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3 Les voies de recours contre les arrêts de la chambre des mises en accusation

Dans le document Procédure pénale (Page 153-158)

H. Le contrôle des méthodes particulières de recherche

En application de l’article 235ter du Code d’instruction criminelle, la chambre des mises en accusation est chargée de contrôler la mise en œuvre des méthodes particulières de recherche d’observation et d’infiltration484. Précisons que l’article 189ter du Code d’instruction criminelle permet au juge du fond ou à la Cour de cassation, en cas d’incidents portant sur la légalité de ces méthodes particulières de recherche d’observation ou d’infiltration, de transmettre l’affaire au ministère public afin qu’il porte celle-ci devant la chambre de mises en accusation en vue du contrôle prévu à l’article 235ter.

§ 3 Les voies de recours contre les arrêts de la chambre des mises en

accusation

Le pourvoi en cassation contre les arrêts de la chambre des mises en accusation est régi par l'article 416 du Code d'instruction criminelle : ce pourvoi ne sera recevable contre les arrêts préparatoires ou d'instruction qu'après l'arrêt ou le jugement définitif, c'est-à-dire après la décision d'acquittement ou de condamnation485. Cette disposition vise à éviter la multiplication des pourvois en cassation au cours de l'instruction. Ainsi, est irrecevable avant la décision définitive au fond le pourvoi contre un arrêt de la chambre des mises en accusation refusant une mesure d'instruction complémentaire, l'accès au dossier ou la levée d'une saisie ou d'un autre acte d'instruction486.

484 L’article 235quater du Code d’instruction criminelle permet, pendant l’instruction et sans préjudice du contrôle visé à l’article 235ter du même Code, à la chambre des mises en accusation de contrôler, à titre provisoire, d’office, à la demande du juge d’instruction ou du ministère public, la régularité des méthodes particulières de recherche d’observation et d’infiltration qui ont été appliquées dans le cadre de cette instruction ou de l’information qui l’a précédée (la Cour de cassation a estimé que la chambre des mises en accusation n’est pas obligée de procéder à cet examen à la seule requête de l’inculpé : Cass., 24 janvier 2006, Pas., 2006, p. 217) ; la Cour constitutionnelle a décidé que la chambre des mises en accusation peut, pour tous les litiges qui n’ont pas encore fait l’objet d’une décision définitive, contrôler la mise en œuvre des méthodes particulières de recherche, que celle-ci ait eu lieu avant ou après l’entrée en vigueur de la loi du 6 janvier 2003 relative aux méthodes particulières. En effet, en juger autrement créerait, au détriment des personnes concernées, une atteinte discriminatoire aux droits garantis par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme et l’article 14 du Pacte international de New-York (voir C. const., 3 juillet 2008, n° 98/2008 ; C. const., 21 février 2008, n° 22/2008).

485 Tel est le cas à l’encontre d’un arrêt rendu sur la base de l’article 61quinquies du Code d’instruction criminelle : Cass., 15 février 2000, Pas., n° 125 ; J.T., 2001, p. 316 (sommaire). Lorsque, après la décision définitive sur l’action publique, le prévenu forme un pourvoi en cassation contre l’ordonnance de la chambre du conseil qui l’a renvoyé à la juridiction de jugement, le contrôle de la Cour de cassation, et dès lors, les moyens qu’elle pourrait soulever d’office sont limités aux règles relatives à la compétence de la juridiction de jugement (Cass., 28 novembre 2001, Rev. dr. pén., 2002, p. 775 et note ; Cass., 5 juin 2002, Rev. dr. pén., 2002, p. 1076).

Le principe admet, cependant, un certain nombre d'exceptions :

• Lorsque le pourvoi est dirigé contre une décision sur la compétence, il est recevable immédiatement (art. 416, al. 2 et art. 539 C.I.C.). Une telle décision est une rendue sur l’allégation que le juge empiète sur les attributions d’un autre juge de manière telle qu’il peut en résulter un conflit de juridiction auquel seul un règlement de juges peut mettre fin487.

• Le pourvoi est immédiatement recevable lorsqu’il est dirigé contre un arrêt prononcé par la chambre des mises en accusation en application de l’article 135 du Code d’instruction criminelle (arrêt de renvoi ou de non-lieu)488 et cela, dans la mesure où l’appel devant la chambre des mises en accusation était lui-même recevable en vertu de l’article 135 dudit Code489.

