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Fondements biologiques de l'obligation alimentaire de l'État en droit international

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Texte intégral

(1)

Fondements biologiques de l’obligation alimentaire

de l’État en droit international

Thèse

Kader Léonide Modou

Doctorat en droit

Docteur en droit (LL.D.)

Québec, Canada

(2)

Fondements biologiques de l’obligation alimentaire

de l’État en droit international

Thèse

Kader Léonide Modou

Sous la direction de :

Geneviève Parent, directrice de recherche

André Bélanger, codirecteur de recherche

(3)

iii

Résumé

Cette thèse questionne l’adaptation du droit au fait alimentaire pour nous enseigner sur la nature de l’obligation alimentaire de l’État en droit international. Ce faisant, elle propose une relecture de l’article 11 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) qui prévoit un droit à un niveau de vie suffisant, notamment pour l’alimentation, et le droit d’être à l’abri de la faim. L’argumentation se construit en faisant appel à l’interdisciplinarité et à différents domaines du droit, dont le droit civil, pour faire ressortir ce que l’article 11 du PIDESC recèle de profondément ancien et de permanent sans toutefois perdre de vue sa nécessaire adaptation aux problèmes sociaux dans un contexte de mondialisation.

(4)

iv

Abstract

This thesis addresses the adaptation of the law to alimentation to teach us about the nature of State maintenance obligation under international law. Thereby, it suggests a review of Article 11 of International Covenant on Economic, Social and Cultural Rights (ICESCR), which provides for a right to adequate standards of living, especially for alimentation, and the freedom from hunger. The argument is built on interdisciplinarity and different areas of law, including civil law, to emphasize what Article 11 of ICESCR holds as deeply ancient and permanent information without loosing sight of its necessary adaptation to social problems in a globalization context.

(5)

v

Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... iv

Table des matières ... v

Liste des tableaux et figures ... xiii

Sigles et abréviations ... xiv

Dédicaces ... xix

Remerciements ... xx

Introduction ... 1

i. Le risque comme indice de rationalité rapportée à l’histoire ... 12

ii. La subsistance comme indice de rationalité rapportée à l’histoire des sociétés et des peuples ... 16

a. L’idée d’équilibre entre les besoins et les moyens ... 20

b. La subsistance et le développement durable ... 24

c. La subsistance et l’identité ... 26

Partie I. La problématique du changement et de la permanence : fondements biologiques . 34 Chapitre 1. La théorie de l’émergence comme fondement biologique de la problématique du changement et de la permanence ... 37

1.1. L’État providence comme totalité émergente ... 41

1.1.1. L’émergence de l’État providence ... 41

1.1.1.1. L’émergence de l’État providence à partir d’une conception nominalisme du pouvoir ... 41

1.1.1.2. L’émergence de l’État providence à partir d’une analyse des transformations sociales impliquant l’État et le droit ... 42

1.1.1.3. L’émergence de l’État providence en considération du concept de « norme » ... 44

1.1.1.4. L’émergence de l’État providence et l’individualisation de l’histoire ... 45

1.1.2. La construction du modèle assurantiel de l’État providence ... 46

1.1.2.1. Du « local au global » : de la responsabilité sociale de l’entreprise à l’État providence ... 46

1.1.2.2. La prévention des risques ... 48

1.1.3. L’insécurité alimentaire : la montée de l’impératif de protection de la santé publique ... 50

(6)

vi

1.1.3.2. L’hypothèse du « risque de développement » : le principe de précaution et la responsabilité des producteurs agroalimentaires du fait des produits défectueux

... 52

1.2. Application des propriétés de l’émergence à l’adaptation du droit international .. 54

1.2.1. La fragmentation du système international ... 54

1.2.1.1. L’inscription du conflit dans le droit ... 55

1.2.1.2. La thèse limitée de l’autonomie d’un système ... 60

1.2.2. La fonction d’ordre du droit dans un système social fragmenté ... 66

1.2.2.1. Le nouvel « ordre social » ... 66

1.2.2.1.1. Les bases juridiques de l’interdépendance et les réflexions éthico-sociales sur l’évolution du droit international ... 67

1.2.2.1.2. La contribution de la notion de nécessité à la compréhension de l’ordre social international dans un contexte d’interdépendance complexe ... 70

1.2.2.2. L’ordre de la négociation permanente : le passage du contrat au consensus ... 76

1.2.2.2.1. Le point de vue du consensus ... 76

1.2.2.2.2. Le politique comme échangeur universel : le linkage ... 79

1.2.2.2.3. La fonction d’ordre de la norme dans un système social autopoïétique ... 84

Chapitre 2. L’interactionnisme comme fondement biologique de la problématique du changement et de la permanence ... 90

2.1. Les fondements biologiques d’un droit humain universel ... 92

2.1.1. La dialectique de la liberté et de la nécessité ... 92

2.1.2. Le fonctionnement courant d’équilibre des sociétés et des peuples ... 94

2.1.2.1. Le fonctionnement courant d’équilibre des sociétés et des peuples : la subsistance comme indice de rationalité ... 94

2.1.2.2. Le fonctionnement courant d’équilibre des sociétés et des peuples : la temporalité de la subsistance comme indice de rationalité ... 97

2.1.2.2.1. Une temporalité sans rupture radicale s’exprimant dans le « droit à la vie » ... 97

2.1.2.2.2. Une temporalité sans rupture traduisant la capacité à durer de l’organisme ou du sujet humain ... 101

2.2. Le dépassement des bornes du droit civil en matière d’aliments ... 108

2.2.1. Les fondements du dépassement des bornes du droit civil en matière d’aliments ... 108

(7)

vii

2.2.1.1. Du besoin alimentaire au droit naturel aux aliments ... 108

2.2.1.2. La subversion de l’état de nécessité dans le passage du besoin alimentaire au droit naturel aux aliments ... 114

2.2.1.3. L’influence de la querelle des universaux ... 118

2.2.1.4. Les fondements du dépassement des bornes du droit civil en matière d’aliments à travers la pauvreté volontaire d’un ordre religieux ... 119

2.2.2. Des fondements questionnant la fragmentation du système juridique ... 128

2.2.2.1. La responsabilité des acteurs du système juridique dans la division historique des droits de l’homme ... 128

2.2.2.2. Définition des trois termes de la relation de droit portée à l’universel dans une perspective de sécurité humaine ... 134

2.2.2.2.1. Le sujet est formellement universel ... 134

2.2.2.2.2. L’objet du droit aux aliments revêt une nécessité fondamentale, du fait de son adéquation à ce qui dans le sujet est universel ... 134

2.2.2.2.3. Le débiteur est en principe universel ... 136

2.2.2.3. L’approche systémique de l’adaptation du droit ... 140

Conclusion de la première partie ... 144

Partie II. Interprétation d’inspiration biologique de l’article 11 du PIDESC ... 148

Chapitre 3. Le paragraphe 1 de l’article 11 du PIDESC : le genre aliments ... 150

3.1. Le niveau de vie : « droit-besoin » ou objectif politique? ... 152

3.1.1. Le niveau de vie dans les textes : du travail (particulier) au besoin (universel)? ... 152

3.1.2. La dynamique du niveau de vie (et son rapport au travail et au besoin) ... 162

3.1.2.1. La dynamique du niveau de vie sous les traits d’une lutte ... 162

3.1.2.1.1. La dynamique du niveau de vie sous les traits d’une lutte divisant « l’intérêt général contre lui-même » ... 162

3.1.2.1.2. Vers une disparition des droits sociaux? ... 167

3.1.2.1.3. La dynamique du niveau de vie dans l’« État social actif » : une nouvelle réduction des droits sociaux? ... 169

3.1.2.2. La dynamique du niveau de vie ordonnée dans la perspective onusienne à l’idéal de la libération du besoin ... 176

