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Interventions dans le mont Parnès, entre attraction de loisir et arrière-cour de la ville

Chapitre 3. Le mont Parnès 1830-1975

3.3. Le Parnès à la veille de l’Indépendance

3.5.2. Interventions dans le mont Parnès, entre attraction de loisir et arrière-cour de la ville

Une nouvelle période est inaugurée pour la présence humaine dans la Parnès, après l’achèvement de la route vers le sommet de la montagne en 1930. Le sanatorium a fonctionné aussi comme un hôtel pour la bourgeoisie athénienne, qui y estivait dans un milieu sain, tout près à la ville. Cette activité a entraîné la fréquentation des habitants des villages alentour. Les habitants de Ménidi en particulier s'y rendaient, influencés par le nouvel esprit montré par les Athéniens, et également pour rendre des services aux étrangers. À cette époque, des familles de Ménidi ont commencé à passer l’été à camper sur le plateau de l’Église à Palaiochori. Le monastère a recommencé à fonctionner et le domaine a été revêtu d'une dimension symbolique le jour de la fête du monastère d’Aghia Triada, la Sainte Trinité, en été. Le rassemblement accueillit tout le monde, les patients, les vacanciers, les travailleurs, les villageois et les nomades éleveurs, dont c'était la fête (Giotas, 2004, p.17-64). Evidemment, il n’y avait plus de brigands dans l’espace de la montagne. Les activités de vacances ont cessé pendant l’occupation et les années qui suivirent. L’accès à la haute montagne fut interdit à cause des guérillas de la résistance. D’ailleurs, 17 nomades valaques ont été tués par les nazis dans la guerre.

C’est l’époque de la naissance de l’alpinisme, des loisirs des populations urbaines dans la montagne. Parnès, avec le mont Olympe, furent les premiers lieux de l’alpinisme en Grèce. L’Olympe attirait les amis du sport en tant que montagne la plus haute du pays, auréolée aussi de l’enchantement de la mythologie. Le Parnès était la montagne la plus proche de la capitale. Sur le site de Bafi, à 1160m, la station de l'EOS d’Athènes (la première société alpine de Grèce) est construite en 1937-1939. À la même période, une petite station (les cyclamens) voit le jour sur le site d’Aghia Triada, aussi sous l'égide de l'EOS d’Athènes et l'EOS d’Acharne.

Après la guerre, l’État a vu dans le Parnès un lieu utile pour la croissance d’Athènes, voire pour la croissance nationale. C'est pourquoi dans plusieurs cas il a utilisé ses terrains soit comme pôle d’usages de tourisme, soit comme récepteurs d’usages nuisibles qu’il voulait cacher dans « l’arrière- cour ». Après la proclamation de la Forêt Nationale, la politique de protection a consisté en l'arrêt de l'installation de ces usages au cœur de la forêt121. Ils continuaient néanmoins à être installés dans sa zone périphérique.

Cela étant, au centre de la forêt, on a des installations techniques d’avant 1961 : des installations de l’armée ont été édifiés entre 1948et 1960 sur presque tous les plus hauts sommets de la montagne, deux bâtiments des locaux de l’inspection de la forêt du Parnès ont été construits sur le terrain d’Aghia Triada en 1948. On trouve également des constructions pour les besoins des travailleurs dans l’Organisme de Télécommunications à Aghia Triada et sur le pic d’Ornio. De l’autre côté, dans la zone

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Sauf les installations sportives de (SEGAS) de petite taille dans le terrain de Kserolivado qui sont construits pendant la dictature

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périphérique du massif, se trouvent plusieurs carrières en fonction, la plus importante du côté d’Ano Liosia, qui est active entre 1966 et 1983 (Organisme de Planning et de protection de l’environnement, 2003, p.45-46). Un des projets d’utilisation de la périphérie de la Forêt Nationale comme terrain à vocation nationale entra en conflit avec la municipalité d’Acharne. En 1968, le Ministère de l’Agriculture céda 35 ha pour l’édification des établissements de la Gendarmerie sur le terrain d’Amygdaleza. En 1969, la municipalité d’Acharne eu recours à la justice contre le Public. Elle affirmait que même en l'absence de titres, la propriété d’Amygdaleza lui appartenait selon le droit d’usucapion extraordinaire122.