• Lorsque le pourvoi est dirigé contre un arrêt prononcé par la chambre des mises en accusation en application de l’article 235bis du Code d’instruction criminelle (contrôle de la régularité de l'instruction) ou en application de l’article 235ter du même Code, il est également recevable sans devoir attendre la décision au fond (art. 416, al. 2 C.I.C.)490. • En cas de renvoi devant la cour d’assises, tant le procureur général que les autres parties

peuvent, pour les motifs énoncés à l’article 252 du Code d’instruction criminelle, introduire un pourvoi contre l’arrêt de renvoi devant la cour d'assises.

• Lorsque la chambre des mises en accusation s’est prononcée en tant que juridiction de fond sur l’internement ou la suspension du prononcé, le pourvoi est également recevable immédiatement491.

487 Cass., 30 octobre 2001 (P.01.1259.N), J.T., 2003, p. 548 (sommaire) ; tel est le cas lorsque l’inculpé, qui a saisi la chambre des mises en accusation du contrôle de l’instruction, en application de l’article 136 du C.I.C., allègue devant cette juridiction que le juge d’instruction est incompétent ratione loci à l’égard des faits faisant l’objet de réquisitions complémentaires du procureur du Roi, en invoquant l’absence de toute connexité entre ces faits et ceux compris dans la saisine initiale du juge d’instruction : Cass., 26 septembre 2001, Rev. dr. pén., 2002, p. 439 (sol. implicite). 488Pour une application de cette hypothèse, voir Cass., 24 février 1999, J.L.M.B., 1999, p. 1205.

489 Cass., 30 janvier 2001, P. 2000. 1618. N ; Cass., 11 janvier 2000 et les conclusions du ministère public (aud. plén.), Pas., n° 20 ; Cass., 27 juin 2000, Pas., n° 407; Cass., 17 octobre 2000, et les conclusions du Procureur général

DU JARDIN, P. 00. 0212. N ; Cass., 7 février 2000, J.T., 2000, p. 699 et note de D. VANDERMEERSCHet O. KLEES; adde

H.-D. BOSLYet D. VANDERMEERSCH, Droit de la procédure pénale, 6ème éd., 2010, La Charte, p. 594.

490 Ainsi, est recevable le pourvoi en cassation formé par une personne qui se prétend lésée par un acte d’instruction relatif à ses biens, contre un arrêt de la chambre des mises en accusation qui rejette sa requête au juge d’instruction tendant à la levée de cet acte, sans procéder au contrôle de la régularité dudit acte d’instruction, dès lors que le demandeur invoquait en conclusions la nullité de celui-ci : Cass., 5 février 2003, Rev. dr. pén., 2003, p. 908.

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A DÉTENTION PRÉVENTIVE

CHAPITRE I

LE DROIT COMMUN DE LA DETENTION PREVENTIVE

SECTION 1 DEFINITION ET OBJECTIFS

La détention préventive est la privation de liberté que subit l’auteur présumé d’un crime ou d’un délit avant que les juridictions de fond aient statué de manière définitive sur sa culpabilité et, le cas échéant, sur la sanction à lui infliger492.

C’est une mesure exceptionnelle et provisoire dans la mesure où elle contrarie le principe de liberté et la présomption d’innocence de l’inculpé garantie, notamment, par l’article 6, § 2 de la Convention européenne des droits de l’homme. La détention préventive doit donc « apparaître comme la solution ultime qui se justifie seulement lorsque toutes les autres options disponibles s’avèrent insuffisantes ».

La détention préventive vise un double but. D’une part, elle consiste à empêcher le délinquant de poursuivre l’accomplissement de ses desseins, de fuir, de faire disparaître le corps du délit ou les preuves ou encore de suborner ou menacer les témoins. D’autre part, elle vise à faciliter l’instruction en tenant l’intéressé à la disposition du magistrat instructeur.

SECTION 2 LE CADRE JURIDIQUE

La détention préventive est régie essentiellement par trois textes : - L’article 12 de la Constitution qui prévoit que :

La liberté individuelle est garantie.

Nul ne peut être poursuivi que dans les cas prévus par la loi, et dans la forme qu'elle prescrit. Hors le cas de flagrant délit, nul ne peut être arrêté qu'en vertu de l'ordonnance motivée du juge, qui doit être signifiée au moment de l'arrestation, ou au plus tard dans les vingt-quatre heures. - L’article 5 de la Convention européenne des droits de l’homme qui dispose que :

1. Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales :

(…)

c) s’il a été arrêté et détenu en vue d’être conduit devant l’autorité judiciaire compétente, lorsqu’il y a des raisons plausibles de soupçonner qu’il a commis une infraction ou qu’il y a des motifs

492La structure de ce Titre s’inspire largement de D. VANDERMEERSCH, Eléments de droit pénal et de procédure pénale, 4e éd., La Charte, 2012, pp. 643-687.

raisonnables de croire à la nécessité de l’empêcher de commettre une infraction ou de s’enfuir après l’accomplissement de celle-ci ;

(…)

2) Toute personne arrêtée doit être informée, dans le plus court délai et dans une langue qu’elle comprend, des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre elle.