3.1.2.2.1. Le PNUD et le niveau de vie ... 177

3.1.2.2.2. Le besoin et son rapport au niveau de vie : constructivisme et naturalisme ... 180

(8)

viii

3.2.1. L’obligation alimentaire : du droit romain au droit à un niveau de vie ... 183

3.2.1.1. L’obligation alimentaire avant l’apparition du concept des droits de l’homme ... 183

3.2.1.2. La pénétration de l’obligation alimentaire par les droits de l’homme .... 185

3.2.2. Les éléments constitutifs du niveau de vie et les aliments en droit ... 190

3.2.2.1. La définition des aliments en droit : origine et évolution ... 191

3.2.2.2. Les aliments comme abstraction monétaire ... 194

Chapitre 4. Le paragraphe 2 de l’article 11 du PIDESC : la nourriture comme espèce du genre aliments ... 197

4.1. Les « mesures nécessaires » en vertu du parag. 2 de l’article 11 du PIDESC et les interactions entre les domaines du droit international ... 199

4.1.1. Les instruments légitimant les mesures à prendre au titre du parag. 2 de l’art. 11, al. a) et b) du PIDESC ... 199

4.1.1.1. La Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification .. 199

4.1.1.2. L’Accord sur l’agriculture ... 203

4.1.2. Les « mesures nécessaires » selon l’ORD de l’OMC ... 206

4.1.2.1. Le « nécessaire » comme lien entre moyens et fin ... 207

4.1.2.2. Le jugement des mesures nécessaire par l’ORD ... 212

4.1.2.2.1. Limites de l’état de nécessité tel que défini dans le Projet d’articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite ... 212

4.1.2.2.2. Le « test de nécessité » comme moyen de contrôle des justifications des « mesures nécessaires » et d’équilibre des intérêts ... 219

4.1.3. Le potentiel du parag. 2 de l’article 11 du PIDESC quant à l’émergence d’une exception de sécurité alimentaire dans les règles commerciales ... 225

4.1.3.1. La constance des contradictions dans l’évolution du traitement international de l’agriculture ... 226

4.1.3.2. La prise en compte de la situation des pays en développement dans l’émergence d’une exception de sécurité alimentaire : la notion de « besoin des États en développement » ... 235

4.1.3.3.1. Le commerce et le développement comme contradiction dans le traitement international de l’agriculture ... 235

4.1.3.3.2. Le potentiel de la notion de besoin des pays en développement à la lumière de l’« idée de faveur » ... 237

4.2. L’actualisation des mesures nécessaires en vertu du parag. 2 de l’art. 11 du PIDESC dans le contexte de la sécurité alimentaire mondiale durable ... 246

(9)

ix

4.2.1. La Conférence mondiale de l’alimentation de 1974 et l’actualisation du parag. 2 de l’art. 11 du PIDESC ... 247 4.2.2. Le Sommet mondial de l’alimentation de 1996 et l’actualisation du parag. 2 de l’art. 11 du PIDESC ... 251 4.2.3. Les conférences ministérielles de l’OMC et l’actualisation du parag. 2 de l’art. 11 du PIDESC ... 255 Conclusion de la deuxième partie ... 258 Partie III. L’obligation alimentaire de l’État : mise en perspective dans l’ordre onusien des droits de l’homme ... 261

Chapitre 5. L’obligation alimentaire de l’État dans la catégorie des obligations positives relatives aux droits de l’homme ... 266

5.1. Les catégories d’obligations positives internationales relatives aux droits de

l’homme de Riccardo Pisillo Mazzeschi : évaluation critique ... 267 5.1.1. L’origine des obligations positives de résultat et de due diligence ... 267 5.1.1.1. Leur origine contractuelle ... 267 5.1.1.2. La difficulté de mettre en perspective l’obligation alimentaire de l’État dans le cadre des obligations positives au regard de cette origine contractuelle . 268 5.1.2. Les sources d’inspiration et de comparaison justifiant la catégorie des obligations « à réalisation progressive » ... 271 5.1.2.1. La référence à la théorie constitutionnelle ... 271 5.1.2.1.1. La distinction théorique d’inspiration constitutionnelle entre « normes prescriptives » et « normes programmatiques » ... 271 5.1.2.1.2. La distinction théorique d’inspiration constitutionnelle entre « règles » et « principes » ... 272 5.1.2.2. L’art. 2 du PIDESC comme point de repère principal des obligations à réalisation progressive ... 274

5.1.2.2.1. Le positionnement de l’obligation générale d’agir en vertu de l’art. 2, parag. 1 du PIDESC comme obligation à réalisation progressive ... 275 5.1.2.2.2. Les critères juridiques suivant lesquels l’État doit procéder vers l’objectif préétabli en vertu du parag. 1 de l’art. 2 du PIDESC ... 276 5.2. L’apport de l’« obligation alimentaire légale » à la compréhension de l’obligation positive générale relative aux DESC ... 280

5.2.1. La détermination propre à l’« obligation alimentaire légale » ... 280 5.2.1.1. Les considérations de besoin et des moyens en droit ... 280 5.2.1.2. Les besoins et moyens : leur « identité conceptuelle » dans la

compréhension de la nature spécifique de l’obligation alimentaire ... 283 5.2.2. L’obligation alimentaire comme « obligation fondée sur la réciprocité » .... 286

(10)

x

5.2.2.1. La notion de réciprocité : théorie générale ... 286 5.2.2.2. « Les limites de la réciprocité en droit international » : illustration dans le contexte du conflit commerce/développement au GATT/OMC ... 290 5.2.2.3. La réciprocité comme fondement de l’obligation alimentaire ... 294 Chapitre 6. L’obligation alimentaire de l’État dans les obligations relatives aux moyens de subsistance d’une personne ou d’un peuple ... 298

6.1. La privation des moyens de subsistance et son interdiction en droit international ... 302

6.1.1. Les occurrences textuelles relatives à la privation des moyens de subsistance ... 302

6.1.1.1. Les textes internationaux relatifs aux droits humanitaire et pénal ... 302 6.1.1.2. Les textes internationaux relatifs à l’environnement, au milieu marin et autres ... 304 6.1.2. Les conséquences de droit attachées au fait de privation des moyens de subsistance : le modèle de l’art. 21 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples ... 308

6.1.2.1. L’article premier commun aux deux pactes de 1966 et l’article 21 de la

Charte africaine des droits de l’homme et des peuples : une réponse au besoin réel

de protéger les populations contre la privation de leurs propres moyens de

subsistance ... 309 6.1.2.1.1. L’exclusion de la souveraineté permanente sur les ressources

naturelles des pactes internationaux…mais maintien d’une obligation

(alimentaire) liée à la privation des moyens de subsistance ... 309 6.1.2.1.2. L’apport de l’article 21 de la Charte africaine à la compréhension de l’obligation (alimentaire) liée à la privation des moyens de subsistance ... 311 6.1.2.1.3. L’apport d’autres instruments à la compréhension de l’obligation (alimentaire) liée à la privation relative aux moyens de subsistance ... 317 6.1.2.2. Les conséquences prévues par le parag. 2 de l’art. 21 de la Charte

africaine des droits de l’homme et des peuples en cas de spoliation ... 325

6.1.2.2.1. Le droit du peuple spolié à la légitime récupération de ses biens .... 325 6.1.2.2.2. Le droit du peuple spolié à une indemnisation adéquate ... 329 6.2. La privation des moyens de subsistance du peuple Ogoni : l’affaire Social and

Economic Rights Action Center (SERAC) and Center for Economic and Social Rights (CESR) contre Nigeria ... 332

6.2.1. L’interprétation évolutive des dispositions de la Charte africaine par la Commission ... 332

(11)

xi

6.2.1.1. Les faits retenus par la Commission africaine des droits de l’homme et des

peuples ... 332

6.2.1.2. Le sens nouveau donné à certaines dispositions de la Charte africaine dans la qualification de ces faits ... 335