Les loisirs « verts » des habitants de la ville et des villages adjacents, qui avaient vu le jour pendant l’entre-deux-guerres se maintenaient. Les alpinistes, organisés en Société Alpine d’Athènes (EOS d’Athènes) continuaient leurs activités avec leur propre « Station Alpine », et les habitants de Ménidi continuaient leur camping estival en violation du règlement de la Forêt Nationale du Parnès et malgré les recommandations de l’Inspection de forêts du Parnès.

Cependant, c’est la mise en place d’installations de tourisme pour les hauts revenus qui représente la volonté politique de développer Parnès dès la fin de la décennie 1950. C'est elle qui a marqué le plus le paysage, l’usage et les représentations des habitants de la ville pour la montagne. En 1950, le sanatorium ferme à cause de l'évolution des conditions et des approches de l’hygiène. Il est vendu à Organisme National de Tourisme (EOT) et commence à fonctionner comme un hôtel, déserté après 1958. En 1958, l'EOT achète un terrain de 80 ha dans Mavrovouni, à 1078m d’altitude. En 1961, il édifie un hôtel de luxe de 3000 lits, accompagnés de locaux auxiliaires et d'espaces sportifs.

Le projet a été conçu comme une attraction et une référence pour le tourisme alpin de la haute société d’Athènes. L’édifice, œuvre de l’architecte Pavlos Mylonas, est inclus dans des catalogues internationaux de l’architecture moderne. Conçu entre 1956-1960, il fait partie du programme national de tourisme de la décennie 1960, qui édifiait des bâtiments dans des paysages extraordinaires, naturels ou archéologiques, pour servir les sites de tourisme. Le programme fut suivi personnellement par le premier ministre Konstantinos Karamanlis, qui a imposé sa vision architecturale pour cette catégorie de bâtiments : une architecture moderne monumentale et luxueuse. Le bâtiment du nouvel hôtel se trouve au sommet du versant sud de la montagne, au lieu le plus saillant et il se projette au bout de l’escarpement comme « s'il était prêt à s'envoler »123. La construction de l’hôtel a fait l'objet de débats vifs dans la presse et l’opposition politique, au point que le gouvernement a failli être renversé. Une partie des contestations, portées plutôt par la gauche, se focalisait sur le coût du projet - il a coûté quatre fois plus que prévu à cause des difficultés techniques de la construction - et le luxe du bâtiment, adressé à la haute bourgeoisie. Un autre reproche concernait l’intégration paysagère du bâtiment. Comme dans le cas de l’hôtel Hilton qui se construisait dans la ville d’Athènes en même temps, la construction, d’un volume qui « s’imposait » dans le paysage du bassin d’Athènes, a fait naître un débat sur les hauts bâtiments et leur relation avec le paysage naturel de l’Attique. Le Comité du Paysage était contre la construction de l’hôtel à Parnès, comme d’ailleurs la Cour parce que le bâtiment déformait la ligne de sommets de la montagne vue depuis le palais de Tatoi.

L’hôtel n’a pas connu la fréquentation prévue et très souvent a été jugé non-rentable. En 1971, il est transformé en casino afin d’attirer une clientèle de la ville d’Athènes. Un téléphérique est construit

122 Journal Acharnet, Les ignorants sont dangereux, 24-5-2011,http://www.acharnet.eu/2011/05/blog-

post_5249.html

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en même temps pour le connecter avec le piémont sud et le terrain de Métochie qui offrait des services de loisir supplémentaires. Le casino a eu un succès énorme et a fait augmenter le nombre de visiteurs de la montagne ainsi que la circulation sur la route qui conduisait au sommet. Il a provoqué aussi une fréquentation et une croissance des espaces de loisir dans la commune d’Acharne, l’entrée sud de la montagne et l’accès principal pour le casino124.

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