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Chapitre 3. Le mont Parnès 1830-1975

3.3. Le Parnès à la veille de l’Indépendance

3.5.3. La voie vers la gestion de protection

Malgré la réforme et la politique de productivité, le Parnès n'a jamais été un massif important pour la sylviculture. Son exploitation pendant l’entre-deux-guerres n'est pas intensifiée par rapport aux années précédentes et de toute façon ne concerne que le bois de sapin, car pour le pin l’exploitation principale fut le gemmage de la résine (Amorgianiotis 1997). Le premier plan de sylviculture en 1920 pour la forêt de Tatoi n’a pas été appliqué car la forêt a été incendiée. Le forestier responsable des domaines de la Cour rédige des plans en 1929 et en 1931, qui sont partiellement appliqués. L’inspection de forêts du Parnès a effectué en 1924 son premier plan de sylviculture pour les forêts publiques de Phylé. Depuis lors, les inspecteurs de forêts ont rédigé des Plans de Sylviculture pour les forêts de Phylé (1934), de Limiko (1937), et du monastère de Kleiston (1937). Mais les plans ne sont pas appliqués, soit à cause d’un incendie qui bouleversait toutes les prévisions, soit à cause du manque de personnel, soit du fait de l'absence d'intérêt des exploitants (Amorgianiotis 1997). Au contraire, pendant l’entre-deux-guerres, les forestiers surveillaient les usages agro-forestiers des paysans qui se transformaient et s’intensifiaient. On a par exemple des informations sur la gestion des terrains publics appartenant à Salonique, à Limiko et à Milesi Tsapochthi, qui étaient exploités de manière méthodique et multifonctionnelle. Les archives des propriétaires démontrent une série de travaux d’infrastructure, ainsi que la complémentarité des usages de sylviculture, arboriculture et de pâturage, dont la permission était donnée par les forestiers (Giotas & Fitas 2011).

Or, le résultat de la gestion d'entre-deux-guerres fut ravageur pour les forêts de l’Attique. Les besoins de la population en bois de chauffage, qui se sont accrus à cause de l’explosion urbaine, ainsi que l’extension des cultures céréalières au pied et dans la montagne ont fait défricher énormément les forêts du Parnès. Les années de l’occupation allemande ont été particulièrement dévastatrices. De l’autre côté, on constate que la surveillance de la propriété des forêts était encore la vocation principale du service combattant du Parnès, et que la technique de la foresterie continuait à constituer encore une fois des justificatifs de propriété (le cas de la propriété du monastère de Aghia Triada).

Après la guerre, le caractère productif de la gestion de forêt du Parnès se restreint énormément. La production en bois chute, notamment parce qu’après les années 1950 l’emploi traditionnel de collecte et de commerce du bois de chauffage pour Athènes décline. Pour les sapins, les prélèvements concernent l’enlèvement des arbres séchés, abattus par les épidémies et les incendies, tandis que toutes les forêts de pin (sauf les forêts de pin du domaine royal de Tatoi) continuent à être gemmées intensivement jusqu’en 1970 environ. Concernant le régime de gestion du Service Forestier, les Plans de Gestion concernent les différentes parties de la forêt publique, de façon

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irrégulière, et s’appliquent encore plus irrégulièrement. Les raisons les plus importantes sont les incendies et les effets d’une épidémie de dessèchement des sapins qui se déclenche en 1962 et continue à influencer l’image générale de la forêt.

Le Plan de Gestion de 1961 constitue une rupture avec tout régime de gestion du passé. Rédigé par Makri, inspecteur des forêt du Parnès et professeur de foresterie, il a constitué la base du régime de gestion de la Forêt Nationale, proclamé en même temps. Il innove pour son époque en mettant en avant la protection de la gestion du massif et en intégrant des fonctions de loisir. Il réalise un enregistrement approfondi de la situation de la forêt et de ses dégâts. Une image de « régression et

de déclin, une sorte de sénilité et de marasme duquel il faut sortir le plus tôt possible ». Il prend en

compte une diversité d’objectifs de gestion plus élargis que l'exploitation sylvicole, pour conclure qu'« il faut à tout prix que l’obtention de la renaissance naturelle et artificielle fasse l'objet de l’effort

incessant du sylviculteur ». Ainsi, il propose que la Forêt Nationale du Parnès s’appelle « Forêt Nationale d’exploitation modérée » où ne seront appliquées que des opérations restreintes et douces

pendant plusieurs décennies « jusqu’à la renaissance absolue de la végétation forestière, afin que les

fonctions protectrices de la forêt et des demandes de loisir de la population de la Capitale soient assurés » (Amorgianiotis, 1997, p.68).