6.2.2. Les constatations concernant le logement et l’alimentation ... 339

6.2.2.1. La constatation des atteintes aux moyens de subsistance concernant le logement ... 339

6.2.2.2. La constatation des atteintes aux moyens de subsistance concernant l’alimentation ... 339

Conclusion de la troisième partie ... 341

Conclusion générale ... 345

Bibliographie ... 347

I. Législation ... 347

I. 1. Textes internationaux ... 347

Nations Unies et institutions spécialisées ... 347

Commerce international ... 347

Droits de l’homme ... 348

Obligations alimentaires ... 349

Environnement, mer, ressources naturelles, produits primaires et autres ... 349

Droits humanitaire et pénal ... 350

Sécurité alimentaire ... 350

I.2. Textes régionaux et communautaires ... 351

Afrique et autres ... 351

Amérique ... 352

Europe ... 352

Asie ... 352

I.3. Textes nationaux ... 352

Canada ... 352

France ... 353

II. Jurisprudence ... 353

II.1. Internationale (incluant opinion individuelle, dissidente et exposé écrit des États) ... 353

II.2 Régionale et communautaire ... 354

(12)

xii

Amérique ... 354

Europe ... 354

II.3. Jurisprudence nationale ... 354

Canada ... 354

III. Rapports, communications et avis ... 354

Nations Unies ... 354

Canada ... 355

Europe ... 355

France ... 355

IV. Monographies, recueils des cours, dictionnaires et études ... 356

V. Ouvrages collectifs ... 371

VI. Articles de périodiques, actes de colloques et articles de presse ... 380

(13)

xiii

Liste des tableaux et figures

Tableau 1. Fondements biologiques de l’adaptation du droit ... 35 Figure 1. Environnement notionnel externe à l’art. 11 du PIDESC ... 6

(14)

xiv

Sigles et abréviations

AA Accord sur l’agriculture

Accord OTC Accord sur les obstacles techniques au commerce

Accord SPS Accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires

ADPIC Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce

AGCS Accord général sur le commerce des services

AGNU Assemblée générale des Nations Unies

Al. Alinéa

Art. Article

CDB Convention sur la diversité biologique

CDESC Comité des droits économiques, sociaux et culturels

CDI Commission du droit international

CEDH Cour européenne des droits de l’homme

CEPED Centre Français sur la Population et le Développement

CES Conseil économique et social

Charte

africaine Charte africaine des droits de l’homme et des peuples

CHDRIP Centre d’Histoire du Droit et de Recherches Inter-normatives de Picardie

CIDH Convention américaine des droits de l’homme

CIJ Cour internationale justice

CIRDI Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements

Clause NPF Clause de la nation la plus favorisée

(15)

xv

Cour IDH Cour interaméricaine des droits de l’homme

CMB Convention sur le droit de la mer ou Convention de Montego Bay

ComADHP Commission africaine des droits de l’homme et des peuples

CNUCED Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement

CNULCD Convention des Nations Unies sur la lutte contre Désertification de 1994

CPI Cour pénale internationale

CPJI Cour permanente de justice internationale

CSA Comité de la Sécurité Alimentaire

CSRP Commission Sous Régionale des Pêches

CURAPP Centre Universitaire de Recherches Administratives et Politiques de Picardie

DESC Droits économiques, sociaux et culturels

DID Droit international du développement

DUDH Déclaration universelle des droits de l’homme

ECOSOC Conseil économique et social des Nations Unies (United Nations Economic and Social Council)

EDI Études et Documentations Internationales

ESA État social actif

FAO Acronyme anglais désignant l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture

FCPASQ Front Commun des Personnes Assistées Sociales

FNUAP Fonds des Nations unies pour la population

GATT de

1947 Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1947 (General Agreement on Tariffs and Trade 1947) GATT de

1994 Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (General Agreement on Tariffs and Trade de 1994) IBDD Instruments de base et documents divers (série publiée par le GATT)

(16)

xvi IDH Indice de développement humain

ISO Organisation internationale de normalisation

MGS Mesure globale du soutien (dans l’Accord sur l’agriculture)

MOSOP Mouvement pour la survie du peuple Ogoni

MSS Mécanisme de sauvegarde spéciale

NOEI Nouvel ordre économique international

NU Nations Unies

OCDE Organisation de coopération et de développement économique

OCI Organisation de Coopération Islamique

OG Observation Générale

OIC Organisation internationale du commerce

OIE Office international des épizooties

OISA Organisation Islamique pour la Sécurité Alimentaire

OIT Organisation internationale du travail

OMC Organisation mondiale du commerce

OMS Organisation mondiale de la santé

ONU Organisation des Nations Unies

ORD Organe de règlement des différends

ORSTOM Institut Français de Recherche pour le Développement en Coopération

OUA Organisation de l’Unité Africaine

PCH Patrimoine commun de l’humanité

(17)

xvii PED Pays en développement

PF-PIDESC Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels

PIDCP Pacte international relatif aux droits civils et politiques

PIDESC Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels

PMA Pays les moins avancés

PNUD Programme des Nations Unies pour le Développement

PS Produits spéciaux

PSD Pays Sous-Développés

RSE Responsabilité sociale d’entreprise

RPCA Réseau de prévention des crises alimentaires

SDN Société des Nations

SFDI Société Française de Droit International

SGS Sauvegarde spéciale (dans l’Accord sur l’agriculture)

SGP Système généralisé des préférences

SMC Subventions et mesures compensatoires

TIDM Tribunal international du droit de la mer

TIRPGAA Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture

TS Traitement spécial (à l’Annexe 5, Accord sur l’agriculture)

TSD Traitement spécial et différencié (Article 15, Accord sur l’agriculture)

UA Union Africaine

UE Union Européenne

(18)

xviii UNICEF Fonds des Nations unies pour l’enfance

WTO World Trade Organization

(19)

xix

Dédicaces

(20)

xx

Remerciements

Je tiens à remercier toutes les personnes qui m’ont aidé dans la préparation de ce travail. Mes remerciements s’adressent d’abord à mes directeurs, les professeurs Geneviève Parent et André Bélanger. Je remercie la professeure Parent avec qui j’ai beaucoup travaillé du début à la fin de mes études doctorales. C’est une expérience qui m’a fait grandir en recherche et en expertise, particulièrement depuis la création de la Chaire de recherche en droit sur la diversité et la sécurité alimentaires (Chaire DDSA). Je remercie le professeur Bélanger pour nos échanges constructifs et pour m’avoir mis sur la voie d’une perspective qui a grandement contribué à apporter de l’originalité à mon travail. Je vous remercie pour l’intérêt que vous avez bien voulu témoigner à l’égard de mon travail et du temps que vous avez bien voulu me consacrer. Je n’oublie pas le professeur Pierre Issalys pour ses conseils de lecture. Je remercie la Faculté de droit pour m’avoir admis aux études doctorales à l’Université Laval et pour son aide financière aux étudiants. Je remercie également le Centre d’étude en droit économique (CEDE) qui m’a offert un cadre de travail dans un local où j’ai socialisé avec mes collègues au doctorat, à la maitrise et au baccalauréat. Enfin, merci du fond du coeur à ceux et celles qui m’ont apporté leur soutien moral et leur aide au cours de cette étude.

