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Première partie : L’avènement d’une réalité ouvrière [1800-1914]

Carte 11 : centres majeurs de fabrication de faïence poitevine au XIX e siècle :

2. Tuiliers, briquetiers et chaufourniers

Les tuileries et briqueteries722 forment un ensemble micro industriel situé à la lisière du monde rural et artisanal. Le faible coût d’investissement financier et humain – chaque fabrique compte très peu d’employés, il s’agit le plus souvent de petits patrons travaillant seuls –, ainsi que les besoins de l’industrie du bâtiment, expliquent la profusion de ces établissements dans les trois départements étudiés. Ce grand nombre de fabriques s’explique aussi par le fait que moult tuiliers sont aussi chaufourniers, la chaux ayant un essor extrêmement important au XIXe siècle en raison d’une utilisation agricole plus fréquente, fortement encouragée par l’agronomie.

La présence de tuileries dans la Vienne est attestée au XVIIe siècle aux abords de la forêt de Moulière723, au nord-est de Poitiers. Longtemps, les tuiliers y « prélèvent » le bois sans que les autorités ne disent mot, jusqu’à la réformation des forêts du Poitou, entre 1665 et 1667, mettant le holà à ces pratiques et contraignant nombre de tuiliers à détruire leurs fours724.

A la fin du XVIIIe, l’art de la tuile se pratique dans la région de Saint-Julien-l’Ars, à mi-chemin entre Poitiers et Chauvigny : la terre y est très argileuse, propice à la cuisson. Le travail des tuiliers se décompose en deux phases : l’hiver est consacré à la préparation de la terre et au stockage des fagots, alors que les tuiles et les briques sont cuites à la belle saison. L’industrie tuilière se développe au fil du XIXe siècle725. Saint-Julien-l’Ars et ses environs comptent huit tuileries au temps des monarchies censitaires. L’essor se poursuit sous le second Empire et les débuts de la IIIe République, pour déboucher sur une période d’activité plus intense entre 1880 et 1886 où onze tuileries occupent une cinquantaine de personnes dans le bourg et les communes avoisinantes. Ce nombre descend à huit en 1896 et jusqu’à la Première Guerre mondiale.

On note aussi de nombreuses tuileries dans l’arrondissement de Montmorillon en 1894. L’activité emploie 25 ouvriers à Montmorillon même, une dizaine à Lussac-les- Châteaux et une cinquantaine dans d’autres petites communes du montmorillonais726.

722 Tuileries et briqueteries sont souvent synonymes dans l’esprit des administrateurs locaux et départementaux 723 Société archéologique du pays chauvinois, Industries disparues du pays chauvinois, Poitiers, 1980, p.41. 724 Cinq fours sont détruits dans la seule commune de Bignoux.

725 Société archéologique du pays chauvinois, op. cit., pp 41-42. 726 ADV M12.113. Grèves [1894 ; 1902].

A celles-ci, il faut ajouter, les tuileries et briqueteries de Gençay, dans l’arrondissement de Civray, et celles d’Ingrandes proche de Châtellerault727.

Au début XIXe, le préfet Dupin recense une centaine de tuileries dans le département des Deux-Sèvres. L’enquête économique et sociale de 1848 mentionne une activité tuilière dans le canton de Bressuire qui emploie une cinquantaine de personnes dont 32 femmes ; ici les fours fabriquent aussi bien des tuiles que de la chaux. La même enquête insiste sur les tuileries du canton de Celles, dans l’arrondissement de Melle, et plus particulièrement sur les établissements de la commune d’Argentière où « tout le monde est tuiliers, hommes, femmes

et enfants728». Cette petite commune qui vit de l’industrie de la tuile et de la brique pourrait, selon les rapporteurs de l’époque, devenir un des plus importants centre industriel de France si le nombre de chemins venait à croître. Un beau témoignage d’optimisme comme on en rencontre à l’époque.

