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La phase d’audience

Dans le document Procédure pénale (Page 139-142)

§ 3 La procédure en vue du règlement de la procédure

B. La phase d’audience

Lorsque l'instruction est complète – c'est-à-dire qu’aucune des parties, dans le délai de quinze ou de trois jours visés ci-dessus, n'a saisi le juge d'instruction d'une requête en vue d'obtenir l'accomplissement d'actes d'instruction complémentaires ou qu'il a été statué définitivement sur ces demandes – l'affaire est fixée devant la chambre du conseil en vue du règlement de la procédure.

La procédure est contradictoire, mais le principe du secret est néanmoins maintenu ; l'audience a donc lieu à huis clos.

À l'audience de la chambre du conseil, le juge d'instruction commence par faire rapport de son instruction438. Vient ensuite le réquisitoire du procureur du Roi qui peut tout aussi bien

434 Dès lors que des poursuites sont exercées simultanément dans la même cause, et notamment du chef de mêmes préventions, contre un inculpé, demandeur en cassation, et contre un co-inculpé détenu préventivement, la nécessité de juger celui-ci rapidement après son renvoi à la juridiction de jugement et de permettre, pour une bonne administration de la justice, à cette juridiction, si elle estime les poursuites connexes, de statuer sur elles par un seul et même jugement, empêche que la Cour de cassation pose à la Cour d'arbitrage une question préjudicielle : Cass., 29 septembre 1999, Pas., 1999, p. 494.

435Dans la mesure où le juge d'instruction n'a pas encore été dessaisi du dossier par la chambre du conseil, la décision d'allonger ce délai lui appartient : Civ. Liège (juge d'instruction), 18 janvier 1999, J.L.M.B., 1999, p. 1223. 436 En vertu de l’article 99, al. 3 C.I.C., toutes les parties ont, à ce stade de la procédure, également le droit de visionner la cassette d’enregistrement de l’audition de mineurs témoins ou victimes des faits.

437 Ce délai ne peut être prolongé ni par le juge d’instruction, ni par la chambre du conseil : Cass., 24 avril 2001, J.T., 2003, p. 72 (sommaire).

438 La doctrine et la jurisprudence ont toujours considéré que c’était le rapport du juge d’instruction à la chambre du conseil qui dessaisissait celui-ci ; voir en ce sens notamment Cass., 24 mars 1999, Rev. dr. pén., 2000, p. 935 et note P. MORLET, « Le dessaisissement du juge d’instruction par l’effet de son rapport » ; par un arrêt du 9 janvier 2002, la

estimer qu'il y a lieu de renvoyer l’affaire devant le juge du fond, de prononcer un non-lieu, un internement ou une suspension du prononcé. Ce sera ensuite au tour de la partie civile ou de son avocat de plaider, mais uniquement sur l'action civile. Arrive enfin la plaidoirie de l'inculpé ou de son avocat. Les parties, tant l’inculpé que la partie civile, peuvent en effet se faire assister d'un conseil ou se faire représenter par lui. La chambre du conseil peut néanmoins toujours ordonner la comparution personnelle des parties.

Il est à noter que, même à ce stade, les parties peuvent encore demander des actes d’instruction complémentaires (même s’ils ont été refusés par le juge d’instruction), la chambre du conseil restant libre de sa décision.

Il convient enfin de préciser que la personne qui a fait une déclaration de personne lésée peut comparaître à cette audience en vue de se constituer partie civile. S'il s'avère que telle n'est pas son intention, elle n'aura pas droit à la parole et ne pourra pas assister à l'audience.

La chambre du conseil statue sur le règlement de la procédure au cours d’une audience mais sans qu’il soit requis que l’ordonnance fasse l’objet d’un prononcé439.

§ 4 Les ordonnances que peut prendre la chambre du conseil

A. L’ordonnance de non-lieu

Si la chambre du conseil constate une absence de charges, des charges insuffisantes, la prescription, l'existence d'une cause de justification ou d'une circonstance absolutoire spéciale, elle prononce le non-lieu440 (art. 128 C.I.C.). L'ordonnance doit être motivée et emporte la mise en liberté de l'inculpé détenu (sous réserve, éventuellement, du délai d'appel de vingt- quatre heures du ministère public).

L'ordonnance de non-lieu revêt toujours un caractère provisoire puisque l'instruction peut être réouverte pour charges nouvelles (sauf, par exemple, en cas d'amnistie). Les charges nouvelles, selon l’article 247 du Code d’instruction criminelle, sont celles qui, n’ayant pu être soumises à la juridiction de fond, sont cependant de nature, soit à fortifier les preuves estimées trop faibles, soit à donner aux faits de nouveaux développements utiles à la manifestation de la vérité. Selon l’article 248 du même Code, seul le ministère public peut demander cette

la décision par laquelle la chambre du conseil a épuisé sa juridiction quant à l’action publique (J.T., 2002, p. 366 et note O. KLEES).