(21)

Introduction

Le fait alimentaire, dans l’histoire des sociétés et des peuples1, est d’abord relatif à un

besoin pour ou contre lequel la volonté humaine ne peut rien parce qu’il est naturel et contraint tout être vivant à faire quelque chose pour le satisfaire2. La qualification

d’« aliment » de quelque chose qui est l’objet d’une appropriation s’inscrit dans une dialectique sujet-objet, liberté-nécessité3 qui cette phrase résume bien : « le fruit que je

cueille pour le manger devient aliment en répondant à mon besoin alimentaire4 ». La

nourriture, le logement et le vêtement forment le noyau dur des aliments en droit, qui, par abstraction, embrassent tout ce qui est nécessaire à l’existence humaine5. En vertu de cette

abstraction, la nourriture ne serait qu’une espèce du genre aliments en utilisant une classification d’inspiration biologique.

La satisfaction du besoin alimentaire souligne la dépendance à l’égard de la nature et à l’égard de l’autre. Cette dépendance est présente au début de l’existence humaine, au

1 Fernand Braudel, « Histoire de la vie matérielle : bulletin n° 2 », Annales. Histoire, Sciences Sociales, 16e année, no 4, 1961, pp. 725-753.

2 Jean-Pierre Baud, « Préface », dans Christophe Meyer, Le système doctrinal des aliments : contribution à la théorie générale de l’obligation alimentaire légale, Bern, Peter Lang, 2006, p. ix et s.

3 Simone Goyard-Fabre, « La chose dans “La prose de la vie” selon Hegel » (1979) 24 Archives de Philosophie du droit 173, 175.

4 Simone Goyard-Fabre, Les fondements de l’ordre juridique, Paris, P.U.F., 1992, p. 278; Christophe Meyer, Le système doctrinal des aliments : contribution à la théorie générale de l’obligation alimentaire légale, Bern, Peter Lang, 2006, p. 34 : « […] il n’est en notre matière de besoin qu’alimentaire, qu’énumérer les “les besoins” ne peut donc aboutir qu’à dresser la liste des besoins “d’aliments”, donc des aliments matériels – renforcé par le sous-entendu : “les aliments” qui correspondent à ces besoins. »

5 Lucien Jeny, De l’obligation alimentaire entre parents et alliés dans l’ancienne Rome et en droit français, Paris/Nancy, Ernest Thorin/N. Collin, 1876, p. 5; Rolland de Villargues (dir.), Dictionnaire du droit civil, commercial et criminel, 4e éd., tome premier, Bruxelles, Bruylant-Christophe, 1889, p. 270 : « ALIMENTS. Cette expression comprend tout ce qui est nécessaire à la vie, savoir : la nourriture, le logement, le vêtement. » Cette définition de Rolland de Villargues est citée dans l’affaire Greenshields et al. v. Duhamel, Hull (county of Ottawa), March 27, 1888 publié dans Legal News (1888) 11 249, 250. Voir aussi M Rivière (dir.), Pandectes françaises : nouveau répertoire de doctrine, de législation et de jurisprudence, tome 6, Paris, Chevalier-Marescq, 1889, p. 134 : « Le mot aliments n’a pas, dans le langage de la loi, le même sens que dans le langage usuel. Par aliments, il faut entendre tout ce qui est nécessaire à la vie : la nourriture, le logement, le vêtement. C’est là la traduction de la définition que donnaient déjà les jurisconsultes romains : Legatis alimentis cibaria et vestitus et habitatio debebitur, quia sine his corpus ali non potest. » Et Renée Joyal, « Les obligations alimentaires familiales et les enfants : de l’exclusion horizontale à l’exclusion verticale » (1999) 33 R.J.T. 327, 332 : « […] la notion d’aliments. Il s’agit, selon la doctrine, des choses nécessaires de la vie : nourriture, logement, vêtement, chauffage, médicaments. » La définition tripartite des « aliments juridiques » ou aliments stricto sensu – nourriture, logement, vêtement, remonte aux jurisconsultes romains. Lato sensu, on inclut notamment l’éducation de l’enfant dans l’« idée alimentaire ». L’idée serait d’alimenter à la fois le corps et l’esprit.

(22)

2

quotidien, et à la vieillesse6. Cette dépendance dans la Cité des besoins7 pose la question

(politique et sociale) de l’« être en groupe8 » pour sa subsistance en général. L’individu

dans un groupe humain est aussi influencé par des règles9 qui concernent, entre autres, la

manière de manger, de se vêtir formant une culture10. L’accès aux aliments dans un système

impliquant ainsi l’autre11 intéresse directement le droit qui peut alors valablement intervenir

par la reconnaissance de droits (naturels, sociaux), souvent à la suite de contestation violente12, ou par l’obligation alimentaire. Les premiers empereurs de la dynastie des

Antonins (96 à 192) sont célèbres pour avoir notamment institué les Alimenta13.

6 Baud, supra note 2 à la p. x.

7 Goyard-Fabre, supra note 4 à la p. 42 : « C’est le besoin […] qui met les hommes en contact les uns avec les autres. Chaque homme est incomplet, ‟non autarcique”; il a besoin de l’autre parce qu’il a besoin d’objets pour survivre et que son effort solitaire ne peut pas le satisfaire. Seul, l’homme ne survivrait pas. C’est donc le besoin qui rapproche l’homme de l’autre homme; il le réunit à l’autre dans un espace géographique donné où se forme une association, une société. Il s’agit certes d’une communauté ‟élémentaire”, qui est encore naturelle et que Platon appelle la cité des besoins. » La nourriture, le logement et le vêtement sont les principaux besoins énoncés dans le dialogue entre Socrate et Adimante [Platon, La République de Platon ou dialogue sur la justice : divisé en dix livres, tome premier, Paris, Humblot, 1765, pp. 94-95].

8 Georges Davy, L’homme, le fait social et le fait politique, Paris-La Haye, Mouton, 1973, p. 11; Adam Fergusson, Essai sur l’histoire de la société civile, Paris, PUF, 1992, p. 4 : « L’homme doit être pris en groupe, ainsi qu’il a toujours vécu ».

9 Baud, supra note 2 à la p. x.

10 Voir Jean-Pierre Poulain (dir.), Le dictionnaire des cultures alimentaires, Paris, PUF, 2002.

11 Baud, supra note 2 : « quand on accepte qu’un individu vive, peut-on le laisser mourir de faim? En d’autres termes, est-il juridiquement correct de mourir de faim, et aussi de froid ou de manque de soins? »

12 Cynthia Bouton, « Les mouvements de subsistance et le problème de l’économie morale sous l’ancien régime et la Révolution française », Annales historiques de la Révolution française, vol. 319, n°1, 2000, p. 73 : « […] étant donné que la faim est une réalité quotidienne mais que la nourriture, comme la terre qui la produit, est bornée en quantité, chacun a droit à une part des ressources limitées de la nature. La reconnaissance générale de droits sociaux sur les objets de première nécessité rendait illégitime tout effort de nier le droit à la subsistance à qui que ce soit et exigeait qu’on secourût ceux qui en avaient besoin. Le refus de suivre ces normes pouvait provoquer et légitimer l’indignation, voire des protestations violentes. » L’apparition en France, vers la fin du XVIe siècle, de l’« expression historique du droit à la subsistance » est l’équivalent de ce que « Thompson appela, pour l’Angleterre, l’économie morale » [Ibid., p. 74] : Edward Palmer Thompson, « L’Économie morale de la foule dans l’Angleterre du XVIIIe siècle », trad. française dans F. Gauthier et G.-R. Ikni (dir.), La Guerre du blé au XVIIIe siècle : la critique populaire contre le libéralisme économique au XVIIIe siècle, Paris, éd. de la Passion, 1988. John Bohstedt, The Politics of Provisions: Food Riots, Moral Economy, and Market transition in England, c. 1550-1850, London/New York, Routledge, 2016, p. 262: « More generally, many societies have recognized a “law of necessity,” a droit de subsistance, that in emergencies gave priority to human survival over individual property rights, an entitlement that paternalists viewed as charity, and consumers as a right. »

