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1 Le principe de légalité

Dans le document Procédure pénale (Page 189-192)

Le principe de légalité présente plusieurs facettes : A. L’intervention du pouvoir législatif

La première facette consiste à attribuer au pouvoir législatif la compétence de déterminer dans quels cas et dans quelle forme des poursuites pénales sont possibles514.

513 Cour eur. D.H., Mancel et Branquart c. France, 24 juin 2010, Rev. dr. pén., 2011, pp. 60-69 et note O. MICHIELS, « La mise en cause devant la Cour européenne des droits de l’homme de l’impartialité objective de la Cour de cassation de France en cas de nouveau pourvoi après une première cassation. ».

514 La Cour constitutionnelle rappelle qu’il appartient au législateur de définir la politique pénale et qu’elle ne peut sanctionner une réglementation que lorsque celle-ci opère une distinction dénuée de justification raisonnable (voir à ce propos C.A., 10 novembre 1999, n° 116/1999 relatif à l’ancien article 370 qui punissait l’enlèvement d’une fille au- dessous de l’âge de dix-huit ans accomplis qui aura consenti à son enlèvement ou qui aura suivi volontairement son ravisseur. Cet article a été abrogé par une loi du 28 novembre 2000. On ne peut s’empêcher d’y voir un effet de l’arrêt prononcé par la Cour dès l’instant où celle-ci observait qu’il appartient au législateur de décider si une telle mesure de protection doit encore être maintenue. Toutefois, en limitant, d’une part, l’incrimination aux auteurs de sexe masculin et en punissant, d’autre part, exclusivement l’enlèvement de jeunes filles mineures, le législateur opère une double distinction, basée sur le sexe, qui, dans le contexte social actuel, peut difficilement être considérée comme raisonnablement justifiée.

B. Nulla poena sine lege

La seconde facette confère à ce même pouvoir législatif le soin d’adopter une loi en vertu de laquelle une peine peut être établie et appliquée, tout en garantissant à tout citoyen qu’aucun comportement ne sera punissable et qu’aucune peine ne sera infligée autrement que sur la base de règles adoptées par une assemblée délibérante démocratiquement élue.

Le principe de légalité en matière pénale est garanti non seulement par les articles 12 et 14 de la Constitution mais également par l’article 7.1 de la Convention européenne des droits de l’homme. La Cour constitutionnelle a pu rappeler, à maintes reprises, que ce principe procède de l’idée que la loi doit être formulée de manière à permettre à chacun de savoir, au moment où il adopte un comportement, si celui-ci est ou non punissable. Autrement dit, il exige du législateur qu’il indique, en des termes suffisamment précis, clairs et offrant la sécurité juridique, quels faits sont sanctionnés, afin, d’une part, que celui qui adopte un comportement puisse évaluer préalablement, de manière satisfaisante, quelle sera la conséquence de ce comportement et afin, d’autre part, que ne soit pas laissé au juge un trop grand pouvoir d’appréciation. La Cour ajoute toutefois que ce principe n’empêche pas que la loi attribue au juge un tel pouvoir. Il faut en effet tenir compte du caractère de généralité des lois, de la diversité des situations auxquelles elles s’appliquent et de l’évolution des comportements qu’elles répriment.

En somme, la condition qu’une infraction doit être clairement définie par la loi se trouve remplie lorsque le justiciable peut savoir, à partir du libellé de la disposition pertinente et, au besoin, à l’aide de son interprétation par les juridictions, quels actes et omissions engagent sa responsabilité pénale515.

C. Non bis in idem

La troisème facette est la règle non bis in idem qui doit être considérée comme un principe général de droit dans l’ordre juridique belge516. Le principe est bien connu : nul ne peut être poursuivi ou puni une deuxième fois en raison d’une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif « conformément à la loi et à la procédure pénale de chaque pays ». Le principe est garanti par l’article 14, § 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, lequel est directement applicable dans l’ordre juridique belge517, et par l’article

515 Voir notamment C. const., 27 mai 2010, n° 62/2010 ; C. const., 25 février 2010, n° 17/2010 ; C. const., 11 mars 2009, n° 39/2009 ; C. const., 10 juillet 2008, n° 102/2008 ; C.A., 21 décembre 2005, n° 199/2005 ; voir aussi, A. JACOBS, « Le principe de légalité en matière pénale au regard de la jurisprudence de la Cour d’arbitrage, Strafrecht als roeping », in Liber amicorum LievenDupont, Universitaire Pers Leuven, Leuven, 2005, pp. 821-845 ; A. DE NAUW, « Nieuwe wendingen inzake het lex certa beginsel, Strafrecht als roeping », in Liber amicorum Lieven Dupont, Universitaire Pers Leuven, Leuven, 2005, pp. 757-773 ; M. NIHOUL, « A propos de la précision requise pour définir une infraction en vertu du principe de légalité ou de prévisibilité du droit pénal », J.T., 2004, pp. 2-6 et les nombreuses références doctrinales citées notamment à la note subpaginale n° 4.