3) Toute personne arrêtée ou détenue, dans les conditions prévues au paragraphe 1.c du présent article, doit être aussitôt traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires et a le droit d’être jugée dans un délai raisonnable, ou libérée pendant la procédure. La mise en liberté peut être subordonnée à une garantie assurant la comparution de l’intéressé à l’audience.

4) Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d’introduire un recours devant un tribunal, afin qu’il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale.

5) Toute personne victime d’une arrestation ou d’une détention dans des conditions contraires aux dispositions de cet article a droit à réparation.

- La loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive (ci-après LDP).

SECTION 3 L’ARRESTATION JUDICIAIRE

L’arrestation judiciaire, qui est régie par les articles 1er et 2 de la loi du 20 juillet 1990

relative à la détention préventive, est la privation de liberté d’une personne à la suite de l’intervention de l’autorité pendant une durée maximale de 24 heures.

En ce qu’elle traduit le passage d’un état dynamique à une situation statique, l’arrestation apparaît comme une notion déterminée par des éléments de fait : « La perte de la liberté d’aller et de venir (…) est une question factuelle qui s’apprécie in concreto à la lumière des circonstances propres à chaque espèce ».

Le délai de garde à vue ne peut, comme nous l’avons souligné, excéder 24 heures, à moins que soit signifié, entre-temps, à la personne arrêtée un mandat d’amener, un mandat d’arrêt ou une ordonnance de prolongation du juge d’instruction.

Le magistrat instructeur, d’office ou sur réquisition du ministère public, peut en effet prolonger, à une seule reprise, le délai initial de privation de liberté de 24 heures (ou le délai de privation de liberté couvert par le mandat d’amener) d’une nouvelle durée de 24 heures maximum à compter de la signification de l’ordonnance de prolongation (art. 15bis L.D.P.)493. Pour ce faire,

493Sur l’ordonnance de prolongation de la détention préventive, voy. C.C. n° 201/2011, 22 décembre 2011 ; Cass. (2e ch.), 22 janvier 2013, RG P.13.0068.N, N.C., 2013, p. 443, note J. HUYSMANS, Pas., 2013, p. 159, R.A.B.G., 2013, p. 477, note V. VEREECKE, R.W., 2012-2013, p. 1539, note B. DE SMET, T. Strafr., 2013, p. 117, note J. VAN GAEVER ; Cass. (2e ch.), 29 mai 2013, RG P.13.0893.F, Rev. dr. pén., 2013, p. 893 ; O. MICHIELS, « Brevet de constitutionnalité pour le délai de garde à vue de quarante-huit heures », J.T., 2012, pp. 92-94 ; J. DE CODT, « [Le délai d'arrestation] Le délai de vingt-quatre heures et sa prolongation », J.T., 2011, pp. 857-860 ; V. VEREECKE, « De verlenging van de aanvankelijke arrestatietermijn kan niet in alle omstandigheden », R.A.B.G., 2013, pp. 480-482 ; M.- A. BEERNAERT, « La loi Salduz: un premier nihil obstat de la Cour constitutionnelle », J.L.M.B., 2012, pp. 107-112 ;

il rend une ordonnance motivée qui mentionne les éléments justifiant l’ouverture d’un nouveau délai, à savoir les indices sérieux de culpabilité relatifs à un crime ou à un délit ou les circonstances particulières de l’espèce.

Cette ordonnance doit être signifiée dans le délai de 24 heures de l’arrestation ou de la signification du mandat d’amener, à défaut de quoi l’inculpé doit être remis en liberté.

Durant la nouvelle période de 24 heures, l’inculpé a le droit de se concerter une seconde fois confidentiellement avec son avocat pendant 30 minutes.