13 Achille Laurent, Droit romain de l’assistance publique à Rome, thèse pour le doctorat, Paris, A. Giard, 1889, pp. 43 et s. Voir aussi Marie-Michelle Pagé, Alimenta Italiae, Québec (QC), Presses de l’Université Laval, 2012; Paul Veyne, « Les alimenta de Trajan », dans Les Empereurs romains d’Espagne, Paris, Éd. du Centre national de la recherche scientifique, 1965, pp. 163-179; C. Bossu, « L’objectif de l’institution alimentaire : essai d’évaluation », Latomus, vol. 48, 1989, pp. 372 et s.; Alice M. Ashley, « The “Alimenta”

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3

Le fait alimentaire inclut par ailleurs, dans l’histoire et dans l’actualité, la question Des

subsistances et des moyens de les mettre en équilibre avec la population14, question qui fait

planer les « spectres de Malthus »15. Un chiffre proche d’un milliard d’individus souffrant

de famine est avancé ces dernières années par plusieurs organisations gouvernementales, intergouvernementales et non gouvernementales s’intéressant au problème de la faim et de la malnutrition dans le monde16. Le plus souvent localisée dans plusieurs pays pauvres, elle

gagne aussi du terrain par la pauvreté et le chômage dans les pays riches où la situation rencontre les risques pour la santé et les risques environnementaux généralisés que représentent les orientations résolument techno-scientifiques et commerciales de la production agroalimentaire. Dans le Plan d’action du Sommet mondial de l’alimentation tenu à Rome en 1996, un objectif commun et ultime a été fixé : « une nourriture suffisante pour tous, à tout moment » qui conditionne l’existence de la sécurité alimentaire17. La

sécurité alimentaire s’inscrit dans une nouvelle perspective du développement et de la sécurité dont la référence humaine est liée à l’idéal, commun aux deux pactes internationaux de 1966 et à la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) de 1948, d’une humanité libérée de la peur et du besoin.

L’art. 11 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) est la principale disposition que nous allons questionner par rapport au fait alimentaire. Cette disposition de référence est au cœur de l’évolution des droits économiques, sociaux et culturels (DESC) vers leur justiciabilité dans le contexte du développement durable et de la sécurité alimentaire : directives de l’Organisation mondiale pour l’alimentation et l’agriculture (FAO)18, observations générales19 du Comité des droits

of Nerva and his Successors », English Historical Review, n° 36, 1921, pp. 5-16. Meyer, supra note 4 à la p. 5 : « On le voit bien dans la genèse de l’institution alimentaire : elle remonte directement à un choix plus politique que juridique des Antonins qui, lassés d’épuiser leur trésor en pain en plus des jeux, cherchèrent à se substituer des débiteurs d’aliments privés. »

14 Titre de l’ouvrage de Théodore Grancoin paru en 1850 (Paris, éd. E. Marc-Aurel).

15 Francis Gendreau et les autres, Les Spectres de Malthus : déséquilibres alimentaires, déséquilibres démographiques, Paris, EDI/ORSTOM/CEPED (co-édition), 1991, pp. 105 et s.; Gustave Du Puynode, Des lois du travail et de la population, vol. 2, Paris, Guillaume et Cie, 1860, pp. 305 et s.

16 Dans le contexte des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) et du Sommet mondial de l’alimentation de 1996 concernant l’élimination de la faim, la FAO publie notamment une « carte de la faim dans le monde » [en ligne] : http://www.fao.org/hunger/fr/.

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4

économiques, sociaux et culturels (CDESC), et rapports du Rapporteur spécial sur le droit

à l’alimentation. Et, depuis l’entrée en vigueur le 5 mai 2013 du Protocole facultatif se rapportant au PIDESC (PF-PIDESC), le CDESC peut désormais recevoir des plaintes

individuelles pour violation des droits reconnus par le PIDESC, comme le confirme la Communication individuelle no 2/2014 concernant une violation du droit au logement20.

L’art. 11 du PIDESC se lit comme suit :

Les États parties au présent Pacte reconnaissent le droit de toute personne à un niveau de vie suffisant pour elle-même et sa famille, y compris une nourriture, un vêtement et un logement suffisants, ainsi qu’à une amélioration constante de ses conditions d’existence.

Les États parties au présent Pacte, reconnaissant le droit fondamental qu’a toute personne d’être à l’abri de la faim, adopteront, individuellement et au moyen de la coopération internationale, les mesures nécessaires, y compris des programmes concrets :

a) Pour améliorer les méthodes de production, de conservation et de distribution des denrées alimentaires par la pleine utilisation des connaissances techniques et scientifiques, par la diffusion de principes d’éducation nutritionnelle et par le développement ou la réforme des régimes agraires, de manière à assurer au mieux la mise en valeur et l’utilisation des ressources naturelles;

b) Pour assurer une répartition équitable des ressources alimentaires mondiales par rapport aux besoins, compte tenu des problèmes qui se posent tant aux pays importateurs qu’aux pays exportateurs de denrées alimentaires.

Cet article énonce en deux paragraphes des droits distincts qu’on ne peut réduire à cette expression générique de « droit à l’alimentation » comme instrument par excellence de lutte

18 Entre autres : Directives volontaires à l’appui de la concrétisation progressive du droit à une alimentation adéquate dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale, adoptées à la 127e session du Conseil de la FAO en novembre 2004, FAO, 2005; Les directives sur le droit à l’alimentation : documents d’information et études de cas, FAO, Rome, 2006, [en ligne] : http://www.fao.org/docrep/010/a0511f/a0511f00.htm (consulté le 12 octobre 2016); Principes pour un investissement responsable dans l’agriculture et les systèmes alimentaires, approuvés par le CSA le 15 octobre 2014, [en ligne] : http://www.fao.org/3/a-au866f.pdf

(consulté le 12 octobre 2016); et Les Directives volontaires pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale, 2012, [en ligne] : http://www.fao.org/fileadmin/templates/cfs/Docs1112/VG/VG_Final_FR_May_2012.pdf (consulté le 12 octobre 2016).

19 CDESC, Observation générale 12 : le droit à une nourriture suffisante (art. 11), 20e session, mai 1999, Genève, Doc. NU E/C.12/1999/5.

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contre la faim21. Il suffit en effet de faire une recherche internet pour constater les

occurrences dans les ouvrages, articles, et documents officiels. Or, le même art. 11 parag. 1 est interprété comme « droit au logement » dans l’OG 722 et la Communication no 2/2014

du CDESC, et, en relation avec l’art. 12 relatif à la santé, comme « droit à l’eau » dans l’OG 1523. Selon nous, les termes de l’art. 11 parag.1 ne permettent pas d’isoler le « droit à

la nourriture », le « droit au logement », le « droit au vêtement », et d’y trouver des arguments pour défendre le « droit à l’eau ».Une telle lecture ne peut que créer de la confusion. Quant à l’art. 11 parag. 2, qui porte exclusivement sur la nourriture, il énonce des « mesures nécessaires » que l’OG 12 a à peine abordées dans le contexte de la sécurité alimentaire durable24, mesures qui mobilisent, entre autres, l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC), la Convention sur la diversité biologique, la Convention internationale pour la protection des obtentions végétales (Convention UPOV) et le Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture (TIRPGAA)25 autour de la question de la production

alimentaire26.

21 Voir Christophe Golay, Droit à l’alimentation et accès à la justice, Bruxelles, Bruylant, 2011; Abdoulaye Soma, Droit de l’homme à l’alimentation et sécurité alimentaire en Afrique, Bruylant, Bruxelles, 2010, pp. 90-102.

22 CDESC, Observation générale no 7 (1997) : Le droit à un logement suffisant (art. 11, par. 1, du Pacte): expulsions forcées, 16e session, U.N. Doc. HRI/GEN/1/Rev.7, 2004.

23 CDESC, Observation générale no 15 (2002). Le droit à l’eau (art. 11 et 12 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels), 29e session, UN Doc. E/C.12/2002/11, 2003.