D’autres petites communes vivent pareillement de la tuile. C’est le cas de Boussay, dans l’arrondissement de Parthenay, qui compte treize fours au début du second Empire729. Entre 1861 et 1865, 124 tuileries employant 606 personnes, sont disséminées sur le territoire du département des Deux-Sèvres730 ; comme dans le bourg de Coulonges où 25 ouvriers tuiliers travaillent dans cinq établissements731. Signalons aussi les tuileries implantées dans les

communes du sud-est des Deux-Sèvres, autour de Sauzé-Vaussais, à la limite des départements de la Vienne et de la Charente732.

Parmi les départements qui composaient l’ancienne province du Poitou, c’est en Vendée qu’il y aurait le plus de tuileries.

Pourtant l’historien Cavoleau, dans sa Description générale du département de la Vendée, dénombre 120 fours en 1809733, soit autant que dans la Vienne et les Deux-Sèvres. En revanche, les divers rapports préfectoraux du XIXe siècle parlent peu de cette activité. Seules quelques tuileries sont signalées du côté des Herbiers en 1844734 et à la Châtaigneraie en

727 Entre 1861 et 1865, le département de la Vienne compte 93 tuileries occupant 418 ouvriers, cf. PINARD

(Jacques), op. cit., p.81.

728 ARCHES (Pierre), L’enquête économique et sociale de 1848 (partie 1), op. cit., p.509. 729 ADDS 10M17.1. Statistiques industrielles et commerciales [1804 ; 1889].

730 PINARD (Jacques), op. cit., p.81.

731 ADDS 10M17.1. Statistiques industrielles et commerciales [1804 ; 1889].

732 En 1884, une cinquantaine d’ouvriers sont employés dans les tuileries localisées dans les communes de

Sauzé-Vaussais, Limalonges et Montalembert, ADDS 10M17.1. Statistiques industrielles et commerciales

[1804 ; 1889].

733 CAVOLEAU (J.-A.) (annoté par de LA FONTENELLE DE VAUDORE (A.-D.)), op. cit., p.652. 734 ADVd 6M1232. Statistiques de France. Industrie, situation des fabriques ou manufactures [1839 ; 1849].

1875735. Une briqueterie existe également à La Roche-sur-Yon en 1884736. Les premiers exploitants des mines de Faymoreau tentent également d’implanter une tuilerie près de leurs puits afin d’absorber une part de leur production mais la tentative est sans succès.

Néanmoins, le nombre de tuileries doit être plus important que ce que les enquêtes économiques indiquent. Cette activité rurale de faible importance est souvent méconnue ou parfois confondue avec les fours à chaux. Tuiliers et chaufourniers737 se confondent bien souvent, ce qui explique la même localisation des lieux de production.

Illustration 18 : fours à chaux de saint Pompain dans les Deux-Sèvres :

Source : Le CORFEC (Jean-Michel), op. cit., p.70.

L’utilisation de la chaux738 se développe et prospère au XIXe siècle, en particulier à partir de la Monarchie de Juillet. On l’utilise dans le bâtiment pour préparer le ciment, dans certaines industries comme la tannerie et bien entendu dans l’agriculture. Le chaulage des terres est une des composantes du progrès agricole739. En 1820, le président de la société d’agriculture de Vendée rapporte que « la chaux […] est d’un usage assez répandu dans le

735 ADVd 10M11. Travail des enfants dans les industries : exécution de la loi du 19 mai 1874 ; commissions

locales [1874 ; 1885].

736 ADVd 6M1243. Statistiques des industries principales [1882 ; 1889]. 737 Ouvriers qui fabriquent la chaux.

738 La chaux se produit par l’action directe d’une forte chaleur sur une pierre à chaux (carbonate de calcium ou

coquillage dans l’Antiquité) qui va perdre son gaz carbonique et son eau pour se réduire à l’état de chaux vive.

739 La chaux permet une meilleure aération et perméabilité des sols argileux. Elle joue aussi un rôle d’engrais en

stimulant la croissance des racines végétales et le développement cellulaire des plantes. L’oxyde de calcium évite également des maladies liées aux acidités végétales. Enfin, elle peut être utilisée comme fongicide et insecticide, GAYON (A.), Chaux et chaulage, Paris, 1950, p.15 et s.

bocage, et produit de bons effets pour la culture des céréales […] Mélangée avec de la

cendre de marais, les effets sont beaucoup plus supérieurs à ceux du fumier740».