Concernant la production agricole du Parnès, on s’est contenté de l’information de l’Etude de Gestion de Amorgianiotis (1998) selon laquelle après la guerre il y a une diminution importante de toutes les activités agricoles dans la montagne, sauf la production de résine qui est en voie d’augmentation. Même s’il est certain que les transformations dans l’agriculture de la région de l'’Attique sont particulières, due à l’influence de la Capitale et l’urbanisation directe de certaines parties, on peut supposer que l’espace du Parnès suit les transformations générales. Ses prairies et ses espaces boisés en périphérie de la Forêt Nationale, ainsi que les cultures dans les champs montagnards sont de moins en moins exploités, mais sans être désertés (Carte 14).

La proclamation de la forêt nationale de Parnès

La proclamation de la Forêt Nationale de Parnès est la suite d’une haute institutionnalisation de la forêt grâce à sa proximité avec la capitale. Un décret125 proclame Parnès Forêt Nationale et définit ses limites et son territoire. D’un coté son noyau de 3.800 ha, où seule la recherche scientifique est permise, et de l’autre sa périphérie de 25.000 ha, qui s’identifie aux limites des compétences de l’inspection de la forêt du Parnès et où il n’y a pas de restrictions spécifiques d’usages126.

Nous n’avons pas d’informations sur le considérant de la proclamation ou sur les personnes derrière le projet de la Forêt Nationale du Parnès. On peut approcher le concept de ses législateurs seulement en penchant sur sa délimitation (Carte 14). On conclut que les critères de la délimitation de la Forêt Nationale ont été rapportés premièrement à la propriété et secondairement aux qualités physiques. Les terrains de Limiko, Saloniki, Milesi-Tsapochthi, ou une partie de Tatoi, accomplissent

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Décret royal 644/31/8/1961

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Avec la décision ministérielle 25638 (Fiche du Journal Officiel 236/B/4.4.69) le Parnès se proclame aussi « site de paysage de beauté naturelle spéciale afin de se protéger par la construction et l’extraction », mais sans effets sur la politique de protection.

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plus les critères physiques de classification, que d’autre terrains qui sont finalement intégrés à la Forêt Nationale, or ils en sont exclus à cause de leur statut « sous possession » (diakatechomena), alors semi-privée (Amorgianiotis, 1997.p.16). D’ailleurs, les terrains du noyau portant des constructions dans le périmètre sont exclus de la Forêt Nationale : les locaux de l’armée, le casino, le sanatorium, les stations, la fontaine de Kantalidi. Dernièrement, la limite sud de la Forêt Nationale, qui en gros suit la courbe de niveau de 500m, « monte » à 700m quand elle « croise » la cité de Thrakomaekdones. Elle sort également sa voie pour ne pas inclure la forêt privée de Goura.

Ainsi, en ne touchant pas aux intérêts fonciers, le projet de la déclaration de la Forêt Nationale n’a pas rencontré de réactions. D’un côté, les forêts publiques du noyau avaient déjà perdu leur valeur d’exploitation sylvicole. De l'autre côté, les forêts privées d’altitude plus basse qui avaient un intérêt foncier urbain se sont trouvées dans la zone périphérique, en réalité au même statut que toutes les forêts du pays. Seule exception, les revendications de la commune d’Acharne dont le territoire forestier se trouvait dans le noyau de la Forêt Nationale dans sa majeure partie. La commune a revendiqué ses droits coutumiers sur la récolte du bois de chauffage, sec et par terre, reconnus dès 1919. L'État a exproprié obligatoirement ces droits en 1961127.

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