24 Hans Morten Haugen, The Right to Food and the TRIPS Agreement: With a Particular Emphasis on Developing Countries’ Measures for Food Production and Distribution, Leiden/Boston, Martinus Nijhoff Publishers 2007, p. 57: « interpretations have to a large extent ignored the second paragrah of Article 11 ». À la note 26 sur la même page, l’auteur dit la chose suivante à propos de l’OG 12 : « General Comment No. 12 is the most prominent example, as there are only two paragraphs in the whole document which have references to food production (paragraphs 25 and 26, identifying ‘critical issues in regard to all aspects of the food system, including the production, processing, distribution, marketing and consumption of safe food’ and ‘prevent discrimination in access to food or resources for food, including appropriate technology’, respectively). For an in-depth analysis of Article 11.2, see Alston 1984 and Craven 1995. »

25 Ibid., pp. 51 et s.

26 Ibid., p. 5 : « Food production depends on a rich variety of plant genetic resources. There is more information than ever on the state of our agricultural genetic resources and on the responsibility of the human race in their degradation. Moreover, there are detailed studies on how to abolish world hunger. The hunger problem is most acute in developing States. Furthermore, the least-developed countries particularly lack technological capacity for food production, and depend heavily on agriculture.

This study, acknowledging that insufficient food is a result of complex factors, seeks to identify the relationship between protection of intellectual property rights on agricultural inputs, primarily seeds, and human rights obligations of States. » Notre soulignement.

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6

Nous avons donc choisi de questionner l’art. 11 du PIDESC en le situant d’abord dans un environnement notionnel qui le met en relation avec divers instruments juridiques internationaux, régionaux et nationaux.

Figure 1. Environnement notionnel externe à l’art. 11 du PIDESC

L’art. 11 du PIDESC est aussi questionné quant aux obligations internationales dans la mesure où c’est dans l’OG 12 portant sur cette disposition que le CDESC développe pour la première fois les catégories d’obligations relatives aux droits de l’homme. Il s’agit des obligations de respecter, de protéger et de réaliser au droit à une nourriture suffisante27. Ces

catégories remontent à la proposition initiale du philosophe juriste américain Henry Shue28

qui sera ensuite reprise et développée par Asbjørn Eide. Ce dernier est connu pour ses travaux sur le droit à l’alimentation dans le cadre de la Commission des droits de l’homme des Nations Unies29. Selon Riccardo Pisillo Mazzeschi, le mérite de cette théorie des

obligations relatives aux droits de l’homme « réside dans le fait d’avoir clarifié que chaque

27 L’obligation de réaliser comporte trois sous-niveaux que d’autres auteurs considèrent cependant comme des catégories à part entière. D’autres distinguent donc quatre, cinq voire six catégories d’obligations, en ajoutant notamment l’obligation de promouvoir.

28 Henry Shue, Basic Rights: Subsistence, Affluence, and U.S. Foreign Policy, Princeton, 1980, pp. 52-53. 29 Créée en 1946, cette Commission a été remplacée par le Conseil des droits de l’homme en 2006. Après lui comme Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation (1992, puis 1998), il y a eu Jean Ziegler (Suisse), de 2000 à 2008, et Olivier De Schutter (Belgique), de 2008 à 2014.

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7

droit humain peut imposer un spectre d’obligations de nature différente, et donc que la

conduite de l’État, notamment dans l’optique de la responsabilité, doit être évaluée sur la base de chaque obligation spécifique qui a été violée.30 » Il reproche toutefois à cette

théorie, entre autres, de placer « la matière des droits de l’homme en position d’isolement par rapport aux autres secteurs du droit international et à la théorie générale du droit31 ».

Cette critique introduit la fragmentation du droit international32 parmi les termes du

problème à aborder.

La cohérence interne et externe de l’art. 11 du PIDESC sera enfin située dans une trajectoire qui l’interroge finalement au regard d’autres développements juridiques pertinents en matière alimentaire avant et après l’émergence des DESC. La Convention des

Nations Unies sur le recouvrement des aliments à l’étranger de 1956 est l’un des

instruments qui nous a amené à une densification de la recherche autour de l’art. 11 soulèvant plusieurs questions de départ. Dans le cadre de cette convention onusienne, la Colombie a notifié la définition suivante des aliments extraite de ses textes en vigueur :

Par aliments, on entend tout ce qui est indispensable pour la subsistance, le logement, l’habillement, l’assistance médicale, les loisirs, la formation et l’éducation ou l’instruction de l’enfant. Par aliments, on entend également l’obligation d’assurer à la mère les dépenses relatives à la grossesse et à l’accouchement (art. 133 du décret 2737 de 1989, Code des enfants).

30 Riccardo Pisillo Mazzeschi « Responsabilité de l’État pour violation des obligations positives relatives aux droits de l’homme », Académie de droit international de La Haye, Recueil des cours, t. 333, 2008, p. 247. Soulignement de l’auteur.

31 Ibid., p. 248.

32 Alain Pellet, « Note sur la “fragmentation” du droit international : droit des investissements internationaux etdroits de l’homme », dans Denis Alland et les autres (dir.), Unité et diversité du droit international, Leiden/Boston, Martinus Nijhoff Publishers, 2014. A la page 758 l’auteur est d’avis que, si la fragmentation existe, y compris en matière des droits de l’homme, « elle se trouve davantage dans l’esprit des juristes, qu’ils soient enseignants, chercheurs ou praticiens, qui, à cause de cette complexification et de cette extension du droit international, se spécialisent à l’excès dans un domaine particulier - soit par paresse intellectuelle […] par goût […] Ils ne sont plus “juristes de droit international”, mais “droits-de-l’hommistes”, “environnementalistes”, “investissementistes”, voire “droit-de-la-meristes”, lorsqu’ils ne se posent pas eux-mêmes en tant que spécialistes du plateau continental, des droits culturels, ou de la conservation des rhinocéros blancs. Le droit international n’est pas fragmenté – ou plutôt, s’il se fragmente, c’est surtout parce que les universitaires et les praticiens en traitent de manière fragmentée. »

(28)

8

Tout enfant a droit à la protection, aux soins et à l’assistance nécessaire pour parvenir à un développement physique, mental, moral et social adéquat, ces droits étant reconnus dès la conception (art. 30 du décret 2737 de 1989, Code des enfants). 33

La perspective d’une contribution originale de notre recherche est alors inspirée par un questionnement sur l’existence d’un lien entre la qualification alimentaire des besoins en droit civil et les DESC. Relativement à ce questionnement initial, nous postulons que le droit interne (civil, social, public) et le droit international ne s’opposent pas sur la qualification alimentaire des nécessités vitales de l’existence humaine.

La perspective d’une contribution originale s’appuie sur des pistes ouvertes par une analyse globale de « l’histoire de la construction doctrinale des aliments […] jusqu’au droit contemporain »34. Selon Christophe Meyer, la double raison qui a techniquement rendu

possible une telle analyse est liée, d’une part, à « la spécificité d’une matière qui a été voulue non seulement universelle mais encore intemporelle », et, d’autre part, aux « longues périodes d’unanimité doctrinale qui ont formé des paliers relatifs de plusieurs centaines d’années dans l’évolution de l’institution » alimentaire légale35. Il y a là un enjeu

épistémologique en considération duquel l’auteur s’inscrit clairement dans « le projet de respecter la continuité historique du droit […] jusqu’au droit contemporain » en se référant à certains travaux avant lui36 auxquels on ajouterait d’autres plus récents. Emmanuelle

Jouannet a par exemple recouru à l’« histoire conceptualisante » de Paul Veyne37 au soutien

de sa thèse sur l’orgine à la fois libérale et providentielle du droit international38. Ce dernier

continue aujourd’hui de se manifester sous cette double forme. Les termes « libéral » et

33 Source :

https://treaties.un.org/pages/ViewDetailsIII.aspx?src=TREATY&mtdsg_no=XX-1&chapter=20&Temp=mtdsg3&clang=_fr . 34 Meyer, supra note 4 à la p. 15.