Nombreuses sont les communes à disposer de leur chaufour741. Il y a une densité remarquable de ces installations, en Vendée, particulièrement dans le bassin de Chantonnay et dans la plaine de Luçon, où les sols sont riches en calcaire. En 1848, autour de Chantonnay, 170 personnes travaillent à la calcination de la chaux742. Ces fours consomment la houille locale, ce qui pousse les propriétaires et concessionnaires des mines à en construire.

« La Société des houillères et verreries de la Vendée qui a déjà tant fait pour la prospérité du pays, voulant donner une nouvelle impulsion à l’industrie de la chaux et au mouvement progressif de l’agriculture dans les contrées avoisinant ses établissements, se propose de faire construire un groupe de fours à chaux à feu continu743».

C’est le cas à Faymoreau et dans les environs de Saint-Laurs, à Coulonges, dans les Deux- Sèvres744 où 54 chaufourniers sont recensés en 1864 dans neuf sites745. Ils vont jusqu’à investir dans les départements voisins. Le four à chaux de la commune de Lhommaizé, dans la Vienne, appartient aux mines de Faymoreau746.

Le nombre de chaufourniers baisse tout de même à la fin du XIXe siècle. Ils ne sont plus que 170 en 1896 et sont fréquemment confondus avec de simples ouvriers agricoles. Dix- sept ans plus tard, il n’y a plus qu’une trentaine de fours.

Si la Vendée a des chaufours à feu continu, alimenté au charbon, il n’en est pas de même dans la très grande majorité des départements voisins. La plupart des installations de cuisson ne sont constituées que « de simples trous au flanc d’une butte où les pierres

calcaires sont amoncelées et brûlées par un tas de fagots en flamme au fond du trou747». C’est le cas dans le chauvinois et le montmorillonais jusqu’en 1850 où des fours à courte flamme fonctionnant au charbon commencent à être implantés à la demande des grands

740 Rapport du président de la société d’agriculture de Vendée d’avril 1820 in HELLO (Yves), REGOURD

(Florence), Un long XIXe siècle (de 1793 à 1946), Saint-Jean-d’Angely, 1983, p.295.

741 Four à chaux.

742 REGOURD (Florence), Grèves et ouvriers vendéens (1840-1940), op. cit., p.15. 743 Lettre de P. Bally au préfet de Vendée du 3 juin 1850, ADVd 5M109.

744 MONTOUX (Michel), op. cit., p.137.

745 ADDS 10M17.1. Statistiques industrielles et commerciales [1804 ; 1889].

746 Cette commune compte 30 chaufourniers en 1894, ADVd M12.113. Grèves [1894 ; 1902]. 747 Société archéologique du pays chauvinois, op. cit., p.27.

propriétaires terriens désireux d’améliorer la performance agronomique de leurs terres748. Le département de la Vienne compte 109 fours à chaux entre 1861 et 1865 et les Deux-Sèvres, 117749, dont une quarantaine dans l’arrondissement de Bressuire employant 195 personnes750. L’augmentation est constante puisqu’en 1887 les Deux-Sèvres ont 144 chaufours alimentés par 564 ouvriers751.

Bien plus élevés dans la hiérarchie artisanale que les chaufourniers, les charpentiers de marine de la côte atlantique vendéenne sont à l’origine, au XIXe siècle, d’un nouvel essor du secteur de la construction navale débouchant au siècle suivant sur une industrie du navire de plaisance réputée en France comme aux quatre coins du globe.

d) Les charpentiers de marine sablais

Les chantiers vendéens752 de construction de navires jouissent d’une excellente réputation dès le XVIIe siècle. L’intendant Colbert de Terron note que « c’est un lieu du

monde où l’on bâtit le mieux mais en petit »753.

La construction navale s’adapte aux modifications qui surviennent dans le monde halieutique. Au XVIIIe, la pêche morutière laisse sa place à celle de la sardine, en plein essor

au siècle suivant, avant de céder son monopole au thon à la fin du XIXe siècle. En 1900, Les Sables-d’Olonne viennent en tête des ports français pour l’armement thonier754. Les charpentiers de marine fabriquent en outre des embarcations destinées au cabotage vers Bordeaux et le Sud-Ouest de la France. Le vin et le sel755 se croisent le long de la côte Atlantique ainsi que le bois et le charbon. A cela s’ajoutent quelques bateaux au long cours destinés au commerce international vers l’Amérique, l’Espagne ou le nord de l’Europe.

