harmonie personnelle en baissant notamment l’autocritique et le sentiment de honte. Le fait d’avoir expérimenté l’empathie du thérapeute permet de développer une empathie pour soi- même, une exploration de soi- même et une ouverture à l’expérience. La personne va pouvoir confronter elle-même ses idées et gérer mieux le stress qu’un conflit entre la situation actuelle et ses valeurs peut provoquer. Cela va également favoriser sa propre empathie envers les autres.

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21 Bien que Bohart et Greenberg (1997b) attirent l’attention sur le fait que les premières recherches sur l’empathie ont montré des résultats très encourageants qui par la suite n’ont pas toujours été confirmés, la majorité des recherches démontrent l’importance de l’empathie dans la relation d’aide.

2.2.7 L’empathie de première intention

Les recherches citées plus haut montrent l’importance de l’empathie sur la suite de la relation entre aidant et aidé. La première demande n’est pas toujours la demande réelle et il faut parfois un peu de temps avant qu’elle n’émerge. Le fait d’écouter avec attention, de reformuler de façon adéquate peut inviter la personne à s’écouter mieux et à identifier sa demande réelle (Artaud, 2006). Ces dernières années, la recherche sur l’alliance thérapeutique a supplée la recherche sur l’empathie. L’alliance thérapeutique est définie par (Bohart &

Greenberg, 1997b) comme l’établissement d’un lien entre le thérapeute et le patient et un accord entre eux sur les buts à donner à la thérapie. Une étude de Bachelor (Bachelor, 2013) montre que les clients voient l’alliance thérapeutique comme six composantes de base qui sont une relation de travail collaborative, un travail productif, un engagement actif, un lien, un non-désaccord sur les buts / tâches et un progrès confiant. Deux méta-analyses importantes ont montrés que l’alliance thérapeutique était associée avec une issue clinique positive (Horvath & Symonds, 1991; Martin, Garske, & Davis, 2000). Nous nous sommes interrogés sur ce qui va donner envie à la personne de revenir pour une deuxième séance. Certaines études (Corso et al., 2012) montrent qu’il peut exister une alliance thérapeutique forte dès la première séance. Selon la définition cités plus haut, l’alliance thérapeutique serait un lien qui se construit et se renforce généralement au fil des séances car il s’agit également d’un accord sur les buts de la thérapie. Nous pensons que l’empathie est essentielle à l’établissement de ce lien lors de la première séance et permettra ensuite de construire une alliance thérapeutique forte. En sécurisant les rapports (Bohart & Greenberg, 1997b)b mais également en permettant à la personne de se sentir entendu et compris, ce qui va l’amener à avoir envie de continuer la relation avec le thérapeute. Rogers (C.R. Rogers, 1942/2005, 1961/2005) ne fait que peu de distinction entre la psychothérapie et la relation d’aide si ce n’est sur l’aspect de la longueur et de la profondeur de la réorganisation de la personnalité. Pour le reste, selon l’auteur, les mêmes mécanismes sont en jeu et les mêmes critères doivent être réunis pour la réussite de cette relation. Dans un article de réflexion personnelle sur l’empathie (C. R. Rogers, 1975), il suggère que le degré d’empathie entre un thérapeute et son patient peut se déterminer dans les 5 premières séances et pense que cela peut même apparaître dès le deuxième entretien.

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22 Une étude (Haynal- Reymond, 2014) va plus loin dans cette idée en démontrant que l’empathie de l’intervenant lors du premier entretien va avoir une influence sur le fait que la patiente revienne au deuxième rendez- vous. Cette étude a été effectuée sur des patientes souffrant de paresthésies buccales médicalement inexpliquées et qui avaient déjà rencontrés plusieurs médecins pour cette problématique. Dans le cadre de cette recherche les patientes étaient reçues par un binôme médecin – psychologue. Lorsque ce binôme montre de l’empathie dans cette première consultation, il y a moins de drop out que si ce binôme n’est pas jugé comme empathique. Ces différentes études et réflexions nous montrent l’importance de l’empathie dès le premier contact.

2.2.8 L’empathie : un phénomène à plusieurs composantes

Malgré les divergences de point de vue sur la définition de l’empathie, on peut dire que la plupart des auteurs à l’heure actuelle s’accordent à dire que l’empathie n’est pas une chose unique et qu’elle peut avoir au moins une composante affective et cognitive (Duan & Hill, 1996). Les liens existant entre l’empathie cognitive et l’empathie affective n’ont pas encore été bien démontrés jusqu’alors.

Le modèle de l’empathie développé par Decety (2005) intègre ces différentes composantes de l’empathie qui la distingue de la contagion émotionnelle. Pour Decety (2004), l’empathie ne comprend pas uniquement une réponse affective déclenchée par l’état émotionnel d’une autre personne, elle comprend également une reconnaissance et une compréhensio n minimale des états mentaux de la personne. L’empathie contient plusieurs composantes comme le partage affectif, la flexibilité mentale, la conscience de soi ainsi que la régulation émotionnelle (Decety, 2005). Ces composantes interagissent entre elles mais aucune ne peut à elle seule rendre compte de ce phénomène complexe qu’est l’empathie. Ce modèle est compatible à la fois avec les théories qui voient l’empathie comme une capacité innée et avec celles qui pensent que c’est une compétence acquise.

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