35 Ibid.

36 L’auteur « songe aux thèses pionnières des professeurs Baud et Poughon : J.-P. BAUD, Le système doctrinal du partage, Thèse Droit, Paris X, 1971; J.-M. POUGHON, Histoire doctrinale de l’échange, Paris 1987 »; et « se reporte à l’exemple récent de X. BIOY, Le concept de personne humaine en droit public. Recherche sur le sujet des droits fondamentaux, Paris 2003. »

37 Paul Veyne, « L’histoire conceptualisante », dans Jacques Le Goff et Pierre Nora (dir.), Faire de l’histoire : nouveaux problèmes, Paris, Gallimard, 1974, pp. 62 et s.

38 Le droit international libéral-providence : une histoire du droit international, Bruxelles, Bruylant-Université de Bruxelles, 2011, p. 1.

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9

« providence » sont finalement employés comme des « termes-concepts39 » rattachables à

l’État ou seulement au droit international40. La finalité providentielle de ce dernier est

développée dans d’autres publications41, notamment dans « Les dualismes du droit des

gens42 » de Vattel43. « Pourvoir aux besoins de la Nation », notamment par l’agriculture, est

le premier objet du bon gouvernement exposé dans le Livre I du Droit des Gens ou

Principes de la loi naturelle appliqués à la conduite et aux affaires des Nations (1758) de

Vattel (1714-1767) sur le devoir envers soi-même d’une Nation ou du souverain envers son peuple.

La possibilité de prendre en compte l’histoire caractérise les démarches d’« expérience juridique » de plusieurs auteurs44 qui proposent une réflexion sur les transformations du

droit45 en relation avec une réalité socioéconomique dont la problématisation coïncide avec

39 Ibid., p. 3 in fine.

40 Ibid., pp. 2-3.

41 Emmanuelle Jouannet, Qu’est-ce qu’une société internationale juste? : le droit international entre développement et reconnaissance, Paris, Pedone, 2011; et « What is the Use of International Law? International Law as a 21st century Guardian of Welfare » (2007) 28 (4) Michigan Journal of International Law 815.

42 Emmanuelle Jouannet, « Les dualismes du droit des gens », dans Vincent Chetail et Peter Haggenmacher (dir.), Le Droit International de Vattel vu du XXIe Siècle, Boston, Martinus Nijhoff Publishers, 2011, pp. 133 et s.

43 Voir Emmanuelle Jouannet, Emer de Vattel et l’émergence doctrinale du droit international classique, Paris, Pedone, 1998.

44 Selon François Gilliard et Léon Husson, Georges Gurvitch [L’expérience juridique et la philosophie pluraliste du droit, Paris, Pedone, 1935] serait le premier à avoir utilisé l’expression d’« expérience juridique » : François Gilliard, L’expérience juridique. Esquisse d’une dialectique, Genève-Paris, Droz, 1979, p. 11 (note 1); Léon Husson, Les transformations de la responsabilité : études sur la pensée juridique, Paris, P.U.F., 1947, p. 401 (note 1). Voir par contre Renato Treves, Sociologie du droit, Paris, P.U.F., 1995, pp. 119-121, où on évoque plutôt l’expérience juridique en relation avec un mouvement contre le formalisme juridique en Italie en mentionnant notamment un livre de Max Ascoli paru en 1929. Un autre auteur italien qui s’est intéressé à l’expérience juridique après Ascoli est Cesarini Sforza. Les autres utilisateurs de l’expérience juridique sont : François Ewald, L’État providence, Paris, Grasset & Fasquelles, 1986, pp. 29-33; Miguel Reale, Expérience et culture. Fondement d’une théorie générale de l’expérience, Éditions Biere, Bordeaux, 1990, 247 p.; Le droit comme expérience, 1968; et « La science du droit selon la théorie tridimensionnelle du droit », dans Mélanges en l’honneur de Jean Dabin, Paris, Sirey, 1963, pp. 211-230; « La situation actuelle de la théorie tridimensionnelle du droit » (1987) 32 Archives de philosophie du droit 369.

45 Voir les articles en deux parties d’Edmond Laskine : « Les transformations du droit au XIXe siècle », Revue de Métaphysique et de Morale, vol. 22, n°3, 1914, pp. 382-409; et « Les transformations du droit au XIXe siècle », Revue de Métaphysique et de Morale, vol. 22, n° 2, 1914, pp. 221-253. Voir aussi Léon Husson, Les transformations de la responsabilité : études sur la pensée juridique, Paris, P.U.F., 1947; du même auteur, Nouvelles études sur la pensée juridique, Paris, Dalloz, 1974, pp. 121 et s.; Léon Duguit, Les transformations générales du droit privé depuis le Code Napoléon, Paris, Alean, 1912; Léon Duguit, Les transformations du droit public, Paris, Colin, 1913; Joseph Gharmont, Les transformations du droit civil, Paris, Colin, 1912;

(30)

10

le développement des sciences sociales au XIXe siècle en Europe occidentale46. C’est un

siècle connu pour avoir été marqué par la révolution industrielle dont les bouleversements ont été problématisés notamment en termes de « paupérisme47 », de « salariat48 » et de

« risque49 ». L’aboutissement juridique de la prise en charge politique de ces problèmes

s’est traduit par l’adoption des premiers textes de lois de protection sociale et environnementale. Au plan international, on enregistre plusieurs textes en ces matières à l’époque du Traité de Versailles (1919)50. William Emmanuel Rappard a relevé « un

rapport de causalité entre la révolution industrielle et l’élaboration de la législation ouvrière »51 permettant de comprendre la naissance, à la fin du XIXe siècle et le début du

XXe siècle d’un « nouveau type de sécurité fondé sur la reconnaissance d’un droit […] en

particulier un droit du travail52 ». Les réflexions sur les transformations du droit sont

Gabriel Tarde, Les transformations du droit : étude sociologique, Paris, F. Alcan, 1893; SFDI, Pays en voie en développement et transformation du droit international, Paris, A. Pedone, 1974.

46 Roberto Miguelez, L’émergence de la sociologie, Ottawa, Presses de l’Université d’Ottawa, 1993, p. 1 : « La sociologie, cette réflexion à prétention scientifique sur la socialité humaine et ses formes, se constitue au XIXe siècle dans trois pays de l’Europe occidentale : la France, l’Angleterre et l’Allemagne. »

47 Henri Hatzfeld, Du paupérisme à la sécurité sociale 1850-1940 : essai sur les origines de la sécurité sociale en France, Paris, Armand Colin, 1971, p. 27.

48 Voir Robert Castel, Les métamorphoses de la question sociale : une chronique du salariat, Paris, Fayard, 1995; du même auteur : L’insécurité sociale : qu’est-ce qu’être protégé?, Paris, Seuil, 2003; La montée des incertitudes : travail, protections, statut de l’individu, Paris, Seuil, 2009.