748 Ibid.

749 PINARD (Jacques), op. cit., p.81.

750 ADDS 10M17.1. Statistiques industrielles et commerciales [1804 ; 1889]. 751 Ibid.

752 Pour un historique complet et un descriptif des techniques de construction voir CLEMENT (Jean-Yves),

PAILLĒ (Patrick), Les chantiers navals du littoral vendéen, XIXe - XXe siècle, une mutation, La Roche-sur-Yon,

1987, 64 p.

753 RETUREAU (Hervé), Les gens de mer du pays d’Olonne au XVIIIe siècle, mémoire de maîtrise histoire,

Nantes, 1996, p.51.

754 D’AVIGNEAU (André Marie), op. cit., p.181.

755 Le port de Noirmoutier est connu depuis le Moyen Age pour son activité de cabotage : son port constitue le

Au XIXe siècle, les bricks756 morutiers disparaissent, remplacés par des embarcations beaucoup plus petites destinées à la pêche à la sardine se pratiquant alors non loin des côtes. Il s’agit de petites chaloupes creuses, non pontées, de six à dix tonneaux qui servent aussi à la drague l’hiver, en dehors des saisons de pêche. Le tonnage ne cesse d’augmenter tout au long du siècle car il est toujours nécessaire d’aller plus loin en mer afin de trouver de nouveaux bancs de sardines757. Les embarcations trouvent aussi preneurs dans les ports de Groix, La Rochelle, Lorient ou Ré. Ponctuellement des navires de tonnages plus importants sont construits, comme les lougres758 ou les trois mâts, commandés généralement par des armateurs étrangers aux ports vendéens.

Fin XIXe, les gréements auriques succèdent aux bateaux de conception plus anciennes portant voilure au tiers. Les précurseurs en la matière sont les goélettes759 et les sloops760, puis viennent les dundees761, surnommés « les gazelles » du fait de leur agilité et de leur vitesse.

Le port des Sables-d’Olonne est le site principal de construction de navires en Vendée. En 1818, trois chantiers se partagent les quais des Sables762. Deux d’entre eux existent depuis les dernières années du siècle précédent : les chantiers Guerry et Chaigneau. Ce dernier est le plus important établissement du port. Son activité s’accroît au fil du XIXe siècle et ses cales ont la capacité de produire des embarcations de gros tonnages. Le chantier Guerry est de moindre importance et son activité cesse dès les années 1840. Un troisième naît sous l’Empire à l’initiative des frères Bertrand, originaires de Bordeaux. Il ferme ses portes une quarantaine d’années plus tard.

Au début des années 1840, entre quinze et trente ouvriers s’affairent sur les chantiers763, qu’ils soient scieurs de long ou charpentiers. En sus, quelques compagnons travaillent à domicile ou dans de petits ateliers à la confection de voiles, poulies, clous et cordes.

L’enquête économique et sociale de 1848 fait état de l’existence de quatre chantiers navals aux Sables-d’Olonne occupant une soixantaine d’ouvriers. Les chantiers Cheusseau et Nauleau s’ajoutent à la liste. Deux autres apparaissent sous le second Empire, époque où les

756 Petit navire à deux mâts et à voile carrée.

757 On utilise alors des bateaux à jauge plus importante pour remorquer les chaloupes sur les lieux de pêche. 758 Le lougre est un bateau de 45 à 75 tonneaux et de 15 à 18 mètres de long.

759 Navire à deux mâts, le mât de misaine et le grand mât. 760 Bateaux à voile à un mât gréant ayant un foc à l’avant. 761 Petit voilier à un mât et à voile trapézoïdale.

762 CLEMENT (Jean-Yves), PAILLĒ (Patrick), op. cit., pp.11-14.

763 Industries par communes en 1844, ADVd 6M1232. Statistiques de France. Industrie, situation des fabriques

charpentiers de marine se font rares puisque certains sont requis par le port militaire voisin de Rochefort, en Charente Inférieure.