439 Cass., 6 février 2001, Pas., 2001, p. 218 : la décision de la chambre du conseil qui règle la procédure ne doit pas faire l’objet d’une prononciation, mais uniquement d’un acte daté et signé par le président et le greffier, de sorte que la circonstance que la décision est prononcée en audience publique n’entache pas la validité de la décision même (art. 127 C.I.C.).

440 Si, en revanche, la chambre du conseil constate que le délai raisonnable est à ce point dépassé que cela empêche les inculpés de pouvoir encore se défendre, elle constate l’irrecevabilité des poursuites : Ch. cons., Mons, 23 décembre 2002, J.T., 2003, p. 629.

réouverture de l'instruction pour charges nouvelles441 ; c'est la juridiction qui a prononcé le non- lieu qui statuera sur l'existence ou non de ces charges ; si elle les admet, le procureur du Roi retournera le dossier au juge d'instruction pour qu'il poursuive l'instruction s'il y a lieu.

Cette distinction entre la partie civile et la partie publique quant à l’initiative d’une réouverture de l’instruction ainsi que l’absence de recours de la première à l’encontre de la décision de la seconde a été dénoncée à la Cour constitutionnelle par le biais d’une question préjudicielle posée par la cour d’appel de Liège.

De manière assez classique, la Cour constitutionnelle a répondu qu’il existe entre le ministère public et la partie civile une différence fondamentale qui repose sur un critère objectif. On le sait, le ministère public est chargé, dans l’intérêt de la société, de la recherche, de la poursuite et de la répression des infractions et il exerce à cette fin l’action publique. La partie civile, quant à elle, défend son intérêt personnel et vise à obtenir, par l’action civile, la réparation du dommage que lui a causé l’infraction. Cette différence justifie que le ministère public soit traité différemment s’agissant de la compétence de solliciter, lorsque des charges nouvelles apparaissent, la réouverture d’une instruction clôturée par une décision de non-lieu. La Cour ajoute que le législateur a raisonnablement pu redouter que l’octroi à la partie civile de la même faculté contienne le risque qu’il en soit fait un usage abusif étranger à l’intérêt général.

En ce qui concerne l’absence de recours contre la décision prise par le ministère public qui estimerait ne pas devoir solliciter une réouverture de l’instruction, la Cour constitutionnelle n’y voit pas une atteinte excessive aux droits de la personne qui se prétend lésée. Elle observe, en effet, que dès lors qu’une décision de non-lieu rendue du chef de charges insuffisantes n’a pas l’autorité de la chose jugée pour le juge civil, celui qui prétend avoir été lésé par une infraction conserve la possibilité d’exercer son action civile, résultant de l’infraction, devant ce juge et d’appuyer cette action, le cas échéant, au moyen de charges qu’il estime nouvelles442.

La Cour constitutionnelle énonce encore qu’en tant qu’il concerne l’action publique, l’article 6.1 de la Convention européenne des droits de l’homme tend à protéger celui contre qui une poursuite pénale est exercée et non celui qui se prétend lésé par une infraction ; dès lors, cette disposition n’implique pas que les possibilités d’action, d’une part, du ministère public, et, d’autre part, de la partie lésée, doivent être les mêmes443.

441 La partie civile n’a pas la possibilité de demander la réouverture de l’instruction pour charges nouvelles (art. 248 C.I.C.) ; cette règle ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution : C.A., 2 février 2000, Rev. dr. pén., 2000, p. 956.

442 Cass., 28 novembre 2002, J.L.M.B., 2004, p. 1348, note de S. BERBUTO ; Pas., 2002, p. 2282, concl. DE RIEMAECKER : arrêt qui précise que les décisions des juridictions d'instruction n'ont l'autorité de la chose jugée que dans les cas où la loi leur attribue le pouvoir de statuer sur le fond de la cause comme les juridictions de jugement. 443 Voir aussi Cass., 7 septembre 1982, Pas., 1983, p. 27 ; R.W., 1982-1983, col. 932, note de P. LEMMENS; Rev. dr. pén., 1983, p. 704 qui énonce que l'article 6, paragraphe 1er de la Convention européenne des droits de l’homme n'implique pas que les possibilités d'action, d'une part, du ministère public, qui exerce l'action publique, et, d'autre part, de la partie lésée qui, dans certains cas, met l'action publique en mouvement, doivent être les mêmes ; voir également Cour eur. D.H., Perez c. France, 12 février 2004 qui rappelle que la partie civile ne peut être considérée comme l’adversaire du ministère public, ni d’ailleurs nécessairement comme son alliée, leur rôle et leurs objectifs étant clairement distincts (§ 68). La Cour estime aussi qu’une plainte avec constitution de partie civile rentre dans le champ d’application de l’article 6, § 1er de la Convention (§ 71). Cependant, l’application de l’article 6 a ses limites.

Partant, la Cour constitutionnelle en conclut que la question préjudicielle appelle une réponse négative444.

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