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Les ressources et les capacités au sein du parcours client

Section 1. Nature de la coconstruction du parcours client

1. Trois courants de la cocréation en marketing

1.1. La Service-Dominant Logic et les courants associés

Le courant SDL est le premier à avoir mis sur le devant de la scène académique la notion de cocréation qui préexistait mais ne suscitait pas autant d’intérêt (Grönroos, 2012).

Selon la SDL, le marketing a trop longtemps fondé son approche sur la vision centrale de marchandises. Or ce sont les services, et non les marchandises, qui devraient être l'unité fondamentale d'échange. Les marchandises sont seulement les émetteurs de service et des moyens pour le client de profiter des compétences de l’entreprise (Vargo et Lusch, 2004; Vargo et al.,

2008). Le consommateur doit toujours, pour créer de la valeur, non seulement apprendre à utiliser, mais aussi persister à utiliser, entretenir, réparer et adapter l'offre à ses besoins uniques, ses situations d'utilisation et ses comportements. D’après Prahalad et Ramaswamy (2004), la valeur devient une fonction commune des actions de l’entreprise et du consommateur, elle est donc toujours cocréée (Vargo et Lusch, 2007). Cette systématisation de la cocréation est la source des principales critiques sur ce courant (Grönroos, 2011).

Cette théorie est fondée sur dix propositions (Vargo et Lusch, 2004) qui ont été ensuite révisées puis étendues (Vargo et Lusch, 2007) avant d’être réduite à quatre propositions (Vargo et Lusch, 2016). Les raisons de ce choix sont exposées dans l’article de 2016 : ils souhaitent voir leur vision s’étendre à un écosystème social de toutes les parties prenantes incluses dans la création de valeur. Le tableau suivant présente ces évolutions (en grisé, les cases identiques) :

Vargo et Lusch (2004) Vargo et Lusch (2007) Vargo et Lusch (2016) 1

L’application de

compétences spécialisées et de savoirs est la base des échanges

Le service est la base des échanges

Le service est la base des échanges

2

Les échanges indirects masquent l’unité réelle d’échange

Les échanges indirects masquent la base réelle d’échange

3

Les biens sont des vecteurs de distribution du service

Les biens sont des vecteurs de distribution du service

4

Le savoir est la principale source d’avantage

compétitif

Les ressources opérantes constituent la principale source d’avantage compétitif 5 Toutes les économies sont

des économies de service

Toutes les économies sont des économies de service 6 Le client est toujours

cocréateur de valeur

Le client est toujours cocréateur de valeur

Le client est toujours cocréateur de valeur 7

L’entreprise peut seulement faire des propositions de valeur

L’entreprise ne peut pas délivrer de valeur mais peut seulement faire des propositions de valeur 8

Une logique centrée sur le service est orientée clients et relations

Une logique centrée sur le service est naturellement orientée clients et relations

9

Les organisations existent pour intégrer et

transformer des

compétences spécialisées en services complexes. Ces derniers sont demandés sur des places de marché

Tous les intégrateurs économiques et sociaux sont des intégrateurs de ressources

Tous les intégrateurs économiques et sociaux sont des intégrateurs de ressources

10

La valeur est toujours déterminée de façon unique et

phénoménologique par le bénéficiaire

La valeur est toujours déterminée de façon unique et phénoménologique par le bénéficiaire

Tableau 1. Evolution des propositions fondatrices de la SDL

Au courant de la SDL s’est joint, de façon récente le courant des ‘service science’. La cocréation y est étudiée sous l’angle de l’interaction de participants (entreprise et consommateurs), de processus et de ressources au sein de systèmes informatisés de services fournissant des propositions de valeur (Baron et Harris 2008). Cette perspective est faite à un niveau macro car il intègre la dimension des environnements technologiques comme facilitateurs de cocréation (Demirkan et al., 2011). Enfin, le courant de cocréation sociale promeut le rôle des réseaux de clients et souligne l'importance d'une multitude d'acteurs, comme des intermédiaires, des salariés, des voisins et de la société en général dans la cocréation de valeur (Gummesson, 2007).

1.2. Le courant du marketing des services

Ce courant, fondé sur le modèle de servuction (Grönroos, 2012) de Langeard et Eiglier fait une différence entre la logique de service du client et celle du fournisseur. Il considère que les clients combinent les ressources fournies par la société avec d'autres ressources dans leurs pratiques quotidiennes et que cela crée de la valeur. Le client est responsable du processus de création de valeur et par conséquent, la valeur n'est pas cocréée (Grönroos, 2008). C'est le client qui crée la valeur, seul, la plupart du temps (Grönroos, 2008). Les interactions sont des actions mutuelles ou réciproques par lesquelles les partis peuvent affecter l’autre. Par ses interactions, la société peut changer l'actualisation du processus de valeur du client et s'assurer que la valeur créée est égale à la proposition de valeur (Grönroos, 2008). Selon ce dernier: « Ce n'est pas le client qui devient un

cocréateur de valeur avec un fournisseur, plutôt c'est le fournisseur qui, à condition qu'il adopte une logique de service et développe des interactions entreprise-clients dans le cadre de la création de ses offres du marché, peut devenir un cocréateur de valeur avec ses clients » (Grönroos, 2008:

307).

1.3. Le courant de la cocréation et l’innovation

Ce courant n’est pas toujours rattaché à la SDL. Il considère que l’utilisateur est une source d’innovation de nouveaux produits en testant, dessinant des produits ou procurant des idées aux entreprises (Frow et al., 2015). Pour découvrir les besoins latents et cachés de clients, les sociétés sont de plus en plus motivées pour exploiter le potentiel créatif de leurs clients dans le nouveau développement de produit/service - souvent mentionné comme la cocréation de valeur (O’Hern et Rindfleisch, 2010). Par exemple, Nambisan et Nambisan, (2008) ont identifié cinq rôles pour le client dans l'innovation et définissent ainsi le moment de participation du client : le conceptualiseur de produit, le dessinateur de produit, le testeur de produit, le spécialiste de support-produit et le marketer de produit.

Ces différentes définitions nous éclairent sur le concept mais il convient de l’approfondir ce que peu de travaux réalisent. Alors qu’il existe une littérature à la croissance exponentielle en cocréation (Galvagno et Dalli 2014), Grönroos et collègues pensent qu’il faut d’abord clarifier les moments et les lieux de la rencontre (Grönroos et Ravald, 2011; Grönroos et Voima, 2012) avant de préciser la définition de la cocréation. La délimitation dans le temps (les moments) et dans l’espace (les lieux de rencontre) de la cocréation est appelée ‘locus’ par Grönroos et collègues. Cette approche nous semble totalement adaptée à notre objet de recherche car la notion de parcours client incorpore une dimension temporelle forte (moments) ainsi que spatiale (les canaux et les points de contact). Ce travail académique dépasse les courants ci-dessus pour essayer d’unifier la compréhension de la/les rencontre(s) de l’entreprise et du client lors du parcours client.