49 Voir François Ewald, L’État providence, Paris, Grasset & Fasquelles, 1986.

50 À l’exemple de la Convention relative à l’assistance mutuelle aux indigents des pays respectifs, signée à Stockholm le 25 octobre 1928. Son article 1 énonce : « Lorsqu’un ressortissant de l’un des pays contractants [Danemark et Islande, Finlande, Norvège et Suède] séjournant dans l’un des autres pays s’y trouvera dénué de ressources, ce dernier pays sera tenu de lui accorder l’assistance publique au même titre et selon les mêmes règles qu’à ses ressortissants. » [L’ajout entre crochets est de nous]. Il y a aussi la Convention relative au statut international des réfugiés, ouverte à la signature à Genève le 28 octobre 1933, dont l’art. 9 énonce : « Les réfugiés résidant sur le territoire d’une des Parties contractantes : chômeurs; personnes atteintes de maladies physiques ou mentales; vieillards ou infirmes incapables de suffire à leurs besoins; enfants à l’entretien desquels ni leurs familles ni des tiers ne pourvoient d’une manière suffisant [sic]; femmes enceintes, en couches, ou allaitant leurs enfants, y bénéficieront du traitement le plus favorable accordé aux ressortissants d’un pays étranger, en ce qui concerne les secours et l’assistance dont ils auraient besoin, y compris les soins médicaux et hospitaliers. » Notre soulignement.

51 William Emmanuel Rappard, La révolution industrielle et les origines de la protection légale du travail en Suisse, Berne, Stæmpfli & Cie, 1914, p. 313; voir aussi Victor Monnier, « La révolution industrielle selon W. E. Rappard », Revue européenne des sciences sociales, tome XLIII, n° 132, 2005, pp. 163-170. Ce dernier met en lumière la « personnalité exceptionnelle » de William E. Rappard (1883-1958) qui « a joui d’une indéniable autorité tant à l’intérieur de son pays qu’à l’extérieur et en particulier au sein des organisations internationales établies à Genève » notamment auprès de l’Organisation internationale du travail. William E. Rappard est le fondateur de l’Institut universitaire des hautes études internationales de Genève.

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11

aujourd’hui animées par l’approche postmoderne du droit53.

Il existe cependant des différences entre auteurs sur le sens donné aux transformations du droit observées54. Les différences sont telles qu’il est essentiel de distinguer entre ce qui est

réel dans cette transformation du droit pour la prise en compte des besoins nouveaux et changeants de la société, et ce qui est « simplement le résultat d’un travail idéologique et de la réflexion individuelle55 ».

La problématique de recherche dans le cadre duquel nous proposons de questionner l’art. 11 du PIDESC est donc celle du changement et de la permanence. L’intérêt de cette problématique réside dans la possibilité de comprendre l’histoire56 pour interroger

l’adaptation du droit au fait alimentaire57. Elle mobilise dans cette perspective

l’épistémologie et la théorie du droit qui détermineront notre méthode58.

Pour bien saisir cette problématique du changement et de la permanence, il convient d’abord de préciser les termes de celle-ci que nous employons comme des indices de rationalité rapportée à l’histoire : le risque et la subsistance. Ces deux indices seront inscrits dans une conception du droit comme expérience.

53 Voir notamment Jacques Chevallier qui a consacré un chapitre sur les « transformations du droit » dans L’État postmoderne, 2e éd., Paris, L.GD.J., 2004, pp. 85-133; et Karim Benyekhlef, Une possible histoire de la norme : les normativités émergentes de la mondialisation, Montréal, Thémis, 2008.

54 Edmond Laskine, « Les transformations du droit au XIXe siècle », Revue de Métaphysique et de Morale, vol. 22, n°3, 1914, p. 392; Edmond Laskine, « Les transformations du droit au XIXe siècle », Revue de Métaphysique et de Morale, vol. 22, n° 2, 1914, p. 234.

55 François Ewald, L’État providence, Paris, Grasset & Fasquelles, 1986, pp. 231-234, 246-247.

56 Cette formulation s’inspire d’un article de Hans Jonas titré « Change and Permanence: on the Possibility of Understanding History », Social Research, vol. 38, n° 3, 1971, pp. 498 et s. Ce titre est l’objet d’un chapitre de son ouvrage Évolution et liberté (traduit de l’allemand et présenté par Sabine Cornille et Philippe Ivernel), Paris, Rivages, 2000, aux pp. 83-128.

57 La formulation est inspirée du titre d’une conférence : Alain Pellet, « L’adaptation du droit aux besoins changeants de la société internationale : conférence inaugurale, session de droit international public, 2007 », Académie de droit international de La Haye, Recueil des cours, t. 329, 2008, pp. 9 et s.

58 Olivier Corten, Méthodologie du droit international public, Bruxelles, Éd. de l’Université de Bruxelles, 2009, pp. 19 et s. Selon cet auteur, « une méthode est toujours déterminée en fonction de la science du droit […] dans laquelle [un chercheur] décide d’incrire son étude » et par rapport au courant théorique ou école de pensée qui encadre sa recherche. Notre ajout entre crochets. Cela explique l’existence d’une « pluralité des méthodes », aucune n’ayant la prétention d’être la meilleure mais seulement d’être adéquate comme moyen d’atteindre la fin d’une recherche poursuivie par un auteur : voir aussi à ce sujet Véronique Champeil-Desplats, Méthodologies du droit et des sciences du droit, Paris, Dalloz, 2016, pp. 1 et s.

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i. Le risque comme indice de rationalité rapportée à l’histoire

L’une des réflexions sur laquelle nous porterons notre attention est celle de François Ewald. C’est un philosophe du risque sous l’angle duquel il analyse l’évolution de la société à l’aide de concepts en grande partie d’inspiration biologique. Le risque, et la sécurité qu’il appelle, est une part de notre problématique du changement et de la permanence pour tenir compte de l’impact du développement technologique59 en questionnant l’adaptation du

droit au fait alimentaire. Il s’agit de considérer l’« origine du machinisme et des transformations qu’il a apportées dans les conditions techniques de la production et dans la vie de ceux qui lui demandent leurs moyens d’existence60 ». L’objectivation du « risque

social » correspond chez lui à la réconciliation de la société avec son industrie61 où le

« droit social » est pensé. Avec sa conception du « social », il sera intéressant de connaître l’impact de l’industrialisation relativement aux besoins que la nature a imposé à l’être humain et qu’il est forcé de satisfaire quotiennement62.

Avec François Ewald, nous allons questionner la construction des instruments internationaux relatifs aux droits économiques et sociaux sur la base du développement de l’État-providence dans les pays les plus avancés économiquement, et en relation avec ce développement. Dans L’État providence (1986), l’auteur soutient une « extension suffisante » des domaines du droit social - droit de la consommation, droit de l’environnement, droit de la santé, droit alimentaire, droit du développement – qui justifie

59 Olivier Godard, « Introduction générale », dans Olivier Godard (dir.), Le principe de précaution dans la conduite des affaires humaines, Paris, Éd. de la maison des sciences de l’homme, 1997, p. 23 : « Le développement technologique moderne s’est en effet accompagné de l’apparition de risques jusqu’alors inconnus de l’homme, qu’il s’agisse de ceux liés aux techniques du quotidien, aux grands appareils de production, aux réseaux d’infrastructures ou aux biotechnologies. Ils touchent au bien-être et à la santé des personnes, mais aussi, de façon nouvelle à une échelle aussi massive, aux systèmes écologiques et aux régulations naturelles. Sont en cause le confort et le bien-être, mais aussi peut-être les conditions de vie et de survie de populations humaines entières, voire du genre humain. »

60 Léon Husson, Les transformations de la responsabilité : études sur la pensée juridique, Paris, P.U.F., 1947, p. 434.

61 Ewald, supra note 55 à la p. 286.

62 Grancoin, supra note 14 aux pp. 2-3 : « La nature a imposé à l’homme une serie [sic] de besoins auxquels il est forcé de satisfaire pour conserver son existence. De tous ces besoins, le plus impérieux, est celui de la nourriture, et on peut dire avec raison que l’industrie qui crée les subsistances mérite d’être classée au premier rang. Si donc quelque chose doit nous étonner, c’est le désaccord qui règne encore aujourd’hui dans le monde économique sur les conditions les plus favorables au développement de cette industrie. »

Figure

Figure 1. Environnement notionnel externe à l’art. 11 du PIDESC

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