516Voir C. Const., 18 juin 2008, n° 91/2008 ; Cass, 19 mars 2002, RG P.00.1603.N ; voir encore à ce propos R. ROTH, « Non bis in idem : vers de nouveaux paradigmes », in Le contrôle juridictionnel dans l’espace pénal européen, Ed. U.L.B., Collection études européennes, 2009, pp. 121-140.

4 du Septième Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme qui a été ratifié par la Belgique le 13 avril 2012 et qui est entré en vigueur, à son égard, le 1er juillet 2012518.

§ 2 L’indépendance et l’impartialité de la juridiction saisie

La Cour constitutionnelle indique qu’une bonne administration de la justice garantit notamment au justiciable que sa cause soit entendue par un juge indépendant et impartial519. Ceci implique non seulement que le juge doit être indépendant et impartial520 mais aussi que cette indépendance et cette impartialité ne puissent raisonnablement être mises en doute, parce que des garanties suffisantes existent qui font disparaître tout soupçon légitime.

Aussi, pour apprécier l’indépendance et l’impartialité d’une juridiction, sa composition et son organisation seront notamment prises en considération ainsi que le cumul de la fonction judiciaire avec d’autres fonctions ou activités521. Les liens du juge avec les parties au procès et son rapport à l’objet de la cause doivent également être pris en compte522.

La Cour constitutionnelle est également d’avis qu’aux yeux d’un public exempt de préjugé malveillant envers les institutions, un magistrat n’apparaît pas comme suspect de partialité par cela seul qu’il a déjà eu à traiter d’une question qui lui est posée. La Cour développe son argument en retenant que dans un système où l’autorité de la chose jugée est relativisée par égard aux vertus du contradictoire, il est cohérent de considérer que les juges, au cours d’un nouveau débat, tiennent compte d’arguments de nature à remettre en cause leur conviction précédente,

518C. const., 26 avril 2007, n° 67/2007 ; C. const., 19 décembre 2013, n°81/2013.

519Voir aussi C. const., 3 décembre 2009, n° 195/2009 dans lequel on peut lire que le droit d’accès au juge serait vidé de tout contenu si ce juge ne satisfaisait pas aux exigences du procès équitable, garanti par l’article 6.1 de la Convention européenne des droits de l’homme, par l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et par un principe général de droit ; sur l’exigence d’impartialité personnelle, voy. Cour eur. D.H., Bucur et Toma c. Roumanie, 8 janvier 2013 ; sur l’impartialité objective, voy. Cour eur. D.H., Nikolova et Vandova c. Bulgarie, 17 décembre 2013.

520Comme l’écrivent M. FRANCHIMONT, A. JACOBS et A. MASSET, op. cit., pp. 1282-1283 : « En pratique, les deux notions d’indépendance et d’impartialité sont généralement invoquées simultanément ; (…) Ceci s’explique par le fait que l’indépendance, si elle ne se confond pas totalement avec l’impartialité, présente avec celle-ci des liens très étroits. » ; voir aussi Cass., 7 avril 2004, J.T., 2004, p. 541 et note O. KLEES ; J.L.M.B., 2004, p. 1365; Pas., 2004, p. 602 ; Rev. dr. pén., 2004, p. 1070 dans lequel on peut lire que la condition essentielle de l'impartialité du juge d'instruction est son indépendance totale à l'égard des parties, en manière telle qu'il ne puisse s'exposer au soupçon de partialité dans l'instruction des faits, que ce soit à charge ou à décharge ; dans son arrêt du 31 mai 2001 n° 74/2001, la Cour constitutionnelle rappelle que l’impartialité du juge est un principe général de droit.

521C.A., 25 janvier 2006, n° 14/2006 : à propos du Comité R, la Cour a observé qu’il va de soi que, si à l’occasion d’une affaire, il apparaissait que l’un des membres du Comité R ne présente pas les exigences d’impartialité requises, notamment parce qu’il aurait connu de l’affaire dans une autre qualité, il devrait se déporter pour être remplacé ; C. const., 3 décembre 2009, n° 195/2009 : dans cet arrêt, la Cour constitutionnelle mentionne que la Cour européenne des droits de l’homme s’est déjà prononcée à plusieurs reprises sur la question de savoir si une institution ayant à la fois une fonction consultative et une fonction juridictionnelle satisfaisait à l’exigence d’impartialité objective (Cour eur. D.H., 28 septembre 1995, Procola c. Luxembourg ; Cour eur. D.H., 6 mai 2003, Kleyn et autres c. Pays-Bas; Cour eur. D.H., 9 novembre 2006, Sacilor Lormines c. France). Le simple fait qu’une institution exerce à la fois une fonction consultative et une fonction juridictionnelle ne suffit pas à établir une violation des exigences d’indépendance et d’impartialité (arrêt Sacilor Lormines, § 66). Il convient, dans ce cas, d’examiner comment l’indépendance des membres est garantie (ibid).

comme il advient, couramment d’ailleurs, lorsqu’une opposition les amène à revenir sur un jugement rendu par défaut523.

§ 3 La motivation des décisions et le prononcé en audience publique

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