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Les théories de l’hérédité

A. DE LA RÉVOLUTION GÉNÉTIQUE À LA MODIFICATION DU GÉNOME

I. De la révolution génétique

1. Les théories de l’hérédité

Les théories de l’hérédité n’ont cessé d’émerveiller et de révolutionner l’idée que l’on s’est toujours faite sur l’homme. Sans remonter aux différentes théories de l’hérédité racontées par Ernst Mayr56, nous allons faire ici le tour de quelques-unes de ces théories. Vers 1850, à l’époque où la génétique était moins avancée que la physique ne l’était avant Newton, commencèrent les expériences de Gregor Mendel. À l’instar de Copernic qui projette au centre de l’univers le soleil plutôt que la terre, Mendel réalise une révolution similaire par l’excellence de la représentation qu’on se faisait du phénomène vital. Par cette révolution mendélienne, le mâle n’est plus l’élément dominant de la reproduction à l’image de la terre qui a cessé d’être le centre du monde au terme de la révolution copernicienne. Le moine de Brno en Moravie formula les lois universelles de l’hérédité. Il est arrivé à cette déduction que les caractères ancestraux devaient être transmis, de génération en génération par quelque substance qu’il ignorait.

55Francis Galton, Hereditary genius. An inquiry into its law and consequences, Cosimo Classics, New-York, 2005.

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Au XXème siècle, l’hypothèse selon laquelle le patrimoine génétique de l’homme reste immuable quel que soit le mode de transmission avait l’adhésion de toute la communauté scientifique. Mais, si rassurante fût-elle, cette hypothèse ne dura pas longtemps. En effet, en 1927, les découvertes de la théorie de la mutation de modèles « patterns » héréditaires à partir de rayons X, du célèbre généticien d’alors Hermann J. Muller feront de lui l’un des apôtres de l’amélioration de l’homme. Ces mutations, à en croire Muller sont possibles d’une génération à une autre. Mais, quelle serait la nature du matériau responsable de cette mutation ? Impossible de donner une réponse aussi précise que satisfaisante. Cependant, la cause de la transmission des caractères héréditaires des arbres généalogiques depuis Mendel devenait de moins en moins un mystère, au fur et à mesure que les microscopes devenaient de plus en plus puissants. Certains généticiens commençaient donc à croire que les chromosomes avaient quelque chose à voir avec l’hérédité.

Dans les années 1940, Oswald T. Avery de l’Institut Rockefeller venait de donner un coup de pouce à la génétique. Il était parvenu à la conclusion selon laquelle l’ADN (acide désoxyribonucléique) à l’intérieur des chromosomes avait certainement une relation avec l’hérédité mais sans parvenir à donner de précision sur son mode de fonctionnement. Dans les années 1950, un Anglais, Francis Crick, un Américain, James Watson, tous deux biologistes à l’Université de Cambridge construisirent un modèle géant d’une molécule d’ADN. C’était la molécule, pièce maîtresse de la vie. Crick et Watson baptisèrent leur modèle « la double hélice ». Pour eux, chacune des deux hélices, ou chaque bordure est composée de phosphates et de sucres. Chaque échelon consiste en deux substances chimiques séparées, au centre de l’échelon, par de l’hydrogène. Quatre substances chimiques, formant ce que l’on appelle la base, entrent dans la constitution des marches de cet escalier en hélice. Il s’agit de l’adénine, la guanine, la thymine et de la cytosine (A-G-T- C). Ces substances forment ce qu’ils ont baptisé, le code génétique. Pour Jean Rostand, les caractéristiques d’un individu dépendent de la manière dont ces quatre bases se combinent et s’ordonnent dans les molécules des bases57. D’elles provient toute la diversité génétique de l’espèce, exactement de la même manière que toute notre littérature est écrite avec vingt- six lettres et toute la musique avec sept notes. Au sein d’une molécule d’ADN, un gène

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particulier représente l’élément du code génétique qui réunit tous les acide aminés, souvent appelés les briques, nécessaires à la production d’une protéine ou souvent d’une enzyme pour la réalisation d’une fonction ou d’une structure physique spécifique. Ces molécules d’ADN, qui contiennent les gènes, se trouvent à l’intérieur de chaque cellule de l’embryon humain. Mais, la question est de savoir comment toute cette information est transmise au cours de la croissance du futur corps humain ? Pour certains, impossible d’en faire une description exacte et cela relève de l’un des miracles de la nature.

Cependant, Francis Crick et James Watson ont tenté de donner une interprétation scientifique de la transmission de cette information à un autre humain. C’est le processus de la mitose ou caryocinèse. Du Grec « karuon » noyau et « kinêsis » mouvement, la caryocinèse est le processus de la division cellulaire. Lorsque la cellule se divise, cet escalier en spirale se fend par son milieu, le long de la ligne formée par les atomes d’hydrogène au centre de chaque échelon. Dans la molécule d’ADN nouvellement formée, chaque moitié de l’ancienne molécule prélève, parmi les matériaux de quoi construire son complément exact. On réalise la formation de deux escaliers en colimaçon à la fin de la division là où il y avait tantôt un escalier. Ces molécules d’ADN sont porteuses des plans architecturaux qui permettent de construire un être humain unique. Ces plans architecturaux sont transmis à la génération suivante par le biais des cellules germinales ou reproductives (spermatozoïde ou ovule). Il importe de rappeler qu’un dé à coudre de sperme renferme des millions de spermatozoïdes. De plus, chaque spermatozoïde renferme dans ses chromosomes, la moitié de son ADN qui fournit le plan d’un nouvel individu avec toutes ses caractéristiques à venir très précises comme une calvitie précoce, l’Alzheimer, la mucoviscidose et un cerveau d’une dimension physique déterminée avec tous ses compartiments qui déterminent les différents génies que porte un homme en son sein. Cette œuvre relevant de la nature est comparable à imprimer la Bible sur un ongle. C’est alors que débutèrent les prodigieuses techniques de manipulation génétique en vue d’effacer ou remplacer purement et simplement les gènes défectueux.

Cette découverte de la structure de l’ADN, qui a valu à Watson et Crick le Prix Nobel de la médecine, n’est quand même pas la fin des révolutions génétiques, en dépit de la falsifiabilité de leur hypothèse. Un autre biologiste du nom de Marshall Nirenberg a levé le

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voile sur le code génétique. Il parvint à associer les diverses composantes de l’ADN à leurs composantes respectives et à montrer la manière dont les briques se combinent en fonction des besoins. C’est ainsi que le premier gène complet fut produit par synthèse en 1970 par une équipe du Massachusetts Institute of Technology dirigée par Har Gobing Khorana. Plus tard, en 1975, une autre équipe cette fois-ci de Harvard est arrivée à synthétiser le premier gène d’un mammifère. L’équipe du Massachusetts Institute of Technology dirigée par Har Gobing Khorana revient sur la scène génétique en 1976 pour fabriquer un gène qui assume effectivement son rôle de gène une fois implanté dans une cellule bactérienne. Ce nouveau gène disposait des signaux qui font fonctionner les gènes dans une cellule vivante. Ce qui est remarquable, c’est que le mécanisme génétique était parfaitement conforme aux hypothèses formulées par Crick et Watson en 1965. Si jusque-là, le secret de la vie inscrit dans les gènes est une évidence, il reste cependant à le localiser. Telle fut l’entreprise de certains généticiens dans des laboratoires qui œuvraient pour localiser les gènes sur les vingt-trois paires de chromosomes de l’homme. Pourquoi donc la localisation des gènes ?