Le nombre d’ouvriers reste stable jusqu’aux années 1870764 qui marquent le début de l’âge d’or de la construction navale, avec le développement des conserveries de sardines. Les chantiers Pitra, Chauffeteau et Guignardeau voient le jour et dominent le secteur jusqu’en 1914. En 1897, 125 ouvriers sont recensés, 103 charpentiers de marine et 22 scieurs de long765. Quinze ans plus tard, une association ouvrière de production est même créée par sept compagnons charpentiers. Elle occupe une quinzaine de personnes et réussit l’exploit de pérenniser son activité. En 1913, 75 personnes travaillent sur les chantiers des Sables.

La construction navale existe dans d’autres ports du littoral vendéen. Saint-Gilles et Croix-de-Vie sont les premières communes à compter des chantiers sur leurs quais. Le premier s’y installe en 1833, le second en 1841. Leur production annuelle est faible : 150 tonneaux en 1848, soit l’équivalent de quelques navires. Moins d’une dizaine d’ouvriers y sont employés. Deux autres établissements de construction s’y établissent pendant le second Empire. L’un d’eux, les chantiers Speck, existe encore en 1896. Un seul autre est recensé à cette date : les chantiers Bénéteau, dont la renommée est mondiale de nos jours766. Deux petits établissements de construction navale existent aussi à Noirmoutier en 1896. Bien vite, ils se diversifient dans la marine de plaisance. Enfin, l’Ile-d’Yeu a aussi sur sa côte quelques ateliers de construction d’embarcations.

Au total, la Vendée compte en 1896 neuf chantiers navals occupant 171 ouvriers767. Il faut additionner à ce nombre les 38 ouvriers voiliers qui travaillent dans de petits ateliers aux Sables-d’Olonne et à leurs domiciles à Croix-de-Vie, l’Ile-d’Yeu et Noirmoutier.

Les charpentiers de marine ne représentent pas un poids démographique considérable. Néanmoins, ils exercent une influence importante sur toute la communauté laborieuse des Sables-d’Olonne et des autres ports vendéens768. L’hérédité professionnelle est souvent la règle et leur savoir-faire, acquis après un long apprentissage, leur confère un statut à part dans un monde industriel où les tâches se simplifient. Cette « aristocratie ouvrière », aux salaires

764 56 ouvriers au deuxième trimestre 1863, ADVd 6M1241. Situation industrielle trimestrielle [1856 ; 1887]. 765 ADVd 10M56. Grèves dans les ports : charpentiers de navires et dockers [1897 ; 1936].

766 L’entreprise fabrique actuellement des bateaux de plaisance à voile ou à moteur. 767 CLEMENT (Jean-Yves), PAILLĒ (Patrick), op. cit., p. 29.

768 Pour une comparaison voir KEREZEON (Michel), Les ateliers et chantiers de Bretagne. Un chantier naval

bien éloignés de ceux des sardinières des usines de conserve, est consciente de disposer d’un poids non négligeable dans la balance de la lutte sociale. Leur organisation, encore marquée par la tradition compagnonnique769, leur permet très tôt de mesurer leur spécificité et d’être aux avants postes de la revendication sociale, entraînant avec eux d’autres professions moins favorisées.

Un rôle de catalyseur revendicatif que jouent également les ouvriers du livre, faibles en nombre mais hautement actifs à l’intérieur du mouvement social ouvrier.

e) Les ouvriers du livre

Introduite en France aux alentours de 1469 en provenance de Mayence, l’invention de Johannes Gutenberg ne tarde pas à atteindre le Poitou et sa capitale. Poitiers est une des premières villes du royaume de France à accueillir l’imprimerie. Une presse s’y installe en 1479, soit neuf ans, seulement, après Paris, et six ans après Lyon770. En outre l’existence de l’imprimerie à Châtellerault est attestée dès 1620771, date marquant la domination de quelques familles sur les presses de la cité772 malgré les arrêts royaux qui interdisent l’exercice de l’imprimerie dans la ville et les poursuites subies après la publication d’ouvrages Jansénistes.