Bien que cet article 15bis ait toujours été justifié par le temps nécessaire à l’intervention de l’avocat494, elle n’impose pas au juge d’instruction de motiver son ordonnance sur la base de ce motif, puisqu’il lui suffit de constater l’existence d’indices sérieux de culpabilité et de mentionner les circonstances particulières de l’espèce. La prolongation du délai ne doit donc pas nécessairement être proportionnée à l’intervention de l’avocat. Dans son avis, la section législation du Conseil d’État ne s’est pas attardée sur ce point, tandis que le ministre de la Justice a appelé de ses vœux qu’il soit utilisé avec parcimonie et de manière exceptionnelle495. Plus

fondamentalement, jusqu’à ce que la Cour constitutionnelle ne se prononce, la constitutionnalité de cet article 15bis laissait plus d’un juriste sceptique : cette disposition ne viole-t-elle pas le délai de garde à vue de vingt-quatre heures garanti par l’article 12 de la Constitution ? Dans un arrêt du 22 décembre 2011496, la Cour constitutionnelle a répondu par la négative.

SECTION 4 LE MANDAT D’AMENER

Le mandat d’amener est réglementé par les articles 3 à 15 de la loi du 20 juillet 1990497. Il s’agit de l’ordre, donné par le juge d’instruction aux agents de la force publique, d’amener devant lui la personne qu’il désigne, si nécessaire par la contrainte, afin de l’interroger, étant entendu que cette personne peut être :

- Un suspect, s’il y a des indices sérieux de culpabilité relatifs à un crime ou un délit et qu’il ne se trouve pas déjà en mesure d’être interrogé par le magistrat instructeur,

- Un témoin, s’il refuse de comparaître à la suite d’une citation qui lui a été donnée conformément à l’article 80 du Code d’instruction criminelle.

M. COLETTE, « Bevel tot verlenging in Salduz-wet is grondwetconform, Juristenkrant, 2012, p. 1 ; C. CONINGS, « [Voorlopige hechtenis] Salduz-Wet: bevel tot verlenging », NjW, 2012, p. 139.

494 À partir du moment où le droit d’accès à un avocat dès la phase initiale des poursuites pénales a été évoqué, la question du prolongement du délai de garde à vue s’est imposée dans la mesure où certains ont craint que ce délai soit insuffisant pour permettre à l’avocat d’intervenir, à tout le moins dans certaines affaires complexes.

495Doc. parl., Ch. repr., session 2010-2011, n° 53-1279/5, rapport fait au nom de la Commission de la justice, p. 71. 496 Voy. M.-A. BEERNAERT,« La loi Salduz : un premier nihil obstat de la Cour constitutionnelle », J.L.M.B., 2012,p. 107 ; O. MICHIELS, « Brevet de constitutionnalité pour le délai de garde à vue de quarante-huit heures », J.T., 2012, pp. 92-94.

497H.-D. BOSLY, D. VANDERMEERSCH et M.-A. BEERNAERT, o.c., pp. 623-625 et 804 ; M. FRANCHIMONT, A.

Le mandat d’amener est un titre de privation de liberté dans la mesure où l’individu qui en est la cible – suspect ou témoin – ne dispose plus, pendant un espace de temps déterminé, du choix d’aller et venir comme il l’entend.

Le mandat d’amener peut être utile à l’égard des personnes qui n’ont pas répondu aux convocations du juge d’instruction mais aussi à l’égard de celles qui ont été arrêtées dans un autre arrondissement que celui du magistrat instructeur en charge de l’enquête.

Le mandat d’amener doit être signé par le juge d’instruction qui le décerne et revêtu de son sceau. Il doit également être motivé et signifié à l’intéressé au plus tard dans les 24 heures de la privation effective de liberté, à défaut de quoi ce dernier est immédiatement remis en liberté.

Le mandat d’amener est exécuté lorsque la personne qui en est l’objet est mise à disposition du juge d’instruction, c’est-à-dire lorsque celui-ci est en mesure de l’interroger. Les droits à la concertation confidentielle et à l’assistance d’un avocat sont d’application.

Si la personne qui fait l’objet du mandat d’amener refuse d’y obéir ou tente de s’y soustraire, il peut être fait usage de la contrainte.

Le mandat d’amener couvre une période de privation de liberté de maximum 24 heures à compter de la privation de liberté en exécution du mandat ou de sa signification si l’inculpé était déjà privé de liberté (par exemple, dans un autre arrondissement). L’interrogatoire doit impérativement intervenir dans ce délai.

Il faut bien garder à l’esprit que, contrairement au mandat d’arrêt, le mandat d’amener n’est pas un titre de détention préventive, mais bien un titre de privation de liberté, puisqu’il n’a pas pour objectif de priver, dans la durée, un individu de sa liberté, contrairement au mandat d’arrêt par exemple.

SECTION 5 LE MANDAT D’ARRET

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